Accès wifi mineurs bibliothèque
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 30/03/2018 à 08h52
1039 vues
Question d'origine :
Bonjour,
Je souhaiterais savoir s'il existe une loi pour réglementer l'accès wifi pour les mineurs dans les bibliothèques publiques ?
Un mineur peut-il consulter Internet via l'accès wifi, sans s'identifier ? ou/et sans autorisation parentale ?
Je vous remercie pour votre réponse.
Bien cordialement
PH
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 31/03/2018 à 11h31
Bonjour,
Réglementer l’accès au wifi en bibliothèque pour les mineurs touche à une problématique plus vaste, qui est celle du contrôle de l’identité des usagers. Cette question est concernée par de nombreux textes applicables (Code des postes et communications électroniques, loi LCEN de 2004, loi anti-terroriste de 2006, loi Hadopi de 2009, etc.) dont les dispositions peuvent être délicates à interpréter.
Notons que la Charte du droit fondamental des citoyens à accéder à l'information et aux savoirs par les bibliothèques de l'Abf défend un accès à internet sans restrictions ou contraintes autres que celles imposées par la loi, et ce afin de garantir les droits fondamentaux à l'information, à la formation et à la culture, ainsi que la protection de la vie privée :
«6 - Le droit d'accéder à un internet public ouvert et fiable
Afin de garantir aux citoyens l'exercice de leurs droits fondamentaux à l'information, à la formation et à la culture, les bibliothèques leur donnent accès gratuitement à un internet sécurisé, fiable et continu, dans les meilleures conditions techniques possibles.
Les bibliothèques ne doivent pas mettre en place de restrictions ou de contraintes à l’accès Internet autres que ce que prévoit la loi, que ce soit en termes d’identification des usagers, de restrictions de la bande passante ou de filtrage des contenus. S'il existe des contraintes techniques, le citoyen doit en être explicitement informé afin qu'il puisse le cas échéant les contester auprès de l'autorité.
Lors de leur consultation d’Internet à la bibliothèque, les citoyens doivent avoir la garantie que leur droit à la vie privée est respecté et qu’aucune donnée personnelle les concernant n’est collectée, ni transmise à des tiers en dehors des cas explicitement prévus par la loi. »
C’est notamment au regard des violations de la propriété intellectuelle (téléchargement illégal d’œuvres protégées par le droit d’auteur), que se pose la question du contrôle de l’identité des utilisateurs ayant accès au wifi. A ce titre, une décision de la Cour de Justice de l’union européenne (CJUE) en 2016 suite à un litige entre Sony Music et une boutique allemande revêt une importance particulière :
« Le 15 septembre 2016, la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu une décision d’importance, contre l'avis de son avocat général, sur lanécessité pour tout professionnel – et implicitement une bibliothèque - mettant à disposition un réseau Wi-Fi de le sécuriser et de recueillir l'identité réelle de leurs utilisateurs.
La CJUE était en effet saisie par la justice allemande du cas du gestionnaire d’une boutique de sons et lumières, proposant un accès Wi-Fi gratuit et ouvert, sans sécurisation contre le téléchargement en provenance des réseaux de Peer-to-Peer. C’est Sony Music qui poursuivait le commerçant et exigeait qu’il soit reconnu civilement responsable des téléchargements illégaux de fichiers ainsi qu’il lui soit fait obligation de sécuriser le réseau Wi-Fi.[…]
«lorsque plusieurs droits fondamentaux protégés par le droit de l’Union sont en concurrence, il incombe aux autorités ou à la juridiction nationale concernée de veiller à assurer un juste équilibre entre ces droits ».
Les magistrats de la CJUE évoquent trois hypothèses.
En premier lieu, « s’agissant, de la surveillance de l’ensemble des informations transmises, une telle mesure doit d’emblée être exclue, car contraire à la directive (…) qui interdit qu’il soit imposé, notamment aux fournisseurs d’accès à un réseau de communication, une obligation générale de surveillance des informations que ceux-ci transmettent. »
« Pour ce qui est, deuxièmement, de la mesure consistant à arrêter complètement la connexion à Internet, il y a lieu de constater que sa mise en œuvre entraînerait une atteinte caractérisée à la liberté d’entreprise de la personne qui, ne serait-ce qu’à titre accessoire, poursuit une activité économique consistant à fournir un accès à Internet, en lui interdisant totalement, de fait, de poursuivre cette activité afin de remédier à une violation limitée du droit d’auteur sans envisager l’adoption de mesures moins attentatoires à cette liberté. »
« En ce qui concerne, troisièmement, la mesure consistant à sécuriser la connexion à Internet au moyen d’un mot de passe, il convient de relever que celle-ci est susceptible de restreindre tant le droit à la liberté d’entreprise du prestataire fournissant un service d’accès à un réseau de communication que le droit à la liberté d’information des destinataires de ce service. »
Il précisent qu’« une mesure consistant à sécuriser la connexion à Internet au moyen d’un mot de passe peut dissuader les utilisateurs de cette connexion de violer un droit d’auteur ou des droits voisins, pour autant que ces utilisateurs soient obligés de révéler leur identité afin d’obtenir le mot de passe requis et ne puissent donc pas agir anonymement ».
