accès aux habitations pentes de la Croix-Rousse
LYON, MÉTROPOLE ET RÉGION
+ DE 2 ANS
Le 09/03/2020 à 16h17
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Question d'origine :
Bonjour,
Dans les pentes de la Croix-Rousse, rue Ozanam, rue de Crimée, rue de l'Alma, il y a des entrées surélevées de quelques marches au-dessus de petits perrons.
J'avais entendu dire que cela pouvait servir à décharger de la soie, mais est-ce vraiment cette utilité ?
Avez-vous une information concernant ces curiosités que l'on ne retrouve presque que dans ce rayon ?
D'avance merci pour votre aide et réponse.
Cordialement,
JCa
Réponse du Guichet
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- Département : Documentation régionale
Le 12/03/2020 à 15h39
Les entrées surélevées sous forme d'escaliers donnant sur un perron en pierre avec garde-corps en fer que l’on peut observer sur les trottoirs des rues de Crimée, Sainte-Clothilde et aux environs ont été réalisés dans un but tout à fait pratique : permettre aux occupants d’accéder à l’entrée de leur immeuble ! En effet ces derniers, construits au début ou milieu du 19e siècle sur des parcelles de l’ancien clos Riondel, se sont trouvés « déchaussés » suite à l’abaissement du sol des rues réalisé en 1866 et 1867, en vue de les mettre à niveau avec le boulevard de la Croix-Rousse nouvellement créé.
Un procès-verbal du conseil municipal de Lyon du 10 septembre 1875 témoigne de la transaction conclue entre la Ville de Lyon et François et Claude Delaval, propriétaires d’immeubles situés rue de Crimée, la ville s’engageant à financer la construction de perrons pour lesdits immeubles. Vous en trouverez le contenu numérisé sur Google books : Premier arrondissement. - Nivellement des rues de Crimée, Ozanam, Sainte-Clothilde et Saint-François d’Assises. - Règlement des dommages causés aux immeubles de MM. Claude et François Delaval, situés rue de Crimée, 7, 9, 11, 13, 15, 8, 10 et 12 – Projets de traités.
On trouve dans les Annales des ponts et chaussées, tome 2 de 1872 un précédent recours du "sieur Delaval" pour deux maisons qu'il possède au 4 rue Saint-François d'Assise et au 5 rue Sainte-Clotilde, dont la destination devra être changée de magasins en ateliers à cause de cet abaissement, malgré la construction des "terrasses avec perrons" par la Ville de Lyon.
Plusieurs sites et documents en ligne mentionnent le clos Riondel. En voici quelques extraits :
- Dans Les rues de Lyon d’Adolphe Vachet, on peut lire à propos de la rue de l’Alma :
« Sur ces pentes de la Croix-Rousse, il y avait autrefois d'assez vastes propriétés, connues sous le nom de clos, le clos Riondel, le clos Flandrin. En 1823, une société d'actionnaires entreprit de créer un nouveau quartier dans le clos Riondel. Elle traça des rues, et au nombre de celles-ci, la rue qui nous occupe.»
- Sur le site de la mairie du 1er arrondissement de Lyon :
PENTES DE LA CROIX-ROUSSE : 2000 ans d’ouvertures de rues et d’urbanisation (pdf)
« Les clos Riondel et du Mont sauvage : Vers 1830, Dans le clos Riondel du nom de sa propriétaire, partie du clos de la Tourette de la rue de Vauzelles à la rue St François d’Assise, sont ouvertes : les rues de Crimée, Vauzelles, Alma, Ozanam, St François d’Assise qui eurent toutes comme premier nom rue X du clos-Riondel. Le Mont Sauvage (clos Flandrin) ( entre St François d’Assise et Pierres Plantées et où était érigé la Tour Pitra) est loti plus tard . Vers 1853 sont ouvertes, la partie est de la rue de Crimée, les rues Reymond et Rast-Maupas et J.B. Say. En 1852 est ouverte la montée du Mont Sauvage( Mtée Lt Allouche) pour assurer la liaison avec la rue du Bon Pasteur.»
Sur le site de Cris, passionnée de généalogie et de l’histoire de la Croix-Rousse :
La CROIX-ROUSSE, brève histoire : Les rues et les traboules. 2- Les rues des Pentes.
« En 1822, Madame Riondel est propriétaire d’une partie du Clos de la Tourette ayant appartenu à la famille Claret de Fleurieu de la Tourette, soit 4,5 hectares (le portail de ce domaine se trouve encore devant l’école normale des institutrices, IUFM actuel). Pour lotir son clos, elle fait percer deux rues Est-Ouest et quatre rues Nord-Sud. Mise devant le fait accompli, la ville refuse de prendre en charge le pavage de ces nouvelles rues qui demeureront longtemps en très mauvais état sur ce quartier appelé “Bellevue“ puis “Mont Sauvage“. Ce n’est qu’en 1853 que la Grande Rue du Clos Riondel, la rue du Midi du Clos Riondel, la rue au Couchant du Clos Riondel, la petite rue du Clos Riondel, la rue au Levant du Clos Riondel et la rue au centre du Clos Riondel seront réhabilitées et nommées respectivement rue de Crimée, rue d’Alma, rue Vauzelles, rue Ozanam, rue Saint François d’Assise et rue Saint Clotilde. »
- Le site Mont sauvage Lyon propose un dossier sur l’histoire de l’urbanisation de l’ancien clos Flandrin, voisin par l’Est du clos Riondel, bâti plus tardivement mais qui subit les mêmes conséquences dans les années 1860 :
« Les travaux de nivellement suite au percement du boulevard de l’empereur (à partir de 1865). En 1865, le percement du boulevard de l’empereur et son corollaire, la destruction des remparts, entraine dans le quartier des travaux importants de nivellement. De part et d’autre des remparts ce ne sont pas les mêmes niveaux de sol. Dans le secteur du mont Sauvage, les excavations sont profondes de 3m en moyenne sur la rue de Bellevue, (qui devient le boulevard de l’Empereur). Les immeubles se retrouvent en contrehaut des voies. Aussi, les édifices sont, non seulement, fragilisées par ces travaux, mais aussi, des changements de distribution doivent être opérés : un rez-de-chaussée peut presque devenir un premier étage. Les travaux de nivellement sont accompagnés d’alignement comme prévu par le plan de Bonnet. Ainsi la rigueur du damier est parachevée à cette époque. À cela s’ajoute toujours des excavations de rigole pour drainer les écoulements d’eau. Cependant, il est fort à parier que pendant 8 ans environ le mont Sauvage souffre d’un aspect de chantier permanent, de 1866 à 1874. À l’orée du XXe siècle, les rues du secteur Mont Sauvage revêtent ainsi un aspect certainement plus commode à la circulation des véhicules et à la vie ; signe que la Municipalité s’engage à nouveau pour l’aménagement du haut du plateau de la Croix-rousse à Lyon. Avec l’annexion du faubourg et les travaux du boulevard le lien entre ces derniers n’existe plus seulement dans les pratiques des habitants qui, se reconnaissant appartenir aux mêmes groupes des canuts, traversaient facilement la muraille. Il reste à définitivement relier le Plateau au bas des pentes. »
- « Le détail suivant illustre les travaux d’excavations qui ont été fait dans la rue de Crimée47 et qui ont modifié l’agencement intérieur des immeubles bordant la rue. La rue de Crimée a perdu presque 2m de haut par rapport à son état d’origine. Les pieds d’immeubles ont donc été déchaussés agrandissant le soubassement en laissant une trace en façade comme le montre la photo ci-après. Nous supposons que le haut de l’actuel soubassement correspondrait au niveau d’origine de la rue. A l’intérieur le niveau d’origine situé à +1.79 actuellement et ne comportait probablement pas d’escalier, mais une allée offrant un passage entre la cour intérieure et la rue qui étaient au même niveau. Aujourd’hui l’escalier a permis de rattraper l’excavation de la rue. On peut remarquer dans la rue l’aménagement maladroit d’escaliers extérieurs mangeant sur le trottoir qui résulte du même phénomène. La plupart du temps des caves voutées occupaient le sous-sol, ne permettant pas d’abaisser le RDC. »
- Les cartes et plans numérisés sur le site des Archives municipales de Lyon vous permettrons d’appréhender l’évolution de ce secteur au XIXe siècle. Vous pouvez par exemple consulter :
Plan d'ensemble d'une voie charretière partant de la rue Saint Marcel et arrivant sur le plateau de la Croix-Rousse et d'un projet d'escalier partant du jardin des plantes et arrivant au même plateau, ca 1840 (Cote 3S0982)
Plan général et géométral de la ville de Lyon. Projets d'alignements - carte n° 13, Année 1846 (Cote 2S0981)
Rectification des pentes des quartiers au nord des Terreaux. Plan des lacets à compléter ou à améliorer entre la place des Terreaux et la Croix-Rousse, 1856 (Cote 2S0446)
Nous n'avons pas trouvé d'information relative à l'utilisation de ces perrons par les soyeux. Cependant, Josette Barre, dans son article Soierie lyonnaise et habitat. Typologie des immeubles de la Croix-Rousse vers 1830 (Le Monde alpin et rhodanien. Revue régionale d’ethnologie Année 1991 19-2-3 pp. 39-52, consultable sur Persée), évoque les immeubles construits sur l’ancien clos Riondel dans la partie de son article consacrée aux
Pour aller plus loin sur l'architecture des immeubles dédiés aux tisseurs lyonnais et plus largement sur l'urbanisation de la Croix-Rousse au XIXe siècle, vous pouvez lire :
Bâti croix-roussien et soierie [article] Josette Barre, in : Lyon et son patrimoine industriel : un paradoxe patrimonial. L'archéologie industrielle en France ; n° 54, juin 2009, p. 30-34
La colline de la Croix-Rousse : histoire et géographie urbaine [Livre] Josette Barre, 1993
La colline de la Croix-Rousse [Livre] par Josette Barre, ELAH, 2007
Le second est un ouvrage grand public et le troisième est une version abrégée de sa thèse.
L'architecture mineure à la Croix-Rousse d'après les demandes de permis (1800-1850), Thierry Monnet, [Article], Travaux de l'institut d'histoire de l'art de Lyon ; No 15, 1992, p. 47-58
Les pentes de la Croix-Rousse, histoire des formes urbaines : urbanisme, architecture, occupation sociale / Marie-Hélène Benetière, Anne-Sophie Clémençon, Nathalie Mathian, [Rapport de recherche] CNRS; Université Lumière; Agence d'urbanisme du Grand Lyon. 1992, 138 p., ouvrage consultable à la DREAL Rhône-Alpes
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