Question d'origine :
Bonjour ! J'ai des questions sur la première Guerre Mondiale.
Il me faut aussi savoir ce qui arrive quand des hommes en bande désertent : est-ce écrit dans les journaux ? Comment le sait-on ? Peut-on sortir ensuite ou faut-il se terrer ?
Est-ce qu'il existe une carte d'invalidité pour les hommes réformés ?
Peut-on être réformé pour des problèmes psychiatriques ? Comment vivent les hommes qui se retrouvent réformés ?
Je cherche aussi des informations relatives à la composition des bataillons, ou qui puisse expliquer comment fonctionne l'armée dans le cas de cette guerre :
Comment les soldats sont-ils répartis ? Est-ce géographique ? Comment composer un bataillon d'infanterie ?
Merci beaucoup d'avance !
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 04/06/2019 à 15h06
Bonjour,
Les questions que vous posez ont en partie déjà obtenues des réponses du Guichet du Savoir ici.
Sur les déserteurs :
Il est difficile de répondre « catégoriquement » à votre question sur les désertions collectives.
Si nous avons trouvé quelques exemples dans cet article Ils n'étaient que des hommes... Un cas de désertion collective en Artois ou celui-ci Les Anduziens dans la guerre 1914-1918, on ne sait pas dans quelle mesure ces événements ont été relayés dans la presse.
Ce qui est sûr, c‘est que le contexte de l’information durant la Grande Guerre est celui de la censure, du contrôle postal et de la propagande, aussi appelée « bourrage de crâne ». Ainsi, les faits de désertion, de refus de guerre ou de mutineries, susceptibles de véhiculer des idées antimilitaristes ou pacifiques, voir révolutionnaires, ou du moins de pointer l’horreur des combats et de la vie dans les tranchées, devaient le moins possible être relayés par la presse pour éviter toute « contamination ».
Voir le chapitre Information, censure et propagande dans l’Encyclopédie de la Grande Guerre : "En 1916-1917, l’objectif est d’identifier et de lutter contre les facteurs de démobilisation (lassitude, pessimisme, défaitisme, pacifisme), en filtrant si nécessaire les indiscrétions militaires et les nouvelles alarmantes." (p. 458). L’exemple des grèves de mai 1918 est aussi cité, où « leur occultation ne pouvant être totale et permanente, la censure française est parvenue à limiter leur aire de diffusion, étouffant l’information par des consignes de censures régionales faites aux commissions de censures locales. » (p. 463)
Dans La censure en France pendant la Grande Guerre, on voit que la censure est parfois subtile, filtrant les informations mais en laissant tout de même passer, notamment à travers l’exemple de l’hebdomadaire pacifiste La Vague, contenant des lettres de poilus qui pour certaines ont été admises par la censure. Cependant, le journal subira des saisies systématiques dès décembre 1917. (p. 204-205)
En revanche on y voit aussi que la presse pouvait évoquer des cas de refus de guerre mais pour les dénoncer et vilipender le manque de patriotisme des concernés. On peut citer aussi Clémenceau qui lança une campagne de presse contre les embusqués en avril 1915.
Certains journaux osaient cependant aborder ces sujets, notamment l'ouvrage La Grande Guerre sous le regard de la presse, cite le journal Le Radical qui publia un article pour dénoncer l'injustice des Conseils de guerre punissant les désertions, abandons de poste... il en subira des représailles. (p. 107)
Voir cet article : Les déserteurs de la Grande Guerre, bêtes noires de la presse et l’ouvrage 14-18. Les refus de la guerre, André Loez
Voir aussi le chapitre Journalistes et correspondants de guerre (p.717) de l'Encyclopédie de la Grande Guerre.
Quant à la « possibilité » de « sortir » ou de « se terrer » (si nous comprenons bien, pour les personnes ayant déserté), les peines encourues en cas de désertion incitaient plutôt les déserteurs à fuir ou se cacher pour éviter la fusillade, la prison, les travaux forcés ou l’engagement dans des unités spéciales souvent les plus exposées sur le front. Sachant que même exilés dans un autre pays, les déserteurs « restaient redevables devant la justice militaire jusqu’à l’âge théorique de leur dégagement des obligations militaires, soit à l’âge de 53 ans. » (voir Les Anduziens dans la guerre 1914-1918)
Ainsi, « le passage en Suisse ou en Espagne est fréquent, en particulier chez les frontaliers, car le déserteur ne saurait songer à rejoindre son domicile, surtout en zone urbaine. En zone rurale, on relève des exceptions, pour la Corse comme pour le pays basque. Le commandant de la gendarmerie des Basses-Pyrénées recense au début au début de 1917 –avant les mouvements de mutineries dans l’armée française- plus de 500 déserteurs dans son département ; 40% d’entre eux sont arrêtés après de nombreux contrôles. » (p. 328), article Déserteurs, insoumis et réfractaires du Dictionnaire de la Grande Guerre
Voir aussi :
Désertion pendant la Première Guerre mondiale
Déserteur au cours de la Première Guerre mondiale
Sur les réformés :
Le Forum 14-18 explique la différence entre les réformés n°1 et n°2. Seuls lesréformés n°1 (réformé des suites d’une blessure de guerre ou d’une maladie contractée en service) ont droit à une pension d’invalidité dont le « taux est déterminé par l'invalidité, et le niveau en fonction du grade ». Même si nous n’avons pas trouvé de document l’attestant, il est probable que les réformés n°1 aient eu en leur possession une carte d’invalidité, car c’est le fait de bénéficier d’une pension qui permet l’attribution de cette carte.