La conclusion, qui a déjà suscité en France, sur la toile, d’âpres commentaires - est donc implacable : « Dans ces conditions,une mesure visant à sécuriser la connexion à Internet au moyen d’un mot de passe doit être considérée comme étant nécessaire pour assurer une protection effective du droit fondamental à la protection de la propriété intellectuelle . (…) la mesure consistant à sécuriser la connexion doit être considérée comme étant susceptible de réaliser un juste équilibre entre, d’une part, le droit fondamental à la protection de la propriété intellectuelle et, d’autre part, le droit à la liberté d’entreprise du prestataire fournissant un service d’accès à un réseau de communication ainsi que le droit à la liberté d’information des destinataires de ce service. »
Et de préciser que rien ne s’oppose donc « à l’adoption d’une injonction qui, telle que celle en cause au principal, exige d’un fournisseur d’accès à un réseau de communication permettant au public de se connecter à Internet, sous peine d’astreinte, qu’il empêche des tiers de mettre à la disposition du public, au moyen de cette connexion à Internet, une œuvre déterminée ou des parties de celle-ci protégées par le droit d’auteur, sur une bourse d’échanges Internet (peer-to-peer), lorsque ce fournisseur a le choix des mesures techniques à adopter pour se conformer à cette injonction,même si ce choix se réduit à la seule mesure consistant à sécuriser la connexion à Internet au moyen d’un mot de passe, pour autant que les utilisateurs de ce réseau soient obligés de révéler leur identité afin d’obtenir le mot de passe requis et ne puissent donc pas agir anonymement . » »
Source : livreshebdo.fr
En complément nous ajoutons un extrait de l’article de Scinfolex publié peu après que la décision ne soit rendue, qui s’intéresse aux implications pour la protection de l’anonymat des usagers en bibliothèque :
« En 2010, l’IABD (Interassociation Archives Bibliothèques et Documentation) avait produit une analyse juridique du cadre législatif en vigueur qui montrait clairement que les bibliothèques n’étaient en réalité soumises ni à l’obligation d’identifier leurs usagers, ni à celle de mettre en place des mesures de filtrage des contenus. Ces principes protégeaient l’anonymat des usagers des bibliothèques, ainsi que la liberté d’accès à l’information, et ils n’ont (miraculeusement) pas été remis en cause par le cortège de lois sécuritaires adoptées en France ces dernières années. […]
Vers une obligation d’identification des usagers ?
En effet, la Cour estime que l’identification par mot de passe constitue une mesure proportionnée, « susceptible de dissuader les usagers d’un réseau de violer des droits de propriété intellectuelle« . Mais afin d' »assurer la réalisation de cet effet dissuasif« , la Cour souligne qu’ :
il est nécessaire que les utilisateurs, pour éviter qu’ils n’agissent anonymement, soient obligés de révéler leur identité avant de pouvoir obtenir le mot de passe requis.
Or si l’on en croit les préconisations de la CNIL, les personnes morales, privées ou publiques, étaient jusqu’à présent dispensées de cette obligation d’identifier les personnes utilisant les connexions Internet qu’elles mettaient à leur disposition. Elles doivent conserver les données de connexion pendant un an, comme nous l’avons vu ci-dessus, mais elles n’ont pas obligation de relier ces logs à des utilisateurs identifiés. Certaines bibliothèques, comme la BULAC par exemple (voir cette interview sur Bibliobsession de l’un de ses responsables) mettent même un point d’honneur à ne pas aller au-delà de la loi en matière d’accès à Internet, en n’imposant pas de mesures d’identification afin de préserver le droit à la vie privée de leurs lecteurs. Aux États-Unis, certains établissements vont même plus loin, notamment dans le cadre du Library Freedom Project, en installant un relai TOR afin d’anonymiser et protéger les données personnelles des usagers qui utilisent la connexion Internet de l’établissement (et l’idée commence visiblement à faire son chemin en France).
La question qu’on peut dès lors se poser est de savoir si ces pratiques protectrices vont être remises en cause par la décision de la CJUE ? »
Source : scinfolex.com
Généralement les bibliothèques publiques en France proposent soit un accès wifi ouvert à tous mais soumis à la création d’un compte avec mot de passe, soit un accès limité aux usagers inscrits.
Certaines chartes précisent par exemple que « pour les mineurs, l’accès Wifi se fait sous la responsabilité de leurs parents ou tuteurs par le biais d’une autorisation parentale (à demander au personnel). » (source : médiathèque d’Artigues)
Pour une réponse plus précise à votre question, nous vous conseillons de vous adresser au service Questions ? Réponses ! de l’enssib, qui répond gratuitement aux questions dans le domaine des sciences de l'information et des bibliothèques.
Bonne journée.
Réglementer l’accès au wifi en bibliothèque pour les mineurs touche à une problématique plus vaste, qui est celle du contrôle de l’identité des usagers. Cette question est concernée par de nombreux textes applicables (Code des postes et communications électroniques, loi LCEN de 2004, loi anti-terroriste de 2006, loi Hadopi de 2009, etc.) dont les dispositions peuvent être délicates à interpréter.
Notons que la Charte du droit fondamental des citoyens à accéder à l'information et aux savoirs par les bibliothèques de l'Abf défend un accès à internet sans restrictions ou contraintes autres que celles imposées par la loi, et ce afin de garantir les droits fondamentaux à l'information, à la formation et à la culture, ainsi que la protection de la vie privée :
«
Afin de garantir aux citoyens l'exercice de leurs droits fondamentaux à l'information, à la formation et à la culture, les bibliothèques leur donnent accès gratuitement à un internet sécurisé, fiable et continu, dans les meilleures conditions techniques possibles.
Les bibliothèques ne doivent pas mettre en place de restrictions ou de contraintes à l’accès Internet autres que ce que prévoit la loi, que ce soit en termes d’identification des usagers, de restrictions de la bande passante ou de filtrage des contenus. S'il existe des contraintes techniques, le citoyen doit en être explicitement informé afin qu'il puisse le cas échéant les contester auprès de l'autorité.
Lors de leur consultation d’Internet à la bibliothèque, les citoyens doivent avoir la garantie que leur droit à la vie privée est respecté et qu’aucune donnée personnelle les concernant n’est collectée, ni transmise à des tiers en dehors des cas explicitement prévus par la loi. »
C’est notamment au regard des violations de la propriété intellectuelle (téléchargement illégal d’œuvres protégées par le droit d’auteur), que se pose la question du contrôle de l’identité des utilisateurs ayant accès au wifi. A ce titre, une décision de la Cour de Justice de l’union européenne (CJUE) en 2016 suite à un litige entre Sony Music et une boutique allemande revêt une importance particulière :
« Le 15 septembre 2016, la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu une décision d’importance, contre l'avis de son avocat général, sur la
La CJUE était en effet saisie par la justice allemande du cas du gestionnaire d’une boutique de sons et lumières, proposant un accès Wi-Fi gratuit et ouvert, sans sécurisation contre le téléchargement en provenance des réseaux de Peer-to-Peer. C’est Sony Music qui poursuivait le commerçant et exigeait qu’il soit reconnu civilement responsable des téléchargements illégaux de fichiers ainsi qu’il lui soit fait obligation de sécuriser le réseau Wi-Fi.[…]
«
Les magistrats de la CJUE évoquent trois hypothèses.
En premier lieu, « s’agissant, de la surveillance de l’ensemble des informations transmises, une telle mesure doit d’emblée être exclue, car contraire à la directive (…) qui interdit qu’il soit imposé, notamment aux fournisseurs d’accès à un réseau de communication, une obligation générale de surveillance des informations que ceux-ci transmettent. »
« Pour ce qui est, deuxièmement, de la mesure consistant à arrêter complètement la connexion à Internet, il y a lieu de constater que sa mise en œuvre entraînerait une atteinte caractérisée à la liberté d’entreprise de la personne qui, ne serait-ce qu’à titre accessoire, poursuit une activité économique consistant à fournir un accès à Internet, en lui interdisant totalement, de fait, de poursuivre cette activité afin de remédier à une violation limitée du droit d’auteur sans envisager l’adoption de mesures moins attentatoires à cette liberté. »
« En ce qui concerne, troisièmement, la mesure consistant à sécuriser la connexion à Internet au moyen d’un mot de passe, il convient de relever que celle-ci est susceptible de restreindre tant le droit à la liberté d’entreprise du prestataire fournissant un service d’accès à un réseau de communication que le droit à la liberté d’information des destinataires de ce service. »
Il précisent qu’« une mesure consistant à sécuriser la connexion à Internet au moyen d’un mot de passe peut dissuader les utilisateurs de cette connexion de violer un droit d’auteur ou des droits voisins, pour autant que ces utilisateurs soient obligés de révéler leur identité afin d’obtenir le mot de passe requis et ne puissent donc pas agir anonymement ».
