Architecture - galilée
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 21/09/2018 à 13h25
353 vues
Question d'origine :
Bonjour,
Je me demandais pourquoi on appelle l’une des portes de l’abbaye de Cluny la « galilée » ?
D’où vient cette appellation ? Quel siècle ? Et est-ce une exception dans l’architecture catholique ?
Je vous remercie.
Très cordialement.
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 24/09/2018 à 08h42
Bonjour,
La galilée désigne, dans le monde clunisien, une avant-nef à deux tours ayant pour fonction d’accueillir la liturgie de commémoration des défunts.
« La Galilée clunisienne
Comme les abbatiales de Cluny II et Cluny III, maintes églises clunisiennes étaient précédées d'avant-nefs occidentales surmontées de tours qui sont appellées dans les textes médiévaux des galilées. Souvent d'une longueur de plusieurs travées, ces édifices sont à l'intérieur divisés en deux niveaux. Pendant que le rez-de-chaussée peut s'ouvrir à l'extérieur par des arcades ou former un espace à murs continus, l'étage renferme toujours une chapelle – chapelle qui se termine à l'est par une abside dont le cul-de-four surplombant la nef de l'église constitue la caratéristique la plus surprenante – quoique pas toujours conservée – de ces galilées.
Auteur : Krüger (K.)
Magazine : Dossiers d'Archéologie n° 269 Page : 110-113 »
Source : dossiers-archeologie.com
« La nef à trois vaisseaux, dont il ne reste que quelques sculptures, était précédée d’une avant-nef, appelée « galilée », ajoutée à la construction primitive probablement sous l’abbatiat d’Odilon. Ce vestibule de 65 pieds de longueur apparaît dans les coutumiers clunisiens comme l’emplacement d’une station liturgique lors des processions. Edifiée sur deux niveaux (comme on peut le voir encore dans l’ancienne abbatiale clunisienne de Romainmôtier ou à Saint-Philibert de Tournus), avec un autel à l’étage, l’avant-nef pouvait aussi servir à la célébration des messes des morts. Donnant accès à l’espace sacré de l’église, elle exprimait en effet le passage de la mort à la vie éternelle, à l’image de la résurrection du Christ. »
Source : L'abbaye de Cluny, Anne Baud, Christian Sapin
« De nombreuses églises clunisiennes, parmi lesquelles on trouve Cluny II et Cluny III, comportaient une avant-nef - appelée galilée - à deux étages, surmontée de tours et comprenant une chapelle haute. C'est un lieu symbolique si l'on se réfère à l'éxégèse du mot galilée. D'une part, la galilée est la transition entre un mode de vie imparfait et un mode de vie parfait (la conversion) ou encore entre la vie et la mort. D'autre part, la galilée signifie l'entrée dans le royaume de Dieu, le face à face avec Dieu, en référence à l'apparition du Christ aux apôtres en Galilée. C'est donc un lieu de transition mais aussi de commémoration de l'apparition du Christ. La chapelle de l'étage servait à célébrer les nombreuses messes pour les morts.
L'avant-nef dont on voit aujourd'hui les restes, entreprise en 1135 (dernier élément construit), comportait cinq travées. Son élévation était à quatre niveaux pour les travées orientales et à trois niveaux pour les trois travées occidentales. Sa construction fut interrompue et achevée seulement au XIIIe siècle, en style gothique. Son portail datait de 1230. Le tympan faisait cinq mètres de diamètre. Il se situait à la croisée des représentations traditionnelles de l'Apocalypse et de l'Ascension. Inscrit dans une mandorle soulevée par des anges, le Christ était néanmoins entouré du tétramorphe et des 24 vieillards. Au linteau, on trouvait la Vierge, les apôtres et également la scène des Saintes femmes au tombeau.
Les tours barabans qui entouraient le portail furent réalisées au XIIe siècle pour la tour sud et au XIIIe pour la tour nord. »
Source : Architecture religieuse en occident
« La plus ancienne mention d’une galilaea ou galilée se trouve dans la description de l’église et des bâtiments de Cluny II donnée par le Liber tramitis, coutumier clunisien du temps de l’abbé Odilon, rédigé entre 1027 et 1048. Il s’agit d’un édifice situé devant l’église, qui mesure 65 pieds de longueur et est surmonté à l’ouest de deux tours. Si sa fonction n’est pas précisée, les prescriptions liturgiques du Liber tramitis nous montrent toutefois qu’elle servait avant tout de lieu privilégié pour les stations solennelles des grandes processions ayant lieu les jours de fêtes et les dimanches. À ces occasions, des laïcs éventuellement présents devaient se tenir dans l’atrium subter turres, c’est-à-dire à l’extrémité occidentale de la galilée ou, plus vraisemblablement, dans une cour au pied des tours devant la galilée elle-même. […]
Signification et utilisation de la galilée
En l’absence de textes expliquant sa fonction, le nom de galilaea lui-même nous permet des éclaircissements instructifs. En fait, la signification théologique de ce nom est au centre d’un débat exégétique depuis l’Antiquité tardive. Ce débat tourne autour des apparitions du Christ ressuscité après sa crucifixion, dont l’une, annoncée de manière prophétique par Jésus lui-même, eut lieu sur une montagne en Galilée (Mt 28, 16-20, ainsi que Mc 14, 28 ; 16, 7 et Mt 26, 32 ; 28, 7 ; 28, 10). L’exégèse du nom de ce pays biblique du nord de la Palestine, élaborée d’abord par Augustin, fut par la suite reprise, modifiée et développée par des auteurs de différentes époques, de Grégoire le Grand à Rupert de Deutz au début du XIIe siècle, en passant par Bède et les auteurs carolingiens. D’après leurs écrits, galilaea, traduite en latin par transmigratio peracta, signifie d’une part la transition d’un état de vie ou de croyance imparfait à un autre, parfait ou éternel – donc la conversion à la foi chrétienne, l’adoption d’un mode de vie pieux et, avant tout, la transition de la mort à la vie éternelle à l’image du Christ ressuscité. D’autre part, galilaea signifie, en analogie avec l’apparition du Ressuscité devant les apôtres en Galilée, le moment du face à face avec le Seigneur à la fin des temps, c’est-à-dire, de l’entrée au royaume céleste. Cet aspect eschatologique, particulièrement privilégié par les auteurs du IXe siècle, est exprimé le plus clairement dans l’homélie de Pâques d’Heiric d’Auxerre. Les œuvres de ce maître de l’école carolingienne de Saint-Germain d’Auxerre, qui furent copiées pour la bibliothèque de Cluny au cours de la réforme clunisienne de cette abbaye à la fin du Xe siècle, ont exercé une influence considérable sur la pensée de l’abbé Odilon et sa vision du monde – influence dont témoigne aussi la construction, par cet abbé, de l’édifice appelé la galilée.
Sur le fond de l’exégèse du nom de galilaea, le sens des stations solennelles tenues dans la galilée lors des processions de Pâques et du dimanche, qui fêtent la résurrection du Christ, devient tout de suite patent : la galilée est le lieu symbolique de la vision du Ressuscité. Ceci est confirmé par Rupert de Deutz, théologien du début du XIIe siècle vivant dans un monastère où l’on suivait les coutumes clunisiennes. Dans son Liber de divinis afficiis, il nous explique que lors de sa dernière station de la procession du dimanche, le couvent rassemble « à l’endroit que nous appelons la galilée » pour commémorer l’apparition du Ressuscité devant ses disciples comme elle est relatée chez Matthieu. »
Source : site de la ville de Souvigny
Bonne journée.
La galilée désigne, dans le monde clunisien, une avant-nef à deux tours ayant pour fonction d’accueillir la liturgie de commémoration des défunts.
« La Galilée clunisienne
Comme les abbatiales de Cluny II et Cluny III, maintes églises clunisiennes étaient précédées d'avant-nefs occidentales surmontées de tours qui sont appellées dans les textes médiévaux des galilées. Souvent d'une longueur de plusieurs travées, ces édifices sont à l'intérieur divisés en deux niveaux. Pendant que le rez-de-chaussée peut s'ouvrir à l'extérieur par des arcades ou former un espace à murs continus, l'étage renferme toujours une chapelle – chapelle qui se termine à l'est par une abside dont le cul-de-four surplombant la nef de l'église constitue la caratéristique la plus surprenante – quoique pas toujours conservée – de ces galilées.
Auteur : Krüger (K.)
Magazine : Dossiers d'Archéologie n° 269 Page : 110-113 »
Source : dossiers-archeologie.com
« La nef à trois vaisseaux, dont il ne reste que quelques sculptures, était précédée d’une avant-nef, appelée « galilée », ajoutée à la construction primitive probablement sous l’abbatiat d’Odilon. Ce vestibule de 65 pieds de longueur apparaît dans les coutumiers clunisiens comme l’emplacement d’une station liturgique lors des processions. Edifiée sur deux niveaux (comme on peut le voir encore dans l’ancienne abbatiale clunisienne de Romainmôtier ou à Saint-Philibert de Tournus), avec un autel à l’étage, l’avant-nef pouvait aussi servir à la célébration des messes des morts. Donnant accès à l’espace sacré de l’église, elle exprimait en effet le passage de la mort à la vie éternelle, à l’image de la résurrection du Christ. »
Source : L'abbaye de Cluny, Anne Baud, Christian Sapin
« De nombreuses églises clunisiennes, parmi lesquelles on trouve Cluny II et Cluny III, comportaient une avant-nef - appelée galilée - à deux étages, surmontée de tours et comprenant une chapelle haute. C'est un lieu symbolique si l'on se réfère à l'éxégèse du mot galilée. D'une part, la galilée est la transition entre un mode de vie imparfait et un mode de vie parfait (la conversion) ou encore entre la vie et la mort. D'autre part, la galilée signifie l'entrée dans le royaume de Dieu, le face à face avec Dieu, en référence à l'apparition du Christ aux apôtres en Galilée. C'est donc un lieu de transition mais aussi de commémoration de l'apparition du Christ. La chapelle de l'étage servait à célébrer les nombreuses messes pour les morts.
