Question d'origine :
Quelle est l'origine culturelle exacte de la fondue ?
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 28/02/2019 à 13h57
Bonjour,
Aussi surprenant que cela puisse paraître, ce plat traditionnel fut déjà décrit par Homère dans l’Iliade, évoquant « un plat de fromage de chèvre râpé fondu mêlé de vin ». Le cuisinier François Pierre de la Varenne, en 1651, rédige la recette du "ramequin de fromage", un mélange de fromage fondu et de vin. Mais c'est en 1699 qu'un manuel zurichois parle d'un plat correspondant à la fondue «moitié-moitié» d'aujourd'hui.
Voici quelques extraits d'articles qui mentionnent cela :
" La plus ancienne description de la fondue figure dans une œuvre antique et illustre.L'Iliade de Homère , composée entre le IX et le VIIIe siècle av. J.-C., parle en effet d'un «breuvage» qui ressemble étrangement à la fondue au vin consommée couramment sous nos latitudes. La mention du mets intervient au chant XI de L'Iliade. La guerre de Troie fait rage. Agamemnon, roi de Mycènes et d'Argos, a réussi à reprendre l'avantage sur les Troyens. Au cours de la bataille, le valeureux Machaon, médecin de son état, est blessé par Pâris, l'ennemi troyen. Nestor, l'un des alliés d'Agamemnon, emmène alors Machaon vers un campement, où les deux hommes sont accueillis par la captive Hécamédée, qui leur prépare une boisson roborative. La belle esclave saisit une lourde coupe dotée de quatre anses, dans laquelle elle mélange «à du vin de Pramnos du fromage de chèvre, qu'elle-même a râpé sur une râpe en bronze, puis y répand la fleur d'une blanche farine. La femme les invite à boire ce breuvage, aussitôt qu'il est prêt. Ils boivent tous deux, chassant l'aride soif, puis se plaisent à converser l'un avec l'autre.»
En Suisse, les sources concernant les origines de la fondue sont rares . «Il est difficile de trouver des renseignements précis sur les habitudes culinaires de nos ancêtres», dit François de Capitani, historien de la gastronomie et conservateur du Musée national suisse à Prangins. Auteur d'un livre* sur la cuisine vaudoise aux XVIIIe et XIXe siècles, il souligne que le savoir culinaire s'est transmis oralement de mère en fille, la lecture et l'écriture étant réservées aux affaires de l'Eglise et de l'Etat. Les premiers recueils de recettes apparaissent seulement au XVIIe siècle. Et la première trace de la fondue figure dans un manuel zurichois de 1699 . Comme l'explique François de Capitani, cette recette, intitulée «Pour cuire le fromage avec du vin», correspond plus ou moins à la fondue «moitié-moitié» d'aujourd'hui. Mais selon le conservateur, l'histoire de la fondue reste un peu mystérieuse. La mythique soupe au lait de Kappel, qui réconcilia en 1529 les catholiques et les protestants autour d'une même marmite, est-elle une fondue ancestrale? D'aucuns le pensent, mais certains historiens mettent en doute la véracité de cet épisode. Quoi qu'il en soit, cette soupe au lait fait partie de la conscience nationale helvétique et la fondue servie lors des actuelles manifestations patriotiques serait une réminiscence de cet événement.
Même les Savoyards en conviennent: l'origine de la fondue est helvétique. Née sur les alpages suisses, cette spécialité s'est ensuite diffusée dans l'Arc alpin. C'est pourquoi on en trouve des traces en Savoie et dans le Piémont. Marie-Thérèse Hermann, mère de famille savoyarde et auteure d'un livre sur la cuisine paysanne de sa région, se souvient: «Avant-guerre, on ne faisait pas de fondue en Savoie. C'était alors un plat de luxe, que nous avaient fait connaître les Genevois. La Savoie ne revendique pas l'origine de la fondue.» Le cuisinier Patrice Dard - le fils de Frédéric, alias San Antonio - n'hésite pas à attribuer l'alpha et l'oméga de ce plat à la Suisse. Selon lui, même la fondue à la viande dite «bourguignonne» est née en Helvétie, et les appellations régionales françaises de la fondue ne sont que des récupérations de recettes suisses.
