Système métrique et USA
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 01/10/2017 à 08h48
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Question d'origine :
Bonjour,
Dans le cadre d'une recherche sur les raisons qui ont fait que les USA ne sont pas passées au système métrique je me souviens avoir lu que les révolutionnaires français avaient envoyé vers ce pays neuf et ami (Lafayette nous voilà!) un bateau.
On comprend que les relations avec le Royaume-Uni n'étant pas au beau fixe à l'époque, nos "amis" britanniques ont mis plus de temps à utiliser ce système qui comme les droits de l'homme se voulait universel.
Ce navire était chargé de toute la documentation et d'échantillons des nouvelles unités de mesure. Mais il n'est jamais arrivé à destination sans que l'on sache pourquoi: piraterie, tempête ou fortune de mer comme disent les marins...
Est-ce que vous pouvez confirmer cela et retrouver le nom de ce navire ce qui me permettrait d'orienter mes recherches (port de départ, archives d'embarquement...)
Je vais continuer mes recherches sur le site du musée de la Marine. Mais vos aides seront plus que bienvenues.
D'avance, comme d'habitude, un grand merci à Mme et à Mr Guichet du savoir.
Cordialement.
Jean-Luc
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 02/10/2017 à 14h10
Bonjour,
Cette histoire est rapportée dans l’ouvrage de Denis Guedj, Le mètre du monde :
« […] une copie du mètre vogue vers les Etats-Unis d’Amérique. Devant se rendre en Amérique pour une expédition, le botaniste Joseph Dombey avait proposé à la Convention d’emporter une copie du mètre – du mètre provisoire – pour la présenter au Congrès des Etats-Unis. Excellente idée. Un seul problème : qui financera le voyage ? Les différentes institutions concernées, bien qu’éprises d’universalités, n’avaient pas un « franc » à mettre dans l’entreprise. Mais voilà, Dombey est prêt à prendre tous les frais à sa charge. Le Comité de salut public accepte alors immédiatement de parrainer l’opération. Muni d’un mètre en cuivre, Dombey avait embarqué pour les Amériques.
[…] En octobre, la Convention annonce la mort de Dombey. Au large des Antilles, après son départ de France, des corsaires avaient attaqué le bâtiment sur lequel il avait pris place avec son chargement. Fait prisonnier, il avait été conduit dans l’île de Montserrat, où une épidémie l’avait emporté peu de temps après. Le mètre n’a jamais atteint les Etats-Unis. Personne ne sait ce qu’il est devenu. Repose-t-il, rouillé, au fond de l’océan au large des Antilles ? Voilà comment, peut-être, les Etats-Unis ont à l’époque échappé au système métrique. »
Voici les précisions que nous trouvons dans l’article de Jean-Luc Chappey et Maria Pia Donato : Voyages et mutations des savoirs. Entre dynamiques scientifiques et transformations politiques. Fin XVIIIe - début XIXe siècle (Annales historiques de la Révolution française, vol. 385, no. 3, 2016, pp. 3-22.), consultable sur Cairn) :
« […]la Convention nationale, pourtant confrontée à la guerre et aux insurrections vendéenne et fédéraliste, n’en décide pas moins d’envoyer Joseph Dombey aux États-Unis pour – officiellement – présenter les étalons des nouvelles mesures et observer l’organisation de la jeune république.Il embarque le 14 octobre 1793 sur un brick américain, The Soon de New-York, sous le capitaine Nathaniel Williams Brown . Un questionnaire lui est confié afin de guider son regard sur des objets particuliers, à la croisée d’intérêts scientifiques, politiques et économiques :
« Questions auxquelles Dombey est invité de répondre par les observations qu’il pourra recueillir dans son voyage en Amérique septentrionale. 1. Dans la traversée, direction, vitesse, largeur, profondeur et température des courants de la mer, le degré de leur salure comparativement aux eaux environnantes. 2. Jusqu’à quelle latitude arrivent les glaces que la Mer du Nord verse dans l’Océan ; à quelle époque de l’année se montrent-elles ? […] 10. Se procurer un modèle de tous les instruments aratoires du pays, de tous les ustensiles de cuisine qui s’écartent des nôtres et qui offrent quelques avantages. 11. Se procurer un échantillon de tous les produits des arts de tout genre. 12. Se procurer un modèle des instruments, machines, métiers qui méritent le plus d’entrer dans une collection pour servir à l’instruction nationale. 