Question d'origine :
Bonjour,
Je me demande comment ça se fait qu'il y ait tant de différence entre les "blancs" et les "non blancs" en France. Un sociologue a-t-il traité cette question de façon simple et impartiale ?
En vous remerciant
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 25/07/2018 à 12h25
Bonjour,
Nous ne sommes pas sûrs de comprendre ce que vous entendez par « différence » - si vous vous interrogez sur les différences de modes de vie, de représentations du monde ou de comportements, la notion de « non-blancs » nous apparaît bien vaste et bien vague. Si en revanche vous pensez aux différences de traitement vécues et subies par les personnes qualifiées de « minorités visibles » ou « non blanches », de la perception dont elles font l’objet dans la société, des discriminations qu'elles subissent, par exemple dans le monde du travail, on trouve de nombreuses sources à ce sujet, et ce, même si les catégories racialisantes ("blancs", "noirs", "jaunes", etc) ne sont pas des catégories pertinentes pour les sociologues.
En effet, les sociologues remarquent que les catégories liées à la couleur de la peau sont une pure construction intellectuelle, qui plus est assez récente. Un article de Pap Ndiaye accessibles sur cairn.info rappelle que la distinction entre blancs et non-blancs n’était pas, par exemple, essentielle dans le monde antique (moins que la distinction homme libre/esclave, ou Grec/barbare) :
« Quoi qu’il en soit, il est clair que les catégories raciales furent inventées parce qu’elles étaient utiles au maintien de structures de pouvoir et de systèmes socioéconomiques généralement fondés sur l’exploitation de la force de travail, en particulier l’esclavage. Au cœur des distinctions raciales se situait bien la « race noire », qui fit l’objet de toutes les attentions théoriciennes, de manière ô combien plus insistante que la « race blanche » ou la « race jaune », non seulement parce qu’elle était placée en limite de l’humanité (privilège qu’elle n’était pas seule à partager) mais parce qu’elle était le « standard » permettant de mesurer les autres races, d’en évaluer l’éventuelle dégénérescence (par contamination raciale, l’obsession de Gobineau), et parce que cette race était considérée comme servile. »
Aujourd’hui, les catégories « blanc » et « non-blanc » sont bien présentes dans la société, comme en témoigne amèrement une enquête sur la discrimination dans l’accès au logement menée en caméra cachée par francetvinfo.fr.
Un article de la Revue Européenne des migrations internationales a mis en ligne sur journals.openedition.org un article intitulé « Les processus d’ethnicisation et de raci(ali)sation dans la France contemporaine : Africains, Ultramarins et « Noirs » ». L’auteur, Christian Poiret, y soutient qu’on ne naît pas noir, mais que l’appartenance à un groupe « racisé » se construit dans un rapport entre une « majorité » qui se pense comme un référent universel, du fait d’une permanence de stéréotype construits au cours de l’époque moderne, notamment au cours de l’élaboration du racialisme « scentifique » du XIXè siècle – ainsi, du fait d’une construction sociale basée sur la « race supposée », une personne sera noire non parce qu’elle se pense comme telle, mais parce qu’elle sera perçue, avant tout, comme telle.
Il en résulte de nombreuses discriminations. On trouve par exemple sur travail-emploi.gouv.fr une étude sur les discriminations à l’embauche. Les résultats sont éloquents : « Les résultats globaux montrent que les recruteurs ont été plus souvent intéressés par les candidatures « hexagonales » que par les candidatures « maghrébines » : le taux de réponses positives est respectivement de 47 % et 36 % des candidatures envoyées, soit un écart moyen de 11 points. »
Pour aller plus loin :
Dictionnaire des racismes, de l’exclusion et des discriminations sous la direction d’Esther Benbassa
La Part de l’étranger.e. Travail & racisme Hélène Yvonne Meynaud
Trop noire pour être française Isabelle Boni-Claverie
Sociologie de la diversité et des discriminations Olivier Masclet
Qu’est-ce qu’une société ethnique? Albert Bastenier
Bonne journée.
Nous ne sommes pas sûrs de comprendre ce que vous entendez par « différence » - si vous vous interrogez sur les différences de modes de vie, de représentations du monde ou de comportements, la notion de « non-blancs » nous apparaît bien vaste et bien vague. Si en revanche vous pensez aux différences de traitement vécues et subies par les personnes qualifiées de « minorités visibles » ou « non blanches », de la perception dont elles font l’objet dans la société, des discriminations qu'elles subissent, par exemple dans le monde du travail, on trouve de nombreuses sources à ce sujet, et ce, même si les catégories racialisantes ("blancs", "noirs", "jaunes", etc) ne sont pas des catégories pertinentes pour les sociologues.
En effet, les sociologues remarquent que les catégories liées à la couleur de la peau sont une pure construction intellectuelle, qui plus est assez récente. Un article de Pap Ndiaye accessibles sur cairn.info rappelle que la distinction entre blancs et non-blancs n’était pas, par exemple, essentielle dans le monde antique (moins que la distinction homme libre/esclave, ou Grec/barbare) :
« Quoi qu’il en soit, il est clair que les catégories raciales furent inventées parce qu’elles étaient utiles au maintien de structures de pouvoir et de systèmes socioéconomiques généralement fondés sur l’exploitation de la force de travail, en particulier l’esclavage. Au cœur des distinctions raciales se situait bien la « race noire », qui fit l’objet de toutes les attentions théoriciennes, de manière ô combien plus insistante que la « race blanche » ou la « race jaune », non seulement parce qu’elle était placée en limite de l’humanité (privilège qu’elle n’était pas seule à partager) mais parce qu’elle était le « standard » permettant de mesurer les autres races, d’en évaluer l’éventuelle dégénérescence (par contamination raciale, l’obsession de Gobineau), et parce que cette race était considérée comme servile. »
Aujourd’hui, les catégories « blanc » et « non-blanc » sont bien présentes dans la société, comme en témoigne amèrement une enquête sur la discrimination dans l’accès au logement menée en caméra cachée par francetvinfo.fr.
Un article de la Revue Européenne des migrations internationales a mis en ligne sur journals.openedition.org un article intitulé « Les processus d’ethnicisation et de raci(ali)sation dans la France contemporaine : Africains, Ultramarins et « Noirs » ». L’auteur, Christian Poiret, y soutient qu’on ne naît pas noir, mais que l’appartenance à un groupe « racisé » se construit dans un rapport entre une « majorité » qui se pense comme un référent universel, du fait d’une permanence de stéréotype construits au cours de l’époque moderne, notamment au cours de l’élaboration du racialisme « scentifique » du XIXè siècle – ainsi, du fait d’une construction sociale basée sur la « race supposée », une personne sera noire non parce qu’elle se pense comme telle, mais parce qu’elle sera perçue, avant tout, comme telle.
Il en résulte de nombreuses discriminations. On trouve par exemple sur travail-emploi.gouv.fr une étude sur les discriminations à l’embauche. Les résultats sont éloquents : « Les résultats globaux montrent que les recruteurs ont été plus souvent intéressés par les candidatures « hexagonales » que par les candidatures « maghrébines » : le taux de réponses positives est respectivement de 47 % et 36 % des candidatures envoyées, soit un écart moyen de 11 points. »
Dictionnaire des racismes, de l’exclusion et des discriminations sous la direction d’Esther Benbassa
La Part de l’étranger.e. Travail & racisme Hélène Yvonne Meynaud
Trop noire pour être française Isabelle Boni-Claverie
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Bonne journée.
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