Question d'origine :
Bonjour,
je souhaiterai connaître la différence entre une motte castrale et une butte féodale... Je me demande si le terme de butte féodale renvoie aussi à une construction artificielle, ou si cela renvoie plutôt à une butte déjà existante sur laquelle on a construit un château de bois, puis de pierre.
Je vous pose la question car j'ai lu le terme de "butte féodale" pour ce que je pensais être la motte castrale du village d'Arinthod (Jura).
Merci,
Anaïs
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 19/04/2019 à 10h14
Bonjour,
Aucune des sources que nous avons parcourues ne fait de différence entre une motte castrale et une butte féodale .
Dans Le Grand Robert de la langue française [Livre] : dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française / Paul Robert ; dir. par Alain Rey, les termes « butte » et « motte » sont donnés pour équivalents dans leur sens premier de « tertre », ou « éminence naturelle ou artificielle ».
Le cnrtl.fr définit même un mot par l’autre :
« A. − Vx. Butte naturelle ou artificielle sur laquelle était édifié un château fort ou sur laquelle s'élevaient un moulin à vent, une habitation, un monument. Aplanir, raser la motte. Au sommet de cette vaste motte de terre, se trouve l'église jadis flanquée de son presbytère, et dont le cimetière enveloppe, comme dans beaucoup de villages, le chevet (Balzac,Paysans, 1844, p.244).D'ordinaire, on élevait une motte ou butte factice, pour y placer le donjon ou la principale tour d'un château. Quelques-unes de ces mottes paraissent avoir été des tumulus antiques (Mérimée,Ét. Arts Moy. Âge, 1870, p.227) »
On ne trouve d’entrée pour le mot « butte » ni dans le Dictionnaire du Moyen Age [Livre] / sous la dir. de Claude Gauvard, Alain de Libera, Michel Zink, ni dans le Dictionnaire encyclopédique du Moyen âge [Livre] / sous la dir. d'André Vauchez ; avec la collab. de Catherine Vincent. Ce dernier ouvrage précisant même :
« La motte peut être entièrement artificielle, c’est-à-dire constituée de terre rapportée, ou résulter de l’aménagement d’un relief naturelle. […] Les fouilles […] ont révélé que les mottes étaient souvent le résultat d’une évolution complexe. Certaines ont pour origine le comblement d’une enceinte de terre construite autour d’une résidence seigneuriale ; dans d’autres cas, la motte résulte de l’accumulation de terre autour de la base d’un donjon construit sur le sol plan : ainsi à Doué-la-Fontaine (Maine-et-Loire) un bâtiment résidentiel carolingien, transformé en donjon au Xe siècle, a été « emmotté » au début du XIe siècle. »
Cette pratique d’emmottement , récemment découverte, est, selon l’archéologue Jean-François Maréchal, à l’origine même du donjon :
« Longtemps, et encore maintenant, les mottes ont été considérées comme servant de support élevé à des tours de guet plus ou moins fortifiées, ou même comme des défenses plus symboliques qu’efficaces! Mais comment expliquer alors leur présence sur une colline ou en montagne quand la vue y est panoramique? Et, tout d’abord, comment ces buttes de terre rapportée et non tassée auraient-elles pu supporter ces constructions de bois ou de pierre sans que celles-ci ne se fussent mises à pencher comme la célèbre tour de Pise ?
L’explication présentée ici réfute cette vision simpliste et pourtant encore répandue du donjon “sur motte” pour redéfinir la motte: celle-ci ne peut, en réalité, qu’être un “emmottement” ou talutage, comme on le voit sur la Tapisserie de Bayeux (fig. 3), d’une tour et de sa chemise en cours d’édification sur le sol plan pour les préserver des attaques de bélier (fig. 4), de la sape ou du minage et de l’approche des beffrois roulants. La terre fraîchement rapportée d’une telle butte aurait dû, dans le cas de la construction du donjon sur la motte, normalement attendre environ cinquante ans pour être suffisamment tassée et pouvoir supporter une telle masse. C’est le cas de nombreux d’entre eux, mais pour une raison: il s’agit alors d’une reconstruction après destruction d’un précédent donjon souvent de bois et c’est aussi la raison pour laquelle, en l’absence de fouilles complètes, les archéologues ont cru, sur simple sondage, que ses fondations reposaient sur la motte, comme c’est le cas, par exemple, à Gisors »
(Source : La genèse conjointe de la motte et du donjon , consultable sur academia.edu)
Toujours est-il que nos sources s’accordent pour dire que ce type d’architecture défensive, n’a « pas d’antécédent attesté dans l’histoire de la fortification » selon le Dictionnaire encyclopédique du Moyen Âge , et que son expansion «semble liée à celle du système féodal » , au point de devenir un « symbole féodo-vassalique supplémentaire », selon un article de Samuel Riou et Flore Marteaux consultable sur openedition.org)
Ce qui explique que nos sources évoquent indifféremment des «mottes féodales » et « buttes féodales ».
