Question d'origine :
S.V.P.
Qu'est ce exactement, qu'une enquète de personnalité, en matière judiciaire, mais pas seulement ? En quelles circonstances se font-elles , et que comprennent t-elles ? merci.
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 06/11/2018 à 13h22
Bonjour,
Le Service de Contrôle Judiciaire et d’Enquêtes explique ce qu’est une Enquête de personnalité :
« Au travers du témoignage de deux de nos enquêteurs, François enquêteur chevronné depuis dix ans au SCJE, diplômé de l’école de criminologie Jean Constant de Liège et Pauline, titulaire d’un master en sciences criminelles à Lille, nous souhaitons faire un focus sur l’enquête de personnalité.
Nous avons commencé à les interroger sur leur définition de l’Enquête de Personnalité. Pour eux, l’EP permet de « résumer l’histoire de la personne, sa trajectoire de vie » afin de permettre aux magistrats de mieux connaitre la personne présente devant eux . En effet, l’Enquête de Personnalité est obligatoire lors d’une procédure criminelle mais peut aussi être demandée pour une procédure correctionnelle . L’enquêteur aura ainsi pour mission de réaliser l’enquête personnalité pour le magistrat instructeur mais également de devoir, la présenter devant la cour d’assises une à deux années plus tard.
Nous avons cherché à comprendre le déroulé d’une enquête de personnalité. Cette dernière se divise en trois parties bien distinctes.
L’entretien
Tout d’abord l’entretien de la personne mise en cause. Il est effectué en maison d’arrêt en cas de placement en détention provisoire ou à domicile. Les faits ne sont pas abordés, suite à la décision de la Cour de Cassation d’avril 2016, seul compte le parcours de vie du mis en cause, qui doit être dépeint avec neutralité et précision. Pour Pauline, les entretiens reposent sur une « confiance » réciproque afin de pouvoir obtenir le maximum de renseignements. François souligne également qu’au-delà de la confiance, l’explication de la mesure ainsi que « la transparence totale » quant à son déroulé sont les garants d’un entretien réussi et riche en informations. L’entretien demande à l’enquêteur de s’adapter au milieu dans lequel il se déroule afin de toujours pouvoir retranscrire le plus fidèlement possible, les antécédents de la personne.
L’enquêteur ne dispose dans ce temps de l’entretien que des dires du mis en cause, il doit dès lors en obtenir également d’autres informations lui permettant de se mettre en relation avec l’entourage familial, amical et professionnel du mis en cause afin d’assurer la seconde phase de l’enquête : Les vérifications.
Dans le cadre d’une enquête de personnalité, le mis en examen peut être entendu sur sa situation matérielle, familiale et sociale hors la présence de son avocat et sans que ce dernier ait été appelé, mais non sur les faits qui lui sont reprochés.
L’enquête sur la personnalité du mis en examen est régie par les articles 81, alinéa 6, et D. 16 du code de procédure pénale. Cette enquête a « pour objet de fournir à l’autorité judiciaire, sous une forme objective et sans en tirer de conclusion touchant à l’affaire en cours, des éléments d’appréciation sur le mode de vie passé et présent de la personne mise en examen ». L’article D. 16 ajoute que le dossier de personnalité « ne saurait avoir pour but la recherche des preuves de la culpabilité ». C’était précisément le problème qui se posait en l’espèce.
Les vérifications
Les vérifications permettent de confirmer les propos de l’intéressé mais également d’étayer l’ensemble des informations présentent dans l’enquête. Il s’agit donc d’une phase particulièrement importante dans l’élaboration de l’enquête de personnalité. L’enquêteur devra donc se tourner vers l’ensemble des proches du mis en cause.
Lors de sa rédaction les enquêteurs procèdent à de multiples vérifications. Pour Pauline il s’agit de « fouiller, travailler son enquête » dans un véritable souci « d’éclairer sur le parcours de vie ». François insiste également sur la nécessaire neutralité de l’écrit, « on ne doit pas prendre parti et toujours proposer un écrit totalement neutre ».
L’enquêteur en plus des qualités « d’écoute et d’attention » soulevées par Pauline se doit donc d’être également « impartial et objectif dans ses écrits ».
La rédaction
La troisième phase permet de synthétiser l’ensemble des informations obtenues. Il s’agit de la rédaction. . ;»
Par ailleurs, la base de données Dalloz – consultable dans toutes les bibliothèques de Lyon – définit ce qu’est une enquête à savoir « une pièce du dossier qui sera transmis aux magistrats, elle se doit de reprendre l’ensemble des informations, avis transmis par l’intéressé, ses proches et les différentes structures entendues .
Pour cet écrit, chaque mot est important et doit être utilisé de manière la plus judicieuse possible afin de décrire au mieux l’histoire de vie et la personnalité du mis en cause».
L’étude « manière de procéder du juge d’instruction » par Christina Guéry et Pierre Chambon, disponible sur Dalloz, décrit exactement la procédure :
« Section 2 - Enquête sur la personnalité
132.21. Pratique ancienne.
Sous le régime du Code d’instruction criminelle, le juge d’instruction, en matière de crime seulement, effectuait une enquête sur le « curriculum vitae » des inculpés qui réunissait des renseignements sur leur vie passée d’ordre familial, scolaire, social et professionnel. Il chargeait les services de police et de gendarmerie de rechercher comment l’auteur du crime avait été élevé, quels résultats il avait obtenus à l’école, quels emplois il avait occupés… Le passé éclairait ainsi le présent.
132.22. Article 81 du Code de procédure pénale.
Afin de permettre à la juridiction de jugement, par une meilleure connaissance de la personne du prévenu, d’individualiser la peine, l’article 81 du Code de procédure pénale a prescrit au juge d’instruction d’effectuer, en toute matière, tant criminelle que correctionnelle, une enquête sur la personnalité des personnes mises en examen, et d’ordonner leur examen médical ou psychologique, le résultat de ces deux mesures constituant ce que l’on appelle le dossier de personnalité, qui était antérieurement prévu seulement pour les mineurs, par l’article 8 de l’ordonnance du 2 février 1945 (1).
L’alinéa 6 de l’article 81 est ainsi rédigé : « Le juge d’instruction procède ou fait procéder, soit par les officiers de police judiciaire, conformément à l’alinéa 4, soit par toute personne habilitée dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État, à une enquête sur la personnalité des personnes mises en examen, ainsi que sur leur situation matérielle, familiale ou sociale ». Toutefois, en matière de délit, cette enquête est facultative. La loi du 15 juin 2000 a ajouté les dispositions suivantes : « Le juge d’instruction peut également commettre suivant les cas, le service pénitentiaire d’insertion et de probation, le service compétent de la protection judiciaire de la jeunesse ou toute association habilitée en application de l’alinéa qui précède à l’effet de vérifier la situation matérielle, familiale et sociale d’une personne mise en examen et de l’informer sur les mesures propres à favoriser l’insertion sociale de l’intéressée.
Il appartient au magistrat instructeur de préciser dans chaque cas la nature des recherches auxquelles il désire qu’il soit procédé ; la mission ainsi donnée délimite les pouvoirs de l’enquêteur. Pour l’accomplissement de sa mission et dans les limites de la tâche qui lui a été confiée, l’enquêteur effectue, sous sa propre responsabilité son enquête comme il l’entend » (art. C. 171).
Lorsque, en matière correctionnelle, où elle est facultative, le juge d’instruction a à apprécier l’opportunité, d’ordonner une enquête sur la personnalité, il tient compte notamment : du fait que l’intéressé est âgé de moins de vingt-cinq ans ; de sa qualité de récidiviste ; de la nature du délit ; de la possibilité de prononcer la déchéance de l’autorité parentale et enfin de l’éventualité d’une décision de sursis avec mise à l’épreuve ou d’admission au régime de la semi-liberté (C. pr. pén., art. D. 17).
Notes
132.23. Caractère obligatoire.
D’après le texte même de l’article 81 alinéa 6 du Code de procédure pénale, l’enquête de personnalité est obligatoire en matière de crime, et facultative en matière correctionnelle. En effet, après avoir indiqué que le juge d’instruction procède ou fait procéder à une enquête sur la personnalité des personnes mises en examen, le texte ajoute : « Toutefois en matière de délit, cette enquête est facultative ». Cependant, la Cour de cassation a, à plusieurs reprises, jugé que même en matière criminelle, l’enquête sur la personnalité demeure facultative, le juge d’instruction conservant entière sa liberté d’appréciation. « Attendu, dit-elle, que la disposition de l’article 81 alinéa 6 du Code de procédure pénale, qui fait un devoir au juge d’instruction de ne pas se borner à rassembler les preuves de la culpabilité ou de la non-culpabilité de l’inculpé, mais de réunir, dans la mesure du possible, les renseignements qui permettent aux juges de déterminer et mesurer la peine éventuellement applicable, ne déroge pas à la règle fondamentale d’après laquelle les juridictions d’instruction ont le droit et l’obligation de clore leur enquête lorsqu’elles estiment que celle-ci est complète » (1). Le professeur Vouin a vivement critiqué cette jurisprudence, comme allant à l’encontre du vœu du législateur (2). En fait le caractère obligatoire de l’enquête de personnalité cède le pas devant le principe selon lequel le juge peut décider librement du moment où son instruction est terminée. L’arrêt rendu par la chambre criminelle le 4 avril 2007 ne peut s’inscrire dans cette jurisprudence puisque le juge d’instruction avait effectué lui-même cette enquête en procédant à diverses auditions de témoins de moralité (3).
Aujourd’hui, un magistrat qui ne procéderait à aucune enquête de personnalité en matière criminelle verrait sans doute le président de la cour d’assises ordonner un supplément d’information. C’était le cas assez systématiquement lorsque la chambre d’accusation était saisie comme juridiction du second degré en matière criminelle. Désormais, la chambre de l’instruction n’intervient plus que sur appel d’une ordonnance de mise en accusation (C. pr. pén., art. 186, al. 1, mod. par L. 15 juin 2000). La loi du 27 mars 2012 (4) favorise l’attribution prioritaire des enquêtes rapides au secteur privé, le service d’insertion et de probation n’intervenant plus qu’à défaut d’association privée.
L’enquête sur la personnalité n’est pas une expertise au sens des articles 156 et suivants du Code de procédure pénale. Il en résulte que la personne qui a procédé à cette enquête, à l’audience de la cour d’assises, prête le serment des témoins et non le serment des experts, prévu par l’article 168 du même code (5).
Notes
132.24. Interdiction des déclarations sur les faits.
Il résulte des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme, 81 ; alinéa 6, 114 et D. 16 du Code de procédure pénale que, si l’enquêteur désigné par le juge d’instruction pour faire rapport sur la personnalité et la situation matérielle, familiale ou sociale de la personne mise en examen peut, à cette fin, s’entretenir avec celle-ci, hors la présence de son avocat et sans que ce dernier ait été appelé, il ne peut lors de cet entretien recueillir aucune déclaration de l’intéressé sur les faits qui lui sont reprochés (1). Rappelons que l’article D. 16 du Code de procédure pénale indique que « l’enquête sur la personnalité des personnes mises en examen ainsi que sur leur situation matérielle, familiale ou sociale prévue à l’article 81, alinéa 6, du Code de procédure pénale et les examens, notamment médical et médico-psychologique, mentionnés à l’alinéa 7 dudit article, constituent le dossier de personnalité de la personne mise en examen. Ce dossier a pour objet de fournir à l’autorité judiciaire, sous une forme objective et sans en tirer de conclusion touchant à l’affaire en cours, des éléments d’appréciation sur le mode de vie passé et présent de la personne mise en examen. Il ne saurait avoir pour but la recherche des preuves de la culpabilité ». Les magistrats instructeurs doivent donc enjoindre aux enquêteurs de ne pas faire figurer un quelconque discours de l’intéressé sur les faits. Cette interdiction ne touche pas les autres personnes entendues dès lors que le fondement de la décision touche aux garanties assurées dans le cadre d’un interrogatoire, et éludées lors de cet « entretien ».
Notes
Section 3 - Examen médical et psychologique
132.31. Textes.
Aux termes de l’article 81 alinéa 8 du Code de procédure pénale, « le juge d’instruction peut prescrire un examen médical, un examen psychologique ou ordonner toutes mesures utiles ». L’examen médical ou médico-psychologique constituait le second élément du dossier de personnalité de la personne. Le texte parle désormais non plus d’examen médico-psychologique mais d’examen psychologique. La jurisprudence qui précisait que cet examen devait être obligatoirement fait par un médecin, et non par un seul expert psychologue (1), et pouvait être effectué par un seul médecin (2) est désormais obsolète.
