A propos de mon talent
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 02/04/2018 à 21h46
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Question d'origine :
Coucou la p'tite grenouille, je me pose des questions au sujet de mon talent. Que savons-nous du talent ? Existe-t-il vraiment ? Est-il déterminé par des paramètres extérieurs ? Par notre libre-arbitre ? Ou n'est-ce qu'un énième concept pour se rassurer - et se persuader que nous sommes incapables d'accomplir ce que nous voulons ?
En espérant une réponse non relativiste,
Un kafkaïen.
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 04/04/2018 à 10h01
Bonjour,
Qu’est-ce que le talent ? Dans l’antiquité le terme « talent » désigne une unité de poids et de monnaie. C’est à partir de la parabole des talents racontée dans l’évangile selon Matthieu que son sens a dérivé jusqu’à son sens moderne pour désigner un don, une aptitude particulière :
« C’est comme un homme qui partait en voyage : il appela ses serviteurs et leur confia ses biens.
À l’un il remit une somme de cinq talents, à un autre deux talents, au troisième un seul talent, à chacun selon ses capacités. Puis il partit. Aussitôt, celui qui avait reçu les cinq talents s’en alla pour les faire valoir et en gagna cinq autres. De même, celui qui avait reçu deux talents en gagna deux autres. Mais celui qui n’en avait reçu qu’un alla creuser la terre et cacha l’argent de son maître. Longtemps après, le maître de ces serviteurs revint et il leur demanda des comptes. Celui qui avait reçu cinq talents s’approcha, présenta cinq autres talents et dit : “Seigneur, tu m’as confié cinq talents ; voilà, j’en ai gagné cinq autres.” Son maître lui déclara : “Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton seigneur.” Celui qui avait reçu deux talents s’approcha aussi et dit : “Seigneur, tu m’as confié deux talents ; voilà, j’en ai gagné deux autres.” Son maître lui déclara : “Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton seigneur.” Celui qui avait reçu un seul talent s’approcha aussi et dit : “Seigneur, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes là où tu n’as pas semé, tu ramasses là où tu n’as pas répandu le grain. J’ai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre. Le voici. Tu as ce qui t’appartient.” Son maître lui répliqua : “Serviteur mauvais et paresseux, tu savais que je moissonne là où je n’ai pas semé, que je ramasse le grain là où je ne l’ai pas répandu. Alors, il fallait placer mon argent à la banque ; et, à mon retour, je l’aurais retrouvé avec les intérêts. Enlevez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui en a dix. À celui qui a, on donnera encore, et il sera dans l’abondance ; mais celui qui n’a rien se verra enlever même ce qu’il a.
Quant à ce serviteur bon à rien, jetez-le dans les ténèbres extérieures ; là, il y aura des pleurs et des grincements de dents !” »
« Talent […] réfection (1050) de talant (980), est le même mot que « talent » [au sens de poids et somme d’argent], par la parabole évangélique, oùtalentum prend des valeurs métaphoriques . Dans cette parabole, des trois serviteurs à qui leur maître a confié des talents, deux font fructifier le leur tandis que le troisième enfouit le sien en terre, et le mot vaut symboliquement pour « étant d’âme » et « aptitude » .
En ancien français et jusqu’au XVIe s., après avoir eu lesens d’ « humeur, état d’esprit » , talent a signifié « désir, volonté » (1050), entrant dans plusieurs locutions, avoir en talent « désirer » (1080), faire son talent de « agir à son gré », dire son talent « donner son avis », et produisant une série de dérivés sortis d’usage.
Lesens moderne, « don, aptitude » apparaît dans le latin scolastique talentum (illa litteralis scientae talenta, chez Abélard, 1079-1142). En français, ce sens de talent, attesté au XIVe s., n’a pris de l’extension qu’après la Réforme […].
Par rapport à l’emploi classique, « disposition naturelle ou acquise pour réussir en quelque chose », l’usage moderne met l’accent sur l’idée d’aptitude particulière dans une activité appréciée par le groupe social (1624) ; en emploi absolu, le talent se dit d’une aptitude remarquable dans le domaine intellectuel ou artistique. »
Source : Dictionnaire historique de la langue française
D’après la définition du Cnrtl, le talent désigne indifféremment une aptitudeinnée ou acquise :
« Aptitude, capacité particulière, habileté, naturelle ou acquise, pour réussir en société et dans une activité donnée. »
Toujours d’après la parabole chrétienne, la notion de talent implique de le faire « fructifier », c’est-à-dire de le cultiver, le développer. Toutefois, le talent a pu être interprété différemment selon le contexte, les époques et les auteurs, comme en témoignent les différentes définitions et citations proposées par le Dictionnaire culturel en langue française :
« II (Don, aptitude). 1 (XIVe s.) Vieilli. Disposition naturelle ou acquise « pour réussir en quelque chose » (Furetière). -> aptitude, capacité, don. Les talents du corps et de l’esprit. « Soyez plutôt maçon, si c’est votre talent » (Boileau, Art poétique). « Ne forçons point notre talent […] » (La Fontaine, Fables, IV, 5). – ironique : Alles exercer vos talents ailleurs (s’emploie pour renvoyer une personne dont on est mécontent).
(1624) Mod. Aptitude particulière, dans une activité appréciée par le groupe social. Cultiver son talent. Se faire connaître par son talent. – Talent de société, qui intéresse, divertit en société. Un petit talent d’imitation. Un talent pour la musique. Le talent d’un virtuose. Accomplir une mission avec talent. -> adresse, habileté. Avoir des talents cachés. -> don.
« […] les talents sont encore plus rares que la naissance et les richesses ; et sans doute ils sont de plus grands biens, puisque rien ne peut les ôter. »
Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie, p. 104.
« Plusieurs écrivains de nos jours ont la manie de dégainer leur talent littéraire pour suivre leur talent politique, l’estimant fort au-dessus du premier. »
Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, t. V, p. 139.
2 (1560) Aptitude remarquable dans le domaine intellectuel ou artistique (distinguée du génie). Avoir du talent, beaucoup de talent. Il, elle, a du talent, mais pas de génie. Il n’a pas, pas beaucoup de talent. Des écrivains sans talent.
« Le talent ne s’enseigne pas. Il grandit dans le sens qui lui plaît. »
Zola, Le Bon Combat, p. 46.
« Nous sommes très longs à reconnaître dans la physionomie particulière d’un nouvel écrivain le modèle qui porte le nom de « grand talent » dans notre musée des idées générales. Justement parce que cette physionomie est nouvelle, nous ne la trouvons pastout à fait ressemblante à ce que nous appelons talent. Nous disons plutôt originalité, charme, délicatesse, force ; et puis un jour nous nous rendons compte que c’est justement tout cela le talent. »
Proust, Du côté de chez Swann, Pl., t. I, p. 137.
« Lorsqu’on se laisse aller, l’on se plaît à croire que c’est au génie. Le talent, c’est ce qui s’acquiert ; mais on n’en a cure. Je me souviens d’avoir écrit jadis qu’il fallait beaucoup de talent pour rendre un peu de génie supportable. »
André Gide, Attendu que…, p. 62.
(1865) Qualité ou ensemble de qualités (d’une œuvre) qui dénote le talent de son auteur. « La Grèce aussi consacre des statues, mais pour elle seule une sculpture, consacrée ou non – et qu’elle représente les mortels ou les immortels –, peut appartenir au divin par le talent » (Malraux, la Métamorphose des dieux).
Don littéraire ou artistique (de quelqu’un) considéré dans ses caractères propres. Un talent qui mûrit. Talent gâché. Le talent d’un peintre.
3 (avant 1734) par métonymie. Personne qui a un talent particulier (artistique, littéraire, politique, etc.), qui a du talent. Encourager les jeunes talents. Un talent ignoré. – (Collectif). Le talent : les gens de talent. »
Aujourd’hui le talent a pris une valeur particulière enressources humaines : la gestion des talents ou le management des talents consiste à identifier, attirer et fidéliser les personnes qui créent le plus de valeur ajoutée.