L'avant-nef dont on voit aujourd'hui les restes, entreprise en 1135 (dernier élément construit), comportait cinq travées. Son élévation était à quatre niveaux pour les travées orientales et à trois niveaux pour les trois travées occidentales. Sa construction fut interrompue et achevée seulement au XIIIe siècle, en style gothique. Son portail datait de 1230. Le tympan faisait cinq mètres de diamètre. Il se situait à la croisée des représentations traditionnelles de l'Apocalypse et de l'Ascension. Inscrit dans une mandorle soulevée par des anges, le Christ était néanmoins entouré du tétramorphe et des 24 vieillards. Au linteau, on trouvait la Vierge, les apôtres et également la scène des Saintes femmes au tombeau.
Les tours barabans qui entouraient le portail furent réalisées au XIIe siècle pour la tour sud et au XIIIe pour la tour nord. »
Source : Architecture religieuse en occident
« La plus ancienne mention d’une galilaea ou galilée se trouve dans la description de l’église et des bâtiments de Cluny II donnée par le Liber tramitis, coutumier clunisien du temps de l’abbé Odilon, rédigé entre 1027 et 1048. Il s’agit d’un édifice situé devant l’église, qui mesure 65 pieds de longueur et est surmonté à l’ouest de deux tours. Si sa fonction n’est pas précisée, les prescriptions liturgiques du Liber tramitis nous montrent toutefois qu’elle servait avant tout de lieu privilégié pour les stations solennelles des grandes processions ayant lieu les jours de fêtes et les dimanches. À ces occasions, des laïcs éventuellement présents devaient se tenir dans l’atrium subter turres, c’est-à-dire à l’extrémité occidentale de la galilée ou, plus vraisemblablement, dans une cour au pied des tours devant la galilée elle-même. […]
Signification et utilisation de la galilée
En l’absence de textes expliquant sa fonction, le nom de galilaea lui-même nous permet des éclaircissements instructifs. En fait, la signification théologique de ce nom est au centre d’un débat exégétique depuis l’Antiquité tardive. Ce débat tourne autour des apparitions du Christ ressuscité après sa crucifixion, dont l’une, annoncée de manière prophétique par Jésus lui-même, eut lieu sur une montagne en Galilée (Mt 28, 16-20, ainsi que Mc 14, 28 ; 16, 7 et Mt 26, 32 ; 28, 7 ; 28, 10). L’exégèse du nom de ce pays biblique du nord de la Palestine, élaborée d’abord par Augustin, fut par la suite reprise, modifiée et développée par des auteurs de différentes époques, de Grégoire le Grand à Rupert de Deutz au début du XIIe siècle, en passant par Bède et les auteurs carolingiens. D’après leurs écrits, galilaea, traduite en latin par transmigratio peracta, signifie d’une part la transition d’un état de vie ou de croyance imparfait à un autre, parfait ou éternel – donc la conversion à la foi chrétienne, l’adoption d’un mode de vie pieux et, avant tout, la transition de la mort à la vie éternelle à l’image du Christ ressuscité. D’autre part, galilaea signifie, en analogie avec l’apparition du Ressuscité devant les apôtres en Galilée, le moment du face à face avec le Seigneur à la fin des temps, c’est-à-dire, de l’entrée au royaume céleste. Cet aspect eschatologique, particulièrement privilégié par les auteurs du IXe siècle, est exprimé le plus clairement dans l’homélie de Pâques d’Heiric d’Auxerre. Les œuvres de ce maître de l’école carolingienne de Saint-Germain d’Auxerre, qui furent copiées pour la bibliothèque de Cluny au cours de la réforme clunisienne de cette abbaye à la fin du Xe siècle, ont exercé une influence considérable sur la pensée de l’abbé Odilon et sa vision du monde – influence dont témoigne aussi la construction, par cet abbé, de l’édifice appelé la galilée.
Sur le fond de l’exégèse du nom de galilaea, le sens des stations solennelles tenues dans la galilée lors des processions de Pâques et du dimanche, qui fêtent la résurrection du Christ, devient tout de suite patent : la galilée est le lieu symbolique de la vision du Ressuscité. Ceci est confirmé par Rupert de Deutz, théologien du début du XIIe siècle vivant dans un monastère où l’on suivait les coutumes clunisiennes. Dans son Liber de divinis afficiis, il nous explique que lors de sa dernière station de la procession du dimanche, le couvent rassemble « à l’endroit que nous appelons la galilée » pour commémorer l’apparition du Ressuscité devant ses disciples comme elle est relatée chez Matthieu. »
Source : site de la ville de Souvigny
Bonne journée.
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