Question d'origine :
Bonjour !
Je cherche des musiques (ou des chansons) qu'on pouvait écouter dans les années 1950, en France, et qui étaient déjà assez connues en 1954.
Et savez-vous qu'est-ce qu'on pouvait écouter à cette époque pour danser et fêter un mariage ? C'est les débuts du rock'n roll aux Etats-Unis, mais il n'est pas encore très présent en France (avant Johnny Halliday dans les années 60 il me semble), mais est-ce que c'est encore vraiment la période des bals musette ?
Merci beaucoup !
Réponse du Guichet
bml_mus
- Département : Musique
Le 06/05/2016 à 13h00
Bonjour,
En 1954, il n’y a pas en Europe de charts ou autres classements des meilleures ventes. En France, la première revue à publier un classement des disques les plus demandés chez les disquaires et dans les juke-boxes, Music Hall parait de 1955 à 1959. Mais ce n’est sans doute pas un problème pour vous répondre car ce qui était entendu l’était souvent davantage à la radio que sur des électrophones. Le premier électrophone portatif complet (avec haut-parleur) Teppaz ne sortira qu’en 1955, auparavant, il n’y avait d’électrophones que dans les familles d’un certain niveau social.
Notre réponse sera donc empirique et s’appuiera essentiellement sur les travaux de Daniel Lesueur qui s’est penché souvent sur cette question et décrit ses résultats ainsi : « Notre palmarès se veut le reflet de la popularité des chansons sur le grand public à une période donnée ». Toutefois, ses classements établis par année ne reflètent sans doute pas la continuité de l’écoute de musiques sorties dans les années précédentes. Nous allons donc essayer de nuancer.
Comme vous le subodorez, l’année 1954 n’est absolument pas rock’n’roll en France, mais même pas aux Etats-Unis : c’est l’année des premiers enregistrements, mais pas de leur succès (Rock around the clock enregistré en avril 1954 dans sa version rock de Bill Haley and the Comets ne deviendra numéro 1 qu’en 1955 grâce au film Blackboard Jungle (Graine de violence) dont c’était la chanson principale).
Compte-tenu des nombreuses divergences entre les classements établis par Daniel Lesueur en 2014 et 16 ans plus tôt, on ne peut pas établir de classement réel. Mais on retrouve parmi les succès enregistrés dans l’année :
Un jour tu verras (Mouloudji)
Le petit cordonnier (Francis Lemarque)
(interprétation filmée en 1956)
La goualante du pauvre Jean (Edith Piaf)
Le Grisbi(du film touchez pas au grisbi, musique de Jean Wiener, interprétée par Jean Wetzel à l’harmonica)
Mon pote le gitan (Yves Montand)
La chasse aux papillons (qui bénéficie de 2 interprètes, son auteur Georges Brassens et Patachou)
Le complexe de la truite (Les frères Jacques, d’après La truite de Schubert, paroles de Francis Blanche)
Mets deux tunes dans l'bastringue (Jean Constantin)
C'était mon copain (Gilbert Bécaud)
Le piano du pauvre (Catherine Sauvage, paroles et musique de Léo Ferré)
Si l’on regarde le succès des années précédentes qui étaient sans doute encore dans toutes les oreilles, il faut aussi faire la part aux opérettes de Francis Lopez et à leurs airs chantés par Luis Mariano (Mexico, 1952, L’amour est un bouquet de violettes, 1953), à André Claveau (La petite diligence, 1951, Bon anniversaire, avec Henri Salvador, 1952), à Line Renaud (Etoile des neiges, 1950, Toi ma p’tite folie, 1952, etc.) à Mick Micheyl (Un gamin de Paris, 1951), etc. , etc. Sans oublier des chansons antérieures des artistes cités pour 54 (Les amoureux des bancs publics de Brassens, Paris canaille par Catherine Sauvage sont de 53, Padam, Padam (Edith Piaf) de 52). Peu d’œuvres étrangères sont des tubes (citons tout de même Singing in the rain par Gene Kelly , 1952). Nous ne pouvons que vous renvoyer aux ouvrages de Daniel Lesueur pour davantage de succès de l'époque.
Quant aux musiques de mariages, ou, plus précisément aux musiques des bals de mariages, nous manquons de sources. Il est probable qu’elles dépendaient beaucoup de la condition sociale des mariés et, dans une France encore largement rurale de la région du mariage : « Jusqu’aux années 50, les danses « modernes », à savoir valse, polka et quadrille font longtemps concurrence aux plus anciennes : sauteuse, rigodon, farandoles, rondeaux et branle, sans pour autant les supprimer. S’y ajoutent des danses locale (bourrée carrée, chibreli, marchoise, brisquet, gigolette…) et d’autres qui sont en même temps des jeux comme la danse du ballet », est-il écrit dans l’ouvrage Le mariage et ses rites d'hier à aujourd'hui. A ces danses, il faudrait sans doute rajouter, au moins dans les milieux populaires urbains la java ainsi que la rumba (introduite en France dans les années 30), le cha-cha-cha - par exemple sur Cerisiers roses et pommiers blancs d’André Claveau, 1950) -, peut-être la salsa et le slow (mais nous n’avons pas pu recouper cette source et préciser leur date d’introduction en France). N’oubliez pas en tout cas, que dans la France de 1954, un des objectifs sociaux majeurs des fêtes et bals de mariage est de favoriser la rencontre de futurs mariés, objectif à concilier avec le divertissement de toutes les classes d’âge par le chant la musique et la danse.
Ce n’est peut-être pas la vertu principale de la majorité des chansons de la liste ci-dessus, il y des chansons pour s'amuser et des airs du temps où l’abbé Pierre doit intervenir pour les mal logés, où la France est en train de perdre la guerre d’Indochine… Rappelons que la chanson de Boris Vian Le Déserteur est sortie en mai 54 dans une version légèrement édulcorée par Mouloudji, juste au moment de la chute de Dien Bien Phu. C’est aussi ça, 1954 en chansons.
En 1954, il n’y a pas en Europe de charts ou autres classements des meilleures ventes. En France, la première revue à publier un classement des disques les plus demandés chez les disquaires et dans les juke-boxes, Music Hall parait de 1955 à 1959. Mais ce n’est sans doute pas un problème pour vous répondre car ce qui était entendu l’était souvent davantage à la radio que sur des électrophones. Le premier électrophone portatif complet (avec haut-parleur) Teppaz ne sortira qu’en 1955, auparavant, il n’y avait d’électrophones que dans les familles d’un certain niveau social.
Notre réponse sera donc empirique et s’appuiera essentiellement sur les travaux de Daniel Lesueur qui s’est penché souvent sur cette question et décrit ses résultats ainsi : « Notre palmarès se veut le reflet de la popularité des chansons sur le grand public à une période donnée ». Toutefois, ses classements établis par année ne reflètent sans doute pas la continuité de l’écoute de musiques sorties dans les années précédentes. Nous allons donc essayer de nuancer.
Comme vous le subodorez, l’année 1954 n’est absolument pas rock’n’roll en France, mais même pas aux Etats-Unis : c’est l’année des premiers enregistrements, mais pas de leur succès (Rock around the clock enregistré en avril 1954 dans sa version rock de Bill Haley and the Comets ne deviendra numéro 1 qu’en 1955 grâce au film Blackboard Jungle (Graine de violence) dont c’était la chanson principale).
Compte-tenu des nombreuses divergences entre les classements établis par Daniel Lesueur en 2014 et 16 ans plus tôt, on ne peut pas établir de classement réel. Mais on retrouve parmi les succès enregistrés dans l’année :
Un jour tu verras (Mouloudji)
Le petit cordonnier (Francis Lemarque)
(interprétation filmée en 1956)
La goualante du pauvre Jean (Edith Piaf)
Le Grisbi(du film touchez pas au grisbi, musique de Jean Wiener, interprétée par Jean Wetzel à l’harmonica)
Mon pote le gitan (Yves Montand)
La chasse aux papillons (qui bénéficie de 2 interprètes, son auteur Georges Brassens et Patachou)
Le complexe de la truite (Les frères Jacques, d’après La truite de Schubert, paroles de Francis Blanche)
Mets deux tunes dans l'bastringue (Jean Constantin)
C'était mon copain (Gilbert Bécaud)
Le piano du pauvre (Catherine Sauvage, paroles et musique de Léo Ferré)
Si l’on regarde le succès des années précédentes qui étaient sans doute encore dans toutes les oreilles, il faut aussi faire la part aux opérettes de Francis Lopez et à leurs airs chantés par Luis Mariano (Mexico, 1952, L’amour est un bouquet de violettes, 1953), à André Claveau (La petite diligence, 1951, Bon anniversaire, avec Henri Salvador, 1952), à Line Renaud (Etoile des neiges, 1950, Toi ma p’tite folie, 1952, etc.) à Mick Micheyl (Un gamin de Paris, 1951), etc. , etc. Sans oublier des chansons antérieures des artistes cités pour 54 (Les amoureux des bancs publics de Brassens, Paris canaille par Catherine Sauvage sont de 53, Padam, Padam (Edith Piaf) de 52). Peu d’œuvres étrangères sont des tubes (citons tout de même Singing in the rain par Gene Kelly , 1952). Nous ne pouvons que vous renvoyer aux ouvrages de Daniel Lesueur pour davantage de succès de l'époque.
Quant aux musiques de mariages, ou, plus précisément aux musiques des bals de mariages, nous manquons de sources. Il est probable qu’elles dépendaient beaucoup de la condition sociale des mariés et, dans une France encore largement rurale de la région du mariage : « Jusqu’aux années 50, les danses « modernes », à savoir valse, polka et quadrille font longtemps concurrence aux plus anciennes : sauteuse, rigodon, farandoles, rondeaux et branle, sans pour autant les supprimer. S’y ajoutent des danses locale (bourrée carrée, chibreli, marchoise, brisquet, gigolette…) et d’autres qui sont en même temps des jeux comme la danse du ballet », est-il écrit dans l’ouvrage Le mariage et ses rites d'hier à aujourd'hui. A ces danses, il faudrait sans doute rajouter, au moins dans les milieux populaires urbains la java ainsi que la rumba (introduite en France dans les années 30), le cha-cha-cha - par exemple sur Cerisiers roses et pommiers blancs d’André Claveau, 1950) -, peut-être la salsa et le slow (mais nous n’avons pas pu recouper cette source et préciser leur date d’introduction en France). N’oubliez pas en tout cas, que dans la France de 1954, un des objectifs sociaux majeurs des fêtes et bals de mariage est de favoriser la rencontre de futurs mariés, objectif à concilier avec le divertissement de toutes les classes d’âge par le chant la musique et la danse.
Ce n’est peut-être pas la vertu principale de la majorité des chansons de la liste ci-dessus, il y des chansons pour s'amuser et des airs du temps où l’abbé Pierre doit intervenir pour les mal logés, où la France est en train de perdre la guerre d’Indochine… Rappelons que la chanson de Boris Vian Le Déserteur est sortie en mai 54 dans une version légèrement édulcorée par Mouloudji, juste au moment de la chute de Dien Bien Phu. C’est aussi ça, 1954 en chansons.
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter