Question d'origine :
Bonjour,
Dans quelle mesure le droit de vote pour les femmes a-t-il été considéré dans les débats à l'Assemblée constituante et dans les clubs lors de la Révolution française ? Existait-ils de telles revendications dans les cahiers de doléances ?
Merci
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 24/09/2018 à 09h26
Bonjour,
L’article consacré aux femmes et au féminisme dans le Dictionnaire historique de la Révolution française revient sur le statut, les droits des femmes et surtout leur exclusion du débat politique pendant la Révolution :
« Les femmes participèrent aux évènements révolutionnaires mais, n’étant pas un tout indistinct, certaines furent révolutionnaires et d’autres contre-révolutionnaires. Un important mouvement féminin, composante du mouvement populaire, se distingua à certains moments de la Révolution , et ce fut par exemple par leurs manifestations que commencèrent les journées d’octobre 1789 et les insurrections du printemps de l’an III (1795). Les femmes, qui par leur rôle de nourricières accordaient une attention privilégiée aux problèmes alimentaires, étaient particulièrement nombreuses dans toutes les émeutes de subsistances. Mais elles n’étaient pas motivées par cette seule question et leurs interventions dans le procès révolutionnaire ne se limitèrent pas à cet aspect. Les militantes prirent part à des évènements dont les motifs d’ordre politique (17 juillet 1791, 20 juin, 10 août 1792, conflit Gironde-Montagne et lutte contre le fédéralisme en 1793, 9 Thermidor an II, etc.). L’on relève même des poussées féminines dans la sans-culotterie, sur fond de crise de subsistances mais se rapportant à des sujets politiques (..) Les citoyennes n’avaient légalement pas le droit de voter et n’étaient pas admises comme membres dans la majorité des organisations révolutionnaires . Pour pallier ces limites imposées à leur engagement, les plus actives s’organisèrent en Clubs de femmes (Citoyennes républicaines Révolutionnaires à Paris et une trentaine en province) : ils furent interdits le 30 octobre 1793. Des femmes se pressaient par ailleurs dans les tribunes publiques des sociétés, clubs ou assemblée (Convention, municipalités), où elles faisaient leur instruction politique tout en y travaillant (…) Dès les débuts de la Révolution, des femmes attendirent une amélioration de leur condition (…) deux textes dominent une production d’écrits souvent forts inégaux : Sur l’admission des femmes au droit de cité de Condorcet (juillet 1790) et La déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d’Olympe de Gouges (septembre 1791). Tous deux considèrent qu’en tant qu’êtres de raison les femmes appartiennent à la communauté humaine et naissent donc avec les mêmes droits naturels que les hommes ; l’interdiction qui leur est faite de « concourir à la loi » est une violation du « principe de l4égalité des droits » et un « acte de tyrannie » écrit Condorcet. Ces deux textes fondamentaux présentent un féminisme théorique ; mais les réflexions sur les droits des femmes ne furent pas propres aux débats de la Révolution et s’appuyant sur la philosophie du droit naturel, reprirent avec une nouvelle vigueur en 1793 alors que la sans –culotterie féministe s’affirmait avec force au sein du mouvement populaire . Les femmes, êtres pensants et sociaux, ont le droit de participer à la vie politique, assuraient les militantes qui ajoutaient : « la déclaration des droits de l’homme à l’un et l’autre sexe » ; et « comme la Constitution repose sur les droits de l’homme », quelques-unes en réclamèrent « l’entier exercice » (le droit de vote). Certaines rejetèrent l’image des femmes passives et mineures qu’elles lièrent à la condition d’un peuple soumis au despotisme et lui opposèrent celles de « femmes libres », membres d’un peuple libre , qui participent par leur action à la conquête de la liberté du genre humain. L’oppression masculine fut mise en parallèle à l’ancien despotisme royal (…) Pour des questions de mentalité, la majorité des révolutionnaires furent hostiles à ce féminisme ; le rapport d’Amar (30 octobre 1793) qui interdisait les clubs féminins et l’exercice des droits des droits politiques par les femmes mit en grande partie un terme aux réflexions féministes . Si légalement, les révolutionnaires leurs refusèrent les droits politiques, ils prirent cependant un certain nombre de mesures qui améliorèrent leur condition … »
Dans 1789-1799 : combats de femmes. Les révolutionnaires excluent les citoyennes, Evelyne Morin-Rotureau note que «les Révolutionnaires sont pétris des discours des médecins qui, tout au long du XVIIIe siècle, posent de façon scientifique l’infériorité de la nature féminine – faisant une collusion étroite entre le physique, le moral, le pathologique et la morale – et de ceux des philosophes des Lumières qui se réfèrent à l’ordre immuable de la Nature. Mirabeau cite souvent Jean-Jacques Rousseau : « c’est une vérité si familière aux peuples anciens, que l’homme et la femme, jouant un rôle différent dans la nature, ne peuvent jouer le même rôle dans l’Etat social et que l’ordre éternel des choses ne les fait concourir à un but commun qu’en leur assignant des places distinctes ».
