Question d'origine :
Bonjour Cher Guichet,
Connaît-on aujourd'hui, presque 80 ans après la tragédie, les raisons exactes qui ont conduit le 3 juillet 1940 le Commandant de la flotte de l'Atlantique du régime de Vichy à ne pas donner suite aux options à lui présentées par le Commandant de la force anglaise concentrée à Gibraltar ?
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 02/01/2018 à 13h51
Bonjour,
Pour mémoire, après l’armistice signé par la France avec l’Allemagne, les Britanniques craignent que la flotte française tombe aux mains des nazis. Ils lancent un ultimatum à tous les navires de la Royale stationnés dans le monde. A Mers el-Kébir, sur le golfe d’Oran, les pourparlers échouent. La Royal Navy attaque les onze bâtiments stationnés dans le port, tuant 1 297 marins français.
Tout d'abord, un résumé circonstancié des moments précédant la bataille, qui a le mérite de mettre en scène les protagonistes de cette tragédie.
Au fil des mots de l’histoire
Herodote:
Attaque de Mers el-Kébir :
Le 3 juillet 1940, la Royal Navy attaque la flotte française amarrée dans la rade nord-africaine de Mers el-Kébir, près d'Oran (1297 morts et 350 blessés chez les marins français).
Le Premier ministre britannique Winston Churchill manifeste de la sorte sa détermination à poursuivre la guerre envers et contre tout, mais c'est au prix d'une rupture sanglante avec son ancien allié français.
La flotte française ne doit pas devenir allemande.
Seuls à faire face aux nazis, après l'armistice franco-allemand du 22 juin 1940, les Anglais craignent non sans raison que la flotte française, puissante et réputée, ne soit un jour réquisitionnée par les Allemands même si la convention d'armistice prévoit le désarmement des navires dans leur port d'attache.
Churchill décide en conséquence de s'emparer de tous les navires de guerre français à sa portée. À tout le moins, il demande que les Français les mettent hors de portée de l'ennemi, à la Martinique, par exemple. C'est l'opération « Catapult ».
Dès le 2 juillet 1940, par des ruses diverses ou par la menace, des officiers britanniques montent à bord des navires français amarrés dans leurs ports, à Portsmouth et Plymouth. Capturés, les marins et officiers se voient proposer de rejoindre de Gaulle. La plupart refusent, par fidélité au gouvernement légitime, et se font rapatrier.
Les Anglais excluent de s'en prendre aux navires français amarrés à Toulon, car leur attaque est risquée et d'autre part inciterait les Allemands à occuper ce port, pour l'heure épargné. L'escadre amarrée dans la rade de Mers el-Kébir, en Algérie, paraît davantage à leur portée.
Churchill affiche sa détermination
Churchill doit résister dans son propre cabinet de guerre à ceux qui, tel Lord Halifax, conservent l'espoir d'amadouer Hitler ! Le Premier ministre voit donc dans l'attaque de Mers el-Kébir un double avantage : d'une part enlever aux Allemands toute chance de s'emparer des navires, d'autre part - le plus important sans doute à ses yeux - briser tout espoir d'accommodement avec le Führer et ses douteux comparses de Vichy.
Il veut prouver en particulier au président américain Franklin Roosevelt qu'il est déterminé à poursuivre la guerre envers et contre tout, au besoin contre son ancienne alliée la France, si celle-ci devait se rapprocher de l'Allemagne.
Il câble à l'amiral Sir James Somerville, basé à Gibraltar : « Vous êtes chargé de l'une des missions les plus désagréables et les plus difficiles à laquelle ait jamais été confronté un amiral britannique ».
Il est vrai que ce dernier reçoit de mauvais gré l'ordre de mettre hors d'état de nuire ses anciens compagnons de combat. Il va tout tenter pour éviter l'irrémédiable... Le 3 juillet au matin, l'amiral se présente devant la rade de Mers el-Kébir, à la tête d'une puissante flotte de guerre.
