Question d'origine :
Bonjour,
Est-ce vrai que dans la Rome antique, les boulangers étaient des fonctionnaires chargés de distribuer du pain gratuit ou moins cher aux nécessiteux ? Si oui, comment cela s'est-il mis en place et pourquoi cela s'est-il arrêté ?
Merci d'avance !
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 11/02/2019 à 14h26
Bonjour,
Peut-être faites-vous allusion auxlois frumentaires de l'époque républicaine ?
Ce sont des distributions mensuelles de blé, d’abord à prix réduit, puis gratuites, à la population citoyenne de Rome, que l’on suit de l’époque deCaius Gracchus à une date avancée de l’Empire . Elles étaient organisées à des fin politiques, afin de contenir les révoltes populaires liées à des épisodes de famine : "on jetait du pain au peuple comme le gâteau dans la gueule de Cerbère, pour l’empêcher de mordre“.
"ANNONE
Il faut chercher à l'époque républicaine l'origine de cette institution. Par tradition, l'État romain a pour fonction d'assurer un ordre public que peuvent troubler diverses circonstances, notamment la famine ; il assure donc la police des marchés et veille à ce que les étals soient garnis, tâche qui incombe aux édiles. Cette responsabilité, limitée à Rome au début, s'étendit avec la conquête à l'Italie puis aux provinces (les magistrats municipaux s'en chargèrent). La crise de ~ 133 à ~ 31 donna une nouvelle importance à ce rôle du pouvoir. En effet, de nombreux citoyens ruinés vinrent grossir les rangs des chômeurs de la capitale. D'autre part, les ambitieux cherchaient à se constituer des clientèles en pratiquant la générosité (évergétisme). C'est ainsi que des lois frumentaires organisèrent gratuitement ou à bas prix des distributions de blé . Pompée se fit confier pour cinq ans, à partir de ~ 57, une « mission d'approvisionnement » (cura annonae), et César fit dénombrer cent cinquante mille assistés ; en ~ 44, le sort de ces malheureux fut confié à deux « édiles du blé » (aediles ceriales).
Dans ce domaine, Auguste réalisa une œuvre considérable. Des difficultés, en ~ 22, lui firent prendre une première cura annonae : il se chargea de faire acheter, transporter et distribuer du blé à bas prix. Ces mesures n'empêchèrent pas une nouvelle crise en 6 après J.-C. Mais des « préfets pour la distribution des céréales » sont attestés dès son époque, et les plus anciens « préfets de l'annone » connus datent de 14 (la création de ce poste remonte sans doute à 8 apr. J.-C.). L'attitude de l'empereur s'explique vraisemblablement par des motifs politiques : une famine risque toujours de provoquer des troubles qui le renverseront ; le peuple de Rome, jouisseur et conscient de cette situation, n'exige plus que « du pain et des jeux » (Juvénal).
L'État fournit donc des céréales puis d'autres denrées, qu'il prélève à titre d'impôt (dîme sicilienne), qu'il réquisitionne ou achète. "
source : Yann LE BOHEC, « ANNONE », Encyclopædia Universalis
D'après Catherine Virlouvet, les historiens mentionnent toujours les quatre ou cinq lois et propositions de lois concernant les frumentationes sur lesquelles on est le moins mal renseigné, mais on connaît en faitdix lois ou propositions de lois sur le sujet en soixante-cinq ans . Vous les retrouverez mentionnez et répertoriées dans un tableau au sein de l'article suivant que nous vous invitons à consulter :
Virlouvet Catherine. Les lois frumentaires d'époque républicaine. In: Le Ravitaillement en blé de Rome et des centres urbains des débuts de la République jusqu'au Haut-Empire. Actes du colloque international de Naples, 14-16 Février 1991. Rome : École Française de Rome, 1994. pp. 11-29. (Publications de l'École française de Rome, 196)
Vous pouvez aussi consulter cet article sur open edition.
Pour approfondir le sujet :
- Carrié Jean-Michel. Les distributions alimentaires dans les cités de l'empire romain tardif. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité, tome 87, n°2. 1975. pp. 995-1101.
- Gonzales Antonio. Trajan, Pline et l’appauvrissement de la plèbe à Rome. In: Dialogues d'histoire ancienne. Supplément n°1, 2005. Hommage à Pierre Lévêque. pp. 53-67.