Quant aux réformés n°2, ils n’avaient sûrement pas d’autres choix que de travailler pour vivre.
Dans ce document Les Passerands réformés en 14-18 : motifs, nous pouvons voir quelques motifs ayant permis de réformer des personnes, certains pourraient relever de ce que vous appelez desproblèmes psychiatriques : « infantilisme », « débilité », « dégénérescence mentale ». Dans L’encyclopédie de la Grande Guerre, le chapitre La psychiatrie en temps de guerre propose un petite encadré avec des "Statistiques de la folie" élaborées à partir de l’expertise sur l’état mental de 54 soldats inculpés devant le Conseil de guerre de la 5e région en 1917, révélant un taux élevé de pathologies psychiatriques. Pour vous donner une idée, voici quelques termes utilisés : « débilité mentale, déséquilibre mental, alcoolisme chronique, démence précoce… »
Ce petit livret fait par le Conseil général de la Loire, 1914 cent ans après, donne des définitions précises des termes : réformés, ajournés et exemptés.
Quant à ce document, il explique de façon plus détaillée Les Pensions militaires d’invalidités en 1914-18.
Sur l’organisation et les bataillons :
Deux principes régissent l’organisation de l’armée durant la Grande guerre :
-la région militaire : les régions militaires crées en 1873 sont au nombre de 21 et 19 en Algérie, leurs responsabilités sont territoriales et opérationnelles. "Le général commandant la région est donc, dans le même temps, le commandant du corps d’armée correspondant. Organisées sur l’ensemble du territoire selon le même modèle, les régions militaires/corps d’armées constituent le pivot de l’organisation militaire française et forment chacune un ensemble cohérent, autonome, passant théoriquement sans difficulté du temps de paix au temps de guerre puisque l’ensemble des formations, unités, services et établissements relèvent de la même autorité.". Ces régions militaires ont aussi appelées circonscriptions . Chaque circonscription est organisée en subdivisions de région (le plus souvent de 8 à 9), auxquelles correspond, pour chacune d’elles, un régiment d’infanterie territorial. (p.247)
-le régiment : "il désigne une unité organique permanente, placée sous les ordres d’un colonel ou d’un lieutenant-colonel, et constituée suivant les armes d’un certain nombre de bataillons, d’escadrons ou de batteries. En 1914, le régiment français d’infanterie est constitué sur la base de trois bataillons de quatre compagnies s’il s’agit d’un régiment d’active, et de deux bataillons à quatre compagnies s’il s’agit d’un régiment de réserve." (p. 876)
Sachant qu’à cette organisation territoriale, s’ajoute la répartition par classes d’âge : armée active, armée de réserve, armée territoriale, réserve de l’armée territoriale.
Pour plus de détails : Régiment d'infanterie territoriale
Voir aussi :
Composition organique et structurelle de l'armée française en 1915
Ordre de bataille de l'armée française en août 1914
Service militaire en 1914 et incorporation
Nous tenons à vous rappeler qu’une question au Guichet du savoir ne doit comporter qu’une seule question, et ne peut donc pas en contenir neuf, portant sur trois sujets différents. Le cas contraire, les bibliothécaires ne sont plus en capacité de répondre dans le temps imparti.
Bonne lecture !
Les questions que vous posez ont en partie déjà obtenues des réponses du Guichet du Savoir ici.
Il est difficile de répondre « catégoriquement » à votre question sur les désertions collectives.
Si nous avons trouvé quelques exemples dans cet article Ils n'étaient que des hommes... Un cas de désertion collective en Artois ou celui-ci Les Anduziens dans la guerre 1914-1918, on ne sait pas dans quelle mesure ces événements ont été relayés dans la presse.
