Question d'origine :
Bonjour
Est-ce que les smartphones changent notre rapport au monde ?
Merci
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 28/08/2019 à 10h13
Bonjour,
Sur France Bleu Géraldine Houdayer rédige un article sur les dix ans de l’Iphone qui montre les divers changements liés à l'usage du smartphone :
Il y a dix ans, le 29 juin 2007, Apple mettait en vente l'iPhone, l'appareil qui a révolutionné l'industrie des téléphones portables et changé nos habitudes . A l'époque où le petit accessoire à écran tactile est mis en vente, le marché est dominé par les téléphones à clavier de Blackberry. Dix ans plus tard, le groupe a écoulé plus d'un milliard d'iPhone, qui en est à sa septième version. La huitième devrait être annoncée à la rentrée. Mais l'iPhone a surtout permis le développement d'une multitude d'applications qui en font un vrai couteau-suisse. Les innovations d'Apple ont été copiées et parfois améliorées par les autres constructeurs. "Les smartphones ont changé notre présence au monde", estime la sociologue Catherine Lejealle, spécialiste des nouvelles technologies et enseignante à l'ISC Paris, une école de commerce et de management.
Avec les smartphones, "le temps devient plus court, mais aussi plus intense"
"Avec les smartphones, tout devient urgent", explique la sociologue. "Tout est immédiat. On fait du zapping, du multi-tasking (plusieurs tâches à la fois), et le temps devient plus court, mais aussi plus intense". Le plus marquant, pour la chercheuse, c'est qu'on à "tout à portée de main : lorsqu'on a une idée, on a immédiatement l'information ou la solution qu'on cherche. Résultat, on anticipe beaucoup moins nos déplacements ou nos sorties : "pas besoin d'acheter l'officiel des spectacles ou le journal pour avoir les horaires de cinéma, il suffit de se connecter à son smartphone. Pas besoin non plus d'un plan pour savoir comment se rendre au cinéma, le smartphone va nous l'indiquer. Il y a une forme de facilité, de soulagement", explique la chercheuse. Le smartphone nous libère d'une certaine charge."
Se dédoubler grâce au smartphone
"Le smartphone a aussibouleversé notre rapport à l'espace" , poursuit Catherine Lejealle. Au travail, à l'école ou dans les transports, on peut être ailleurs. "Partout, on peut lire, jouer, regarder des photos ou parler avec son amoureux", sourit la chercheuse. Sans compter que le téléphone a remplacé le GPS et les cartes routières.
L'info partout, tout le temps
Le rapport à l'information a également été bouleversé. "L'info est pléthorique, gratuite et partout à la fois , explique la chercheuse. "L'expérience est plus riche, l'information aussi." Mais Catherine Lejealle rappelle aussi l'effet pervers de l'infobésité, la surinformation . "C'est désormais l'attention qui est une ressource rare ." En clair, parmi le flot d'informations ou de publicités, difficile pour un article ou un annonceur de retenir l'attention d'un lecteur ou d'un consommateur, sollicité de toutes parts. Car dans le même temps, "il y a une fragmentation de l'attention, nous avons tous des problèmes de concentration". Cas typique, la lecture d'un article est détournée par la réception d'un mail, elle-même interrompue par une notification Facebook, Twitter ou un SMS.
Un couteau suisse devenu concierge de luxe
Le smartphone a aussi remplacé une multitude d'objets, rappelle la chercheuse. "Le smartphone est un couteau suisse. Et en 10 ans, sa technologie a énormément évolué." Il remplace désormais le lecteur MP3, mais aussi l'appareil photo, le GPS et la console de jeux, "puisque c'est devenu le premier support de jeu." La baisse des prix a concouru à la démocratisation des smartphones. "Grâce aux forfaits peu chers et au réseau 4G, les smartphones sont devenus accessibles à tous, explique Catherine Lejeall. Les freins financiers et techniques on disparu. Le smartphone a aussi remplacé le réveil et le minuteur, parfois même la boussole ou le niveau. Pour la chercheuse, "c'est devenu une sorte de concierge de luxe."
