Question d'origine :
Bonjour, Des adultes regardent beaucoup les dessins animés américains et mêmes autres avec admiration. Que dit la psychologie ?
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 19/03/2019 à 10h37
Bonjour,
Tel Michel Onfray qui s'indigne devant ces adultes à trottinette, certains pensent que la société s'infantilise. « Plus personne n’est adulte aujourd’hui » nous dit-il.
On assisterait également à une juvénilisation croissante de la culture. Le marché du film d'animation américain mais également français se porte bien.
" En 2017, les films d'animation représentent 31,0 millions d’entrées (16,3 % des entrées des films inédits) en France !
Au niveau international, la France se place juste après les Etats-Unis en totalisant presque 10% des entrées de films d'animation au niveau mondial. D'ailleurs, l’animation concentre 40 % des ventes de programmes audiovisuels français en 2016."
source : AFCA
A lire aussi :
- La filière française de production de dessins animés sur un nuage / Laurent Marcaillou - Les Echos | Le 08/09/2017
- Le marché de l’animation en 2017 / Les études du CNC - juin 2018
De quoi parle-t-on ? Une pathologie clinique ? Une dérive de notre société qui aurait tendance à s'infantiliser ? Ou de l'émergence d'un style artistique à part entière ?
Qu'en disent les psychologues ?
* Les psychiatres américains ont défini le "syndrome de Peter Pan " :
" Baptisé ainsi par le psychiatre américain Dan Kiley, en référence au petit garçon qui voulait rester toute sa vie un enfant, le syndrome de Peter Pan ne constitue pas une maladie mentale mais un mode de fonctionnement qui, s'il peut être bien vécu, risque de conduire à la dépression ou de poser de sérieux problèmes dans ses relations avec les autres."
source : Doctissimo
Tout comme les syndromes appelés "Cendrillon", "Blanche-neige", "Le vilain petit canard", "La belle et la bête", "Le syndrome de Peter pan" ne serait qu'un "coup marketing " ? C'est l'opinion exprimée par Jean-Pierre Winter, un psychanalyste français, auteur des Errants de la chair, “Ces syndromes “made in USA” sont rassurants mais pas suffisants " :
"Selon vous, ces syndromes sont-ils crédibles ?
C’est d’abord du marketing, des coups éditoriaux qui donnent des noms nouveaux à des symptômes connus. Ça séduit parce que c’est simple. La démarche est très américaine parce que très " psychologisante ", au sens où elle veut toujours tout expliquer, faire des classifications commodes. Les psys anglo-saxons font de votre symptôme votre identité. Ils prennent les gens par la main, ils les rassurent : " Ne t’inquiète pas ma chérie, Cendrillon et des millions de femmes ont déjà vécu ça ! " Ce courant s’inspire directement des archétypes décrits par Jung. Sauf que lui a utilisé la mythologie et les traditions culturelles de nombreux pays, notamment l’Inde et la Chine. Les psys américains, eux, s’inspirent des contes de Perrault et d’Andersen, ou plutôt de leurs adaptations par Disney ! "
* Qu'en dit Jacques Arènes, psychologue, psychanalyste et chroniqueur à La Vie ?
" Dans des sociétés de plus en plus complexes, apparaît le besoin de se recréer des mondes parallèles. Orles films d'animation comme ceux de Disney permettent de s’extraire de la dureté du monde . C'est une des manières dont ces œuvres nous façonnent, même au-delà de l’enfance : grâce à la puissance rassurante de l’imaginaire, les blessures d’une réalité parfois trop fragile – dans sa complexité et sa diversité – et brutale peuvent se recoudre... ce qu'offre rarement la production filmique, souvent marquée par une violence très crue et assumée, pleine de cynisme, ou les séries, même les meilleures, qui portent sur le monde un regard très dur, tout sauf reposant. [...]
De nombreux adultes expriment aujourd’hui le besoin de se réfugier dans une bulle d’enfance . Or, la séparation culturelle étant de moins en moins tranchée entre les âges et les générations, ce rapport à l’enfance est désormais assumé. "
source : “Le dessin animé permet de recoudre les blessures d’une réalité brutale“ / propos recueillis par Yoann Labroux-Satabin - La Vie - 14/12/2016 à 10h59
A lire aussi pour approfondir le sujet : L'enfant dans l'adulte / Sandor Ferenczi ; préface de Simone Korff-Sausse
Le psychanalyste a développé l'idée de la part infantile toujours active dans la vie psychique de l'adulte, idée qui fut révélée par Freud. Il n'a cessé de rechercher, enfouie dans l'adulte, la part d'enfant blessée, afin de la traiter au cours de la séance.
* La sociologie a également étudié le sujet. Voici quelques études qui pourront vous intéresser.
