Question d'origine :
Bonjour tout le monde,
Merci de bien vouloir m'aider.
En 1862, Victor Hugo a touché la somme de 300.OOO francs Or de son éditeur pour l'édition de son livre "les Misérables".
Combien pourrait bien valoir 300.OOO francs Or de 1862 en euros de nos jours ?
Encore merci de bien vouloir m'aider.
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 29/07/2015 à 09h34
Bonjour,
Il est extrêmement difficile de répondre à votre question, car on ne peut comparer que ce qui est comparable. Comme le dit Thierry Sabot dans La valeur des biens, niveau de vie et de fortune :
vouloir convertir les prix, les salaires ou les fortunes de nos ancêtres en euros actuels n’a pas grand sens, tant les époques sont peu comparables et les modes de vie si différents. De plus, il n’y a pas de valeur nominale indiquée sur les pièces, car seul compte le poids en métal. Or, il est impossible de connaître avec précision la valeur intrinsèque d’une pièce à cause de l’usure du métal et des manipulations du cours légal et/ou de la convertibilité des espèces métalliques par le pouvoir royal.
Pour vous rendre compte de ce que représentait 300 000 francs, il importe de revenir sur le niveau de vie en 1862 [date de parution des Misérables] et, à travers les chiffres, constater qu’il s’agissait d’un somme considérable.
Le document Pdf prix et salaires aux 19 et 20 siècles en région parisienne, permet de voir combien gagnait un ouvrier :
Ouvrier agricole 1860-65 2,69 F / jour 2,69 F Morte saison (non nourri)
Ouvrier agricole 1860-65 3,82 F / jour 4,04 F Eté (2,69x1,5) (non nourri)
Ouvrier industriel 1860-65 3,33 F / jour 3,33F Salaire moy. ttes branches
Journalier agricole 1862 2,69 F / jour 2,69 F Non nourri
En 1862, un maçon gagnait un salaire horaire moyen à Paris de 0,525 francs, un charpentier 0,6 francs et un terrassier 0,4 francs.
Par ailleurs, dans Le monde du travail en France 1800-1950 Alain Dewerpe fournit d’autres chiffres :
A Roubaix, en 1862, dans le textile, un célibataire qualifié peut épargner entre 66 et 165 F. Dans la laine de Sedan, un homme suel gagnera 720 F en dépensant 660. Quand père et mère travaillent, le budget est tenu à l’équilibre ; c’est le cas d’une famille de 5 personnes à Roubaix, avec 1000 F (…) A Anzin, une famille de 5 personnes, où les fils travaillent, dispose de 2580 F de revenu par an, ce qui, avec 2000 F de dépenses annuelles, ménage 500 F d’excédent.
Nous pouvons alors revenir sur le prix des denrées – et notamment le pouvoir d’achat en blé - qui permet d’évaluer le niveau de vie.
Ainsi, entre 1861 et 1870, le prix moyen national du quintal de blé en France est de 132,1. Pour le cours du blé, il faut savoir qu’au XIXe siècle, les moyennes n’atteignent jamais 200 salaires horaires, tout en restant longtemps supérieure à 100 (…) les écarts inter-régionaux et inter-temporels diminuent. 1850 est la première année où la moyenne nationale française du prix réel du blé est inférieure à 100 heures de salaire de manœuvre.
Source : D'une France à une autre : avant et après les Trente glorieuses.
En outre, Annie Fourcaut dans La Ville divisée: les ségrégations urbaines en question : France XVIIIe-XXe ... s’intéresse aux valeurs locatives. A Paris à 1862, notons que le prix des locations varie considérablement et peut être relativement élevé:
Rue Aumaire : 7426,8
Rue Beaubourg : 4 472, 5
Rue des Fontaines : 9 896,2
Rue Meslay : 23 405, 8 francs
Ryue Saint Martin : 12 495,2
Rue du Temple : 15 669
Dans un article consacré aux travaux ferroviaires de 1860 il est mentionné que sur la section entre l’Ille-et-Vilaine et Saint-Brieuc vingt maisons de garde sont à construire. L’adjudication est lancée le 24 mars 1862 ; Les maisons sont évaluées à 150 000 francs soit 7 500 chacune.
Dans un même temps, la première tranche des travaux de l’église d’Eu est évaluée à 300 000 francs.
Source : Médiathèque de l’architecture et du patrimoine.
A Nantes, l’exposition nationale de 1861 coûte 280 000 francs
Source : archives-nantes.fr
Et pour revenir au monde de la littérature, on apprend qu’en 1859, Emile Zola, grâce à la protection d’Alexandre Labot, entre comme employé à l’administration des Docks de Paris, où il gagne à peine de quoi manger (60 francs par mois, soit environ 274 euros selon Colette Becker).
Source : L’Argent selon Zola : « La pire et la meilleure des choses » rédigé par un enseignant du Lycée Louis le Grand.
Selon les calculs de Colette Becker, en 1859, 300 000 francs équivalaient à 1 370 000 euros.
Par ailleurs, il existe une autre méthode (également « hasardeuse ») pour essayer de calculer le prix réel d’un bien. Il faut diviser son prix monétaire par le salaire horaire du manœuvre (c’est-à-dire le salaire le plus bas). D’après Jean Fourastié (D’une France à une autre, avant et après les Trente Glorieuses), le salaire horaire d’un manœuvre en 1860 était 0,205 francs.