Vie privée, vie publique
Avec les smartphones, "on a envie de tout savoir, de tout lire à la fois" , rappelle Catherine Lejealle. "Et cette révolution s'est jouée en très peu d'années. Pour ne pas en devenir prisonnier, la chercheuse estime que "c'est à nous d'apprendre à être sélectifs, ça demande forcément des adaptations dans les années a venir. Le smartphone a aussi aboli les frontières entre la vie privée et la vie professionnelle. D'après la chercheuse, le droit à la déconnexion est loin d'être revendiqué par tous les salariés. Alors qu'ils pourraient déconnecter, "beaucoup continuent à regarder leurs mails en dehors du travail pour se rassurer. Dans un contexte miné par le chômage, c'est une façon de se dire que si on reçoit des mails, c'est qu'on existe, qu'on est important, décrypte la sociologue. C'est aussi une façon de montrer à son employeur qu'on est très investi et passionné et par son travail. Alors que ce serait mieux d'être déconnecté, car on n'est pas forcément efficace quand on travaille de n'importe quel endroit", conclut la chercheuse, qui a écrit J'arrête d'être hyperconnecté !: 21 jours pour réussir sa détox digitale / Catherine Lejealle.
Moins alarmiste, Michel Serres dans Petite Poucette revient sur les mutations - politiques, sociales et cognitives – induites par les nouvelles technologies et s’intéresse à ce nouvel humain qu’il baptise « petite poucette ». Nous ne pouvons résister à la tentation de vous en présenter un bref extrait – mais il faudra poursuivre la lecture :
« Ces enfants habitent donc le virtuel. Les sciences cognitives montrent que l’usage de la Toile, la lecture ou l’écriture au pouce, la consultation de Wikipédia ou de Facebook n’excitent pas les mêmes neurones nos les mêmes zones corticales que l’usage du livre, de l’ardoise ou du cahier. Ils peuvent manipuler plusieurs informations à la fois. Ils ne connaissent, ni n’intègrent, ni ne synthétisent comme nous, leurs ascendants. Ils n’ont plus la même tête.
Par téléphone cellulaire, ils accèdent à toutes personnes ; par GPS, en tous lieux ; par la toile ; à tout le savoir … »
En complément, nous vous suggérons les lectures suivantes :
• Le troisième cerveau : petite phénoménologie du smartphone / Pierre-Marc de Biasi, 2018 : Il y a dix ans, Steve Jobs présente son dernier-né : iPhone, premier téléphone cellulaire contenant un navigateur Internet, un iPod et un écran tactile multi-touch. C’est une révolution. Depuis, le smartphone a su se rendre aussi indispensable que l’air que l’on respire : on ne l’éteint que forcé et contraint, on ne s’en sépare jamais, au point que certains parlent de pathologie addictive, d’amnésie, d’hyper connexion, de confusion mentale. D’un autre côté, chacun mesure l’étendue des services rendus : communiquer, s’informer, traduire, écouter, lire, écrire, voir, photographier, se localiser, payer, jouer… Le smartphone n’est pas qu’un intercesseur efficace du réel, il est devenu notre point de vue sur le monde. Son rôle de médiateur est tel qu’il finit par adhérer à nous comme une sorte d’artefact organique, sans frontière entre l’outil et son utilisateur.
Avec l’intelligence artificielle et la 5G, le smartphone augmenté nous dotera de super pouvoirs, mais en aggravant les dangers. Il nous a appris à désapprendre : il fera de nous des assistés. Il vend nos profils au plus offrant : il servira à nous manipuler pour orienter nos votes. Il espionne notre vie privée : il fera de nous les sujets d’un véritable empire de la surveillance. À moins qu’il ne devienne l’instrument d’une nouvelle conscience collective capable de donner leurs chances à la fraternité, à la démocratie directe et à la survie de la planète.
Enrichi de témoignages, Le troisième cerveau est un essai décapant sur un comportement à risque : notre sujétion aveugle à l’objet fétiche de la culture numérique.
• Les affinités connectives : sociologie de la culture numérique / Vincenzo Susca, 2016 : «
L'auteur étudie la prolifération des outils permettant l'accès au numérique, tels que les smartphones, les tablettes, le wifi ou les biotechnologies, leur utilisation dans la vie quotidienne, notamment à travers les réseaux sociaux, et analyse leurs conséquences, bonnes ou mauvaises ».
