Question d'origine :
Est ce que la loi du 10 aout 1927 article 1 paragraphe 2est de statut de droit commun ?
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 14/11/2018 à 14h41
Bonjour,
Nous ne sommes pas sûrs de comprendre votre question : voulez-vous savoir si le principe selon lequel est français « Tout enfant légitime né en France d'un père qui y est lui-même né », donnait automatiquement à ses bénéficiaires un statut de droit commun, dans le contexte de la colonisation algérienne ?
Rappelons tout d’abord que le texte de la loi précise :
“Art. 15. — La présente loi est applicable à l'Algérie, ainsi qu'aux colonies de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion. Continueront toutefois, en ce qui concerne les indigènes algériens, à recevoir leur application, même sur le territoire métropolitain, le sénatus-consulte du 14 juillet
1865 et la loi du 4 février 1919. »
(Source : gallica.bnf.fr)
L’article de Patrick Weil, « Le statut des musulmans en Algérie coloniale », paru en 2005 dans la revue Histoire de la justice (consultable en bibliothèque sur cairn.info), retrace l’évolution de l’accès à la nationalité française dans les ex-départements algériens. On y apprend que le sénatus-consulte de 1865, promulgué par Napoléon, était une première tentative pour permettre à certains sujets algériens d’acquérir, individuellement, la citoyenneté française :
« Inspiré par Ismaël Urbain, ce sénatus-consulte est promulgué par Napoléon III dans le cadre de sa politique du « royaume arabe. Il permet aux indigènes musulmans et israélites de demander à « jouir des droits de citoyen français » ». Mais les conditions d’accès à la nationalité sont si exigeantes que la mesure n’aura que peu d’effet. Certes, la législation évolue encore dans les décennies suivantes : « […] par la loi du 26 juin 1889, l’enfant né en Algérie d’un parent déjà né en Algérie est français à la naissance comme l’enfant né en France d’un parent né en France. Si les parents sont nés à l’étranger, l’enfant sera français à sa majorité, sauf renonciation dans l’année qui la suit. » Mais ce droit à la naturalisation ne concerne que les étrangers, italiens et espagnols principalement :
«Restent à l’écart de ce processus « d’intégration », qui a déjà concerné les juifs algériens en 1870, les « indigènes musulmans » , qui constituent la majorité de la population de l’Algérie. La loi de 1889 les déclasse même explicitement : à la demande des élus d’Algérie, la loi de 1889 ne s’applique pas aux indigènes musulmans. En matière de « naturalisation » des musulmans, la « doctrine » des colons d’Algérie est qu’il faut en rester à la porte étroite de la naturalisation individuelle ouverte par le sénatus-consulte de 1865. »
La loi de 1919, échoue à apporter une réponse au problème :
« La loi du 4 février 1919 crée bien une nouvelle procédure d’accès à la pleine nationalité, mais elle fixe de telles conditions qu’elle apparaît à certains égards plus restrictive que le sénatus-consulte de 1865 . Outre la monogamie ou le célibat, la résidence de deux ans dans la même commune est exigée. Le procureur de la République ou le gouverneur peut aussi s’opposer à la demande « pour cause d’indignité », c’est-à-dire, comme le dit Ageron, « pour fait de non-convenance ». L’effet de la loi est donc faible. Entre 1919 et 1930, 1204 musulmans sont naturalisés, pour 1547 demandes. »
Si la loi de 1927 concerne donc bien l’acquisition automatique de la nationalité de droit commun , elle ne concerne pas les sujets « musulmans » … qui continueront d’être contraint de demander individuellement leur naturalisation, au cours d’un parcours semé d’embûches et de mauvaises volontés administratives :
« Le parcours d’un postulant était parsemé d’obstacles : le dossier devait être constitué de huit pièces différentes – dont un certificat de bonne vie et de bonnes mœurs – ; l’indigène devait se présenter devant le maire (décret du 21 avril 1866) ou l’autorité administrative et « déclarer abandonner son statut personnel pour être régi par lois civiles et politiques françaises » ; une enquête administrative était effectuée sur la moralité, les antécédents et surtout la situation familiale du demandeur ; enfin, le dossier était transmis avec l’avis du préfet et celui du gouverneur au ministère de la Justice, puis au Conseil d’État, avant qu’un décret ne soit signé par le président de la République.