Dans ce cadre, le « talent » s’apprécie en fonction de ce que la personne apporte à l’entreprise, et l’adéquation de son état d’esprit, ses valeurs et ses aspirations avec les besoins de l’entreprise…
Pour aller plus loin sur la notion de talent dans le monde de l’entreprise :
- Qu’est-ce qu’un talent ? e-rh.org
- Qu'est-ce qu'un talent et pour quoi faire? huffingtonpost.fr
Si vous souhaitez approfondir, nous vous proposons de suivre le cours du Collège de France donné par Pierre-Michel Menger : Qu'est-ce que le talent ? Éléments de physique sociale des différences et des inégalités dont les vidéos sont publiées en ligne.
(voir aussi les podcasts disponibles sur le site de France Culture)
Bonne journée.
Qu’est-ce que le talent ? Dans l’antiquité le terme « talent » désigne une unité de poids et de monnaie. C’est à partir de la parabole des talents racontée dans l’évangile selon Matthieu que son sens a dérivé jusqu’à son sens moderne pour désigner un don, une aptitude particulière :
« C’est comme un homme qui partait en voyage : il appela ses serviteurs et leur confia ses biens.
À l’un il remit une somme de cinq talents, à un autre deux talents, au troisième un seul talent, à chacun selon ses capacités. Puis il partit. Aussitôt, celui qui avait reçu les cinq talents s’en alla pour les faire valoir et en gagna cinq autres. De même, celui qui avait reçu deux talents en gagna deux autres. Mais celui qui n’en avait reçu qu’un alla creuser la terre et cacha l’argent de son maître. Longtemps après, le maître de ces serviteurs revint et il leur demanda des comptes. Celui qui avait reçu cinq talents s’approcha, présenta cinq autres talents et dit : “Seigneur, tu m’as confié cinq talents ; voilà, j’en ai gagné cinq autres.” Son maître lui déclara : “Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton seigneur.” Celui qui avait reçu deux talents s’approcha aussi et dit : “Seigneur, tu m’as confié deux talents ; voilà, j’en ai gagné deux autres.” Son maître lui déclara : “Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton seigneur.” Celui qui avait reçu un seul talent s’approcha aussi et dit : “Seigneur, je savais que tu es un homme dur : tu moissonnes là où tu n’as pas semé, tu ramasses là où tu n’as pas répandu le grain. J’ai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre. Le voici. Tu as ce qui t’appartient.” Son maître lui répliqua : “Serviteur mauvais et paresseux, tu savais que je moissonne là où je n’ai pas semé, que je ramasse le grain là où je ne l’ai pas répandu. Alors, il fallait placer mon argent à la banque ; et, à mon retour, je l’aurais retrouvé avec les intérêts. Enlevez-lui donc son talent et donnez-le à celui qui en a dix. À celui qui a, on donnera encore, et il sera dans l’abondance ; mais celui qui n’a rien se verra enlever même ce qu’il a.
Quant à ce serviteur bon à rien, jetez-le dans les ténèbres extérieures ; là, il y aura des pleurs et des grincements de dents !” »
« Talent […] réfection (1050) de talant (980), est le même mot que « talent » [au sens de poids et somme d’argent], par la parabole évangélique, où
En ancien français et jusqu’au XVIe s., après avoir eu le
Le
Par rapport à l’emploi classique, « disposition naturelle ou acquise pour réussir en quelque chose », l’usage moderne met l’accent sur l’idée d’aptitude particulière dans une activité appréciée par le groupe social (1624) ; en emploi absolu, le talent se dit d’une aptitude remarquable dans le domaine intellectuel ou artistique. »
Source : Dictionnaire historique de la langue française
D’après la définition du Cnrtl, le talent désigne indifféremment une aptitude
« Aptitude, capacité particulière, habileté, naturelle ou acquise, pour réussir en société et dans une activité donnée. »
Toujours d’après la parabole chrétienne, la notion de talent implique de le faire « fructifier », c’est-à-dire de le cultiver, le développer. Toutefois, le talent a pu être interprété différemment selon le contexte, les époques et les auteurs, comme en témoignent les différentes définitions et citations proposées par le Dictionnaire culturel en langue française :
« II (Don, aptitude). 1 (XIVe s.) Vieilli. Disposition naturelle ou acquise « pour réussir en quelque chose » (Furetière). -> aptitude, capacité, don. Les talents du corps et de l’esprit. « Soyez plutôt maçon, si c’est votre talent » (Boileau, Art poétique). « Ne forçons point notre talent […] » (La Fontaine, Fables, IV, 5). – ironique : Alles exercer vos talents ailleurs (s’emploie pour renvoyer une personne dont on est mécontent).
(1624) Mod. Aptitude particulière, dans une activité appréciée par le groupe social. Cultiver son talent. Se faire connaître par son talent. – Talent de société, qui intéresse, divertit en société. Un petit talent d’imitation. Un talent pour la musique. Le talent d’un virtuose. Accomplir une mission avec talent. -> adresse, habileté. Avoir des talents cachés. -> don.
« […] les talents sont encore plus rares que la naissance et les richesses ; et sans doute ils sont de plus grands biens, puisque rien ne peut les ôter. »
Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie, p. 104.
« Plusieurs écrivains de nos jours ont la manie de dégainer leur talent littéraire pour suivre leur talent politique, l’estimant fort au-dessus du premier. »
Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe, t. V, p. 139.
2 (1560) Aptitude remarquable dans le domaine intellectuel ou artistique (distinguée du génie). Avoir du talent, beaucoup de talent. Il, elle, a du talent, mais pas de génie. Il n’a pas, pas beaucoup de talent. Des écrivains sans talent.
« Le talent ne s’enseigne pas. Il grandit dans le sens qui lui plaît. »
Zola, Le Bon Combat, p. 46.
« Nous sommes très longs à reconnaître dans la physionomie particulière d’un nouvel écrivain le modèle qui porte le nom de « grand talent » dans notre musée des idées générales. Justement parce que cette physionomie est nouvelle, nous ne la trouvons pastout à fait ressemblante à ce que nous appelons talent. Nous disons plutôt originalité, charme, délicatesse, force ; et puis un jour nous nous rendons compte que c’est justement tout cela le talent. »
Proust, Du côté de chez Swann, Pl., t. I, p. 137.
« Lorsqu’on se laisse aller, l’on se plaît à croire que c’est au génie. Le talent, c’est ce qui s’acquiert ; mais on n’en a cure. Je me souviens d’avoir écrit jadis qu’il fallait beaucoup de talent pour rendre un peu de génie supportable. »
André Gide, Attendu que…, p. 62.
(1865) Qualité ou ensemble de qualités (d’une œuvre) qui dénote le talent de son auteur. « La Grèce aussi consacre des statues, mais pour elle seule une sculpture, consacrée ou non – et qu’elle représente les mortels ou les immortels –, peut appartenir au divin par le talent » (Malraux, la Métamorphose des dieux).
Don littéraire ou artistique (de quelqu’un) considéré dans ses caractères propres. Un talent qui mûrit. Talent gâché. Le talent d’un peintre.
3 (avant 1734) par métonymie. Personne qui a un talent particulier (artistique, littéraire, politique, etc.), qui a du talent. Encourager les jeunes talents. Un talent ignoré. – (Collectif). Le talent : les gens de talent. »
Aujourd’hui le talent a pris une valeur particulière en
Dans ce cadre, le « talent » s’apprécie en fonction de ce que la personne apporte à l’entreprise, et l’adéquation de son état d’esprit, ses valeurs et ses aspirations avec les besoins de l’entreprise…
Pour aller plus loin sur la notion de talent dans le monde de l’entreprise :
- Qu’est-ce qu’un talent ? e-rh.org
- Qu'est-ce qu'un talent et pour quoi faire? huffingtonpost.fr
Si vous souhaitez approfondir, nous vous proposons de suivre le cours du Collège de France donné par Pierre-Michel Menger : Qu'est-ce que le talent ? Éléments de physique sociale des différences et des inégalités dont les vidéos sont publiées en ligne.
(voir aussi les podcasts disponibles sur le site de France Culture)
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