Les articles D. 23 à D. 26 du Code de procédure pénale fixent les règles essentielles de l’examen médical et psychologique Ces deux examens constituent des mesures soumises aux règles de l’expertise organisée par les articles 156 à 169 dudit code (C. pr. pén., art. D. 23). Les médecins chargés de ces examens, sont, en principe, choisis sur les listes d’experts établies en application de l’article 157 ; mais le juge d’instruction peut, par décision motivée, choisir en dehors de ces listes des médecins particulièrement qualifiés (C. pr. pén., art. D. 24). La chambre criminelle a confirmé que l’examen médico-psychologique est une expertise au sens des articles 156 et suivants du Code de procédure pénale, et les personnes qui y ont procédé prêtent aux assises le serment des experts (3). Par contre, la cour de Paris a jugé que l’examen médical ordonné en vue de déterminer si l’état de santé de l’inculpé est compatible avec la détention, relève de l’article 81, mais n’est pas une expertise, et qu’il en résulte que l’appel de cet inculpé de l’ordonnance refusant un second examen, n’est pas recevable (4).
Le médecin qui se fait assister dans son examen par d’autres personnes, doit mentionner dans son rapport le nom et la qualité de celles-ci (C. pr. pén., art. D. 25). Ces auxiliaires ne peuvent être choisis par l’expert, mais doivent être désignés par le juge. En tout cas, le médecin psychiatre ne peut choisir lui-même comme auxiliaire un psychologue (5). L’« examen psychologique », qui donne mission notamment d’éclairer le juge « sur les mobiles des faits » et le « comportement de l’inculpé », est une expertise qui porte sur le fond, même si certaines conditions autrefois attachées à ce caractère ont disparu (6). D’une façon générale les dossiers criminels comportent tous une expertise psychiatrique et un examen psychologique de la personne. L’opportunité d’un examen purement médical varie selon les affaires.
Notes
132.32. Autres mesures. Voies de recours.
Dans la première rédaction de l’alinéa 8 de l’article 81 du Code de procédure pénale, on se demandait si l’ordonnance motivée par laquelle le juge d’instruction refusait de prescrire l’examen médical ou médico-psychologique, était susceptible d’appel de la part des parties privées. La jurisprudence avait répondu par la négative, ces examens, bien que soumis aux formes de l’expertise, « constituant une simple faculté laissée à l’appréciation du juge d’instruction, et l’ordonnance que celui-ci était appelé à rendre en la circonstance n’entrant pas dans l’énumération de l’article 136 du même code » (1).
La question est aujourd’hui réglée par les alinéas 9 et 11 de l’article 81, dans sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993. Le juge d’instruction qui entend ne pas faire droit à la demande écrite de l’une des parties tendant à ce que l’un de ces examens soit ordonné, doit dans le délai d’un mois rendre une ordonnance motivée (al. 9), qui est susceptible d’appel (C. pr. pén., art. 186-1, al. 1er). À défaut, la partie peut saisir directement le président de la chambre de l’instruction, qui procède selon les alinéas 3, 4 et 5 alinéa de ce dernier texte (C. pr. pén., art. 81, al. 11).
Le juge d’instruction peut également prendre les autres mesures ajoutées par la loi du 6 juillet 1989 (2) et énumérées par l’alinéa 7 de l’article 81, à l’effet « de vérifier la situation matérielle, familiale et sociale de la personne mise en examen, et de l’informer sur les mesures propres à favoriser son insertion sociale ». Ces diligences sont nécessaires quand il s’agit de placer en détention un majeur de moins de 21 ans, et si la peine encourue n’excède pas cinq ans d’emprisonnement. Il en est de même pour les mineurs (ord. 2 févr. 1945, art. 12).
Notes
132.33. Investigations concernant la victime.
Depuis la loi du 15 juin 2000, le juge d’instruction peut, d’office, sur réquisition du parquet ou à la demande de la partie civile, procéder, conformément à la loi, à tout acte permettant d’apprécier la nature et l’importance des préjudices subis par la victime, ou de recueillir des renseignements sur la personnalité de celle-ci.
Il arrivait déjà que le juge d’instruction réalise ces investigations. Certains pouvaient cependant estimer que la détermination du préjudice de la victime, notamment en ce qui concerne les conséquences civiles des dommages, ne concernait pas l’instruction. Depuis l’entrée en vigueur de ce texte (C. pr. pén., art. 81-1), si ces investigations ne sont pas obligatoires, il est difficile de prétendre qu’elles ne peuvent pas entrer dans la mission du magistrat instructeur. D’autant que l’article 82-1 du Code de procédure pénale permet désormais à la partie civile de demander tout acte utile à la manifestation de la vérité (encore qu’on puisse évidemment interpréter différemment ce que constitue la « vérité »).
Nous vous laissons poursuivre cette lecture.
Le Service de Contrôle Judiciaire et d’Enquêtes explique ce qu’est une Enquête de personnalité :
« Au travers du témoignage de deux de nos enquêteurs, François enquêteur chevronné depuis dix ans au SCJE, diplômé de l’école de criminologie Jean Constant de Liège et Pauline, titulaire d’un master en sciences criminelles à Lille, nous souhaitons faire un focus sur l’enquête de personnalité.
Nous avons commencé à les interroger sur leur définition de l’Enquête de Personnalité. Pour eux, l’EP permet de «
Nous avons cherché à comprendre le déroulé d’une enquête de personnalité. Cette dernière se divise en trois parties bien distinctes.
L’entretien
Tout d’abord l’entretien de la personne mise en cause. Il est effectué en maison d’arrêt en cas de placement en détention provisoire ou à domicile. Les faits ne sont pas abordés, suite à la décision de la Cour de Cassation d’avril 2016, seul compte le parcours de vie du mis en cause, qui doit être dépeint avec neutralité et précision. Pour Pauline, les entretiens reposent sur une « confiance » réciproque afin de pouvoir obtenir le maximum de renseignements. François souligne également qu’au-delà de la confiance, l’explication de la mesure ainsi que « la transparence totale » quant à son déroulé sont les garants d’un entretien réussi et riche en informations. L’entretien demande à l’enquêteur de s’adapter au milieu dans lequel il se déroule afin de toujours pouvoir retranscrire le plus fidèlement possible, les antécédents de la personne.
L’enquêteur ne dispose dans ce temps de l’entretien que des dires du mis en cause, il doit dès lors en obtenir également d’autres informations lui permettant de se mettre en relation avec l’entourage familial, amical et professionnel du mis en cause afin d’assurer la seconde phase de l’enquête : Les vérifications.
Dans le cadre d’une enquête de personnalité, le mis en examen peut être entendu sur sa situation matérielle, familiale et sociale hors la présence de son avocat et sans que ce dernier ait été appelé, mais non sur les faits qui lui sont reprochés.
L’enquête sur la personnalité du mis en examen est régie par les articles 81, alinéa 6, et D. 16 du code de procédure pénale. Cette enquête a « pour objet de fournir à l’autorité judiciaire, sous une forme objective et sans en tirer de conclusion touchant à l’affaire en cours, des éléments d’appréciation sur le mode de vie passé et présent de la personne mise en examen ». L’article D. 16 ajoute que le dossier de personnalité « ne saurait avoir pour but la recherche des preuves de la culpabilité ». C’était précisément le problème qui se posait en l’espèce.
Les vérifications
Les vérifications permettent de confirmer les propos de l’intéressé mais également d’étayer l’ensemble des informations présentent dans l’enquête. Il s’agit donc d’une phase particulièrement importante dans l’élaboration de l’enquête de personnalité. L’enquêteur devra donc se tourner vers l’ensemble des proches du mis en cause.
Lors de sa rédaction les enquêteurs procèdent à de multiples vérifications. Pour Pauline il s’agit de « fouiller, travailler son enquête » dans un véritable souci « d’éclairer sur le parcours de vie ». François insiste également sur la nécessaire neutralité de l’écrit, « on ne doit pas prendre parti et toujours proposer un écrit totalement neutre ».
L’enquêteur en plus des qualités « d’écoute et d’attention » soulevées par Pauline se doit donc d’être également « impartial et objectif dans ses écrits ».
La rédaction
La troisième phase permet de synthétiser l’ensemble des informations obtenues. Il s’agit de la rédaction. . ;»
Par ailleurs, la base de données Dalloz – consultable dans toutes les bibliothèques de Lyon – définit ce qu’est une enquête à savoir «
Pour cet écrit, chaque mot est important et doit être utilisé de manière la plus judicieuse possible afin de décrire au mieux l’histoire de vie et la personnalité du mis en cause».