- Virlouvet Catherine. La topographie des distributions frumentaires avant la création de la Porticus Minucia fruentaria. In: L'Urbs : espace urbain et histoire (Ier siècle av. J.-C. - IIIe siècle ap. J.-C.). Actes du colloque international de Rome (8-12 mai 1985) Rome : École Française de Rome, 1987. pp. 175-189. (Publications de l'École française de Rome, 98)
- Bats Maria. Les réserves alimentaires des cités d’Italie, entre autosubsistance et ravitaillement de Rome, des débuts de la République à l’instauration du Principat. In: Cahiers du Centre Gustave Glotz, 20, 2009. pp. 281-325.
- Carrié Jean-Michel. Les distributions alimentaires dans les cités de l'empire romain tardif. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité, tome 87, n°2. 1975. pp. 995-1101.
- Pavis d'Escurac Henriette. La préfecture de l'annone, service administratif impérial d'Auguste à Constantin. Rome : Ecole française de Rome, 1976. 493 p. (Bibliothèque des Écoles françaises d'Athènes et de Rome, 226)
- Famines et émeutes à Rome [Livre] : des origines de la République à la mort de Néron / Catherine Virlouvet
Bonne journée.
Peut-être faites-vous allusion aux
Ce sont des distributions mensuelles de blé, d’abord à prix réduit, puis gratuites, à la population citoyenne de Rome, que l’on suit de l’époque de
"
Il faut chercher à l'époque républicaine l'origine de cette institution. Par tradition, l'État romain a pour fonction d'
Dans ce domaine, Auguste réalisa une œuvre considérable. Des difficultés, en ~ 22, lui firent prendre une première cura annonae : il se chargea de faire acheter, transporter et distribuer du blé à bas prix. Ces mesures n'empêchèrent pas une nouvelle crise en 6 après J.-C. Mais des « préfets pour la distribution des céréales » sont attestés dès son époque, et les plus anciens « préfets de l'annone » connus datent de 14 (la création de ce poste remonte sans doute à 8 apr. J.-C.). L'attitude de l'empereur s'explique vraisemblablement par des motifs politiques : une famine risque toujours de provoquer des troubles qui le renverseront ; le peuple de Rome, jouisseur et conscient de cette situation, n'exige plus que « du pain et des jeux » (Juvénal).
L'État fournit donc des céréales puis d'autres denrées, qu'il prélève à titre d'impôt (dîme sicilienne), qu'il réquisitionne ou achète. "
source : Yann LE BOHEC, « ANNONE », Encyclopædia Universalis
D'après Catherine Virlouvet, les historiens mentionnent toujours les quatre ou cinq lois et propositions de lois concernant les frumentationes sur lesquelles on est le moins mal renseigné, mais on connaît en fait
Virlouvet Catherine. Les lois frumentaires d'époque républicaine. In: Le Ravitaillement en blé de Rome et des centres urbains des débuts de la République jusqu'au Haut-Empire. Actes du colloque international de Naples, 14-16 Février 1991. Rome : École Française de Rome, 1994. pp. 11-29. (Publications de l'École française de Rome, 196)
Vous pouvez aussi consulter cet article sur open edition.
- Carrié Jean-Michel. Les distributions alimentaires dans les cités de l'empire romain tardif. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité, tome 87, n°2. 1975. pp. 995-1101.
- Gonzales Antonio. Trajan, Pline et l’appauvrissement de la plèbe à Rome. In: Dialogues d'histoire ancienne. Supplément n°1, 2005. Hommage à Pierre Lévêque. pp. 53-67.
- Virlouvet Catherine. La topographie des distributions frumentaires avant la création de la Porticus Minucia fruentaria. In: L'Urbs : espace urbain et histoire (Ier siècle av. J.-C. - IIIe siècle ap. J.-C.). Actes du colloque international de Rome (8-12 mai 1985) Rome : École Française de Rome, 1987. pp. 175-189. (Publications de l'École française de Rome, 98)
- Bats Maria. Les réserves alimentaires des cités d’Italie, entre autosubsistance et ravitaillement de Rome, des débuts de la République à l’instauration du Principat. In: Cahiers du Centre Gustave Glotz, 20, 2009. pp. 281-325.
- Carrié Jean-Michel. Les distributions alimentaires dans les cités de l'empire romain tardif. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Antiquité, tome 87, n°2. 1975. pp. 995-1101.
- Pavis d'Escurac Henriette. La préfecture de l'annone, service administratif impérial d'Auguste à Constantin. Rome : Ecole française de Rome, 1976. 493 p. (Bibliothèque des Écoles françaises d'Athènes et de Rome, 226)
- Famines et émeutes à Rome [Livre] : des origines de la République à la mort de Néron / Catherine Virlouvet
Bonne journée.
DANS NOS COLLECTIONS :
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter