La mélancolie de Charles d'Orléans
LANGUES ET LITTÉRATURES
+ DE 2 ANS
Le 08/10/2018 à 15h25
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Question d'origine :
Bonjour, je voudrai savoir comment est-ce que Charles d'Orléans représente la mélancolie des ses poèmes.
Réponse du Guichet
bml_litt
- Département : Langues et Littératures
Le 09/10/2018 à 14h25
Vous nous gâtez avec votre question. Vous n’avez pas choisi le plus joyeux drille de la Folle Epopée de la poésie française.
Et pour cause, à relire la bio express de notre poète, on apprend que Charles d’Orléans perd assez vite son père, assassiné. Pas sympa. Après ça, Bonne D’Armagnac lui court après et ils se marient. Bonne d’Armagnac. Avec un nom pareil, on se dit que le Charles allait tôt fait d’oublier le trépas de papa. Que nenni. Chef de guerre étoilé (mais sans mention au guide Michelin de la Chevalerie), Le Charles se coltine des guerres à répétition. Résultat des courses : désastre à Azincourt, des bottes crottées et 6000 morts. Et Charles est fait prisonnier chez les affreux, lisez : les Anglais. Entre nous soit dit, une rançon fut demandée. Mais on mit 25 ans pour régler la facture. Pas sympa again.
Libéré, celui qu’on n’appela jamais par le sobriquet de Charly, se remaria…et compila 25 années de poésie écrite derrière les barreaux : ballades, rondeaux (*) et rondels. Merci qui ? Merci les Anglais. (*attention, voici le moment je-brille-en-société : mais qu’est-ce donc qu’un rondeau ? Ecrivez : un rondeau est un poème à forme fixe de 13 vers de longueur variable et construit sur deux rimes, avec des répétitions obligées. Il est composé sur trois strophes dont les deux dernières reprennent le tout premier hémistiche. Point).
Charles d’Orléans serait mort dans les années 1460 mais ce qui est certain, c’est qu’il nous a laissé de très beaux textes rassemblés chez Gallimard sous ce titre prometteur : En la forêt de longue attente. 25 ans en effet, c’est long. Surtout si on renâcle au porridge et au carrot cake.
Vous comprenez donc pourquoi notre poète pactise aussi bien avec la mélancolie. Il convoque pêle-mêle :
l’amour frustré autrement dit l’éloignement de la copine (à l’époque on dit une dame et Charles d’Orléans, avec une belle constance, chante dans la tradition courtoise l’éloignement de la femme aimée),
l’amère défaite face à la liberté chérie,
le temps qui passe (et de façon corollaire le topos du vieillissement)
la nostalgie de la patrie
Si on devait écrire quelque chose de plus savant, on dirait que Charles préfigure en quelque sorte le régime de solitude qui accable l’homme moderne : l’homme reste seul sur terre et doit composer avec sa douleur (d’être seul sur terre, si vous avez bien suivi).
Pour aller plus loin, quelques lectures :
Poètes en prison
Mélancolies
Huit questions de poétique
On n’a pas trouvé la Mélancolie pour les nuls mais, en soulevant quelques kleenex, on a retrouvé cet extrait du rondeau 187. On y va :
Le monde est ennuyé de moi
Et moi pareillement de lui ;
Je ne connais rien aujourd’hui qui m’importe, sinon bien peu
Je peux donc, pour ce que je vois, l’appeler ennui sur ennui :
le monde est ennuyé de moi
et moi pareillement de lui
Allez il est temps de tourner la page pour aujourd’hui !
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