L’étude « manière de procéder du juge d’instruction » par Christina Guéry et Pierre Chambon, disponible sur Dalloz, décrit exactement la procédure :
« Section 2 - Enquête sur la personnalité
132.21. Pratique ancienne.
Sous le régime du Code d’instruction criminelle, le juge d’instruction, en matière de crime seulement, effectuait une enquête sur le « curriculum vitae » des inculpés qui réunissait des renseignements sur leur vie passée d’ordre familial, scolaire, social et professionnel. Il chargeait les services de police et de gendarmerie de rechercher comment l’auteur du crime avait été élevé, quels résultats il avait obtenus à l’école, quels emplois il avait occupés… Le passé éclairait ainsi le présent.
132.22. Article 81 du Code de procédure pénale.
Afin de permettre à la juridiction de jugement, par une meilleure connaissance de la personne du prévenu, d’individualiser la peine, l’article 81 du Code de procédure pénale a prescrit au juge d’instruction d’effectuer, en toute matière, tant criminelle que correctionnelle, une enquête sur la personnalité des personnes mises en examen, et d’ordonner leur examen médical ou psychologique, le résultat de ces deux mesures constituant ce que l’on appelle le dossier de personnalité, qui était antérieurement prévu seulement pour les mineurs, par l’article 8 de l’ordonnance du 2 février 1945 (1).
L’alinéa 6 de l’article 81 est ainsi rédigé : « Le juge d’instruction procède ou fait procéder, soit par les officiers de police judiciaire, conformément à l’alinéa 4, soit par toute personne habilitée dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État, à une enquête sur la personnalité des personnes mises en examen, ainsi que sur leur situation matérielle, familiale ou sociale ». Toutefois, en matière de délit, cette enquête est facultative. La loi du 15 juin 2000 a ajouté les dispositions suivantes : « Le juge d’instruction peut également commettre suivant les cas, le service pénitentiaire d’insertion et de probation, le service compétent de la protection judiciaire de la jeunesse ou toute association habilitée en application de l’alinéa qui précède à l’effet de vérifier la situation matérielle, familiale et sociale d’une personne mise en examen et de l’informer sur les mesures propres à favoriser l’insertion sociale de l’intéressée.
Il appartient au magistrat instructeur de préciser dans chaque cas la nature des recherches auxquelles il désire qu’il soit procédé ; la mission ainsi donnée délimite les pouvoirs de l’enquêteur. Pour l’accomplissement de sa mission et dans les limites de la tâche qui lui a été confiée, l’enquêteur effectue, sous sa propre responsabilité son enquête comme il l’entend » (art. C. 171).
Lorsque, en matière correctionnelle, où elle est facultative, le juge d’instruction a à apprécier l’opportunité, d’ordonner une enquête sur la personnalité, il tient compte notamment : du fait que l’intéressé est âgé de moins de vingt-cinq ans ; de sa qualité de récidiviste ; de la nature du délit ; de la possibilité de prononcer la déchéance de l’autorité parentale et enfin de l’éventualité d’une décision de sursis avec mise à l’épreuve ou d’admission au régime de la semi-liberté (C. pr. pén., art. D. 17).
Notes
132.23. Caractère obligatoire.
D’après le texte même de l’article 81 alinéa 6 du Code de procédure pénale, l’enquête de personnalité est obligatoire en matière de crime, et facultative en matière correctionnelle. En effet, après avoir indiqué que le juge d’instruction procède ou fait procéder à une enquête sur la personnalité des personnes mises en examen, le texte ajoute : « Toutefois en matière de délit, cette enquête est facultative ». Cependant, la Cour de cassation a, à plusieurs reprises, jugé que même en matière criminelle, l’enquête sur la personnalité demeure facultative, le juge d’instruction conservant entière sa liberté d’appréciation. « Attendu, dit-elle, que la disposition de l’article 81 alinéa 6 du Code de procédure pénale, qui fait un devoir au juge d’instruction de ne pas se borner à rassembler les preuves de la culpabilité ou de la non-culpabilité de l’inculpé, mais de réunir, dans la mesure du possible, les renseignements qui permettent aux juges de déterminer et mesurer la peine éventuellement applicable, ne déroge pas à la règle fondamentale d’après laquelle les juridictions d’instruction ont le droit et l’obligation de clore leur enquête lorsqu’elles estiment que celle-ci est complète » (1). Le professeur Vouin a vivement critiqué cette jurisprudence, comme allant à l’encontre du vœu du législateur (2). En fait le caractère obligatoire de l’enquête de personnalité cède le pas devant le principe selon lequel le juge peut décider librement du moment où son instruction est terminée. L’arrêt rendu par la chambre criminelle le 4 avril 2007 ne peut s’inscrire dans cette jurisprudence puisque le juge d’instruction avait effectué lui-même cette enquête en procédant à diverses auditions de témoins de moralité (3).