(…)
Mais1793 sonne le glas d’une répression terrible contre les femmes, qu’on exclut de toute participation publique ; on leur interdit même de se retrouver à plus de cinq dans la rue ! » (...) Au même moment, Portalis, le rédacteur du Code civil, dira que les hommes doivent aux femmes « une protection perpétuelle en échange d’un sacrifice irrévocable».
Olympe de Gouges, pionnière de la lutte contre l’esclavage, est guillotinée cette funeste année 1793. Constatant que l’universalité de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen se conjugue au masculin,elle rédige en 1791 la déclaration des droits de la femme et de la citoyenne dont l’article 1er dit : « La femme naît libre et demeure égale en droits à l’homme »
(..)
En 1791, devant l’Assemblée nationale, Talleyrand fait un discours sur l’éducation des filles (…) or il nous semble incontestable que le bonheur commun, surtout celui des femmes, demande qu’elle n’aspire point à l’exercice des droits et des fonctions politiques ….
(…) Néanmoins, la révolution française ouvre l’ère du féminisme en posant la question du statut de la moitié de l’humanité. Des débats ont lieu sur le sujet, maisseuls Condorcet et Guyomar demandent-clairement les mêmes droits politiques pour les hommes et les femmes … »
Pour finir, nous citerons brièvement les propos de Jacques-Olivier Boudon qui mentionne dans Citoyenneté, république et démocratie en France : 1789-1889 que « l’exclusion des femmes du processus électoral est un fait. Elle a été voulue par les hommes de la Révolution dès 1790 ;Condorcet la regrettant, dans un article intitulé « Sur l’admission des femmes au droit de cité » , publié le 3 juillet 1790 dans le Journal de la Société de 1789, sans que ce texte ait eu beaucoup d’écho. Il n’en conteste pas moins cette exclusion au nom du principe d’égalité …. »
Nous vous laissons poursuivre ces lectures et vous suggérons aussi de parcourir le cens de la famille: les femmes et le vote, 1789-1848.
L’article consacré aux femmes et au féminisme dans le Dictionnaire historique de la Révolution française revient sur le statut, les droits des femmes et surtout leur exclusion du débat politique pendant la Révolution :
« Les femmes participèrent aux évènements révolutionnaires mais, n’étant pas un tout indistinct, certaines furent révolutionnaires et d’autres contre-révolutionnaires.
Dans 1789-1799 : combats de femmes. Les révolutionnaires excluent les citoyennes, Evelyne Morin-Rotureau note que «
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Mais
Olympe de Gouges, pionnière de la lutte contre l’esclavage, est guillotinée cette funeste année 1793. Constatant que l’universalité de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen se conjugue au masculin,
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En 1791, devant l’Assemblée nationale, Talleyrand fait un discours sur l’éducation des filles (…) or il nous semble incontestable que le bonheur commun, surtout celui des femmes, demande qu’elle n’aspire point à l’exercice des droits et des fonctions politiques ….
(…) Néanmoins, la révolution française ouvre l’ère du féminisme en posant la question du statut de la moitié de l’humanité. Des débats ont lieu sur le sujet, mais
Pour finir, nous citerons brièvement les propos de Jacques-Olivier Boudon qui mentionne dans Citoyenneté, république et démocratie en France : 1789-1889 que « l’exclusion des femmes du processus électoral est un fait. Elle a été voulue par les hommes de la Révolution dès 1790 ;
Nous vous laissons poursuivre ces lectures et vous suggérons aussi de parcourir le cens de la famille: les femmes et le vote, 1789-1848.
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