Plats / recettes créées pour des raisons économiques
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 12/02/2019 à 13h15
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Question d'origine :
Bonjour, je suis à la recherche de plats / recettes francais ou internationaux qui ont été créé uniquement dans un but économique, je prend pour exemple le cas du risotto au parmesan qui a été inventé par Massimo Bottura après qu'un tremblement de terre ai eu lieu en Italie dans la région de Parme.
Il a ainsi pu écouler l'ensemble de la production de meules de Parmesan abîmées par le tremblement de terre, en incitant les chefs du monde entier à intégrer du parmesan dans la recette initiale du risotto !
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Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 13/02/2019 à 15h08
Bonjour,
L’histoire de la cuisine fourmille d’anecdotes savoureuses ou émouvantes comme celle de Massimo Bottura. Et nombreuses sont les préparations culinaires que nous consommons tous les jours et qui furent, à l’origine, des plats de pauvres. Pour en découvrir quelques-unes, nous allons nous munir d’un précieux outil : le Dictionnaire gourmand de Marie-Hélène Baylac :
« La pizza est née à Naples. Ce morceau de pâte à pain, recouvert d’un peu de saindoux et d’herbes puis de tomates (partir du 18è siècle) et cuit au four, était une nourriture de pauvres, pire une nourriture plus ou moins ragoûtante, voire dangereuse pour la santé. La Naples surpeuplée du 19è siècle était régulièrement frappée par le choléra qui décimait les familles entassées dans de minuscules logements où il était impossible de faire la cuisine, si bien qu’elles se nourrissaient aux éventaires des marchands ambulants. Pas un Italien du nord n’aurait voulu en manger ! Il fallut attendre les années 1960 pour que la péninsule l’adopte et prenne conscience qu’elle faisait partie de son patrimoine culinaire. » La pizza fait même figure d’indicateur économique : d’après les Impression de voyage d’Alexandre Dumas, « c’est le thermomètre gastronomique du marché : elle hausse ou baisse de prix selon le cours des ingrédients sus-désignés, selon l’abondance ou la disette de l’année. Quand la pizza aux poissons est à un demi-grain, c’est que la pêche a été bonne ; quand la pizza à l’huile est à un grain c’est que la récolte a été mauvaise. »
Cette insécurité alimentaire était partagée par les pêcheurs du midi, à l’origine d’un des fleurons de la gastronomie française : « A l’origine, la bouillabaisse était une simple soupe réalisée par les pêcheurs de Marseille en faisant cuire les poissons invendus »
L’histoire de la crème de marrons est assez semblable à celle du risotto parmesan, sur fond de crise :
« En 1882, l’Ardèche est en pleine crise : l’invention de la soie artificielle réduit au chômage les ouvriers des élevages de vers à soie. C’est alors qu’un enfant du pays, Clément Faugier, a l’idée de mettre à profit une autre ressource locale, les châtaigniers, en se lançant dans la fabrication intensive de marrons glacés. Il crée à Privas la première fabrique. Avec les brisures résultant de la fabrication, il invente la crème de marrons. C’est un succès, y compris à l’exportation qu’il développe en mettant au point un emballage en « papier d’argent » (une fine feuille d’étain) qui sera aussi bientôt adoptée par les chocolatiers. »
Les questionnements économiques ont également présidé à l’invention de la margarine, à la fin du second Empire :
« Nous sommes à la veille de la Commune lorsque la Société d’alimentation reconnaît que « l’aliment le plus essentiel après le pain, le plus indispensable à la table comme à la cuisine, [est] le beurre ». Or, à l’époque, il est cher, souvent défectueux, insuffisant à la demande et hors de portée de la classe ouvrière. Il est urgent de fabriquer « un beurre frais nutritif, pur de tout élément hostile à la santé publique ou nuisible à sa propre consommation ».
