le mouvement insurrectionnel de Sakété en 1905 au Dahomey
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 20/07/2018 à 12h33
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Question d'origine :
bonjour mmes et Messieurs
je viens encore vous prier de me donner des précisions sur sur les victimes à l'occasion du mouvement insurrectionnel de Sakété au Dahomey en 1905.
PAUL C AGO
CLUB DE LECTURE AMANDINA
BP 488 COME
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 23/07/2018 à 13h20
Bonjour,
Lorsqu'elle aborde la révolte de février 1905 à Sakété, la presse française de l’époque coloniale ne fait écho que de deux victimes :l’administrateur Caït et le douanier Cadeau.
(Voir par exemple un exemplaire du « Tour du monde » de 1911, disponible sur gallica.bnf.fr et la « Revue du monde musulman », 1925, toujours sur gallica.bnf.fr)
On peut cependant lire sur persee.fr un article de Dadjo Koôvi Michel Videgla et Abiola Félix Iroko, qui a l’avantage de confronter les sources coloniales avec la mémoire orale des habitants de Sakété.
On rappellera que l’insurrection commença lorsque l’administrateur colonial local, un nommé Caït, fit interrompre une cérémonie funéraire pour des raisons de nuisances sonores, ce qui poussa la population, pourtant assez favorable à l’administration coloniale auparavant – Sakété était peuplée majoritairement de ressortissants de l’ethnie nagot, qui avaient régulièrement souffert avant la colonisation de razzias de la part du pouvoir fon – à la révolte.
Voyant la foule s’approcher de sa résidence, l’administrateur lui-même se contenta de tirer en l’air, mais son épouse, prise de panique, tira pour de bon sur la foule. « Elle en blessa un certain nombre, dont Okouadé, et tua sur le coup Adélakoun et Abiogba ; ce fut le signal d’une escalade de la violence et des affrontements ».
L’administration coloniale détruisit le sanctuaire d’Oshugbé « divinité tutélaire de la localité » - et donc, elle-même, à porter symboliquement au nombre des victimes. En représailles, les habitants prirent d’assaut la résidence de l’administrateur et ses dépendances. « Un hamacaire fut tué, de même que le douanier Cadeau ».
Le seul ouvrage dans lequel nous avons trouvé une définition du mot « hamacaire » est Le Phénomène de l’appropriation linguistique et esthétique en littérature africaine de langue française. Le cas des écrivains ivoiriens : Dadie, Kourouma et Adiaffi, de Germain Kouassi, qu’on peut feuilleter sur books.google.fr. L’auteur définit les hamacaires comme “porteurs de hamacs, sorte de lits de toile ou de filets dans lesquels les blancs restent assis ou allongés le long de leurs périples sur les pistes africaines à l’époque coloniale ».
Le douanier Cadeau fut démembré et ses morceaux distribués aux féticheurs locaux à fins de fabrication d’amulettes, puis les populations évacuèrent Sakété pour les villages environnants.
L’administration coloniale, Caït en tête, quitta à son tour la ville pour Porto-Novo, située à une trentaine de kilomètres, afin d’organiser la riposte. Selon Videgla et Iroko, les deux parties s’accordent pour constater qu’elle fut sanglante, même si, toujours d’après eux, «On ne saura peut-être jamais le nombre exact de victimes de cette répression qui dépassa largement le cadre restreint de la localité de Sakété : les habitants de Sakété perdirent une dizaine d’hommes […] ; davantage, selon les sources orales ; quoi qu’il en soit, le total des pertes dut être impressionnant, puisque dans le seul petit village d’Agonsa, les coups de feu échangés firent une quinzaine de victimes parmi les rebelles. »
L’administrateur Caït fit visiblement partie des victimes ; une victime collatérale et non létale fut le roi Agbola Djoyé, qui s’exila au Nigeria, et fut en conséquence déposé par l’occupant.
En tout, les troubles durèrent une semaine, pendant laquelle la ville fut pratiquement détruite, avant qu’une « opération de maintien de l’ordre », menée conjointement par la police et l’armée, ne contraigne les insurgés à cesser le combat.
Bonne journée.
Lorsqu'elle aborde la révolte de février 1905 à Sakété, la presse française de l’époque coloniale ne fait écho que de deux victimes :
(Voir par exemple un exemplaire du « Tour du monde » de 1911, disponible sur gallica.bnf.fr et la « Revue du monde musulman », 1925, toujours sur gallica.bnf.fr)
On peut cependant lire sur persee.fr un article de Dadjo Koôvi Michel Videgla et Abiola Félix Iroko, qui a l’avantage de confronter les sources coloniales avec la mémoire orale des habitants de Sakété.
On rappellera que l’insurrection commença lorsque l’administrateur colonial local, un nommé Caït, fit interrompre une cérémonie funéraire pour des raisons de nuisances sonores, ce qui poussa la population, pourtant assez favorable à l’administration coloniale auparavant – Sakété était peuplée majoritairement de ressortissants de l’ethnie nagot, qui avaient régulièrement souffert avant la colonisation de razzias de la part du pouvoir fon – à la révolte.
Voyant la foule s’approcher de sa résidence, l’administrateur lui-même se contenta de tirer en l’air, mais son épouse, prise de panique, tira pour de bon sur la foule. « Elle en blessa un certain nombre, dont Okouadé, et tua sur le coup Adélakoun et Abiogba ; ce fut le signal d’une escalade de la violence et des affrontements ».
L’administration coloniale détruisit le sanctuaire d’Oshugbé « divinité tutélaire de la localité » - et donc, elle-même, à porter symboliquement au nombre des victimes. En représailles, les habitants prirent d’assaut la résidence de l’administrateur et ses dépendances. « Un hamacaire fut tué, de même que le douanier Cadeau ».
Le seul ouvrage dans lequel nous avons trouvé une définition du mot « hamacaire » est Le Phénomène de l’appropriation linguistique et esthétique en littérature africaine de langue française. Le cas des écrivains ivoiriens : Dadie, Kourouma et Adiaffi, de Germain Kouassi, qu’on peut feuilleter sur books.google.fr. L’auteur définit les hamacaires comme “porteurs de hamacs, sorte de lits de toile ou de filets dans lesquels les blancs restent assis ou allongés le long de leurs périples sur les pistes africaines à l’époque coloniale ».
Le douanier Cadeau fut démembré et ses morceaux distribués aux féticheurs locaux à fins de fabrication d’amulettes, puis les populations évacuèrent Sakété pour les villages environnants.
L’administration coloniale, Caït en tête, quitta à son tour la ville pour Porto-Novo, située à une trentaine de kilomètres, afin d’organiser la riposte. Selon Videgla et Iroko, les deux parties s’accordent pour constater qu’elle fut sanglante, même si, toujours d’après eux, «
L’administrateur Caït fit visiblement partie des victimes ; une victime collatérale et non létale fut le roi Agbola Djoyé, qui s’exila au Nigeria, et fut en conséquence déposé par l’occupant.
En tout, les troubles durèrent une semaine, pendant laquelle la ville fut pratiquement détruite, avant qu’une « opération de maintien de l’ordre », menée conjointement par la police et l’armée, ne contraigne les insurgés à cesser le combat.
Bonne journée.
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