Tomi Ungerer, Les Trois Brigands
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 24/11/2017 à 14h35
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Question d'origine :
Bonjour,
je suis élève de Lettres Modernes et je dois réaliser un travail sur l'histoire éditoriale des Trois Brigands de Tomi Ungerer.
J'ai pu lire que la première publication, en 1961, s'est faite chez Diogène Verlag, un éditeur suisse. Savez-vous si cette information est juste?
De plus, savez-vous pourquoi cette oeuvre de Tomi Ungerer a ensuite été publiée aux éditions l'Ecole des loisirs?
Je vous remercie d'avance de votre réponse.
Bonne journée,
Marianne B.
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 25/11/2017 à 10h56
Bonjour,
La Joie par les livres (BnF) indique que Les Trois Brigands a été publié en 1961 à Munich chezGeorg Lentz Verlag , puis en 1968 à L’école des loisirs.
Georg Lentz, d’après sa fiche Wikipedia, était un éditeur et écrivain allemand (verlag, en allemand, signifie maison d’édition). Cette maison d’édition, fondée en 1952 et dirigée par Georg Lentz jusqu’en 1964, était basée à Stuttgart. Elle était spécialisée dans les livres de photos et de jeunesse.
L'article de Michel Defourny : Relire les premiers albums de Tomi Ungerer précise que l'édition chez Diogenes Verlag, à Zurich, est postérieure à l'édition chez Georg Lentz.
L’Ecole des loisirs est créée en 1965 : en 1968 il s’agit donc d’une jeune maison d’édition, qui se positionne dans un mouvement de rupture vis-à-vis de la tendance éditoriale de l’époque :
« Pour élargir leur clientèle et pour répondre à l’accroissement démographique, que l’on a appelé le « baby-boom » du début des années cinquante, les éditeurs ont « recherché l’assimilation de certains livres à des produits quelconques de grande consommation. » Cette « vulgarisation » du livre en tant que marchandise s’est faite dans deux directions : par une modification de sa présentation et par une transformation dans sa conception même. Ainsi, la production a été notamment envahie par des albums pour enfants, maniables et cartonnés, dans le style des Golden Books américains aux images colorées représentant des enfants dynamiques et rieurs, en rupture avec les images d’enfants sages et rigides du XIXe siècle. Cette nouvelle vision « positive » de l’enfance s’est peu à peu imposée dans la production alors que les méthodes de marketing et de management venues des Etats-Unis s’implantaient et que la publicité remplaçait la réclame dans une société devenue « de consommation ».
Or en 1965, à l’opposé de cette politique éditoriale, les Editions de L’Ecole des loisirs choisissent d’éditer des auteurs en rupture avec la production de masse, comme l’explique un de ses dirigeants :
« Sendak, Lobel, et Ungerer ont été de ceux-là, et ils ont été suivis par les éditeurs américains. Ce sont eux qui ont inventé un nouveau langage, qui ont fait des livres individualisés, avec des héros qui pouvaient changer d’une histoire à l’autre, des héros négatifs… Ils ont eu un rôle précurseur. Nous les avons publiés quatre ou cinq ans après leur parution en langue originale aux USA. Nous avons eu la chance d’être arrivés au bon moment avec des livres différents, de résister à la relative déprime de notre appareil commercial qui se plaignait amèrement de ne rien vendre, et d’être aidés par l’histoire qui, en Mai 68, a changé beaucoup de choses dans les mentalités, les comportements vestimentaires, l’esthétique. Nous proposions des images différentes, qui ne correspondaient plus au langage d’avant 1968. »
[Propos de A. Hubschimd recueillis dans Images à la page, op. cit., p.52]
En refusant, dans un premier temps, le cadre des collections par définition normalisé, en s’ouvrant à la création étrangère, principalement américaine, et en proposant une illustration qui rompt avec la tradition de l’après-guerre, L’Ecole des loisirs ouvre, tout comme les éditeurs Tisné et Delpire, une brèche. Mais à la différence de ces derniers, elle dispose d’une solide assise dans le milieu scolaire qui assurera son succès dans la durée. »
Source : L'édition pour la jeunesse en France de 1945 à 1980, Michèle Piquard
Bonne journée.
La Joie par les livres (BnF) indique que Les Trois Brigands a été publié en 1961 à Munich chez
Georg Lentz, d’après sa fiche Wikipedia, était un éditeur et écrivain allemand (verlag, en allemand, signifie maison d’édition). Cette maison d’édition, fondée en 1952 et dirigée par Georg Lentz jusqu’en 1964, était basée à Stuttgart. Elle était spécialisée dans les livres de photos et de jeunesse.
L'article de Michel Defourny : Relire les premiers albums de Tomi Ungerer précise que l'édition chez Diogenes Verlag, à Zurich, est postérieure à l'édition chez Georg Lentz.
« Pour élargir leur clientèle et pour répondre à l’accroissement démographique, que l’on a appelé le « baby-boom » du début des années cinquante, les éditeurs ont « recherché l’assimilation de certains livres à des produits quelconques de grande consommation. » Cette « vulgarisation » du livre en tant que marchandise s’est faite dans deux directions : par une modification de sa présentation et par une transformation dans sa conception même. Ainsi, la production a été notamment envahie par des albums pour enfants, maniables et cartonnés, dans le style des Golden Books américains aux images colorées représentant des enfants dynamiques et rieurs, en rupture avec les images d’enfants sages et rigides du XIXe siècle. Cette nouvelle vision « positive » de l’enfance s’est peu à peu imposée dans la production alors que les méthodes de marketing et de management venues des Etats-Unis s’implantaient et que la publicité remplaçait la réclame dans une société devenue « de consommation ».
Or en 1965, à l’opposé de cette politique éditoriale, les Editions de L’Ecole des loisirs choisissent d’éditer des auteurs en rupture avec la production de masse, comme l’explique un de ses dirigeants :
« Sendak, Lobel, et Ungerer ont été de ceux-là, et ils ont été suivis par les éditeurs américains. Ce sont eux qui ont inventé un nouveau langage, qui ont fait des livres individualisés, avec des héros qui pouvaient changer d’une histoire à l’autre, des héros négatifs… Ils ont eu un rôle précurseur. Nous les avons publiés quatre ou cinq ans après leur parution en langue originale aux USA. Nous avons eu la chance d’être arrivés au bon moment avec des livres différents, de résister à la relative déprime de notre appareil commercial qui se plaignait amèrement de ne rien vendre, et d’être aidés par l’histoire qui, en Mai 68, a changé beaucoup de choses dans les mentalités, les comportements vestimentaires, l’esthétique. Nous proposions des images différentes, qui ne correspondaient plus au langage d’avant 1968. »
[Propos de A. Hubschimd recueillis dans Images à la page, op. cit., p.52]
En refusant, dans un premier temps, le cadre des collections par définition normalisé, en s’ouvrant à la création étrangère, principalement américaine, et en proposant une illustration qui rompt avec la tradition de l’après-guerre, L’Ecole des loisirs ouvre, tout comme les éditeurs Tisné et Delpire, une brèche. Mais à la différence de ces derniers, elle dispose d’une solide assise dans le milieu scolaire qui assurera son succès dans la durée. »
Source : L'édition pour la jeunesse en France de 1945 à 1980, Michèle Piquard
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