Eglise et France
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 20/10/2014 à 21h30
162 vues
Question d'origine :
Bonjour
Pourquoi disons nous que la France est la fille aînée de l'Eglise ?
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 21/10/2014 à 14h20
Bonjour,
Cette expression, étendue à la nation française en 1841 par le Henri-Dominique Lacordaire dans son « Discours sur la vocation de la nation française », s’applique originellement au roi de France, « roi très chrétien », « fils aîné de l’Eglise » :
Fils aîné de l'Église est un titre qui fut porté par les rois de France. L’expression « France, fille aînée de l'Église » est attestée pour la première fois lors du « Discours sur la vocation de la nation française » prononcé le 14 février 1841 par le père Henri-Dominique Lacordaire dans la Cathédrale Notre-Dame de Paris, évoquant le lien entre le roi Louis XIX alors en exil et sa filiation avec l'Église. Le titre de Fils aîné de l'Église peut être comparé à celui de Très chrétien, également spécifique au roi de France.
Problématique
Plusieurs auteurs ont étudié les origines de cette désignation. Cette filiation spirituelle qui lie le roi de France à l'Église catholique remonte à l'époque carolingienne mais sa systématisation, de même que la transmission de cette filiation à la France en tant que nation, remonte à la Renaissance.
La France est désignée fille aînée de l'Église, car ses rois sont les successeurs directs de Clovis Ier, premier roi barbare baptisé chrétien en 496 et sont à ce titre fils aînés de l'Église mais cette expression est historiquement infondée. L’empereur romain Dioclétien installe Tiridate IV (298-330) sur le trône d’Arménie. Le roi est païen, mais un prédicateur, Grégoire Ier l'Illuminateur, le convainc de se faire baptiser et faire de l’Arménie le premier État officiellement chrétien en 301. Le christianisme en Éthiopie lui emboîte le pas avec la conversion du roi Ezana d'Aksoum par Frumentius vers 330, puis l'empire romain avec Théodose Ier qui décrète le 28 février 380 l'édit de Thessalonique qui y officialise le culte catholique orthodoxe. Le royaume des Francs n'occupe donc que la quatrième place mais comme la décision de Clovis intervient après le sac de Rome en 410 et les conciles d'Éphèse et de Chalcédoine, le peuple franc est considéré par la tradition chrétienne comme le premier peuple barbare à avoir été baptisé dans la foi de Nicée.
Histoire
La notion de filiation spirituelle des rois Francs apparaît à l'époque de Pépin le Bref lorsque celui-ci donne naissance aux États pontificaux le 14 avril 754 et se fait sacrer roi des Francs le 28 juillet 754 par le pape Étienne III qui le proclame « Défenseur de l'Église romaine ». Lorsque Pépin lance trois campagnes (couronnées de succès) de 756 à 758, pour parvenir à repousser les Lombards et finalement livrer au pape les territoires conquis, appelés depuis le patrimoine de Saint-Pierre, il est alors qualifié de Protecteur, Fils aîné de l'Église et roi très chrétien. La tradition rapporte de plus qu'en 757, le pape Paul Ier fait transporter les reliques de sainte Pétronille dans la basilique Saint-Pierre. Cette femme légendaire considérée comme la fille spirituelle de saint Pierre est reconnue comme patronne du royaume de France qui est considéré comme le premier fils de l'Église comme Pétronille est la fille du premier chef de l'Église. Cette filiation se poursuit lorsque le pape Grégoire IX sollicite l'aide de Saint Louis contre l’empereur Frédéric II le 21 octobre 12391.
Cependant, cette mention d'aînesse se manifeste surtout dès la Renaissance :
• le pape Alexandre VI appelle Charles VIII son fils aîné ;
• les rois de France Louis XII et François Ier se diront premiers fils de l'Église ;
• la reine Catherine de Médicis assure en 1562 à l'ambassadeur d'Angleterre que « le royaume de France était l'aîné de la sainte Église » ;
• la ligue en lutte contre Henri III déclara la France fille aînée de l'Église.
Elle se poursuit dans la perspective providentialiste du XIXe siècle lorsque les papes appellent la France au secours pour défendre leurs intérêts temporels, comme en atteste la politique italienne de Napoléon III. Elle triomphe en 1896 avec le quatorzième centenaire du baptême de Clovis célébré en grande pompe à Reims.
Lors du premier voyage apostolique de Jean-Paul II en France, le pape apostrophe les évêques réunis au Bourget, dans son homélie du 1er juin 1980, en ces termes « France, fille aînée de l'Église, es-tu fidèle aux promesses de ton baptême ? ». Lorsqu'il est revenu en France en 1996 pour l'anniversaire du baptême de Clovis et en 2004, le pape n'utilise plus cette expression qui manque de fondement historique.