La conclusion, qui a déjà suscité en France, sur la toile, d’âpres commentaires - est donc implacable : « Dans ces conditions,
Et de préciser que rien ne s’oppose donc « à l’adoption d’une injonction qui, telle que celle en cause au principal, exige d’un fournisseur d’accès à un réseau de communication permettant au public de se connecter à Internet, sous peine d’astreinte, qu’il empêche des tiers de mettre à la disposition du public, au moyen de cette connexion à Internet, une œuvre déterminée ou des parties de celle-ci protégées par le droit d’auteur, sur une bourse d’échanges Internet (peer-to-peer), lorsque ce fournisseur a le choix des mesures techniques à adopter pour se conformer à cette injonction,
Source : livreshebdo.fr
En complément nous ajoutons un extrait de l’article de Scinfolex publié peu après que la décision ne soit rendue, qui s’intéresse aux implications pour la protection de l’anonymat des usagers en bibliothèque :
« En 2010, l’IABD (Interassociation Archives Bibliothèques et Documentation) avait produit une analyse juridique du cadre législatif en vigueur qui montrait clairement que les bibliothèques n’étaient en réalité soumises ni à l’obligation d’identifier leurs usagers, ni à celle de mettre en place des mesures de filtrage des contenus. Ces principes protégeaient l’anonymat des usagers des bibliothèques, ainsi que la liberté d’accès à l’information, et ils n’ont (miraculeusement) pas été remis en cause par le cortège de lois sécuritaires adoptées en France ces dernières années. […]
En effet, la Cour estime que l’identification par mot de passe constitue une mesure proportionnée, « susceptible de dissuader les usagers d’un réseau de violer des droits de propriété intellectuelle« . Mais afin d' »assurer la réalisation de cet effet dissuasif« , la Cour souligne qu’ :
il est nécessaire que les utilisateurs, pour éviter qu’ils n’agissent anonymement, soient obligés de révéler leur identité avant de pouvoir obtenir le mot de passe requis.
Or si l’on en croit les préconisations de la CNIL, les personnes morales, privées ou publiques, étaient jusqu’à présent dispensées de cette obligation d’identifier les personnes utilisant les connexions Internet qu’elles mettaient à leur disposition. Elles doivent conserver les données de connexion pendant un an, comme nous l’avons vu ci-dessus, mais elles n’ont pas obligation de relier ces logs à des utilisateurs identifiés. Certaines bibliothèques, comme la BULAC par exemple (voir cette interview sur Bibliobsession de l’un de ses responsables) mettent même un point d’honneur à ne pas aller au-delà de la loi en matière d’accès à Internet, en n’imposant pas de mesures d’identification afin de préserver le droit à la vie privée de leurs lecteurs. Aux États-Unis, certains établissements vont même plus loin, notamment dans le cadre du Library Freedom Project, en installant un relai TOR afin d’anonymiser et protéger les données personnelles des usagers qui utilisent la connexion Internet de l’établissement (et l’idée commence visiblement à faire son chemin en France).
La question qu’on peut dès lors se poser est de savoir si ces pratiques protectrices vont être remises en cause par la décision de la CJUE ? »
Source : scinfolex.com
Généralement les bibliothèques publiques en France proposent soit un accès wifi ouvert à tous mais soumis à la création d’un compte avec mot de passe, soit un accès limité aux usagers inscrits.
Certaines chartes précisent par exemple que « pour les mineurs, l’accès Wifi se fait sous la responsabilité de leurs parents ou tuteurs par le biais d’une autorisation parentale (à demander au personnel). » (source : médiathèque d’Artigues)
Pour une réponse plus précise à votre question, nous vous conseillons de vous adresser au service Questions ? Réponses ! de l’enssib, qui répond gratuitement aux questions dans le domaine des sciences de l'information et des bibliothèques.
Bonne journée.
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
quels sont les symboles maçonniques que l'on peut décrire...
Commentaires 0
Connectez-vous pour pouvoir commenter.
Se connecter