Un plénipotentiaire anglais, le capitaine Cedric Holland, se rend auprès de l'amiral français Marcel Gensoul, sur le croiseur Dunkerque, et lui propose soit de suivre les Anglais, soit encore de se réfugier dans les Antilles, soit à la rigueur de se saborder.
L'amiral Gensoul fait traîner les négociations en longueur et met ses navires en position de combat ainsi que peut l'observer le plénipotentiaire. Il fait valoir qu'une attaque anglaise équivaudrait à une « déclaration de guerre ». À 15h, pour montrer sa détermination, Somerville fait miner l'entrée de la passe par ses avions de l'aéronavale.
Cependant que les discussions s'éternisent, les Anglais captent un message de l'amiral Darlan au vice-amiral Gensoul : le chef de la marine française lui fait savoir que les escadres de Toulon et d'Alger se portent à son secours ! À 17h30, Somerville fait savoir à l'amiral Gensoul que son ultimatum arrive à expiration. Les négociations s'interrompent et le plénipotentiaire regagne aussitôt la flotte anglaise, à l'abri derrière la jetée qui protège le port.
Peu avant 18 heures, les Anglais ouvrent le feu sur l'escadre, composée de puissants et prestigieux croiseurs ou cuirassés : Dunkerque, Strasbourg, Provence, Bretagne, ainsi que de 15 torpilleurs, 6 sous-marins etc. Coulé à la troisième minute du combat, le Bretagne entraîne près d'un millier de marins dans la mort.
Au bout d'un quart d'heure, le tir cesse mais les avions anglais reviennent à la charge le 6 juillet et endommagent gravement le Dunkerque.
Les Anglais ont néanmoins la surprise de constater que le Strasbourg et trois contre-torpilleurs, dissimulés par la fumée des combats, ont réussi à franchir le barrage de mines. Ils regagnent Toulon, suivis quelques semaines plus tard du Provence et du Dunkerque. Ces navires vont en définitive se saborder avec le reste de la flotte le 27 novembre 1942 pour échapper cette fois aux Allemands.
Alexandrie et Dakar aussi
L'opération «Catapult» a plus de chance à Alexandrie, en Égypte, où l'amiral Godfroy accepte l'ultimatum poli de l'amiral Sir Andrew Cunningham et fait désarmer ses navires sur place, sous contrôle britannique. Deux ans plus tard, ils entreront dans la guerre aux côtés des Alliés.
À Dakar, le cuirassé Richelieu est endommagé dans la nuit du 7 au 8 juillet 1940 par des avions qui ont décollé d'un porte-avions britannique. Le 23 septembre suivant, il répondra par des coups de canon au général de Gaulle, qui avait tenté d'entrer dans le port à bord de navires alliés en vue d'obtenir le ralliement du Sénégal à la France libre.
L'attaque de Mers el-Kébir a un immense impact dans tous les pays. Le président américain Roosevelt tout comme Hitler comprennent que les Anglais ne renonceront pas à la lutte. Les députés anglais sont également rassurés et font une ovation à Churchill dans les Communes.
Côté français, les réactions sont amères. La brutalité de l'attaque réveille en France une anglophobie latente. C'est une aubaine pour les partisans d'une cohabitation avec l'occupant allemand. Une semaine plus tard, le 10 juillet, l'Assemblée nationale issue des élections de 1936 et du Front populaire vote à une écrasante majorité les pleins pouvoirs au maréchal Pétain.
Voir aussi :
Attaque sur Mers-El-Kébir
La Grande- Bretagne qui jouait sa survie sur la maîtrise de la mer par la Royal Navy, était gravement menacée si les forces de l’axe mettaient la main sur la flotte française, la quatrième du monde par son tonnage, forte d’unités très modernes, montées par des équipages expérimentés. C’est contre ce danger majeur que fut décidée la neutralisation de la flotte française, malgré, il est vrai,, les mises en garde de certains amiraux britanniques. Sa logique était militaire. Charles de Gaulle ne s’y trompa& pas : « Il vaut mieux qu’ils [les navires] aient été détruits. Dans une canonnade fratricide » Et si Churchill la présenta à la chambre des communes, puis dans ses Mémoires, comme une décision avant tout politique, elle ne pouvait guère représenter qu’un signe de détermination anglaise, adressée aux pays neutres.