• Démocratie smartphone: Le populisme numérique, de Trump à Macron / Francis Brochet, 2017 : « Une enquête sur les dangers d'Internet dans les démocraties occidentales. Si l'auteur souligne ses apports, il dénonce sa face sombre, entre diffusion de fausses informations, manipulation de l'opinion, multiplication de publications extrémistes aux origines obscures, forums haineux ou risques d'interventions occultes de puissances étrangères dans les jeux politique »s nationaux
• Enfin, la revue Books a consacré son numéro n°79 (2016) à cette thématique : Le smartphone nous rend-il dingues ?
Bonnes lectures
Sur France Bleu Géraldine Houdayer rédige un article sur les dix ans de l’Iphone qui montre les divers changements liés à l'usage du smartphone :
Avec les smartphones, "le temps devient plus court, mais aussi plus intense"
Se dédoubler grâce au smartphone
"Le smartphone a aussi
L'info partout, tout le temps
Le
Un couteau suisse devenu concierge de luxe
Le smartphone a aussi remplacé une multitude d'objets, rappelle la chercheuse. "Le smartphone est un couteau suisse. Et en 10 ans, sa technologie a énormément évolué." Il remplace désormais le lecteur MP3, mais aussi l'appareil photo, le GPS et la console de jeux, "puisque c'est devenu le premier support de jeu." La baisse des prix a concouru à la démocratisation des smartphones. "Grâce aux forfaits peu chers et au réseau 4G, les smartphones sont devenus accessibles à tous, explique Catherine Lejeall. Les freins financiers et techniques on disparu. Le smartphone a aussi remplacé le réveil et le minuteur, parfois même la boussole ou le niveau. Pour la chercheuse, "c'est devenu une sorte de concierge de luxe."
Avec les smartphones, "on a envie de tout savoir, de tout lire à la fois" ,
Moins alarmiste, Michel Serres dans Petite Poucette revient sur les mutations - politiques, sociales et cognitives – induites par les nouvelles technologies et s’intéresse à ce nouvel humain qu’il baptise « petite poucette ». Nous ne pouvons résister à la tentation de vous en présenter un bref extrait – mais il faudra poursuivre la lecture :
« Ces enfants habitent donc le virtuel. Les sciences cognitives montrent que l’usage de la Toile, la lecture ou l’écriture au pouce, la consultation de Wikipédia ou de Facebook n’excitent pas les mêmes neurones nos les mêmes zones corticales que l’usage du livre, de l’ardoise ou du cahier. Ils peuvent manipuler plusieurs informations à la fois. Ils ne connaissent, ni n’intègrent, ni ne synthétisent comme nous, leurs ascendants. Ils n’ont plus la même tête.
Par téléphone cellulaire, ils accèdent à toutes personnes ; par GPS, en tous lieux ; par la toile ; à tout le savoir … »
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Avec l’intelligence artificielle et la 5G, le smartphone augmenté nous dotera de super pouvoirs, mais en aggravant les dangers. Il nous a appris à désapprendre : il fera de nous des assistés. Il vend nos profils au plus offrant : il servira à nous manipuler pour orienter nos votes. Il espionne notre vie privée : il fera de nous les sujets d’un véritable empire de la surveillance. À moins qu’il ne devienne l’instrument d’une nouvelle conscience collective capable de donner leurs chances à la fraternité, à la démocratie directe et à la survie de la planète.
Enrichi de témoignages, Le troisième cerveau est un essai décapant sur un comportement à risque : notre sujétion aveugle à l’objet fétiche de la culture numérique.
• Les affinités connectives : sociologie de la culture numérique / Vincenzo Susca, 2016 : «
L'auteur étudie la prolifération des outils permettant l'accès au numérique, tels que les smartphones, les tablettes, le wifi ou les biotechnologies, leur utilisation dans la vie quotidienne, notamment à travers les réseaux sociaux, et analyse leurs conséquences, bonnes ou mauvaises ».
• Démocratie smartphone: Le populisme numérique, de Trump à Macron / Francis Brochet, 2017 : « Une enquête sur les dangers d'Internet dans les démocraties occidentales. Si l'auteur souligne ses apports, il dénonce sa face sombre, entre diffusion de fausses informations, manipulation de l'opinion, multiplication de publications extrémistes aux origines obscures, forums haineux ou risques d'interventions occultes de puissances étrangères dans les jeux politique »s nationaux
• Enfin, la revue Books a consacré son numéro n°79 (2016) à cette thématique : Le smartphone nous rend-il dingues ?
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