Question d'origine :
Bonjour,
Pour quelle raison les acteurs de l'Antiquité étaient-ils frappés d'infamie ? En quoi consistait précisément celle-ci? Dans quel ouvrage pourrais-je me documenter à ce sujet ?
merci pour votre réponses.
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 29/11/2017 à 15h54
Bonjour,
Le traitement social de l’acteur en Grèce et à Rome n’a pas du tout été équivalent. C’est à propos des acteurs romains que l’on peut parler d’infamie. Les prostitué(e)s et les gladiateurs partageaient ce statut d’infâmes.
Pour une étude approfondie de cette notion vous pouvez écouter la conférence de l’historienClément Bur en ligne sur le site du Collège de France, dans le cadre des cours et séminaires d’ Histoire moderne et contemporaine du politique de Pierre Rosanvallon Infamie et citoyenneté à Rome : réflexions sur la République aristocratique .
Le chapitre L’acteur dans la société romaine de l'ouvrageL’acteur-roi de Florence Dupont devrait vous apporter toutes les informations souhaitées. Vous pourrez y lire :
« Est marqué d’infamie qui monte sur scène pour jouer dans un spectacle y compris pour réciter un texte. Cette infamie est bien plus qu’une condamnation morale : l’acteur est rayé par le censeur des registres de sa tribu, frappé d’incapacité juridique et politique. Tertullien va jusqu’à parler de deminutio capitis, ce qui pour l’acteur revient à disparaître en tant que citoyen romain. (…) Cette infamie qui atteint donc tous les artistes de la scène, acteurs, chanteurs, danseurs, musiciens, a beaucoup choqué les contemporains qui ont essayé de la minimise et même de la mettre en doute, mais en vain. A la différence de ce qui se passait dans la Grèce classique, un acteur romain est un homme déshonoré aux yeux de la morale et de la loi. Il suffit de monter une fois sur scène pour perdre ses droits civiques. (…) Tout porte à croire que l’infamie des histrions a été introduite d’Etrurie en même temps que les jeux scéniques (le terme d’histrion est sans aucun doute possible un terme étrusque latinisé). Or les acteurs étrusques étaient esclaves, comme les acteurs romains seront esclaves ou affranchis, ce qui du point de vue du droit est la même chose. Si en outre on essaie de circonscrire précisément l’espace atteint par l’infamie, on constate qu’il faut interpréter rigoureusement les termes juridiques. Pour être infâme, il faut à la fois jouer dans le cadre des jeux, dans le .cadre d’un spectacle public et monter sur la scène. Ce que montre bien le statut ambigu des flûtistes. Ils participent à toutes les cérémonies publiques, civiles et religieuses et ils ne sont marqués d’infamie que s’ils montent matériellement sur scène. Quand sous l’Empire on placera des musiciens dans les coulisses ou sur les gradins et les travées de la cavea, ceux-là resteront indemnes de l’infamie. » p. 95-96
En effet, le spectacle doit être séparé de la vie politique et des réalités sérieuses.
« Si la coupure doit être partout affirmée entre théâtre et politique, c’est parce que leur parenté, leur proximité rend toujours possible un glissement de l’un à l’autre. (…) Il était donc impératif de séparer clairement le spectaculaire ludique de la scène et de l’otium, du spectaculaire sérieux de la vie politique et du negotium. » (…) « Les seuls acteurs qui échappent à l’infamie sont les acteurs d’atellane . Ce sont aussi les seuls qui portent un masque. » (p.97).
Sur ce sujet vous pouvez lire aussi :
- Théâtre et politique dans l’Occident romain (IIe siècle avant notre ère - IIe siècle de notre ère) : la « civilisation du spectacle » par Arnaud Suspène
- De l'infamie à la contrainte. Évolution de la condition de l'acteur sous l'Empire romain. Le statut de l'acteur dans l'Antiquité gréco-romaine : actes du colloque qui s'est tenu sous la direction de C. Hugoniot, à Tours les 3 et 4 mai 2002, 2004, Tours, France. Presses universitaires François-Rabelais, 2004.
-Musique et spectacles à Rome et dans l'Occident romain : sous la République et le Haut-Empire de Valérie Péché et Christophe Vendries
-Le théâtre romain et ses spectacles de Jean-Claude Golvin, avec la collaboration de Catherine Salles.
Bon travail !
Le traitement social de l’acteur en Grèce et à Rome n’a pas du tout été équivalent. C’est à propos des acteurs romains que l’on peut parler d’infamie. Les prostitué(e)s et les gladiateurs partageaient ce statut d’infâmes.
Pour une étude approfondie de cette notion vous pouvez écouter la conférence de l’historien
Le chapitre L’acteur dans la société romaine de l'ouvrage
« Est marqué d’infamie qui monte sur scène pour jouer dans un spectacle y compris pour réciter un texte. Cette infamie est bien plus qu’une condamnation morale : l’acteur est rayé par le censeur des registres de sa tribu, frappé d’incapacité juridique et politique. Tertullien va jusqu’à parler de deminutio capitis, ce qui pour l’acteur revient à disparaître en tant que citoyen romain. (…) Cette infamie qui atteint donc tous les artistes de la scène, acteurs, chanteurs, danseurs, musiciens, a beaucoup choqué les contemporains qui ont essayé de la minimise et même de la mettre en doute, mais en vain. A la différence de ce qui se passait dans la Grèce classique, un acteur romain est un homme déshonoré aux yeux de la morale et de la loi. Il suffit de monter une fois sur scène pour perdre ses droits civiques. (…) Tout porte à croire que l’infamie des histrions a été introduite d’Etrurie en même temps que les jeux scéniques (le terme d’histrion est sans aucun doute possible un terme étrusque latinisé). Or les acteurs étrusques étaient esclaves, comme les acteurs romains seront esclaves ou affranchis, ce qui du point de vue du droit est la même chose. Si en outre on essaie de circonscrire précisément l’espace atteint par l’infamie, on constate qu’il faut interpréter rigoureusement les termes juridiques. Pour être infâme, il faut à la fois jouer dans le cadre des jeux, dans le .cadre d’un spectacle public et monter sur la scène. Ce que montre bien le statut ambigu des flûtistes. Ils participent à toutes les cérémonies publiques, civiles et religieuses et ils ne sont marqués d’infamie que s’ils montent matériellement sur scène. Quand sous l’Empire on placera des musiciens dans les coulisses ou sur les gradins et les travées de la cavea, ceux-là resteront indemnes de l’infamie. » p. 95-96
En effet, le spectacle doit être séparé de la vie politique et des réalités sérieuses.
« Si la coupure doit être partout affirmée entre théâtre et politique, c’est parce que leur parenté, leur proximité rend toujours possible un glissement de l’un à l’autre. (…) Il était donc impératif de séparer clairement le spectaculaire ludique de la scène et de l’otium, du spectaculaire sérieux de la vie politique et du negotium. » (…) « Les seuls acteurs qui échappent à l’infamie sont les acteurs d’
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