Question d'origine :
S.V.P.
On voit et entend ,de plus en plus fréquemment, des expressions, abréviations,acronymes,sigles ou mots isolés, à priori nouveaux ; la plupart du temps d'origine anglo-américaines ,- l'informatique y ayant une grosse part-, mais pas seulement.
Comment s'y retrouver, parmi tous ces langages d'initiés, codés ou semis codés ?
On parle de novlangue,langue de banlieue, langue de bois, mais aussi, quoique un peu différent :expressions et éléments de langages.... Qu'en 'est t il d'ailleurs, de l'hexagonal,qui au moins, même langage "tarasbicoté", était du bon français, avec l'humour en plus ! cf livre de Robert BEAUVAIS, lu il y a très longtemps.
Ou pourrait t on trouver (livres , net), des lexiques ou dictionnaires, pour essayer de mieux comprendre ces nouveaux langages, souvent obscurs et parfois verbiages ? Pour la langue anglaise, j'ai un bon dico qui, il est vrai, me sert de plus en plus souvent ! mais pour le reste ? merci.
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 13/06/2018 à 14h59
Bonjour,
La question que vous posez recouvre deux aspects différents du langage : d’une part, l’évolution de la langue et le développement des parlers populaires (expressions, langues de banlieues etc), qui sont une forme de l’évolution de la langue, d’autre part, les usages rhétoriques du type novlangue, éléments de langage, langue de bois, on pourrait ajouter « politiquement correct », associés aux discours politiques ou commerciaux, avec une nuance oppressive.
En ce qui concerne les parlers populaires, ils font partie depuis toujours de l’évolution des langues. Comme le remarque le lexicologue Alain Rey, « La notion de langue pure est un mythe. Pour survivre et appréhender le monde, elle doit se nourrir d’emprunts, comme elle nourrit de son vocabulaire d’autres langues, directement ou indirectement, parfois au terme d’un long cheminement, parfois dans un double mouvement d’aller-retour. Si « sport » vient bien de l’anglais, ce dernier l’a lui-même emprunté au vieux français du XIIe siècle « desport », c’est-à-dire « divertissement ».
Il faut rappeler aussi que nombre de vocables d’origine italienne ou latine présents dans l’anglais, ont transité… par le français. Le génie d’une langue tient autant à ses capacités analytiques qu’à son ouverture et son talent pour exprimer, intégrer la réalité métissée de cultures différentes. C’est le cas du français. »
(Source : la-croix.com)
C’est pour tenter de suivre cette évolution et d’en montrer les continuités qu’Alain Rey s’est donné pour tâche de diriger l’écriture d’un Dictionnaire historique de la langue française, dont pas moins de quatre éditions ont été éditées entre 1992 et 2016 - et dont l’auteur souligne, en comparant les deux dernières dans l’interview précitée, qu’« en 6 ans, le nombre de nouveaux mots apparus et employés est considérable, notamment en ce qui concerne la science et l’informatique. » !
Mais le linguiste-star de chez Robert n’est pas le seul à avoir ce souci de fixer les faits de langue dans le temps et dans l’espace : en 2007, un collectif de jeunes d’Evry s’est réuni pour écrire un dictionnaire du français des banlieues parisiennes, Le Lexik des cités, paru aux éditions Fleuve Noir.
Le problème principal que posent ces faits linguistiques aux auteurs de dictionnaires, c’est leur rapidité d’apparition, du fait des moyens de communication modernes – on imagine bien que malgré la qualité de leur travail, les dictionnaires paraîtront toujours avec un peu de retard. A titre d’exemple, nous avons sous les yeux,au moment où nous vous répondons, un exemplaire de l’ouvrage 365 mots nouveaux expliqués [Livre] / Paul Desalmand, Yves Stalloni, datant de 2013 qualifiants de « nouveaux » des vocables tels que « mondialisation » ou « pizzaiolo »… quand ce ne sont pas des mots carrément passés d’usage comme « branchouille » ou « bunga bunga ».
C’est pourquoi, en complément, nous vous conseillons les lexiques « jeunes » dont on trouve un large choix en ligne, par exemple sur lecurionaute.fr ou sur lamontagne.fr, qui, s’ils manquent de la rigueur intellectuelle et éditoriale des dictionnaires, ont le mérite de la réactivité.
En ce qui concerne l’intégration des mots anglais dans le français, nous pouvez vous reporter à l’article « La Fabrique des anglicismes » de Valérie Saugera dans la revue Travaux de linguistique, et lisible en ligne sur cairn.info.
La novlangue, quant à elle, est un « calque de l’anglais newspeak, « nouveau parler », mot créé par George Orwell en 1948 dans son roman d’anticipation 1984. Le mot […] désigne un langage ou un discours officiel stéréotypé, « politiquement correct » et mensonger, analogue à la « langue de bois » des pays totalitaires ». (Source : Dictionnaire historique de la langue Française, op. cit.). Il ne s’agit pas ici d’observer des faits de langue, mais de déjouer des pièges sémantiques destinés à tromper – il n’est donc pas très étonnant que les quelques ouvrages que nous avons trouvés sur le sujet aient une approche très politique :
Une histoire de la langue de bois [Livre] / Christian Delporte
Arguments politiques [Livre] : décryptez la langue de bois ! / Sylvain Bosselet, Vincent Billard
Petit dictionnaire de la fausse monnaie politique [Livre] / Olivier Besancenot
La novlangue managériale [Livre] : emprise et résistance / Agnès Vandevelde-Rougale ; préface Gilles Herreros
La novlangue néolibérale [Livre] : la rhétorique du fétichisme capitaliste / Alain Bihr
Des unes et des autres. Eléments de langage (Femmes, Burqa, Roms…), article collectif du Journal des anthropologues, disponible sur journals.openedition.org
Bonnes lectures.