Dans son livre intitulé La France en culottes courtes, Robert Ebguy, analyse cette régression des trentenaires. C'est un sociologue, sémiologue, directeur de recherches au Centre International de Communication Avancée, spécialiste des études de styles de vie et tendances sociales.
Autre document intéressant : Ces adultes qui ne grandiront jamais : petite sociologie des grands enfants / Rémy Oudghiri
Un décryptage des postures et des motivations des adultes qui se comportent de plus en plus comme de grands enfants. Etude sociologique d'un phénomène que l'auteur fait remonter aux années 1960.
" Des érudits de l’École de Francfort tels que Herbert Marcuse, Erich Fromm et d’autres théoriciens critiques suggèrent que, comme les individus, une société peut aussi souffrir d’un arrêt de développement. Selon ces théoriciens, l’incapacité des adultes à atteindre la maturité affective, sociale ou cognitive n’est pas due à des insuffisances individuelles.
Mais en fait, cette incapacité a été construite sciemment sur le plan social.
En visite en Amérique en 1946, l’anthropologue français Claude Lévi-Strauss a commenté les traits attachants et infantiles de la culture américaine.
Il a particulièrement remarqué l’adulation enfantine du baseball par les adultes, leur approche passionnée des voitures ressemblant à des jouets et le temps qu’ils ont consacré à leurs passe-temps."
source : L’infantilisation de la culture occidentale / Houssen Moshinaly · 3 août 2018
Quelques ouvrages pour aller plus loin :
- Infantilisation générale - Ravages, n° 2 - publ. Les Amoureux des genres humains - 25 mai 2009
- Harry Potter ou l’anti-Peter Pan / Isabelle Cani
- Le syndrome de Peter Pan : ces hommes qui ont refusé de grandir / Dan Kiley ; trad. de l'américain par Jean Duriau
- L'infantilisation des adultes expliquée aux grands / Audrey Chauvet - 20 minutes - 08/04/15
* Notons toutefois que les films d'animation ne sont pas forcément destinés à la jeunesse. Beaucoup s'adressent uniquement aux adultes. Vous en trouverez quelques exemples dans cet article : Pourquoi les adultes aiment-ils encore regarder des dessins animés ?.
Le cinéma d'animation peut même être considéré comme créateur d’œuvres artistiques à part entière, au même titre qu'un film de cinéma.
"dans les pays anglo-saxons par exemple, cela fait des années que l’on considère l’animation, sous toutes ses formes (cinéma, audiovisuelle), comme un objet d’intérêt au même titre que toutes les autres formes de cinéma, et qu’on l’étudie à l’université au même titre que les films du répertoire. "
source : inrocks
Pour développer ce sujet :
- Le cinéma d’animation : une essence poétique ? / Marion Poirson-Dechonne
- Esthétique du cinéma d'animation [Livre] / Georges Sifianos
- Les expériences du dessin dans le cinéma d'animation [Livre] / sous la direction de Patrick Barrès et Serge Verny
- Le cinéma d'animation [Livre] : techniques, esthétiques, imaginaires / Sébastien Denis
Bonne journée.
Tel Michel Onfray qui s'indigne devant ces adultes à trottinette, certains pensent que la société s'infantilise. « Plus personne n’est adulte aujourd’hui » nous dit-il.
On assisterait également à une juvénilisation croissante de la culture. Le marché du film d'animation américain mais également français se porte bien.
" En 2017, les films d'animation représentent 31,0 millions d’entrées (16,3 % des entrées des films inédits) en France !
Au niveau international, la France se place juste après les Etats-Unis en totalisant presque 10% des entrées de films d'animation au niveau mondial. D'ailleurs, l’animation concentre 40 % des ventes de programmes audiovisuels français en 2016."
source : AFCA
A lire aussi :
- La filière française de production de dessins animés sur un nuage / Laurent Marcaillou - Les Echos | Le 08/09/2017
- Le marché de l’animation en 2017 / Les études du CNC - juin 2018
De quoi parle-t-on ? Une pathologie clinique ? Une dérive de notre société qui aurait tendance à s'infantiliser ? Ou de l'émergence d'un style artistique à part entière ?
* Les psychiatres américains ont défini le "
" Baptisé ainsi par le psychiatre américain Dan Kiley, en référence au petit garçon qui voulait rester toute sa vie un enfant, le syndrome de Peter Pan ne constitue pas une maladie mentale mais un mode de fonctionnement qui, s'il peut être bien vécu, risque de conduire à la dépression ou de poser de sérieux problèmes dans ses relations avec les autres."
source : Doctissimo
Tout comme les syndromes appelés "Cendrillon", "Blanche-neige", "Le vilain petit canard", "La belle et la bête", "Le syndrome de Peter pan" ne serait qu'un "
"
C’est d’abord du marketing, des coups éditoriaux qui donnent des noms nouveaux à des symptômes connus. Ça séduit parce que c’est simple. La démarche est très américaine parce que très " psychologisante ", au sens où elle veut toujours tout expliquer, faire des classifications commodes. Les psys anglo-saxons font de votre symptôme votre identité. Ils prennent les gens par la main, ils les rassurent : " Ne t’inquiète pas ma chérie, Cendrillon et des millions de femmes ont déjà vécu ça ! " Ce courant s’inspire directement des archétypes décrits par Jung. Sauf que lui a utilisé la mythologie et les traditions culturelles de nombreux pays, notamment l’Inde et la Chine. Les psys américains, eux, s’inspirent des contes de Perrault et d’Andersen, ou plutôt de leurs adaptations par Disney ! "
* Qu'en dit Jacques Arènes, psychologue, psychanalyste et chroniqueur à La Vie ?
" Dans des sociétés de plus en plus complexes, apparaît le besoin de se recréer des mondes parallèles. Or
source : “Le dessin animé permet de recoudre les blessures d’une réalité brutale“ / propos recueillis par Yoann Labroux-Satabin - La Vie - 14/12/2016 à 10h59
A lire aussi pour approfondir le sujet : L'enfant dans l'adulte / Sandor Ferenczi ; préface de Simone Korff-Sausse
Le psychanalyste a développé l'idée de la part infantile toujours active dans la vie psychique de l'adulte, idée qui fut révélée par Freud. Il n'a cessé de rechercher, enfouie dans l'adulte, la part d'enfant blessée, afin de la traiter au cours de la séance.
* La sociologie a également étudié le sujet. Voici quelques études qui pourront vous intéresser.
Dans son livre intitulé La France en culottes courtes, Robert Ebguy, analyse cette régression des trentenaires. C'est un sociologue, sémiologue, directeur de recherches au Centre International de Communication Avancée, spécialiste des études de styles de vie et tendances sociales.
Autre document intéressant : Ces adultes qui ne grandiront jamais : petite sociologie des grands enfants / Rémy Oudghiri
Un décryptage des postures et des motivations des adultes qui se comportent de plus en plus comme de grands enfants. Etude sociologique d'un phénomène que l'auteur fait remonter aux années 1960.
" Des érudits de l’École de Francfort tels que Herbert Marcuse, Erich Fromm et d’autres théoriciens critiques suggèrent que, comme les individus, une société peut aussi souffrir d’un arrêt de développement. Selon ces théoriciens, l’incapacité des adultes à atteindre la maturité affective, sociale ou cognitive n’est pas due à des insuffisances individuelles.
Mais en fait, cette incapacité a été construite sciemment sur le plan social.
En visite en Amérique en 1946, l’anthropologue français Claude Lévi-Strauss a commenté les traits attachants et infantiles de la culture américaine.
Il a particulièrement remarqué l’adulation enfantine du baseball par les adultes, leur approche passionnée des voitures ressemblant à des jouets et le temps qu’ils ont consacré à leurs passe-temps."
source : L’infantilisation de la culture occidentale / Houssen Moshinaly · 3 août 2018
Quelques ouvrages pour aller plus loin :
- Infantilisation générale - Ravages, n° 2 - publ. Les Amoureux des genres humains - 25 mai 2009
- Harry Potter ou l’anti-Peter Pan / Isabelle Cani
- Le syndrome de Peter Pan : ces hommes qui ont refusé de grandir / Dan Kiley ; trad. de l'américain par Jean Duriau
- L'infantilisation des adultes expliquée aux grands / Audrey Chauvet - 20 minutes - 08/04/15
* Notons toutefois que les films d'animation ne sont pas forcément destinés à la jeunesse. Beaucoup s'adressent uniquement aux adultes. Vous en trouverez quelques exemples dans cet article : Pourquoi les adultes aiment-ils encore regarder des dessins animés ?.
Le cinéma d'animation peut même être considéré comme créateur d’œuvres artistiques à part entière, au même titre qu'un film de cinéma.
"dans les pays anglo-saxons par exemple, cela fait des années que l’on considère l’animation, sous toutes ses formes (cinéma, audiovisuelle), comme un objet d’intérêt au même titre que toutes les autres formes de cinéma, et qu’on l’étudie à l’université au même titre que les films du répertoire. "
source : inrocks
Pour développer ce sujet :
- Le cinéma d’animation : une essence poétique ? / Marion Poirson-Dechonne
- Esthétique du cinéma d'animation [Livre] / Georges Sifianos
- Les expériences du dessin dans le cinéma d'animation [Livre] / sous la direction de Patrick Barrès et Serge Verny
- Le cinéma d'animation [Livre] : techniques, esthétiques, imaginaires / Sébastien Denis
Bonne journée.
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