Pendant combien de temps un guillotiné reste-t-il conscient?
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 28/08/2018 à 21h06
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Question d'origine :
L'utilisation en France de la guillotine depuis la Révolution jusqu'en 1989 a mis en évidence le fait que les individus, une fois décapités, montraient un visage expressif (peur, douleur).
Jusqu'à combien de temps un guillotiné reste-t-il conscient ?
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 30/08/2018 à 12h31
Bonjour,
Il ne sera pas chose aisée de vous répondre car la durée de la survie après décapitation, sujet de controverses,demeure incertaine et ne peut être attestée précisément de manière scientifique.
Comme le rapporte Anne Carol dans Physiologie de la veuve. Une histoire médicale de la guillotine, dès le XVIIIe siècle, la décapitation fait débat tant sur la douleur que sur la question de la persistance d’une forme de vie. Au cours des XVIIIe et XIXe siècles, de multiples anecdotes et rumeurs mettent en scène des têtes qui bondissent et l’auteure rappelle que « l’hypothèse d’une survie s’inscrit dans une longue tradition chrétienne » perdure.
Ainsi, l’auteure reproduit au fil des siècles divers témoignages dont celui, en 1932, du neurologue Louis Lapicque :
« Dans le corps d’un supplicié, au moment où l’on vient de lui couper la tête, rien n’est mort. Le cerveau lui-même n’est qu’engourdi par le choc. Tout va mourir peu à peu, organe par organe, cellule par cellule, parce que dans un organisme évolué comme celui de l’homme, la vie de chaque détail dépende des grandes fonctions essentielles, circulation, respiration, qui sont assurées par une coordination de l’ensemble ».
Le 6 janvier 1953, les deux médecins légistes René Piédelièvre et Etiennent Fournier livrent quelques réflexions sur la peine de mort ;
« Le sang sort des vaisseaux au rythme des carotides sectionnées, puis il se coagule. Les muscles se contractent et leur fibrillation est stupéfiante ; l’intestin ondule et le cœur a des mouvements irréguliers, incomplets, fascinants ? La bouche se crispe à certains moments dans une moue terrible. Il est vrai que sur cette tête décapitée, les yeux sont immobiles (…) tout cela peut durer des minutes, des heures même chez des sujets sans tares :la mort n’est pas immédiate …. Ainsi chaque élément vital survit à la décapitation... »
Le RP Devoyod publie un témoignage sur son ministère à la prison de la Santé (…) or, pendant ce court espace de temps, nous eûmes la possibilité de voir les deux yeux du condamné fixés sur nous dans un regarde de supplication (…) alors ensuite les paupières clignèrent (…) cela dura quelques secondes"
De même qu’un exécuteur témoigne que chez ceux qui meurent les yeux ouverts « la vie subsiste encore deux à trois secondes après.
Vous l’aurez compris, multiples sont les doutes sur la question de la survie ou de la douleur et le débat ne semble pas être clos.
Ainsi, le magazine Pour la science publiait en 2011 un article « Derniers instants d’un décapité. Le cerveau peut-il survivre après une décapitation ? Des expériences sur des rats apportent des éléments de réponse. »
« « Languille ! » criait le docteur Beaurieux au condamné. De fait, il s’adressait à la tête de la victime fraîchement décapitée. Languille était un meurtrier condamné à la guillotine et exécuté le 28 juin 1905. Le médecin rapporte ses observations dans les Archives d’Anthropologie Criminelle. Entendant son nom, la victime décapitée, dont les paupières venaient de se fermer, rouvrit les yeux et fixa le docteur avec intensité, puis les yeux se refermèrent lentement, au bord de l’inconscience...
Antoine Lavoisier aurait aussi demandé à son assistant, condamné à la guillotine, de cligner des yeux s’il l’entendait. Ce que, dit-on, le malheureux aurait fait. De nombreuses anecdotes tirées de la Révolution font état de tels signes de conscience, ou d’un défilement d’expressions du visage reflétant la douleur, puis la tristesse et enfin la peur.
Évidemment, la question de l’état de conscience d’une tête séparée de son corps ne saurait aujourd’hui être étudiée scientifiquement. Mais la décapitation reste pratiquée à des fins scientifiques dans les laboratoires, sur des souris ou des rats que l’on sacrifie pour réaliser des mesures biologiques post mortem. C’est sur des rats q ue Clementina van Rijn et ses collègues neuroscientifiques ont examiné les effets de la décapitation.
La méthode consistait à enregistrer les ondes électriques produites par le cerveau avec des électrodes posées sur le crâne. Selon cette méthode, des ondes de fréquence comprise entre 13 et 100 oscillations par seconde reflètent l’activité cognitive chez cet animal. Les neuroscientifiques ont observé que ces ondes de « conscience » diminuent rapidement après la décapitation, mais pas immédiatement. Elles restent assez nettement visibles environ quatre secondes, puis disparaissent au bout de 17 secondes. Selon le neurobiologiste Georges Chapouthier, il est très probable que la conscience ne s’étende pas au-delà de ces quatre secondes. Ensuite, le signal électroencéphalographique s’atténue et évoque celui d’un animal endormi, ce qui suggère que la victime entre dans un état second de torpeur se rapprochant progressivement de la mort.Au-delà de 17 secondes, aucune conscience n’est possible, et 50 secondes après la décapitation, une onde de basse fréquence intense est enregistrée, vraisemblablement due à la dépolarisation massive des neurones : c’est la mort cellulaire définitive.
Les auteurs en concluent que la conscience disparaît en quelques secondes après une décapitation chez le rat, et que cette méthode de sacrifice rapide en laboratoire peut être qualifiée d’éthique. Quant aux décapités de la Terreur, dont certains continuaient de cligner des yeux pendant une demi-minute à en croire les annales de la guillotine, c’est une autre affaire ».
De semblables explications sont reprises dans maxisciences.
Cette question a été malheureusement reposée lors des spectaculaires décapitations menées par l’état islamique :
Harold Hillman souligne que la peau, les muscles et les vertèbres du cou sont si résistants qu’il est difficile de parvenir à les couper en une seule fois. Même si l’on utilise une guillotine, la mort n’est pas immédiate. Des expériences menées sur des moutons ont montré que l’activité du cerveau s’interrompait 14 secondes après que les artères carotides avaient été tranchées. Il a aussi été calculé que le cerveau humain pouvait fonctionner pendant encore 7 secondes en cas d’interruption subite et totale de l’apport en oxygène. Les calculs ne disent en revanche pas ce qui s’y passe pendant ces 7 secondes…
Source : passeurdesciences.blog.lemonde.fr
Pour approfondir la question nous vous laissons lire :
• Il était une fois la guillotine/ Bessette, 1982.
• Histoire de la douleur / Roselyne Rey ; postfaces de Jean Cambier et Jean-Louis Fischer, 2011.
• En d'atroces souffrances / Antoine de Baecque, 2015.
Il ne sera pas chose aisée de vous répondre car la durée de la survie après décapitation, sujet de controverses,demeure incertaine et ne peut être attestée précisément de manière scientifique.
Comme le rapporte Anne Carol dans Physiologie de la veuve. Une histoire médicale de la guillotine, dès le XVIIIe siècle, la décapitation fait débat tant sur la douleur que sur la question de la persistance d’une forme de vie. Au cours des XVIIIe et XIXe siècles, de multiples anecdotes et rumeurs mettent en scène des têtes qui bondissent et l’auteure rappelle que « l’hypothèse d’une survie s’inscrit dans une longue tradition chrétienne » perdure.
Ainsi, l’auteure reproduit au fil des siècles divers témoignages dont celui, en 1932, du neurologue Louis Lapicque :
« Dans le corps d’un supplicié, au moment où l’on vient de lui couper la tête, rien n’est mort. Le cerveau lui-même n’est qu’engourdi par le choc. Tout va mourir peu à peu, organe par organe, cellule par cellule, parce que dans un organisme évolué comme celui de l’homme, la vie de chaque détail dépende des grandes fonctions essentielles, circulation, respiration, qui sont assurées par une coordination de l’ensemble ».