Ce qui est sûr, c‘est que le contexte de l’information durant la Grande Guerre est celui de la censure, du contrôle postal et de la propagande, aussi appelée « bourrage de crâne ». Ainsi, les faits de désertion, de refus de guerre ou de mutineries, susceptibles de véhiculer des idées antimilitaristes ou pacifiques, voir révolutionnaires, ou du moins de pointer l’horreur des combats et de la vie dans les tranchées, devaient le moins possible être relayés par la presse pour éviter toute « contamination ».
Voir le chapitre Information, censure et propagande dans l’Encyclopédie de la Grande Guerre : "En 1916-1917, l’objectif est d’identifier et de lutter contre les facteurs de démobilisation (lassitude, pessimisme, défaitisme, pacifisme), en filtrant si nécessaire les indiscrétions militaires et les nouvelles alarmantes." (p. 458). L’exemple des grèves de mai 1918 est aussi cité, où « leur occultation ne pouvant être totale et permanente, la censure française est parvenue à limiter leur aire de diffusion, étouffant l’information par des consignes de censures régionales faites aux commissions de censures locales. » (p. 463)
Dans La censure en France pendant la Grande Guerre, on voit que la censure est parfois subtile, filtrant les informations mais en laissant tout de même passer, notamment à travers l’exemple de l’hebdomadaire pacifiste La Vague, contenant des lettres de poilus qui pour certaines ont été admises par la censure. Cependant, le journal subira des saisies systématiques dès décembre 1917. (p. 204-205)
En revanche on y voit aussi que la presse pouvait évoquer des cas de refus de guerre mais pour les dénoncer et vilipender le manque de patriotisme des concernés. On peut citer aussi Clémenceau qui lança une campagne de presse contre les embusqués en avril 1915.
Certains journaux osaient cependant aborder ces sujets, notamment l'ouvrage La Grande Guerre sous le regard de la presse, cite le journal Le Radical qui publia un article pour dénoncer l'injustice des Conseils de guerre punissant les désertions, abandons de poste... il en subira des représailles. (p. 107)
Voir cet article : Les déserteurs de la Grande Guerre, bêtes noires de la presse et l’ouvrage 14-18. Les refus de la guerre, André Loez
Voir aussi le chapitre Journalistes et correspondants de guerre (p.717) de l'Encyclopédie de la Grande Guerre.
Quant à la « possibilité » de « sortir » ou de « se terrer » (si nous comprenons bien, pour les personnes ayant déserté), les peines encourues en cas de désertion incitaient plutôt les déserteurs à fuir ou se cacher pour éviter la fusillade, la prison, les travaux forcés ou l’engagement dans des unités spéciales souvent les plus exposées sur le front. Sachant que même exilés dans un autre pays, les déserteurs « restaient redevables devant la justice militaire jusqu’à l’âge théorique de leur dégagement des obligations militaires, soit à l’âge de 53 ans. » (voir Les Anduziens dans la guerre 1914-1918)
Ainsi, « le passage en Suisse ou en Espagne est fréquent, en particulier chez les frontaliers, car le déserteur ne saurait songer à rejoindre son domicile, surtout en zone urbaine. En zone rurale, on relève des exceptions, pour la Corse comme pour le pays basque. Le commandant de la gendarmerie des Basses-Pyrénées recense au début au début de 1917 –avant les mouvements de mutineries dans l’armée française- plus de 500 déserteurs dans son département ; 40% d’entre eux sont arrêtés après de nombreux contrôles. » (p. 328), article Déserteurs, insoumis et réfractaires du Dictionnaire de la Grande Guerre
Désertion pendant la Première Guerre mondiale
Déserteur au cours de la Première Guerre mondiale
Sur les réformés :
Le Forum 14-18 explique la différence entre les réformés n°1 et n°2. Seuls les
Quant aux réformés n°2, ils n’avaient sûrement pas d’autres choix que de travailler pour vivre.
Dans ce document Les Passerands réformés en 14-18 : motifs, nous pouvons voir quelques motifs ayant permis de réformer des personnes, certains pourraient relever de ce que vous appelez des
Ce petit livret fait par le Conseil général de la Loire, 1914 cent ans après, donne des définitions précises des termes : réformés, ajournés et exemptés.
Quant à ce document, il explique de façon plus détaillée Les Pensions militaires d’invalidités en 1914-18.
Deux principes régissent l’organisation de l’armée durant la Grande guerre :
-
-
Sachant qu’à cette organisation territoriale, s’ajoute la répartition par classes d’âge : armée active, armée de réserve, armée territoriale, réserve de l’armée territoriale.
Pour plus de détails : Régiment d'infanterie territoriale
Composition organique et structurelle de l'armée française en 1915
Ordre de bataille de l'armée française en août 1914
Service militaire en 1914 et incorporation
Nous tenons à vous rappeler qu’une question au Guichet du savoir ne doit comporter qu’
Bonne lecture !
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter