Question d'origine :
Cette "citation" de Gilles Deleuze circule beaucoup sur Internet : "Être de gauche c’est d’abord penser le monde, puis son pays, puis ses proches, puis soi ; être de droite, c’est l’inverse."
Mais si je reprends "L'Abécédaire", je n'y entends cette phrase, ainsi formulée, nulle part. Par contre, j'entends :
"Ne pas être de gauche, c’est quoi ? Ne pas être de gauche, c’est un peu comme une adresse postale : partir de soi... la rue où on est, la ville, le pays, les autres pays, de plus en plus loin... On commence par soi et, dans la mesure où l’on est privilégié et qu’on vit dans un pays riche, on se demande : « Comment faire pour que la situation dure ? » On sent bien qu’il y a des dangers, que ça va pas durer, tout ça, que c’est trop dément... mais comment faire pour que ça dure. On se dit : les Chinois, ils sont loin mais comment faire pour que l’Europe dure encore, etc. Être de gauche, c’est l’inverse. C’est percevoir..."
La première citation partout reproduite ne serait-elle pas une adaptation simplifiée de la seconde, mais jamais formulée ainsi par Gilles Deleuze ? Sinon, quelle en est la source (exacte ! à l'oral ou à l'écrit) ? Merci de votre réponse.
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 11/04/2018 à 15h54
Bonjour,
Il semble en effet que Deleuze n’ait jamais prononcé ou écrit cette phrase sous cette forme, même s'il est difficile de l’affirmer définitivement vu l’ampleur de l’œuvre.
Cette citation, très fréquente sur le Web, n’est généralement pas sourcée, et quand elle l’est, nous sommes en effet renvoyés à L’Abécédaire. Vous l’avez bien vérifié, Deleuze ne dit pas exactement cela, faisant un détour par les japonais, comme on peut le voir aussi dans la transcription de l’émission :
« C’est,d’abord, une affaire de perception. Ne pas être de gauche, c’est quoi ? Ne pas être de gauche, c’est un peu comme une adresse postale : partir de soi... la rue où on est, la ville, le pays, les autres pays, de plus en plus loin... On commence par soi et, dans la mesure où l’on est privilégié et qu’on vit dans un pays riche, on se demande : "comment faire pour que la situation dure ?". On sent bien qu’il y a des dangers, que ça va pas durer, tout ça, que c’est trop dément... mais comment faire pour que ça dure. On se dit : les chinois, ils sont loin mais comment faire pour que l’Europe dure encore, etc. Être de gauche, c’est l’inverse. C’est percevoir... On dit que les japonais ne perçoivent pas comme nous. Ils perçoivent d’abord le pourtour. Alors, ils diraient : le monde, l’Europe, la France, la rue de Bizerte, moi. C’est un phénomène de perception. On perçoit d’abord l’horizon. On perçoit à l’horizon. »
Gilles Deleuze - Qu’est-ce qu’être de gauche ?
Voir aussi la vidéo sur le site des éditions Montparnasse.
Par acquis de conscience, nous avons vérifié dans les recueils Pourparlers, et Dialogues, ainsi que dans l’année 1988 du Nouvel Observateur, (il est parfois fait mention à la suite de la citation entretien au Nouvel Observateur comme ici, note 25). En vain.
Pour aller plus loin, vous pouvez tenter de contacter l’auteur du blog La diagonale de l’art, qui dans le texte Nutashkuan, un film bien engagé, cite un paragraphe entier qui comprend la citation, sans préciser, hélas, d’où il le tient.
On peut aussi trouver sur le site des Cours de Gilles Deleuze une bibliographie qui contient entre autres la référence de ses articles dans le Nouvel Observateur. D’après les titres, aucun ne semble correspondre à votre recherche.
Bonne soirée !
Il semble en effet que Deleuze n’ait jamais prononcé ou écrit cette phrase sous cette forme, même s'il est difficile de l’affirmer définitivement vu l’ampleur de l’œuvre.
Cette citation, très fréquente sur le Web, n’est généralement pas sourcée, et quand elle l’est, nous sommes en effet renvoyés à L’Abécédaire. Vous l’avez bien vérifié, Deleuze ne dit pas exactement cela, faisant un détour par les japonais, comme on peut le voir aussi dans la transcription de l’émission :
« C’est,d’abord, une affaire de perception. Ne pas être de gauche, c’est quoi ? Ne pas être de gauche, c’est un peu comme une adresse postale : partir de soi... la rue où on est, la ville, le pays, les autres pays, de plus en plus loin... On commence par soi et, dans la mesure où l’on est privilégié et qu’on vit dans un pays riche, on se demande : "comment faire pour que la situation dure ?". On sent bien qu’il y a des dangers, que ça va pas durer, tout ça, que c’est trop dément... mais comment faire pour que ça dure. On se dit : les chinois, ils sont loin mais comment faire pour que l’Europe dure encore, etc. Être de gauche, c’est l’inverse. C’est percevoir... On dit que les japonais ne perçoivent pas comme nous. Ils perçoivent d’abord le pourtour. Alors, ils diraient : le monde, l’Europe, la France, la rue de Bizerte, moi. C’est un phénomène de perception. On perçoit d’abord l’horizon. On perçoit à l’horizon. »
Gilles Deleuze - Qu’est-ce qu’être de gauche ?
Voir aussi la vidéo sur le site des éditions Montparnasse.
Par acquis de conscience, nous avons vérifié dans les recueils Pourparlers, et Dialogues, ainsi que dans l’année 1988 du Nouvel Observateur, (il est parfois fait mention à la suite de la citation entretien au Nouvel Observateur comme ici, note 25). En vain.
Pour aller plus loin, vous pouvez tenter de contacter l’auteur du blog La diagonale de l’art, qui dans le texte Nutashkuan, un film bien engagé, cite un paragraphe entier qui comprend la citation, sans préciser, hélas, d’où il le tient.
On peut aussi trouver sur le site des Cours de Gilles Deleuze une bibliographie qui contient entre autres la référence de ses articles dans le Nouvel Observateur. D’après les titres, aucun ne semble correspondre à votre recherche.
Bonne soirée !
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