La procédure de naturalisation était d’autant plus difficile que l’administration locale faisait preuve d’une rare bonne volonté. Tous les témoignages concordent en ce sens. M. Gastu, ancien député d’Alger, rapporte que quelques semaines après la révolte de 1871, dans les premiers jours du mois de septembre, « la population de Bougie vit avec surprise arriver de nombreux groupes indigènes appartenant à diverses tribus qui se rendaient auprès du juge de paix, pour remplir les formalités relatives à la naturalisation. Que fit l’autorité militaire de qui ces indigènes relevaient ? Elle mit en prison les plus influents, de manière à intimider les autres. Puis les cavaliers du Bureau arabe furent envoyés dans toutes les directions pour enjoindre aux Kabyles que la contagion aurait gagnés de rester chez eux. Malgré tout, 82 Kabyles réussirent à se faire inscrire à la mairie et obtinrent du juge de paix les actes de notoriété nécessaires pour l’obtention des demandes. Ce succès partiel ne laissa pas d’encourager la tribu des Beni-Mohali qui, tout entière, se rendit à Bougie pour remplir les formalités. Mais telle fut l’attitude de l’autorité militaire, qu’elle dut renoncer à tout projet de ce genre » »
Bonne journée.
Nous ne sommes pas sûrs de comprendre votre question : voulez-vous savoir si le principe selon lequel est français «
Rappelons tout d’abord que le texte de la loi précise :
“Art. 15. — La présente loi est applicable à l'Algérie, ainsi qu'aux colonies de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion. Continueront toutefois, en ce qui concerne les indigènes algériens, à recevoir leur application, même sur le territoire métropolitain, le sénatus-consulte du 14 juillet
1865 et la loi du 4 février 1919. »
(Source : gallica.bnf.fr)
L’article de Patrick Weil, « Le statut des musulmans en Algérie coloniale », paru en 2005 dans la revue Histoire de la justice (consultable en bibliothèque sur cairn.info), retrace l’évolution de l’accès à la nationalité française dans les ex-départements algériens. On y apprend que le sénatus-consulte de 1865, promulgué par Napoléon, était une première tentative pour permettre à certains sujets algériens d’acquérir, individuellement, la citoyenneté française :
« Inspiré par Ismaël Urbain, ce sénatus-consulte est promulgué par Napoléon III dans le cadre de sa politique du « royaume arabe. Il permet aux indigènes musulmans et israélites de demander à « jouir des droits de citoyen français » ». Mais les conditions d’accès à la nationalité sont si exigeantes que la mesure n’aura que peu d’effet. Certes, la législation évolue encore dans les décennies suivantes : « […] par la loi du 26 juin 1889, l’enfant né en Algérie d’un parent déjà né en Algérie est français à la naissance comme l’enfant né en France d’un parent né en France. Si les parents sont nés à l’étranger, l’enfant sera français à sa majorité, sauf renonciation dans l’année qui la suit. » Mais ce droit à la naturalisation ne concerne que les étrangers, italiens et espagnols principalement :
«
La loi de 1919, échoue à apporter une réponse au problème :
« La loi du 4 février 1919 crée bien une nouvelle procédure d’accès à la pleine nationalité, mais
Si
« Le parcours d’un postulant était parsemé d’obstacles : le dossier devait être constitué de huit pièces différentes – dont un certificat de bonne vie et de bonnes mœurs – ; l’indigène devait se présenter devant le maire (décret du 21 avril 1866) ou l’autorité administrative et « déclarer abandonner son statut personnel pour être régi par lois civiles et politiques françaises » ; une enquête administrative était effectuée sur la moralité, les antécédents et surtout la situation familiale du demandeur ; enfin, le dossier était transmis avec l’avis du préfet et celui du gouverneur au ministère de la Justice, puis au Conseil d’État, avant qu’un décret ne soit signé par le président de la République.
La procédure de naturalisation était d’autant plus difficile que l’administration locale faisait preuve d’une rare bonne volonté. Tous les témoignages concordent en ce sens. M. Gastu, ancien député d’Alger, rapporte que quelques semaines après la révolte de 1871, dans les premiers jours du mois de septembre, « la population de Bougie vit avec surprise arriver de nombreux groupes indigènes appartenant à diverses tribus qui se rendaient auprès du juge de paix, pour remplir les formalités relatives à la naturalisation. Que fit l’autorité militaire de qui ces indigènes relevaient ? Elle mit en prison les plus influents, de manière à intimider les autres. Puis les cavaliers du Bureau arabe furent envoyés dans toutes les directions pour enjoindre aux Kabyles que la contagion aurait gagnés de rester chez eux. Malgré tout, 82 Kabyles réussirent à se faire inscrire à la mairie et obtinrent du juge de paix les actes de notoriété nécessaires pour l’obtention des demandes. Ce succès partiel ne laissa pas d’encourager la tribu des Beni-Mohali qui, tout entière, se rendit à Bougie pour remplir les formalités. Mais telle fut l’attitude de l’autorité militaire, qu’elle dut renoncer à tout projet de ce genre » »
Bonne journée.
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