Dans le tome VII du Glossaire des patois de la Suisse romande, un long article - ô bonheur - est consacré à la fondue. Selon la notice,«le mot figure dans les dictionnaires français dès le XIXe siècle, mais son origine suisse n'a guère été contestée par la lexicographie». Mais avant de devenir, aux XIXe et XXe siècles, un mets à la mode, la fondue ne semblait pas être réellement intégrée dans la culture gastronomique locale. «Si l'usage du fromage fondu dans l'alimentation est bien connu depuis le Moyen Age, il ne semble pas que la fondue ait désigné anciennement une préparation alimentaire spécifique; aucune attestation dans cette acception n'a été retrouvée avant le milieu du XVIIIe siècle», explique la notice. Le sens étymologique de ce terme, qui est le participe passé substantivé du verbe fondre, semble avoir englobé autrefois tous les mets préparés à partir de fromage fondu. Ainsi, la raclette a vraisemblablement été considérée dans le passé comme une fondue, du moins dans certaines régions. Dans son Dictionnaire universel de cuisine pratique, paru en 1903, Joseph Favre mentionne quelques variétés de ce plat. Parmi elles, «la fondue à la valaisanne», dont il donne une recette datée de 1824, et qui n'est autre que celle de la raclette au feu de bois telle qu'on la sert aujourd'hui en Valais.
Hormis la recette zurichoise de 1699, les plus anciennes attestations de la fondue comme mets spécifique s'appliquent à un plat d'oeufs brouillés avec du fromage.En 1735, le chef français Vincent la Chapelle publie Le Cuisinier moderne, un livre dans lequel il décrit une recette composée d'oeufs brouillés et de fromage fondu aux truffes fraîches. Anthelme Brillat-Savarin a contribué à rendre célèbre cette sorte de fondue dont la recette fait aujourd'hui sourire . Dans son livre Physiologie du goût, publié en 1825, il s'attarde au moins à deux reprises sur ce plat qu'il affectionne. «La fondue est originaire de la Suisse, affirme-t-il. Ce n'est autre chose que des oeufs brouillés au fromage, dans certaines proportions que le temps et l'expérience ont révélées. [...] C'est un mets sain, savoureux, appétissant, de prompte confection, et partant toujours prêt à faire face à l'arrivée de quelques convives inattendus.»
[...]
La présentation de la fondue dans un récipient commun dans lequel chacun plonge un morceau de pain piqué au bout d'une fourchette est d'origine récente. Le Glossaire des patois de la Suisse romande remarque que «cette manière de faire a conféré à ce plat un fort caractère de convivialité, et sa popularité dès la fin du XIXe siècle dans toute la Suisse romande […] l'a élevé au rang de repas national, souvent servi lors de commémorations patriotiques et autres». [...]
L'essor de la fondue «moitié-moitié» telle que nous la mangeons aujourd'hui a été tributaire de la diffusion de nouveaux instruments auparavant inconnus. Ce n'est sans doute pas un hasard si les deux plus anciennes recettes connues de fondues au vin, l'une neuchâteloise et l'autre genevoise, datent de la seconde moitié du XIXe siècle. Le succès de cette fondue a été tel qu'au début du XXe siècle, la «moitié-moitié» a conquis pratiquement toute la Suisse romande, à l'exception des cantons de Fribourg et du Valais, dans lesquels de vieilles recettes résistent à l'air du temps. "
source : Avant les Suisses, les Grecs de L'Iliade mélangeaient déjà le fromage et le vin / Patricia Briel - Le Temps, no. 2013 - Opinions, vendredi 6 août 2004
" En 1651,Pierre de La Varenne (1618-1678), dans son ouvrage Le Cuisinier françois (1651), décrit la recette du « ramequin de fromage », un mélange à base de ramequin, petit fromage sec produit sur les hauteurs de Saint-Rambert-en-Bugey (dans le Jura méridional), fondu avec du beurre et des oignons dans du vin blanc. Le cuisinier dijonnais - qui officie pour le marquis d'Uxelles, gouverneur de Chalon-sur-Saône - préfère, aux saveurs épicées typiques des temps médiévaux, le goût authentique des aliments. Car, en fondant, le fromage libère des saveurs fruitées qui n'ont pas besoin d'être masquées. Le ramequin est à la fois le contenu, le contenant et son résultat - puisqu'il désigne la casserole où cuit le fromage, le fromage lui-même et, en patois, le fromage fondu.
Si l'on suit la logique, la fondue savoyarde devrait plutôt s'appeler fondue du Jura... Mais le Bugey est arraché par Henri IV à la souveraineté de Charles-Emmanuel de Savoie en 1601, tout comme les provinces savoyardes de la rive droite du Rhône, à l'exception de la Valteline. Les annales rapportent qu'en 1705 François de Madot est nommé évêque de Belley. Ses administrés l'accueillent en lui servant un festin de fondue auquel il fait grand honneur et qu'il s'empresse de servir à son tour dans la capitale et à Chalon lorsqu'il y est nommé évêque en 1711.Du côté suisse, on aime aussi faire fondre dans du vin les productions laitières locales, gruyère et vacherin, puisqu'en 1699 un livre, édité à Zurich, en vante les qualités gustatives. Il conseille d'attraper le gruyère fondu avec un bout de pain piqué à une fourchette. "
source : La fondue savoyarde / Historia, no. 814 - mercredi 1 octobre 2014 378 mots, p. 70
" La fondue n'est pas une invention de chef. Elle n'est pas non plus le résultat d'un ratage culinaire d'une quelconque demoiselle Fondu. Ni celui d'une improvisation de ménagère savoyarde impécunieuse obligée de rogner sur les croûtes pour avoir de quoi en casser une petite de temps à autre. D'un point de vue historique, les spécialistes fixent largement l'époque de l'apparition de la fondue telle que nous la connaissonsau courant du XVIIIe siècle avec pour toile de fond celle des nappes des familles savoyardes aisées. On appelait alors ce plat « crème de fromage » et on le dégustait avec des croûtons dorés dans du beurre. La fondue serait donc un plat de riches préparé en faisant fondre ensemble dans un mélange de vin blanc et de kirsch (non, pas fantaisie !) plusieurs fromages dont le gruyère, sans lequel aucune fondue ne mérite ce nom. "
source :Fondue, à ne pas prendre à la légère / Pierre LEONFORTE - Le Figaro, no. 17569 - samedi 3 février 2001 1181 mots, p. 16
L'histoire ne dit qui, le premier, fit tomber son morceau de pain dedans...
Quelques livres de la Bibliothèque municipale de Lyon sur la fondue.
Bon appétit !
Aussi surprenant que cela puisse paraître, ce plat traditionnel fut déjà décrit par Homère dans l’Iliade, évoquant « un plat de fromage de chèvre râpé fondu mêlé de vin ». Le cuisinier François Pierre de la Varenne, en 1651, rédige la recette du "ramequin de fromage", un mélange de fromage fondu et de vin. Mais c'est en 1699 qu'un manuel zurichois parle d'un plat correspondant à la fondue «moitié-moitié» d'aujourd'hui.
Voici quelques extraits d'articles qui mentionnent cela :
" La plus ancienne description de la fondue figure dans une œuvre antique et illustre.
Dans le tome VII du Glossaire des patois de la Suisse romande, un long article - ô bonheur - est consacré à la fondue. Selon la notice,
Hormis la recette zurichoise de 1699, les plus anciennes attestations de la fondue comme mets spécifique s'appliquent à un plat d'oeufs brouillés avec du fromage.
[...]
La présentation de la fondue dans un récipient commun dans lequel chacun plonge un morceau de pain piqué au bout d'une fourchette est d'origine récente. Le Glossaire des patois de la Suisse romande remarque que «cette manière de faire a conféré à ce plat un fort caractère de convivialité, et sa popularité dès la fin du XIXe siècle dans toute la Suisse romande […] l'a élevé au rang de repas national, souvent servi lors de commémorations patriotiques et autres». [...]
L'essor de la fondue «moitié-moitié» telle que nous la mangeons aujourd'hui a été tributaire de la diffusion de nouveaux instruments auparavant inconnus. Ce n'est sans doute pas un hasard si les deux plus anciennes recettes connues de fondues au vin, l'une neuchâteloise et l'autre genevoise, datent de la seconde moitié du XIXe siècle. Le succès de cette fondue a été tel qu'au début du XXe siècle, la «moitié-moitié» a conquis pratiquement toute la Suisse romande, à l'exception des cantons de Fribourg et du Valais, dans lesquels de vieilles recettes résistent à l'air du temps. "
source : Avant les Suisses, les Grecs de L'Iliade mélangeaient déjà le fromage et le vin / Patricia Briel - Le Temps, no. 2013 - Opinions, vendredi 6 août 2004
" En 1651,
Si l'on suit la logique, la fondue savoyarde devrait plutôt s'appeler fondue du Jura... Mais le Bugey est arraché par Henri IV à la souveraineté de Charles-Emmanuel de Savoie en 1601, tout comme les provinces savoyardes de la rive droite du Rhône, à l'exception de la Valteline. Les annales rapportent qu'en 1705 François de Madot est nommé évêque de Belley. Ses administrés l'accueillent en lui servant un festin de fondue auquel il fait grand honneur et qu'il s'empresse de servir à son tour dans la capitale et à Chalon lorsqu'il y est nommé évêque en 1711.
source : La fondue savoyarde / Historia, no. 814 - mercredi 1 octobre 2014 378 mots, p. 70
" La fondue n'est pas une invention de chef. Elle n'est pas non plus le résultat d'un ratage culinaire d'une quelconque demoiselle Fondu. Ni celui d'une improvisation de ménagère savoyarde impécunieuse obligée de rogner sur les croûtes pour avoir de quoi en casser une petite de temps à autre. D'un point de vue historique, les spécialistes fixent largement l'époque de l'apparition de la fondue telle que nous la connaissons
source :
L'histoire ne dit qui, le premier, fit tomber son morceau de pain dedans...
Quelques livres de la Bibliothèque municipale de Lyon sur la fondue.
Bon appétit !
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