Le 6 janvier 1953, les deux médecins légistes René Piédelièvre et Etiennent Fournier livrent quelques réflexions sur la peine de mort ;
« Le sang sort des vaisseaux au rythme des carotides sectionnées, puis il se coagule. Les muscles se contractent et leur fibrillation est stupéfiante ; l’intestin ondule et le cœur a des mouvements irréguliers, incomplets, fascinants ? La bouche se crispe à certains moments dans une moue terrible. Il est vrai que sur cette tête décapitée, les yeux sont immobiles (…) tout cela peut durer des minutes, des heures même chez des sujets sans tares :
Le RP Devoyod publie un témoignage sur son ministère à la prison de la Santé (…) or, pendant ce court espace de temps, nous eûmes la possibilité de voir les deux yeux du condamné fixés sur nous dans un regarde de supplication (…) alors ensuite les paupières clignèrent (…) cela dura quelques secondes"
De même qu’un exécuteur témoigne que chez ceux qui meurent les yeux ouverts « la vie subsiste encore deux à trois secondes après.
Ainsi, le magazine Pour la science publiait en 2011 un article « Derniers instants d’un décapité. Le cerveau peut-il survivre après une décapitation ? Des expériences sur des rats apportent des éléments de réponse. »
« « Languille ! » criait le docteur Beaurieux au condamné. De fait, il s’adressait à la tête de la victime fraîchement décapitée. Languille était un meurtrier condamné à la guillotine et exécuté le 28 juin 1905. Le médecin rapporte ses observations dans les Archives d’Anthropologie Criminelle. Entendant son nom, la victime décapitée, dont les paupières venaient de se fermer, rouvrit les yeux et fixa le docteur avec intensité, puis les yeux se refermèrent lentement, au bord de l’inconscience...
Antoine Lavoisier aurait aussi demandé à son assistant, condamné à la guillotine, de cligner des yeux s’il l’entendait. Ce que, dit-on, le malheureux aurait fait. De nombreuses anecdotes tirées de la Révolution font état de tels signes de conscience, ou d’un défilement d’expressions du visage reflétant la douleur, puis la tristesse et enfin la peur.
Évidemment, la question de l’état de conscience d’une tête séparée de son corps ne saurait aujourd’hui être étudiée scientifiquement. Mais la décapitation reste pratiquée à des fins scientifiques dans les laboratoires, sur des souris ou des rats que l’on sacrifie pour réaliser des mesures biologiques post mortem. C’est sur des
La méthode consistait à enregistrer les ondes électriques produites par le cerveau avec des électrodes posées sur le crâne. Selon cette méthode, des ondes de fréquence comprise entre 13 et 100 oscillations par seconde reflètent l’activité cognitive chez cet animal. Les neuroscientifiques ont observé que ces ondes de « conscience » diminuent rapidement après la décapitation, mais pas immédiatement. Elles restent assez nettement visibles environ quatre secondes, puis disparaissent au bout de 17 secondes. Selon le neurobiologiste Georges Chapouthier, il est très probable que la conscience ne s’étende pas au-delà de ces quatre secondes. Ensuite, le signal électroencéphalographique s’atténue et évoque celui d’un animal endormi, ce qui suggère que la victime entre dans un état second de torpeur se rapprochant progressivement de la mort.
Les auteurs en concluent que la conscience disparaît en quelques secondes après une décapitation chez le rat, et que cette méthode de sacrifice rapide en laboratoire peut être qualifiée d’éthique. Quant aux décapités de la Terreur, dont certains continuaient de cligner des yeux pendant une demi-minute à en croire les annales de la guillotine, c’est une autre affaire ».
De semblables explications sont reprises dans maxisciences.
Cette question a été malheureusement reposée lors des spectaculaires décapitations menées par l’état islamique :
Harold Hillman souligne que la peau, les muscles et les vertèbres du cou sont si résistants qu’il est difficile de parvenir à les couper en une seule fois. Même si l’on utilise une guillotine, la mort n’est pas immédiate. Des expériences menées sur des moutons ont montré que l’activité du cerveau s’interrompait 14 secondes après que les artères carotides avaient été tranchées.
Source : passeurdesciences.blog.lemonde.fr
Pour approfondir la question nous vous laissons lire :
• Il était une fois la guillotine/ Bessette, 1982.
• Histoire de la douleur / Roselyne Rey ; postfaces de Jean Cambier et Jean-Louis Fischer, 2011.
• En d'atroces souffrances / Antoine de Baecque, 2015.
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