Bonne journée.
Aucune des sources que nous avons parcourues
Dans Le Grand Robert de la langue française [Livre] : dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française / Paul Robert ; dir. par Alain Rey, les termes « butte » et « motte » sont donnés pour équivalents dans leur sens premier de « tertre », ou « éminence naturelle ou artificielle ».
Le cnrtl.fr définit même un mot par l’autre :
« A. − Vx. Butte naturelle ou artificielle sur laquelle était édifié un château fort ou sur laquelle s'élevaient un moulin à vent, une habitation, un monument. Aplanir, raser la motte. Au sommet de cette vaste motte de terre, se trouve l'église jadis flanquée de son presbytère, et dont le cimetière enveloppe, comme dans beaucoup de villages, le chevet (Balzac,Paysans, 1844, p.244).D'ordinaire, on élevait une motte ou butte factice, pour y placer le donjon ou la principale tour d'un château. Quelques-unes de ces mottes paraissent avoir été des tumulus antiques (Mérimée,Ét. Arts Moy. Âge, 1870, p.227) »
On ne trouve d’entrée pour le mot « butte » ni dans le Dictionnaire du Moyen Age [Livre] / sous la dir. de Claude Gauvard, Alain de Libera, Michel Zink, ni dans le Dictionnaire encyclopédique du Moyen âge [Livre] / sous la dir. d'André Vauchez ; avec la collab. de Catherine Vincent. Ce dernier ouvrage précisant même :
« La motte peut être entièrement artificielle, c’est-à-dire constituée de terre rapportée, ou résulter de l’aménagement d’un relief naturelle. […] Les fouilles […] ont révélé que les mottes étaient souvent le résultat d’une évolution complexe. Certaines ont pour origine le comblement d’une enceinte de terre construite autour d’une résidence seigneuriale ; dans d’autres cas, la motte résulte de l’accumulation de terre autour de la base d’un donjon construit sur le sol plan : ainsi à Doué-la-Fontaine (Maine-et-Loire) un bâtiment résidentiel carolingien, transformé en donjon au Xe siècle, a été « emmotté » au début du XIe siècle. »
Cette pratique d’
« Longtemps, et encore maintenant, les mottes ont été considérées comme servant de support élevé à des tours de guet plus ou moins fortifiées, ou même comme des défenses plus symboliques qu’efficaces! Mais comment expliquer alors leur présence sur une colline ou en montagne quand la vue y est panoramique? Et, tout d’abord, comment ces buttes de terre rapportée et non tassée auraient-elles pu supporter ces constructions de bois ou de pierre sans que celles-ci ne se fussent mises à pencher comme la célèbre tour de Pise ?
L’explication présentée ici réfute cette vision simpliste et pourtant encore répandue du donjon “sur motte” pour redéfinir la motte: celle-ci ne peut, en réalité, qu’être un “emmottement” ou talutage, comme on le voit sur la Tapisserie de Bayeux (fig. 3), d’une tour et de sa chemise en cours d’édification sur le sol plan pour les préserver des attaques de bélier (fig. 4), de la sape ou du minage et de l’approche des beffrois roulants. La terre fraîchement rapportée d’une telle butte aurait dû, dans le cas de la construction du donjon sur la motte, normalement attendre environ cinquante ans pour être suffisamment tassée et pouvoir supporter une telle masse. C’est le cas de nombreux d’entre eux, mais pour une raison: il s’agit alors d’une reconstruction après destruction d’un précédent donjon souvent de bois et c’est aussi la raison pour laquelle, en l’absence de fouilles complètes, les archéologues ont cru, sur simple sondage, que ses fondations reposaient sur la motte, comme c’est le cas, par exemple, à Gisors »
(Source : La genèse conjointe de la motte et du donjon , consultable sur academia.edu)
Toujours est-il que nos sources s’accordent pour dire que ce type d’architecture défensive, n’a « pas d’antécédent attesté dans l’histoire de la fortification » selon le Dictionnaire encyclopédique du Moyen Âge , et que son expansion «
Ce qui explique que nos sources évoquent indifféremment des «
Bonne journée.
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