On peut donc dire qu’en prix réel, 300 000 francs ( 300 000 / 0, 205 ) équivalait à environ 1 463 414 salaires horaires de manœuvre, ce qui veut dire qu’un manœuvre aurait eu à travailler 146 341 jours à raison de 10 heures par jour…
Il est extrêmement difficile de répondre à votre question, car on ne peut comparer que ce qui est comparable. Comme le dit Thierry Sabot dans La valeur des biens, niveau de vie et de fortune :
vouloir convertir les prix, les salaires ou les fortunes de nos ancêtres en euros actuels n’a pas grand sens, tant les époques sont peu comparables et les modes de vie si différents. De plus, il n’y a pas de valeur nominale indiquée sur les pièces, car seul compte le poids en métal. Or, il est impossible de connaître avec précision la valeur intrinsèque d’une pièce à cause de l’usure du métal et des manipulations du cours légal et/ou de la convertibilité des espèces métalliques par le pouvoir royal.
Pour vous rendre compte de ce que représentait 300 000 francs, il importe de revenir sur le niveau de vie en 1862 [date de parution des Misérables] et, à travers les chiffres, constater qu’il s’agissait d’un somme considérable.
Le document Pdf prix et salaires aux 19 et 20 siècles en région parisienne, permet de voir combien gagnait un ouvrier :
Ouvrier agricole 1860-65 2,69 F / jour 2,69 F Morte saison (non nourri)
Ouvrier agricole 1860-65 3,82 F / jour 4,04 F Eté (2,69x1,5) (non nourri)
Ouvrier industriel 1860-65 3,33 F / jour 3,33F Salaire moy. ttes branches
Journalier agricole 1862 2,69 F / jour 2,69 F Non nourri
En 1862, un maçon gagnait un salaire horaire moyen à Paris de 0,525 francs, un charpentier 0,6 francs et un terrassier 0,4 francs.
Par ailleurs, dans Le monde du travail en France 1800-1950 Alain Dewerpe fournit d’autres chiffres :
A Roubaix, en 1862, dans le textile, un célibataire qualifié peut épargner entre 66 et 165 F. Dans la laine de Sedan, un homme suel gagnera 720 F en dépensant 660. Quand père et mère travaillent, le budget est tenu à l’équilibre ; c’est le cas d’une famille de 5 personnes à Roubaix, avec 1000 F (…) A Anzin, une famille de 5 personnes, où les fils travaillent, dispose de 2580 F de revenu par an, ce qui, avec 2000 F de dépenses annuelles, ménage 500 F d’excédent.
Nous pouvons alors revenir sur le prix des denrées – et notamment le pouvoir d’achat en blé - qui permet d’évaluer le niveau de vie.
Ainsi, entre 1861 et 1870, le prix moyen national du quintal de blé en France est de 132,1. Pour le cours du blé, il faut savoir qu’au XIXe siècle, les moyennes n’atteignent jamais 200 salaires horaires, tout en restant longtemps supérieure à 100 (…) les écarts inter-régionaux et inter-temporels diminuent. 1850 est la première année où la moyenne nationale française du prix réel du blé est inférieure à 100 heures de salaire de manœuvre.
Source : D'une France à une autre : avant et après les Trente glorieuses.
En outre, Annie Fourcaut dans La Ville divisée: les ségrégations urbaines en question : France XVIIIe-XXe ... s’intéresse aux valeurs locatives. A Paris à 1862, notons que le prix des locations varie considérablement et peut être relativement élevé:
Rue Aumaire : 7426,8
Rue Beaubourg : 4 472, 5
Rue des Fontaines : 9 896,2
Rue Meslay : 23 405, 8 francs
Ryue Saint Martin : 12 495,2
Rue du Temple : 15 669
Dans un article consacré aux travaux ferroviaires de 1860 il est mentionné que sur la section entre l’Ille-et-Vilaine et Saint-Brieuc vingt maisons de garde sont à construire. L’adjudication est lancée le 24 mars 1862 ; Les maisons sont évaluées à 150 000 francs soit 7 500 chacune.
Dans un même temps, la première tranche des travaux de l’église d’Eu est évaluée à 300 000 francs.
Source : Médiathèque de l’architecture et du patrimoine.
A Nantes, l’exposition nationale de 1861 coûte 280 000 francs
Source : archives-nantes.fr
Et pour revenir au monde de la littérature, on apprend qu’en 1859, Emile Zola, grâce à la protection d’Alexandre Labot, entre comme employé à l’administration des Docks de Paris, où il gagne à peine de quoi manger (60 francs par mois, soit environ 274 euros selon Colette Becker).
Source : L’Argent selon Zola : « La pire et la meilleure des choses » rédigé par un enseignant du Lycée Louis le Grand.
Selon les calculs de Colette Becker, en 1859, 300 000 francs équivalaient à 1 370 000 euros.
Par ailleurs, il existe une autre méthode (également « hasardeuse ») pour essayer de calculer le prix réel d’un bien. Il faut diviser son prix monétaire par le salaire horaire du manœuvre (c’est-à-dire le salaire le plus bas). D’après Jean Fourastié (D’une France à une autre, avant et après les Trente Glorieuses), le salaire horaire d’un manœuvre en 1860 était 0,205 francs.
On peut donc dire qu’en prix réel, 300 000 francs ( 300 000 / 0, 205 ) équivalait à environ 1 463 414 salaires horaires de manœuvre, ce qui veut dire qu’un manœuvre aurait eu à travailler 146 341 jours à raison de 10 heures par jour…
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