L’opération Catapult est déclenchée le 3 juillet. Dans les ports britanniques, les équipages français furent assaillis en plein sommeil. En rade d’Alexandrie, les deux amiraux Godfroy et Cunningham, qui s’appréciaient, rusant au besoin avec les instructions de leurs amirautés respectives, finirent par trouver un gentleman’s agreement : les navires français furent désarmés, mais ne pourraient être utilisés par les Britanniques, à moins d’une rupture de l’armistice.
Il en alla différemment à Mers-El-Kébir. On peut trouver au drame trois causes directes. D’abord les « lords de la mer » avaient exclu, dans le cas précis, du moins dans un premier temps, le désarmement sur place. Ensuite, l’amiral Gensoul se montra, au nom de »L’honneur du pavillon », d’une extrême raideur, fournissant à son état-major des informations tronquées. En fin l’amirauté française ayant donné l’ordre à des forces aéronavales d’aller soutenir la « force de raid », les négociations furent dramatiquement écourtées…
Vichy, 1940-1944 par Jean pierre Azema et Olivier Wieviorka dont les travaux font autorité sur la période.
Détermination, malentendus, erreurs psychologiques, maladresses, susceptibilités militaires et hiérarchiques, les raisons ne manquent pas à l’échec des négociations franco-anglaises qui conduisirent à ce tragique épisode comme en témoignent les ouvrages suivants :
Dans cet ouvrage, le commandant Vuillez, ayant connu les principaux acteurs français et anglais du drame du 3 juillet a recueilli leurs souvenirs et fait un récit circonstancié des négociations entre anglais et français.
Un long chapitre de la marine française et la guerre, 1939-1945, par Philippe Masson, est consacré à Mers El-Kébir, p 114 à 166.
Un autre ouvrage très complet : Mers El-Kébir, par des spécialistes de l’ histoire navale au XXe siècle, dont voici quelques extraits :
L’impossible négociation :
A priori, le choix du Captain Holland comme négociateur est habile. Au cours des mois qu’il a passé à l’Amirauté française comme officier de liaison, il a conquis une sympathie universelle. L’amiral Darlan lui a remis la légion d’honneur. Il, parle parfaitement le français et connaît bien la mentalité de ses interlocuteurs. Au cours des jours précédents, il n’a cessé de réagir contre les illusions de ceux qui s’imaginaient que les Français étaient prêts, au premier coup de semonce, à rendre leurs vaisseaux. Mais son envoi va susciter un effet négatif que Sommerville n’avait pas pévu. Le vice-amiral d’escadre Gensoul a reçu, quelques jours auparavant, la visite du vice-amiral North, qui pouvait traiter d’égal à égal. Le grade de Holland est trop faible pour lui permettre de discuter sur un pied d’égalité avec Gensoul. Celui-ci perçoit un tel émissaire comme un marque désinvolture des britanniques. Il déclare à un officier de son état-major : »Hier, ils m’envoyaient un vice-amiral, aujourd’hui un commandant, demain, ils m’enverront un second maître. Sa réaction est celle d’un homme a cheval sur le respect des formes, surtout en ces jours de tension nerveuse ou le moindre manquement est encore plus durement ressenti. Surtout le signal envoyé par le « Foxhound »,vécu comme une menace évoque une réaction immédiate de rejet…. L’amiral décide donc de ne pas recevoir l’émissaire britannique et lui délègue son officier d’ordonnance, le lieutenant de vaisseau Dufay. Juste retour des choses, il envoie à Holland, non un capitaine de vaisseau, mais un officier qui lui est inférieur en grade. Mais Dufay connaît personnellement Holland, avec lequel il a des relations d’amitié et parle anglais.
Le Foxhound qui a reçu la permission d’entrer jette l’ancre. Cinq minutes après, Holland apprend par Dufay que l’amiral refuse de le voir, mais qu’il lui enverra son chef d’état-major. Par ailleurs, Gensoul lui envoie un signal très sec : « vous prie de bien vouloir appareiller aussitôt que possible ». Le Foxhound obéit à cette injonction, mais Holland embarque à bord de sa vedette pour se rendre à bord du « Dunkerque ». Gensoul lui renvoie immédiatement Dufay pour lui interdire de monter à bord des deux vedettes se rencontrent à mi-chemin. Holland remet à Dufay l’aide- mémoire dont il est porteur…
Suit le texte de cet aide- mémoire.
« le texte a fait l’objet de plusieurs versions successives. La dernière a été personnellement été revue par Churchill…la formule finale « j’ai l’honneur d’être votre ami et votre camarade »…Erreur psychologique supplémentaire, le texte (en anglais) est tapé en rouge et non signé : Somerville n’a pas cru utile d’y apposer sa signature, ni d’y joindre le moindre mot d’accompagnement. Dans l’état d’esprit ou se trouve Gensoul, la proposition britannique ne constitue ni plus ni moins qu’un ultimatum…
Suit le récit d’autres situations conflictuelles et autres « embrouilles » que nous vous épargnerons.
La bataille aurait-elle pu être évitée ?...
Sont remises en cause la mauvaise interprétation des messages anglais de la part de Gensoul, les propositions anglaises peu réalisables (l’appareillage vers les Antilles) , les erreurs de l’amiral Sommerville qui ont pesé dans l’échec des négociations, par exemple d’avoir envoyé Holland trop émotif ou d’avoir fait mouiller des mines dans le chenal alors que le délai n’était pas expiré…
Nous vous conseillons la lecture des pages 140 à 143.
Voir aussi :
Mers El-Kébir,juillet 1940 Dominique Lormier
L’Angleterre et la flotte française, Albert Kammerer
Un petit tour du côté du CHRD vous tentera peut-être, il possède des ouvrages que nous n’avons pas, par ailleurs uniquement à consulter sur place
Vérités interdites : Mers El-kébir
20 ans en 1939, marin à Mers-El-Kébir
Le drame de Mers El-kébir
Mers El-kébir, 3 juillet 1940, l’Angleterre rentre en guerre
Mers-El-Kébir : 3 juillet 1940, exécution ou bataille perdue ?
Bonnes lectures
Pour mémoire, après l’armistice signé par la France avec l’Allemagne, les Britanniques craignent que la flotte française tombe aux mains des nazis. Ils lancent un ultimatum à tous les navires de la Royale stationnés dans le monde. A Mers el-Kébir, sur le golfe d’Oran, les pourparlers échouent. La Royal Navy attaque les onze bâtiments stationnés dans le port, tuant 1 297 marins français.
Tout d'abord, un résumé circonstancié des moments précédant la bataille, qui a le mérite de mettre en scène les protagonistes de cette tragédie.
Au fil des mots de l’histoire
Herodote:
Attaque de Mers el-Kébir :
Le 3 juillet 1940, la Royal Navy attaque la flotte française amarrée dans la rade nord-africaine de Mers el-Kébir, près d'Oran (1297 morts et 350 blessés chez les marins français).
Le Premier ministre britannique Winston Churchill manifeste de la sorte sa détermination à poursuivre la guerre envers et contre tout, mais c'est au prix d'une rupture sanglante avec son ancien allié français.
La flotte française ne doit pas devenir allemande.
Seuls à faire face aux nazis, après l'armistice franco-allemand du 22 juin 1940, les Anglais craignent non sans raison que la flotte française, puissante et réputée, ne soit un jour réquisitionnée par les Allemands même si la convention d'armistice prévoit le désarmement des navires dans leur port d'attache.
Churchill décide en conséquence de s'emparer de tous les navires de guerre français à sa portée. À tout le moins, il demande que les Français les mettent hors de portée de l'ennemi, à la Martinique, par exemple. C'est l'opération « Catapult ».
Dès le 2 juillet 1940, par des ruses diverses ou par la menace, des officiers britanniques montent à bord des navires français amarrés dans leurs ports, à Portsmouth et Plymouth. Capturés, les marins et officiers se voient proposer de rejoindre de Gaulle. La plupart refusent, par fidélité au gouvernement légitime, et se font rapatrier.
Les Anglais excluent de s'en prendre aux navires français amarrés à Toulon, car leur attaque est risquée et d'autre part inciterait les Allemands à occuper ce port, pour l'heure épargné. L'escadre amarrée dans la rade de Mers el-Kébir, en Algérie, paraît davantage à leur portée.
Churchill affiche sa détermination
Churchill doit résister dans son propre cabinet de guerre à ceux qui, tel Lord Halifax, conservent l'espoir d'amadouer Hitler ! Le Premier ministre voit donc dans l'attaque de Mers el-Kébir un double avantage : d'une part enlever aux Allemands toute chance de s'emparer des navires, d'autre part - le plus important sans doute à ses yeux - briser tout espoir d'accommodement avec le Führer et ses douteux comparses de Vichy.
Il veut prouver en particulier au président américain Franklin Roosevelt qu'il est déterminé à poursuivre la guerre envers et contre tout, au besoin contre son ancienne alliée la France, si celle-ci devait se rapprocher de l'Allemagne.
Il câble à l'amiral Sir James Somerville, basé à Gibraltar : « Vous êtes chargé de l'une des missions les plus désagréables et les plus difficiles à laquelle ait jamais été confronté un amiral britannique ».
Il est vrai que ce dernier reçoit de mauvais gré l'ordre de mettre hors d'état de nuire ses anciens compagnons de combat. Il va tout tenter pour éviter l'irrémédiable... Le 3 juillet au matin, l'amiral se présente devant la rade de Mers el-Kébir, à la tête d'une puissante flotte de guerre.
Un plénipotentiaire anglais, le capitaine Cedric Holland, se rend auprès de l'amiral français Marcel Gensoul, sur le croiseur Dunkerque, et lui propose soit de suivre les Anglais, soit encore de se réfugier dans les Antilles, soit à la rigueur de se saborder.
L'amiral Gensoul fait traîner les négociations en longueur et met ses navires en position de combat ainsi que peut l'observer le plénipotentiaire. Il fait valoir qu'une attaque anglaise équivaudrait à une « déclaration de guerre ». À 15h, pour montrer sa détermination, Somerville fait miner l'entrée de la passe par ses avions de l'aéronavale.
Cependant que les discussions s'éternisent, les Anglais captent un message de l'amiral Darlan au vice-amiral Gensoul : le chef de la marine française lui fait savoir que les escadres de Toulon et d'Alger se portent à son secours ! À 17h30, Somerville fait savoir à l'amiral Gensoul que son ultimatum arrive à expiration. Les négociations s'interrompent et le plénipotentiaire regagne aussitôt la flotte anglaise, à l'abri derrière la jetée qui protège le port.
Peu avant 18 heures, les Anglais ouvrent le feu sur l'escadre, composée de puissants et prestigieux croiseurs ou cuirassés : Dunkerque, Strasbourg, Provence, Bretagne, ainsi que de 15 torpilleurs, 6 sous-marins etc. Coulé à la troisième minute du combat, le Bretagne entraîne près d'un millier de marins dans la mort.
Au bout d'un quart d'heure, le tir cesse mais les avions anglais reviennent à la charge le 6 juillet et endommagent gravement le Dunkerque.
Les Anglais ont néanmoins la surprise de constater que le Strasbourg et trois contre-torpilleurs, dissimulés par la fumée des combats, ont réussi à franchir le barrage de mines. Ils regagnent Toulon, suivis quelques semaines plus tard du Provence et du Dunkerque. Ces navires vont en définitive se saborder avec le reste de la flotte le 27 novembre 1942 pour échapper cette fois aux Allemands.
Alexandrie et Dakar aussi
L'opération «Catapult» a plus de chance à Alexandrie, en Égypte, où l'amiral Godfroy accepte l'ultimatum poli de l'amiral Sir Andrew Cunningham et fait désarmer ses navires sur place, sous contrôle britannique. Deux ans plus tard, ils entreront dans la guerre aux côtés des Alliés.
À Dakar, le cuirassé Richelieu est endommagé dans la nuit du 7 au 8 juillet 1940 par des avions qui ont décollé d'un porte-avions britannique. Le 23 septembre suivant, il répondra par des coups de canon au général de Gaulle, qui avait tenté d'entrer dans le port à bord de navires alliés en vue d'obtenir le ralliement du Sénégal à la France libre.
L'attaque de Mers el-Kébir a un immense impact dans tous les pays. Le président américain Roosevelt tout comme Hitler comprennent que les Anglais ne renonceront pas à la lutte. Les députés anglais sont également rassurés et font une ovation à Churchill dans les Communes.
Côté français, les réactions sont amères. La brutalité de l'attaque réveille en France une anglophobie latente. C'est une aubaine pour les partisans d'une cohabitation avec l'occupant allemand. Une semaine plus tard, le 10 juillet, l'Assemblée nationale issue des élections de 1936 et du Front populaire vote à une écrasante majorité les pleins pouvoirs au maréchal Pétain.
Voir aussi :
Attaque sur Mers-El-Kébir
La Grande- Bretagne qui jouait sa survie sur la maîtrise de la mer par la Royal Navy, était gravement menacée si les forces de l’axe mettaient la main sur la flotte française, la quatrième du monde par son tonnage, forte d’unités très modernes, montées par des équipages expérimentés. C’est contre ce danger majeur que fut décidée la neutralisation de la flotte française, malgré, il est vrai,, les mises en garde de certains amiraux britanniques. Sa logique était militaire. Charles de Gaulle ne s’y trompa& pas : « Il vaut mieux qu’ils [les navires] aient été détruits. Dans une canonnade fratricide » Et si Churchill la présenta à la chambre des communes, puis dans ses Mémoires, comme une décision avant tout politique, elle ne pouvait guère représenter qu’un signe de détermination anglaise, adressée aux pays neutres.
L’opération Catapult est déclenchée le 3 juillet. Dans les ports britanniques, les équipages français furent assaillis en plein sommeil. En rade d’Alexandrie, les deux amiraux Godfroy et Cunningham, qui s’appréciaient, rusant au besoin avec les instructions de leurs amirautés respectives, finirent par trouver un gentleman’s agreement : les navires français furent désarmés, mais ne pourraient être utilisés par les Britanniques, à moins d’une rupture de l’armistice.
Il en alla différemment à Mers-El-Kébir. On peut trouver au drame trois causes directes. D’abord les « lords de la mer » avaient exclu, dans le cas précis, du moins dans un premier temps, le désarmement sur place. Ensuite, l’amiral Gensoul se montra, au nom de »L’honneur du pavillon », d’une extrême raideur, fournissant à son état-major des informations tronquées. En fin l’amirauté française ayant donné l’ordre à des forces aéronavales d’aller soutenir la « force de raid », les négociations furent dramatiquement écourtées…
Vichy, 1940-1944 par Jean pierre Azema et Olivier Wieviorka dont les travaux font autorité sur la période.
Détermination, malentendus, erreurs psychologiques, maladresses, susceptibilités militaires et hiérarchiques, les raisons ne manquent pas à l’échec des négociations franco-anglaises qui conduisirent à ce tragique épisode comme en témoignent les ouvrages suivants :
Dans cet ouvrage, le commandant Vuillez, ayant connu les principaux acteurs français et anglais du drame du 3 juillet a recueilli leurs souvenirs et fait un récit circonstancié des négociations entre anglais et français.
Un long chapitre de la marine française et la guerre, 1939-1945, par Philippe Masson, est consacré à Mers El-Kébir, p 114 à 166.