Aujourd’hui, un magistrat qui ne procéderait à aucune enquête de personnalité en matière criminelle verrait sans doute le président de la cour d’assises ordonner un supplément d’information. C’était le cas assez systématiquement lorsque la chambre d’accusation était saisie comme juridiction du second degré en matière criminelle. Désormais, la chambre de l’instruction n’intervient plus que sur appel d’une ordonnance de mise en accusation (C. pr. pén., art. 186, al. 1, mod. par L. 15 juin 2000). La loi du 27 mars 2012 (4) favorise l’attribution prioritaire des enquêtes rapides au secteur privé, le service d’insertion et de probation n’intervenant plus qu’à défaut d’association privée.
L’enquête sur la personnalité n’est pas une expertise au sens des articles 156 et suivants du Code de procédure pénale. Il en résulte que la personne qui a procédé à cette enquête, à l’audience de la cour d’assises, prête le serment des témoins et non le serment des experts, prévu par l’article 168 du même code (5).
Notes
132.24. Interdiction des déclarations sur les faits.
Il résulte des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’Homme, 81 ; alinéa 6, 114 et D. 16 du Code de procédure pénale que, si l’enquêteur désigné par le juge d’instruction pour faire rapport sur la personnalité et la situation matérielle, familiale ou sociale de la personne mise en examen peut, à cette fin, s’entretenir avec celle-ci, hors la présence de son avocat et sans que ce dernier ait été appelé, il ne peut lors de cet entretien recueillir aucune déclaration de l’intéressé sur les faits qui lui sont reprochés (1). Rappelons que l’article D. 16 du Code de procédure pénale indique que « l’enquête sur la personnalité des personnes mises en examen ainsi que sur leur situation matérielle, familiale ou sociale prévue à l’article 81, alinéa 6, du Code de procédure pénale et les examens, notamment médical et médico-psychologique, mentionnés à l’alinéa 7 dudit article, constituent le dossier de personnalité de la personne mise en examen. Ce dossier a pour objet de fournir à l’autorité judiciaire, sous une forme objective et sans en tirer de conclusion touchant à l’affaire en cours, des éléments d’appréciation sur le mode de vie passé et présent de la personne mise en examen. Il ne saurait avoir pour but la recherche des preuves de la culpabilité ». Les magistrats instructeurs doivent donc enjoindre aux enquêteurs de ne pas faire figurer un quelconque discours de l’intéressé sur les faits. Cette interdiction ne touche pas les autres personnes entendues dès lors que le fondement de la décision touche aux garanties assurées dans le cadre d’un interrogatoire, et éludées lors de cet « entretien ».
Notes
Section 3 - Examen médical et psychologique
132.31. Textes.
Aux termes de l’article 81 alinéa 8 du Code de procédure pénale, « le juge d’instruction peut prescrire un examen médical, un examen psychologique ou ordonner toutes mesures utiles ». L’examen médical ou médico-psychologique constituait le second élément du dossier de personnalité de la personne. Le texte parle désormais non plus d’examen médico-psychologique mais d’examen psychologique. La jurisprudence qui précisait que cet examen devait être obligatoirement fait par un médecin, et non par un seul expert psychologue (1), et pouvait être effectué par un seul médecin (2) est désormais obsolète.
