Question d'origine :
Bonjour,
Je suis à la recherche de travaux sur le langage inclusif : comment rendre le langage féministe, c'est-à-dire incluant tous les genres, femmes et personnes non-binaires ?
Par exemple
- au lieu de dire "droits de l'homme", dire "droits humains". C'est simple et basique mais cela change le prisme réflexif d'un débat, d'une discussion ou d'un essai. Par ailleurs il me semble que c'est un réflexe que votre équipe n'a pas encore pris (j'ai beaucoup lu l'homme pour l'humain).
- ou un travail sur les insultes, qui véhiculent un grand nombre de mécanismes de pensée discriminatoires : homophobie, misogynie, transphobie... J'ai trouvé le travail du collectif Georgette Sand que je trouve sympathique mais peu convaincant (réécriture d'insultes safe "sexy cool", mais ce n'est pas la fonction des insultes d'être rigolotes, c'est d'être violentes)
Merci d'avance de vos sources et lumières diverses sur le sujet !
DNC
Réponse attendue le 24/07/2018 - 15:12
Réponse du Guichet
bml_litt
- Département : Langues et Littératures
Le 23/07/2018 à 08h25
L’article Wikipedia consacré au langage épicène, remarquablement documenté, fait le point sur cette question dont la complexité et les implications multiples sont à l’origine de nombreuses polémiques (en France singulièrement).
En voici quelques extraits pouvant servir de base à votre recherche :
Le langage épicène, la rédaction épicène, le langage neutre, l'écriture inclusive ou le langage dit « non sexiste » ou dégenré sont un ensemble de règles et de pratiques qui cherchent à éviter toute discrimination supposée par le langage ou l'écriture. Cela se fait à travers le choix des mots, la syntaxe, la grammaire ou la typographie.
Le terme épicène renvoie spécifiquement à la représentation des genres, incluant la féminisation des titres, la dénomination neutre et la dénomination des personnes transgenres. Quant à l'écriture inclusive, sa portée est plus large : outre le genre, elle vise aussi à éviter d'autres discriminations liées au handicap, à l'âge et à l'origine ethnique.
Le terme langage inclusif désigne un langage qui n'exclurait personne pour motif de sexe, d'âge, de race ou d'orientation sexuelle. Par exemple, les expressions « les handicapés » ou « les aborigènes » seraient des expressions exclusives. Les expressions « personnes handicapées » ou « personnes aborigènes » seraient en revanche des expressions inclusives3. Le langage inclusif est différent du langage neutre.
L'usage et la réception publique du langage épicène et de l'écriture inclusive varient selon les langues et les pays. Au Québec, la rédaction épicène est recommandée par l'Office québécois de la langue française depuis 1979 (situation similaire à la Suisse). En France, le langage épicène suscite des critiques et une opposition de longue date de l'Académie française.
Les langages genrés dont le neutre est identique au masculin ou dont le masculin l'emporte dans un groupe posent trois problèmes selon certains analystes :
• ils rendent les femmes invisibles ;
• ils obligent à avoir une vision dichotomique du genre humain ;
• ils imposent de se positionner en tant que femme ou en tant qu'homme.
Une étude menée en 2008 par Markus Brauer et Michaël Landry montre qu'« en moyenne, 23 % des représentations mentales sont féminines après l'utilisation d'un générique masculin, alors que ce même pourcentage est de 43 % après l'utilisation d'un terme générique épicène ».
Le langage neutre ou épicène vise à remplacer des termes masculins par des termes neutres. L'expression « Dieu écoute les prières de tous les hommes » est considérée par certains comme exclusive. L'expression « beaucoup de personnes travaillent au projet » est neutre. « Des hommes et des femmes travaillent au projet » est une expression inclusive.
Les pratiques pour un langage non sexiste, inclusif ou épicène portent sur trois aspects :
• accorder les noms de métiers et de fonctions au sexe de la personne qui l'occupe ;
• utiliser des expressions non sexuées, comme « les droits humains » ;
• utiliser les deux formes grammaticales. Pour cela, il existe deux possibilités :
o faire figurer les deux formes comme « elles et ils partent en vacances », « he or she » ;
o utiliser à l'écrit une forme liée par un point, un tiret, une barre oblique, une majuscule, etc. comme « ami·e » « participant·e ».
Pour tenter d’approfondir les aspects pratiques nous vous invitons à consulter les documents suivants :
Manuel d’écriture inclusive (Agence Mots-clés). Le téléchargement du contenu nécessite la spécification de votre adresse mail.
Préconisations des Salopettes (l’Association féministe de l’ENS Lyon)
Le langage inclusif pourquoi ? Comment ?, par Eliane Viennot (cet ouvrage n’est pour l’instant pas disponible à la BML)
Pour aller plus loin, des articles de fond proposant des pistes de réflexion sur les multiples implications de la mise en place et de l’utilisation du langage inclusif :
Jusqu’où féminiser la langue (française) ?, par Martine Fournier, in : Sciences humaines, n°3018 (2018/3)
Ecriture inclusive et moralisme, par Adrien Louis, in : Commentaire, n°162 (2018/2)
L’écriture inclusive au défi de la neutralisation en français, par Patrick Charaudeau, in : Le Débat, n°199 (2018/2)
Avis d’incertitude sur la grammaire, par Gil Delannoi, in : Commentaire, n°161 (2018/1)
«Le féminisme universaliste incite à suspendre les différences», entretien avec Nathalie Heinich, in : Cités, n°73 (2018/1)
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