Question d'origine :
Bonjour, au cours de certaines discussions mes amis et moi-même avons remarqué que les définitions d'"illettrisme" et "illettré" s'éloignaient parfois de la définition avancée par ATD Quart monde et utilisée par le gouvernement ("On parle d’illettrisme pour des personnes qui, après avoir été scolarisées en France, n’ont pas acquis une maîtrise suffisante de la lecture, de l’écriture, du calcul, des compétences de base, pour être autonomes dans les situations simples de la vie courante. Il s’agit pour elles de réapprendre, de renouer avec la culture de l’écrit, avec les formations de base, dans le cadre de la politique de lutte contre l’illettrisme.", site de l'ANLCI). Mais alors, pourquoi donc les définitions d'"illettrisme" et/ou d'"illettré" que l'on peut retrouver sur des dictionnaires d'une certaine notoriété s'apparentent-elles plus à la définition d'"analphabétisme" / "analphabète" ?
En l'occurrence, je vais prendre les exemples de l'académie française et du dictionnaire Larousse :
- Illettrisme, Académie française : "Dérivé d'illettré.
Incapacité à lire un texte simple en le comprenant.", malgré un article donnant une autre définition (SALLENAVE, Danièle. Illettrisme et enseignement du français, publié le 12 février 2013, retranscription d'une communication prononcée le 20 décembre 2012)
- Illettré, Académie française : "Qui ne connaît pas ses lettres, qui ne sait ni lire ni écrire" ; "Qui est incapable de lire un texte simple en le comprenant" ; "Qui manque de culture, spécialement de culture littéraire"
- Illettrisme, Larousse en ligne : "État de ceux qui, ayant appris à lire et à écrire, en ont complètement perdu la pratique."
- Illettré, Larousse en ligne : "Qui ne sait ni lire ni écrire ; analphabète." ; "Vieux. Qui n'a pas de culture, qui n'a pas reçu d'instruction."
Merci de votre aide !
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 04/02/2019 à 14h45
Bonjour,
A notre connaissance, seule la définition l’illettré sur larousse.fr donne le mot comme un synonyme d’analphabète. Mais le même site, à l’entrée « illettrisme » pose une distinction claire entre les deux :
« État de ceux qui, ayant appris à lire et à écrire, en ont complètement perdu la pratique.
[la lutte contre l'illettrisme] s'est développée à la fin des années 1970. Selon la définition du Groupe permanent de lutte contre l'illettrisme, celui-ci désigne la situation dans laquelle se trouvent « des personnes de plus de 16 ans, ayant été scolarisées, et ne maîtrisant pas suffisamment l'écrit pour faire face aux exigences minimales requises dans leur vie professionnelle, sociale, culturelle, personnelle ».Il se distingue ainsi de l'analphabétisme – lequel induit l'absence totale d'alphabétisation. »
D’ailleurs, la version papier du Larousse que nous avons consultée se borne à définir un illettré comme une personne « Qui ne sait ni lire ni écrire ; Qui n'a pas de culture, qui n'a pas reçu d'instruction. » Sans suggérer d’équivalence avec l’analphabétisme.
Ainsi, dans la définition de l’Académie, ne pas connaître « ses lettres » nous semble à prendre dans le sens de « ses belles-lettres », à savoir une culture littéraire minimale. Ce qui rejoint la définition donnée par le très auguste Littré, « Qui n’est point lettré, qui n’a point de connaissances en littérature » et du Dictionnaire culturel en langue française [Livre] / (Robert) : « qui n’est pas lettré, « qui n’a aucune connaissance des Belles-Lettres » (Trévoux) »
Pourtant, dans le langage courant, les deux mots sont parfois employés indifféremment, comme en témoigne une page du site projet-voltaire.fr :
« Les origines respectives d’« illettré » et d’« analphabète » nous éclairent immédiatement sur leur sens. Commençons par décomposer « analphabète » en « an-alpha-bête ». On reconnaît bien le préfixe privatif a- (sous la forme an-, car placé devant une voyelle), et les deux premières lettres grecques alpha et bêta. Littéralement donc, un analphabète « ne sait ni alpha ni bêta », c’est-à-dire « ni A ni B ». Et si l’on ignore les deux premières lettres de l’alphabet, alors foncièrement, on ne peut ni lire ni écrire…
À présent, intéressons-nous à « illettré », qui est composé du préfixe privatif in- (devenu il- devant « l ») et de « lettré ». À l’origine, on qualifiait de « lettré » celui qui étudiait les lettres, c’est-à-dire les livres. Par conséquent, l’illettré méconnaissait la littérature, et, par extension, n’était pas cultivé.Avec le temps, ce sens s’est affaibli, et « illettré » a fini par signifier « qui ne sait ni lire ni écrire », devenant un parfait synonyme d’« analphabète » ! »
Mais cette souplesse de l'usage n'empêche pas que, d’un point de vue institutionnel, et dans un souci d’efficacité de la lutte contre deux handicaps ne réclamant pas les mêmes actions, l’illettrisme est l’analphabétisme sont clairement distingués. Mais, comme nous vous le disions dans une précédente réponse, la France fait plutôt figure d’exception en la matière :
« La lutte contre l’illettrisme mobilise aussi bien les associations que le système éducatif, les services publics, ou les entreprises. Pour en savoir plus sur les actions mises en œuvre, et comment contribuer, nous vous invitons donc à visiter les sites de l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme, d’Eduscol (qui propose aussi plusieurs liens vers ses partenaires pour agir contre l’illettrisme), ou encore d’associations comme la Croix-Rouge, qui forme chaque année 150 bénévoles investis dans les actions de lutte contre l’illettrisme.