Ce sera l’œuvre de M. Mège-Mouriès, chimiste, spécialiste du blé, qui va émulsionner de la graisse de bœuf fractionnée de lait et d’eau pour en sortir « un véritable beurre propre à remplacer le beurre ordinaire de lait ». Il est autorisé à la vente en 1872 sous le nom de « margarine », et il faudra attendre la fin de la guerre de 1870 pour sa diffusion en France et dans le monde. Une réussite 100 % française. »
(Source : lemonde.fr)
Mais s’il est une préparation culinaire qui porte aujourd’hui encore la marque des conditions économiques qui ont amené à sa création, c’est bien le gigot de bitume – voir cet article de ouest-france.fr :
« C'est une tradition dans le BTP, le secteur du bâtiment et des travaux publics. Le repas autour d'un gigot cuit dans du bitume marque la fin d'un chantier. « Une fois l'étanchéité d'une toiture terminée, il reste toujours du goudron, explique Benjamin Barberot. Les étancheurs (ouvriers chargés de l'étanchéité) préparent alors un gigot. Ils le cuisent en le plongeant dans le fondoir qui leur a servi à fondre le bitume. » C'est comme une cuisson à l'étouffée. Le goudron en plus.
Visuellement, c'est quelque chose ! L'odeur, c'est pas mal non plus. De grosses bulles noirâtres éclatent à la surface. Impossible de savoir qu'au fond de ce drôle de barbecue (le fondoir), dans une masse de bitume fumant à plus de 220 degrés, cuisent de doux gigots... Quel est le truc pour avoir d'aussi délicieuses tranches d'agneau ? Les épices embaument la viande. Nulle vilaine odeur de goudron ne perturbe le plaisir gustatif. »
L’histoire de la cuisine abonde en anecdotes de ce type, pas toujours, hélas, vérifiables ; c’est pourquoi nous nous en tiendrons là. Pour aller plus loin, nous vous proposons de consulter quelques ouvrages, livres historiques et de recettes correspondant aux exigences économiques d’aujourd’hui, c’est-à-dire « anti-gaspi " :
- Dictionnaire gourmand [Livre] / de Marie-Hélène Baylac
- Idées reçues sur les cuisines du monde [Livre]
- Délices d'initiés [Livre] : dictionnaire rock, historique et politique de la gastronomie / Emmanuel Rubin avec Aymeric Mantoux
-Je cuisine les restes et je fais des économies [Livre] / Céline Mennetrier ; photographies d'Aurélie Jeannette
-Cuisine anti-gaspi [Livre] : 40 recettes pour accommoder les restes / Judith Clavel ; photographies de Catherine Madani
-100 recettes anti-gaspi [Livre] : pour transformer les restes en bons petits plats / Martine Lizambard ; photographies et stylisme de Bernard Radvane ; illustrations de Stéphanie Brepson
Bonnes lectures et bonne dégustation.
L’histoire de la cuisine fourmille d’anecdotes savoureuses ou émouvantes comme celle de Massimo Bottura. Et nombreuses sont les préparations culinaires que nous consommons tous les jours et qui furent, à l’origine, des plats de pauvres. Pour en découvrir quelques-unes, nous allons nous munir d’un précieux outil : le Dictionnaire gourmand de Marie-Hélène Baylac :
« La pizza est née à Naples. Ce morceau de pâte à pain, recouvert d’un peu de saindoux et d’herbes puis de tomates (partir du 18è siècle) et cuit au four, était une nourriture de pauvres, pire une nourriture plus ou moins ragoûtante, voire dangereuse pour la santé. La Naples surpeuplée du 19è siècle était régulièrement frappée par le choléra qui décimait les familles entassées dans de minuscules logements où il était impossible de faire la cuisine, si bien qu’elles se nourrissaient aux éventaires des marchands ambulants. Pas un Italien du nord n’aurait voulu en manger ! Il fallut attendre les années 1960 pour que la péninsule l’adopte et prenne conscience qu’elle faisait partie de son patrimoine culinaire. » La pizza fait même figure d’indicateur économique : d’après les Impression de voyage d’Alexandre Dumas, « c’est le thermomètre gastronomique du marché : elle hausse ou baisse de prix selon le cours des ingrédients sus-désignés, selon l’abondance ou la disette de l’année. Quand la pizza aux poissons est à un demi-grain, c’est que la pêche a été bonne ; quand la pizza à l’huile est à un grain c’est que la récolte a été mauvaise. »
Cette insécurité alimentaire était partagée par les pêcheurs du midi, à l’origine d’un des fleurons de la gastronomie française : « A l’origine, la bouillabaisse était une simple soupe réalisée par les pêcheurs de Marseille en faisant cuire les poissons invendus »
L’histoire de la crème de marrons est assez semblable à celle du risotto parmesan, sur fond de crise :
« En 1882, l’Ardèche est en pleine crise : l’invention de la soie artificielle réduit au chômage les ouvriers des élevages de vers à soie. C’est alors qu’un enfant du pays, Clément Faugier, a l’idée de mettre à profit une autre ressource locale, les châtaigniers, en se lançant dans la fabrication intensive de marrons glacés. Il crée à Privas la première fabrique. Avec les brisures résultant de la fabrication, il invente la crème de marrons. C’est un succès, y compris à l’exportation qu’il développe en mettant au point un emballage en « papier d’argent » (une fine feuille d’étain) qui sera aussi bientôt adoptée par les chocolatiers. »
Les questionnements économiques ont également présidé à l’invention de la margarine, à la fin du second Empire :
« Nous sommes à la veille de la Commune lorsque la Société d’alimentation reconnaît que « l’aliment le plus essentiel après le pain, le plus indispensable à la table comme à la cuisine, [est] le beurre ». Or, à l’époque, il est cher, souvent défectueux, insuffisant à la demande et hors de portée de la classe ouvrière. Il est urgent de fabriquer « un beurre frais nutritif, pur de tout élément hostile à la santé publique ou nuisible à sa propre consommation ».
Ce sera l’œuvre de M. Mège-Mouriès, chimiste, spécialiste du blé, qui va émulsionner de la graisse de bœuf fractionnée de lait et d’eau pour en sortir « un véritable beurre propre à remplacer le beurre ordinaire de lait ». Il est autorisé à la vente en 1872 sous le nom de « margarine », et il faudra attendre la fin de la guerre de 1870 pour sa diffusion en France et dans le monde. Une réussite 100 % française. »
(Source : lemonde.fr)
Mais s’il est une préparation culinaire qui porte aujourd’hui encore la marque des conditions économiques qui ont amené à sa création, c’est bien le gigot de bitume – voir cet article de ouest-france.fr :
« C'est une tradition dans le BTP, le secteur du bâtiment et des travaux publics. Le repas autour d'un gigot cuit dans du bitume marque la fin d'un chantier. « Une fois l'étanchéité d'une toiture terminée, il reste toujours du goudron, explique Benjamin Barberot. Les étancheurs (ouvriers chargés de l'étanchéité) préparent alors un gigot. Ils le cuisent en le plongeant dans le fondoir qui leur a servi à fondre le bitume. » C'est comme une cuisson à l'étouffée. Le goudron en plus.
Visuellement, c'est quelque chose ! L'odeur, c'est pas mal non plus. De grosses bulles noirâtres éclatent à la surface. Impossible de savoir qu'au fond de ce drôle de barbecue (le fondoir), dans une masse de bitume fumant à plus de 220 degrés, cuisent de doux gigots... Quel est le truc pour avoir d'aussi délicieuses tranches d'agneau ? Les épices embaument la viande. Nulle vilaine odeur de goudron ne perturbe le plaisir gustatif. »
L’histoire de la cuisine abonde en anecdotes de ce type, pas toujours, hélas, vérifiables ; c’est pourquoi nous nous en tiendrons là. Pour aller plus loin, nous vous proposons de consulter quelques ouvrages, livres historiques et de recettes correspondant aux exigences économiques d’aujourd’hui, c’est-à-dire « anti-gaspi " :
- Dictionnaire gourmand [Livre] / de Marie-Hélène Baylac
- Idées reçues sur les cuisines du monde [Livre]
- Délices d'initiés [Livre] : dictionnaire rock, historique et politique de la gastronomie / Emmanuel Rubin avec Aymeric Mantoux
-Je cuisine les restes et je fais des économies [Livre] / Céline Mennetrier ; photographies d'Aurélie Jeannette
-Cuisine anti-gaspi [Livre] : 40 recettes pour accommoder les restes / Judith Clavel ; photographies de Catherine Madani
-100 recettes anti-gaspi [Livre] : pour transformer les restes en bons petits plats / Martine Lizambard ; photographies et stylisme de Bernard Radvane ; illustrations de Stéphanie Brepson
Bonnes lectures et bonne dégustation.
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