La question que vous posez recouvre deux aspects différents du langage : d’une part, l’évolution de la langue et le développement des parlers populaires (expressions, langues de banlieues etc), qui sont une forme de l’évolution de la langue, d’autre part, les usages rhétoriques du type novlangue, éléments de langage, langue de bois, on pourrait ajouter « politiquement correct », associés aux discours politiques ou commerciaux, avec une nuance oppressive.
En ce qui concerne les parlers populaires, ils font partie depuis toujours de l’évolution des langues. Comme le remarque le lexicologue Alain Rey, « La notion de langue pure est un mythe. Pour survivre et appréhender le monde, elle doit se nourrir d’emprunts, comme elle nourrit de son vocabulaire d’autres langues, directement ou indirectement, parfois au terme d’un long cheminement, parfois dans un double mouvement d’aller-retour. Si « sport » vient bien de l’anglais, ce dernier l’a lui-même emprunté au vieux français du XIIe siècle « desport », c’est-à-dire « divertissement ».
Il faut rappeler aussi que nombre de vocables d’origine italienne ou latine présents dans l’anglais, ont transité… par le français. Le génie d’une langue tient autant à ses capacités analytiques qu’à son ouverture et son talent pour exprimer, intégrer la réalité métissée de cultures différentes. C’est le cas du français. »
(Source : la-croix.com)
C’est pour tenter de suivre cette évolution et d’en montrer les continuités qu’Alain Rey s’est donné pour tâche de diriger l’écriture d’un Dictionnaire historique de la langue française, dont pas moins de quatre éditions ont été éditées entre 1992 et 2016 - et dont l’auteur souligne, en comparant les deux dernières dans l’interview précitée, qu’« en 6 ans, le nombre de nouveaux mots apparus et employés est considérable, notamment en ce qui concerne la science et l’informatique. » !
Mais le linguiste-star de chez Robert n’est pas le seul à avoir ce souci de fixer les faits de langue dans le temps et dans l’espace : en 2007, un collectif de jeunes d’Evry s’est réuni pour écrire un dictionnaire du français des banlieues parisiennes, Le Lexik des cités, paru aux éditions Fleuve Noir.
Le problème principal que posent ces faits linguistiques aux auteurs de dictionnaires, c’est leur rapidité d’apparition, du fait des moyens de communication modernes – on imagine bien que malgré la qualité de leur travail, les dictionnaires paraîtront toujours avec un peu de retard. A titre d’exemple, nous avons sous les yeux,au moment où nous vous répondons, un exemplaire de l’ouvrage 365 mots nouveaux expliqués [Livre] / Paul Desalmand, Yves Stalloni, datant de 2013 qualifiants de « nouveaux » des vocables tels que « mondialisation » ou « pizzaiolo »… quand ce ne sont pas des mots carrément passés d’usage comme « branchouille » ou « bunga bunga ».
C’est pourquoi, en complément, nous vous conseillons les lexiques « jeunes » dont on trouve un large choix en ligne, par exemple sur lecurionaute.fr ou sur lamontagne.fr, qui, s’ils manquent de la rigueur intellectuelle et éditoriale des dictionnaires, ont le mérite de la réactivité.
En ce qui concerne l’intégration des mots anglais dans le français, nous pouvez vous reporter à l’article « La Fabrique des anglicismes » de Valérie Saugera dans la revue Travaux de linguistique, et lisible en ligne sur cairn.info.
La novlangue, quant à elle, est un « calque de l’anglais newspeak, « nouveau parler », mot créé par George Orwell en 1948 dans son roman d’anticipation 1984. Le mot […] désigne un langage ou un discours officiel stéréotypé, « politiquement correct » et mensonger, analogue à la « langue de bois » des pays totalitaires ». (Source : Dictionnaire historique de la langue Française, op. cit.). Il ne s’agit pas ici d’observer des faits de langue, mais de déjouer des pièges sémantiques destinés à tromper – il n’est donc pas très étonnant que les quelques ouvrages que nous avons trouvés sur le sujet aient une approche très politique :
Une histoire de la langue de bois [Livre] / Christian Delporte
Arguments politiques [Livre] : décryptez la langue de bois ! / Sylvain Bosselet, Vincent Billard
Petit dictionnaire de la fausse monnaie politique [Livre] / Olivier Besancenot
La novlangue managériale [Livre] : emprise et résistance / Agnès Vandevelde-Rougale ; préface Gilles Herreros
La novlangue néolibérale [Livre] : la rhétorique du fétichisme capitaliste / Alain Bihr
Des unes et des autres. Eléments de langage (Femmes, Burqa, Roms…), article collectif du Journal des anthropologues, disponible sur journals.openedition.org
Bonnes lectures.
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