Question d'origine :
Cher guichet,
Que mangent couramment et les jours de fête les artisans en France sous l’Ancien Régime'?
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 20/01/2018 à 15h06
Bonjour,
Nous vous avions déjà proposé des éléments de réponse à propos de la nourriture des artisans sous l’Ancien Régime.
Cependant, nous vous proposons en complément cet article de synthèse : « Contribution à l’histoire de la consommation alimentaire du XIVe au XVII siècle », de Bartolomé Benassar et Joseph Goy, paru dans les Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 30ᵉ année, N. 2-3, 1975. pp. 402-430.
Il fait le point sur l’alimentation dans les différentes couches sociales. A propos des sources utilisées pour l’histoire de l’alimentation, les deux auteurs précisent qu’elles sont « sont extrêmement variées, rarement sérielles, souvent indirectes comme dans le cas des sources origine fiscale (octrois taxes etc.), beaucoup plus nombreuses pour les villes que pour les campagnes et laissant dans l’ombre, pour une bonne partie de l’Ancien Régime, les quantités consommées par les ouvriers-artisans-marchands sans parler de énorme lacune de la consommation infantile et juvénile ».
Concernant les repas de fêtes, nous ne sommes pas en mesure de vous donner une réponse précise, d’autant qu’il n’est pas certain que l’on puisse isoler des fêtes spécifiques à cette catégorie socio-professionnelle particulière, qui s’insère inévitablement dans un tissu social plus large. Cependant :
Vous pourriez commencer par consulter Fête et Révolte, des mentalités populaires du XVIe au XVIIe siècle, d’Yves-Marie Bercé. Outre la problématique principale de l’ouvrage, qui s’interroge sur les dimensions potentiellement subversives des réunions festives, l’auteur décrit les différents types de fêtes (carnavals, charivaris, spectacles de rue…) qui avaient lieu sous l’Ancien Régime.
Le mérite de cet ouvrage est en outre de mettre en avant les spécificités régionales des grandes fêtes populaires, urbaines et rurales.
Le livre de Nadine Cretin (historienne et anthropologue) Fête des fous, Saint-Jean et Belles de Mai : une histoire passe en revue les fêtes traditionnelles et populaires. Vous pourriez en tirer des éléments transposables au monde artisanal de l’Ancien Régime.
Ainsi, évoquant le carnaval (mentionné dès le XVIe siècle), elle confirme que l’abondance alimentaire y était de mise. « Les repas copieux, particulièrement celui du Mardi gras, comprenaient bouillon gras, ragoûts de viandes, pois, fèves et autres aliments flatulents. Ils se terminaient par des pâtisseries restées traditionnelles : crêpes, gaufres, beignets ou bugnes, roussettes, rissoles… ».
Par ailleurs, vous trouverez dans les archives de la Revue des Deux Mondes un article de 1876 (dont les informations sont donc à manier avec précaution, du fait de son ancienneté !) de l’économiste Henri Baudrillard, intitulé « Les Fêtes publiques dans l’ancienne monarchie française ».
« Un autre accessoire grossier [des fêtes populaires], ce sont les largesses faites au peuple. […] Alors, c’étaient aussi, des bombances, d’interminables ripailles. La féodalité les avait déjà vues dans leur plein développement. Le peuple avait l’habitude et la passion de ces sortes de réjouissances fort à la mode dans les corporations et les confréries. Ces repas populaires, véritablement pantagruéliques, étaient usités dans tous les pays, et on n’a pas l’idée des folles excentricités qui se produisirent en ce genre. Ce n’est plus même au moyen âge, c’est en 1601 qu’on voit les bouchers de Kœnigsberg imaginer de fabriquer une andouille de 1,005 aunes, et les boulangers, qui la mangent avec eux de compagnie, fournir des pains de 5 aunes pour la même circonstance ».
Enfin, la boisson accompagnant inévitablement les repas, nous vous invitons à parcourir Ivresse et ivrognerie dans la France moderne de l’historien Matthieu Lecoutre. Dans le paragraphe sur « les invitations à l’ivresse par “bienséance” : les réjouissances publiques en ville, l’auteur rappelle que, durant ces fêtes, « proposer à boire au peuple s’apparente à un repas offrent, à un banal don de nourriture. Ces sont des libéralités charitables que le puissant […] offre à la population, tel un père nourricier […]. Mais cette ivresse incitée permet aussi d’agir comme exutoire : la société sort davantage soudée. Nous retrouvons ici l’ivresse collective comme geste de sociabilité et de compromis, mais à l’échelle de la communauté entière. Toutes les catégories participent. Des élites offrent le vin et le peuple s’enivre ».
L’autre intérêt de cette étude est qu’elle propose un tableau (p. 304) des réjouissances publiques « officielles » de plusieurs grande villes françaises, principalement données pour célébrer un fait royal qui peut être utile pour vos recherches.
Bonnes lectures
Nous vous avions déjà proposé des éléments de réponse à propos de la nourriture des artisans sous l’Ancien Régime.
Cependant, nous vous proposons en complément cet article de synthèse : « Contribution à l’histoire de la consommation alimentaire du XIVe au XVII siècle », de Bartolomé Benassar et Joseph Goy, paru dans les Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 30ᵉ année, N. 2-3, 1975. pp. 402-430.
Il fait le point sur l’alimentation dans les différentes couches sociales. A propos des sources utilisées pour l’histoire de l’alimentation, les deux auteurs précisent qu’elles sont « sont extrêmement variées, rarement sérielles, souvent indirectes comme dans le cas des sources origine fiscale (octrois taxes etc.), beaucoup plus nombreuses pour les villes que pour les campagnes et laissant dans l’ombre, pour une bonne partie de l’Ancien Régime, les quantités consommées par les ouvriers-artisans-marchands sans parler de énorme lacune de la consommation infantile et juvénile ».
Concernant les repas de fêtes, nous ne sommes pas en mesure de vous donner une réponse précise, d’autant qu’il n’est pas certain que l’on puisse isoler des fêtes spécifiques à cette catégorie socio-professionnelle particulière, qui s’insère inévitablement dans un tissu social plus large. Cependant :
Vous pourriez commencer par consulter Fête et Révolte, des mentalités populaires du XVIe au XVIIe siècle, d’Yves-Marie Bercé. Outre la problématique principale de l’ouvrage, qui s’interroge sur les dimensions potentiellement subversives des réunions festives, l’auteur décrit les différents types de fêtes (carnavals, charivaris, spectacles de rue…) qui avaient lieu sous l’Ancien Régime.
Le mérite de cet ouvrage est en outre de mettre en avant les spécificités régionales des grandes fêtes populaires, urbaines et rurales.
Le livre de Nadine Cretin (historienne et anthropologue) Fête des fous, Saint-Jean et Belles de Mai : une histoire passe en revue les fêtes traditionnelles et populaires. Vous pourriez en tirer des éléments transposables au monde artisanal de l’Ancien Régime.
Ainsi, évoquant le carnaval (mentionné dès le XVIe siècle), elle confirme que l’abondance alimentaire y était de mise. « Les repas copieux, particulièrement celui du Mardi gras, comprenaient bouillon gras, ragoûts de viandes, pois, fèves et autres aliments flatulents. Ils se terminaient par des pâtisseries restées traditionnelles : crêpes, gaufres, beignets ou bugnes, roussettes, rissoles… ».
Par ailleurs, vous trouverez dans les archives de la Revue des Deux Mondes un article de 1876 (dont les informations sont donc à manier avec précaution, du fait de son ancienneté !) de l’économiste Henri Baudrillard, intitulé « Les Fêtes publiques dans l’ancienne monarchie française ».
« Un autre accessoire grossier [des fêtes populaires], ce sont les largesses faites au peuple. […] Alors, c’étaient aussi, des bombances, d’interminables ripailles. La féodalité les avait déjà vues dans leur plein développement. Le peuple avait l’habitude et la passion de ces sortes de réjouissances fort à la mode dans les corporations et les confréries. Ces repas populaires, véritablement pantagruéliques, étaient usités dans tous les pays, et on n’a pas l’idée des folles excentricités qui se produisirent en ce genre. Ce n’est plus même au moyen âge, c’est en 1601 qu’on voit les bouchers de Kœnigsberg imaginer de fabriquer une andouille de 1,005 aunes, et les boulangers, qui la mangent avec eux de compagnie, fournir des pains de 5 aunes pour la même circonstance ».
Enfin, la boisson accompagnant inévitablement les repas, nous vous invitons à parcourir Ivresse et ivrognerie dans la France moderne de l’historien Matthieu Lecoutre. Dans le paragraphe sur « les invitations à l’ivresse par “bienséance” : les réjouissances publiques en ville, l’auteur rappelle que, durant ces fêtes, « proposer à boire au peuple s’apparente à un repas offrent, à un banal don de nourriture. Ces sont des libéralités charitables que le puissant […] offre à la population, tel un père nourricier […]. Mais cette ivresse incitée permet aussi d’agir comme exutoire : la société sort davantage soudée. Nous retrouvons ici l’ivresse collective comme geste de sociabilité et de compromis, mais à l’échelle de la communauté entière. Toutes les catégories participent. Des élites offrent le vin et le peuple s’enivre ».
L’autre intérêt de cette étude est qu’elle propose un tableau (p. 304) des réjouissances publiques « officielles » de plusieurs grande villes françaises, principalement données pour célébrer un fait royal qui peut être utile pour vos recherches.
Bonnes lectures
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