Pour en savoir plus sur l’histoire de cette expression, vous pouvez lire La France est-elle encore la « fille aînée de l'Eglise » ? du cardinal Philippe Barbarin.
Bonne journée.
Cette expression, étendue à la nation française en 1841 par le Henri-Dominique Lacordaire dans son « Discours sur la vocation de la nation française », s’applique originellement au roi de France, « roi très chrétien », « fils aîné de l’Eglise » :
Fils aîné de l'Église est un titre qui fut porté par les rois de France. L’expression « France, fille aînée de l'Église » est attestée pour la première fois lors du « Discours sur la vocation de la nation française » prononcé le 14 février 1841 par le père Henri-Dominique Lacordaire dans la Cathédrale Notre-Dame de Paris, évoquant le lien entre le roi Louis XIX alors en exil et sa filiation avec l'Église. Le titre de Fils aîné de l'Église peut être comparé à celui de Très chrétien, également spécifique au roi de France.
Plusieurs auteurs ont étudié les origines de cette désignation. Cette filiation spirituelle qui lie le roi de France à l'Église catholique remonte à l'époque carolingienne mais sa systématisation, de même que la transmission de cette filiation à la France en tant que nation, remonte à la Renaissance.
La France est désignée fille aînée de l'Église, car ses rois sont les successeurs directs de Clovis Ier, premier roi barbare baptisé chrétien en 496 et sont à ce titre fils aînés de l'Église mais cette expression est historiquement infondée. L’empereur romain Dioclétien installe Tiridate IV (298-330) sur le trône d’Arménie. Le roi est païen, mais un prédicateur, Grégoire Ier l'Illuminateur, le convainc de se faire baptiser et faire de l’Arménie le premier État officiellement chrétien en 301. Le christianisme en Éthiopie lui emboîte le pas avec la conversion du roi Ezana d'Aksoum par Frumentius vers 330, puis l'empire romain avec Théodose Ier qui décrète le 28 février 380 l'édit de Thessalonique qui y officialise le culte catholique orthodoxe. Le royaume des Francs n'occupe donc que la quatrième place mais comme la décision de Clovis intervient après le sac de Rome en 410 et les conciles d'Éphèse et de Chalcédoine, le peuple franc est considéré par la tradition chrétienne comme le premier peuple barbare à avoir été baptisé dans la foi de Nicée.
La notion de filiation spirituelle des rois Francs apparaît à l'époque de Pépin le Bref lorsque celui-ci donne naissance aux États pontificaux le 14 avril 754 et se fait sacrer roi des Francs le 28 juillet 754 par le pape Étienne III qui le proclame « Défenseur de l'Église romaine ». Lorsque Pépin lance trois campagnes (couronnées de succès) de 756 à 758, pour parvenir à repousser les Lombards et finalement livrer au pape les territoires conquis, appelés depuis le patrimoine de Saint-Pierre, il est alors qualifié de Protecteur, Fils aîné de l'Église et roi très chrétien. La tradition rapporte de plus qu'en 757, le pape Paul Ier fait transporter les reliques de sainte Pétronille dans la basilique Saint-Pierre. Cette femme légendaire considérée comme la fille spirituelle de saint Pierre est reconnue comme patronne du royaume de France qui est considéré comme le premier fils de l'Église comme Pétronille est la fille du premier chef de l'Église. Cette filiation se poursuit lorsque le pape Grégoire IX sollicite l'aide de Saint Louis contre l’empereur Frédéric II le 21 octobre 12391.
Cependant, cette mention d'aînesse se manifeste surtout dès la Renaissance :
• le pape Alexandre VI appelle Charles VIII son fils aîné ;
• les rois de France Louis XII et François Ier se diront premiers fils de l'Église ;
• la reine Catherine de Médicis assure en 1562 à l'ambassadeur d'Angleterre que « le royaume de France était l'aîné de la sainte Église » ;
• la ligue en lutte contre Henri III déclara la France fille aînée de l'Église.
Elle se poursuit dans la perspective providentialiste du XIXe siècle lorsque les papes appellent la France au secours pour défendre leurs intérêts temporels, comme en atteste la politique italienne de Napoléon III. Elle triomphe en 1896 avec le quatorzième centenaire du baptême de Clovis célébré en grande pompe à Reims.
Lors du premier voyage apostolique de Jean-Paul II en France, le pape apostrophe les évêques réunis au Bourget, dans son homélie du 1er juin 1980, en ces termes « France, fille aînée de l'Église, es-tu fidèle aux promesses de ton baptême ? ». Lorsqu'il est revenu en France en 1996 pour l'anniversaire du baptême de Clovis et en 2004, le pape n'utilise plus cette expression qui manque de fondement historique.
Pour en savoir plus sur l’histoire de cette expression, vous pouvez lire La France est-elle encore la « fille aînée de l'Eglise » ? du cardinal Philippe Barbarin.
Bonne journée.
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