Les articles D. 23 à D. 26 du Code de procédure pénale fixent les règles essentielles de l’examen médical et psychologique Ces deux examens constituent des mesures soumises aux règles de l’expertise organisée par les articles 156 à 169 dudit code (C. pr. pén., art. D. 23). Les médecins chargés de ces examens, sont, en principe, choisis sur les listes d’experts établies en application de l’article 157 ; mais le juge d’instruction peut, par décision motivée, choisir en dehors de ces listes des médecins particulièrement qualifiés (C. pr. pén., art. D. 24). La chambre criminelle a confirmé que l’examen médico-psychologique est une expertise au sens des articles 156 et suivants du Code de procédure pénale, et les personnes qui y ont procédé prêtent aux assises le serment des experts (3). Par contre, la cour de Paris a jugé que l’examen médical ordonné en vue de déterminer si l’état de santé de l’inculpé est compatible avec la détention, relève de l’article 81, mais n’est pas une expertise, et qu’il en résulte que l’appel de cet inculpé de l’ordonnance refusant un second examen, n’est pas recevable (4).
Le médecin qui se fait assister dans son examen par d’autres personnes, doit mentionner dans son rapport le nom et la qualité de celles-ci (C. pr. pén., art. D. 25). Ces auxiliaires ne peuvent être choisis par l’expert, mais doivent être désignés par le juge. En tout cas, le médecin psychiatre ne peut choisir lui-même comme auxiliaire un psychologue (5). L’« examen psychologique », qui donne mission notamment d’éclairer le juge « sur les mobiles des faits » et le « comportement de l’inculpé », est une expertise qui porte sur le fond, même si certaines conditions autrefois attachées à ce caractère ont disparu (6). D’une façon générale les dossiers criminels comportent tous une expertise psychiatrique et un examen psychologique de la personne. L’opportunité d’un examen purement médical varie selon les affaires.
Notes
132.32. Autres mesures. Voies de recours.
Dans la première rédaction de l’alinéa 8 de l’article 81 du Code de procédure pénale, on se demandait si l’ordonnance motivée par laquelle le juge d’instruction refusait de prescrire l’examen médical ou médico-psychologique, était susceptible d’appel de la part des parties privées. La jurisprudence avait répondu par la négative, ces examens, bien que soumis aux formes de l’expertise, « constituant une simple faculté laissée à l’appréciation du juge d’instruction, et l’ordonnance que celui-ci était appelé à rendre en la circonstance n’entrant pas dans l’énumération de l’article 136 du même code » (1).
La question est aujourd’hui réglée par les alinéas 9 et 11 de l’article 81, dans sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993. Le juge d’instruction qui entend ne pas faire droit à la demande écrite de l’une des parties tendant à ce que l’un de ces examens soit ordonné, doit dans le délai d’un mois rendre une ordonnance motivée (al. 9), qui est susceptible d’appel (C. pr. pén., art. 186-1, al. 1er). À défaut, la partie peut saisir directement le président de la chambre de l’instruction, qui procède selon les alinéas 3, 4 et 5 alinéa de ce dernier texte (C. pr. pén., art. 81, al. 11).
Le juge d’instruction peut également prendre les autres mesures ajoutées par la loi du 6 juillet 1989 (2) et énumérées par l’alinéa 7 de l’article 81, à l’effet « de vérifier la situation matérielle, familiale et sociale de la personne mise en examen, et de l’informer sur les mesures propres à favoriser son insertion sociale ». Ces diligences sont nécessaires quand il s’agit de placer en détention un majeur de moins de 21 ans, et si la peine encourue n’excède pas cinq ans d’emprisonnement. Il en est de même pour les mineurs (ord. 2 févr. 1945, art. 12).
Notes
132.33. Investigations concernant la victime.
Depuis la loi du 15 juin 2000, le juge d’instruction peut, d’office, sur réquisition du parquet ou à la demande de la partie civile, procéder, conformément à la loi, à tout acte permettant d’apprécier la nature et l’importance des préjudices subis par la victime, ou de recueillir des renseignements sur la personnalité de celle-ci.
Il arrivait déjà que le juge d’instruction réalise ces investigations. Certains pouvaient cependant estimer que la détermination du préjudice de la victime, notamment en ce qui concerne les conséquences civiles des dommages, ne concernait pas l’instruction. Depuis l’entrée en vigueur de ce texte (C. pr. pén., art. 81-1), si ces investigations ne sont pas obligatoires, il est difficile de prétendre qu’elles ne peuvent pas entrer dans la mission du magistrat instructeur. D’autant que l’article 82-1 du Code de procédure pénale permet désormais à la partie civile de demander tout acte utile à la manifestation de la vérité (encore qu’on puisse évidemment interpréter différemment ce que constitue la « vérité »).
Nous vous laissons poursuivre cette lecture.
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