Un autre ouvrage très complet : Mers El-Kébir, par des spécialistes de l’ histoire navale au XXe siècle, dont voici quelques extraits :
L’impossible négociation :
A priori, le choix du Captain Holland comme négociateur est habile. Au cours des mois qu’il a passé à l’Amirauté française comme officier de liaison, il a conquis une sympathie universelle. L’amiral Darlan lui a remis la légion d’honneur. Il, parle parfaitement le français et connaît bien la mentalité de ses interlocuteurs. Au cours des jours précédents, il n’a cessé de réagir contre les illusions de ceux qui s’imaginaient que les Français étaient prêts, au premier coup de semonce, à rendre leurs vaisseaux. Mais son envoi va susciter un effet négatif que Sommerville n’avait pas pévu. Le vice-amiral d’escadre Gensoul a reçu, quelques jours auparavant, la visite du vice-amiral North, qui pouvait traiter d’égal à égal. Le grade de Holland est trop faible pour lui permettre de discuter sur un pied d’égalité avec Gensoul. Celui-ci perçoit un tel émissaire comme un marque désinvolture des britanniques. Il déclare à un officier de son état-major : »Hier, ils m’envoyaient un vice-amiral, aujourd’hui un commandant, demain, ils m’enverront un second maître. Sa réaction est celle d’un homme a cheval sur le respect des formes, surtout en ces jours de tension nerveuse ou le moindre manquement est encore plus durement ressenti. Surtout le signal envoyé par le « Foxhound »,vécu comme une menace évoque une réaction immédiate de rejet…. L’amiral décide donc de ne pas recevoir l’émissaire britannique et lui délègue son officier d’ordonnance, le lieutenant de vaisseau Dufay. Juste retour des choses, il envoie à Holland, non un capitaine de vaisseau, mais un officier qui lui est inférieur en grade. Mais Dufay connaît personnellement Holland, avec lequel il a des relations d’amitié et parle anglais.
Le Foxhound qui a reçu la permission d’entrer jette l’ancre. Cinq minutes après, Holland apprend par Dufay que l’amiral refuse de le voir, mais qu’il lui enverra son chef d’état-major. Par ailleurs, Gensoul lui envoie un signal très sec : « vous prie de bien vouloir appareiller aussitôt que possible ». Le Foxhound obéit à cette injonction, mais Holland embarque à bord de sa vedette pour se rendre à bord du « Dunkerque ». Gensoul lui renvoie immédiatement Dufay pour lui interdire de monter à bord des deux vedettes se rencontrent à mi-chemin. Holland remet à Dufay l’aide- mémoire dont il est porteur…
Suit le texte de cet aide- mémoire.
« le texte a fait l’objet de plusieurs versions successives. La dernière a été personnellement été revue par Churchill…la formule finale « j’ai l’honneur d’être votre ami et votre camarade »…Erreur psychologique supplémentaire, le texte (en anglais) est tapé en rouge et non signé : Somerville n’a pas cru utile d’y apposer sa signature, ni d’y joindre le moindre mot d’accompagnement. Dans l’état d’esprit ou se trouve Gensoul, la proposition britannique ne constitue ni plus ni moins qu’un ultimatum…
Suit le récit d’autres situations conflictuelles et autres « embrouilles » que nous vous épargnerons.
La bataille aurait-elle pu être évitée ?...
Sont remises en cause la mauvaise interprétation des messages anglais de la part de Gensoul, les propositions anglaises peu réalisables (l’appareillage vers les Antilles) , les erreurs de l’amiral Sommerville qui ont pesé dans l’échec des négociations, par exemple d’avoir envoyé Holland trop émotif ou d’avoir fait mouiller des mines dans le chenal alors que le délai n’était pas expiré…
Nous vous conseillons la lecture des pages 140 à 143.
Voir aussi :
Mers El-Kébir,juillet 1940 Dominique Lormier
L’Angleterre et la flotte française, Albert Kammerer
Un petit tour du côté du CHRD vous tentera peut-être, il possède des ouvrages que nous n’avons pas, par ailleurs uniquement à consulter sur place
Vérités interdites : Mers El-kébir
20 ans en 1939, marin à Mers-El-Kébir
Le drame de Mers El-kébir
Mers El-kébir, 3 juillet 1940, l’Angleterre rentre en guerre
Mers-El-Kébir : 3 juillet 1940, exécution ou bataille perdue ?
Bonnes lectures
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