Au niveau international, l’Anlci explique qu’il est difficile de trouver des chiffres comparables à ceux produits en France, car rares sont les pays qui font la distinction entre illettrisme et analphabétisme. Vous pouvez cependant consulter sur son site plusieurs enquêtes de l’OCDE. Vous trouverez aussi des informations sur la lutte contre l’illettrisme au niveau international dans la rubrique actualités du site de l’Anlci. »
Bonne journée.
A notre connaissance, seule la définition l’illettré sur larousse.fr donne le mot comme un synonyme d’analphabète. Mais le même site, à l’entrée « illettrisme » pose une distinction claire entre les deux :
« État de ceux qui, ayant appris à lire et à écrire, en ont complètement perdu la pratique.
[la lutte contre l'illettrisme] s'est développée à la fin des années 1970. Selon la définition du Groupe permanent de lutte contre l'illettrisme, celui-ci désigne la situation dans laquelle se trouvent « des personnes de plus de 16 ans, ayant été scolarisées, et ne maîtrisant pas suffisamment l'écrit pour faire face aux exigences minimales requises dans leur vie professionnelle, sociale, culturelle, personnelle ».
D’ailleurs, la version papier du Larousse que nous avons consultée se borne à définir un illettré comme une personne « Qui ne sait ni lire ni écrire ; Qui n'a pas de culture, qui n'a pas reçu d'instruction. » Sans suggérer d’équivalence avec l’analphabétisme.
Ainsi, dans la définition de l’Académie, ne pas connaître « ses lettres » nous semble à prendre dans le sens de « ses belles-lettres », à savoir une culture littéraire minimale. Ce qui rejoint la définition donnée par le très auguste Littré, « Qui n’est point lettré, qui n’a point de connaissances en littérature » et du Dictionnaire culturel en langue française [Livre] / (Robert) : « qui n’est pas lettré, « qui n’a aucune connaissance des Belles-Lettres » (Trévoux) »
Pourtant, dans le langage courant, les deux mots sont parfois employés indifféremment, comme en témoigne une page du site projet-voltaire.fr :
« Les origines respectives d’« illettré » et d’« analphabète » nous éclairent immédiatement sur leur sens. Commençons par décomposer « analphabète » en « an-alpha-bête ». On reconnaît bien le préfixe privatif a- (sous la forme an-, car placé devant une voyelle), et les deux premières lettres grecques alpha et bêta. Littéralement donc, un analphabète « ne sait ni alpha ni bêta », c’est-à-dire « ni A ni B ». Et si l’on ignore les deux premières lettres de l’alphabet, alors foncièrement, on ne peut ni lire ni écrire…
À présent, intéressons-nous à « illettré », qui est composé du préfixe privatif in- (devenu il- devant « l ») et de « lettré ». À l’origine, on qualifiait de « lettré » celui qui étudiait les lettres, c’est-à-dire les livres. Par conséquent, l’illettré méconnaissait la littérature, et, par extension, n’était pas cultivé.
Mais cette souplesse de l'usage n'empêche pas que, d’un point de vue institutionnel, et dans un souci d’efficacité de la lutte contre deux handicaps ne réclamant pas les mêmes actions, l’illettrisme est l’analphabétisme sont clairement distingués. Mais, comme nous vous le disions dans une précédente réponse, la France fait plutôt figure d’exception en la matière :
« La lutte contre l’illettrisme mobilise aussi bien les associations que le système éducatif, les services publics, ou les entreprises. Pour en savoir plus sur les actions mises en œuvre, et comment contribuer, nous vous invitons donc à visiter les sites de l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme, d’Eduscol (qui propose aussi plusieurs liens vers ses partenaires pour agir contre l’illettrisme), ou encore d’associations comme la Croix-Rouge, qui forme chaque année 150 bénévoles investis dans les actions de lutte contre l’illettrisme.
Au niveau international, l’Anlci explique qu’il est difficile de trouver des chiffres comparables à ceux produits en France, car rares sont les pays qui font la distinction entre illettrisme et analphabétisme. Vous pouvez cependant consulter sur son site plusieurs enquêtes de l’OCDE. Vous trouverez aussi des informations sur la lutte contre l’illettrisme au niveau international dans la rubrique actualités du site de l’Anlci. »
Bonne journée.
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