13. Étudier les mœurs des naturels, la conduite des pères, des mères envers leurs enfants sous le rapport de leur éducation physique, intellectuelle et morale. 14. Étudier les mœurs des habitants civilisés sous les mêmes rapports. 15. Rassembler les lois faites sur l’éducation, des renseignements sur les établissements qui y sont consacrés, les livres élémentaires qu’on y suit. 16. Quelles sont les lois du pays sur les poids et mesures, sur la mesure du temps. 17. Sur les inventions et découvertes, les récompenses et encouragements, sur la conservation, le rassemblement des objets qui intéressent les arts et la liberté d’en prendre communication. 18. Des vocabulaires des différents idiomes en créant, s’il en est besoin, de nouveaux signes pour rendre plus parfaitement les sons, les accents, les inflexions des voix qui seraient étrangers à notre langue »
Questionnaire que Dombey ne put jamais remplir : le 10 janvier 1794, le navire fait relâche dans la rade de la Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe. On connaît la suite de ses mésaventures, victime des tensions particulièrement fortes entre les différents courants politiques sur l'île [5][5] BMNH, Manuscrit 2625. I, « Notes nécrologiques », signées..., où « il a péri dans les prisons [de Monserra] vers la fin du même mois. Ses effets et le mètre qui lui avait été confié par le Comité de salut public ont été vendus »
BMHN, Manuscrit 2625, Lettre de Partarrieu, déporté de la Guadeloupe, Paris, le 17 vendémiaire an 3/8 octobre 1794 à Henri Grégoire. La lettre précise que « Après une longue et pénible navigation, Dombey fut obligé de relâcher à la Pointe-à-Pitre, aujourd’hui, Port-de-la-Liberté. Il […] reçut de la part des sans-culottes de la ville l’accueil le plus empressé. La municipalité fit imprimer sa déclaration sur la situation de la République. Elle avait pour objet d’éclairer le peuple que la malveillance du général Collot et de ses agents cherchaient à corrompre. […] Ce bulletin fut conspué et les officiers municipaux furent traités d’imposteurs. […] Dombey, forcé de changer de route et d’aller se rembarquer à la Basse-Terre sur le bâtiment qui l’avait mené de France, fut enlevé à la vue de la rade par un corsaire anglais ». »
Bonne journée.
Cette histoire est rapportée dans l’ouvrage de Denis Guedj, Le mètre du monde :
« […] une copie du mètre vogue vers les Etats-Unis d’Amérique. Devant se rendre en Amérique pour une expédition, le botaniste Joseph Dombey avait proposé à la Convention d’emporter une copie du mètre – du mètre provisoire – pour la présenter au Congrès des Etats-Unis. Excellente idée. Un seul problème : qui financera le voyage ? Les différentes institutions concernées, bien qu’éprises d’universalités, n’avaient pas un « franc » à mettre dans l’entreprise. Mais voilà, Dombey est prêt à prendre tous les frais à sa charge. Le Comité de salut public accepte alors immédiatement de parrainer l’opération. Muni d’un mètre en cuivre, Dombey avait embarqué pour les Amériques.
[…] En octobre, la Convention annonce la mort de Dombey. Au large des Antilles, après son départ de France, des corsaires avaient attaqué le bâtiment sur lequel il avait pris place avec son chargement. Fait prisonnier, il avait été conduit dans l’île de Montserrat, où une épidémie l’avait emporté peu de temps après. Le mètre n’a jamais atteint les Etats-Unis. Personne ne sait ce qu’il est devenu. Repose-t-il, rouillé, au fond de l’océan au large des Antilles ? Voilà comment, peut-être, les Etats-Unis ont à l’époque échappé au système métrique. »
Voici les précisions que nous trouvons dans l’article de Jean-Luc Chappey et Maria Pia Donato : Voyages et mutations des savoirs. Entre dynamiques scientifiques et transformations politiques. Fin XVIIIe - début XIXe siècle (Annales historiques de la Révolution française, vol. 385, no. 3, 2016, pp. 3-22.), consultable sur Cairn) :
« […]la Convention nationale, pourtant confrontée à la guerre et aux insurrections vendéenne et fédéraliste, n’en décide pas moins d’envoyer Joseph Dombey aux États-Unis pour – officiellement – présenter les étalons des nouvelles mesures et observer l’organisation de la jeune république.
« Questions auxquelles Dombey est invité de répondre par les observations qu’il pourra recueillir dans son voyage en Amérique septentrionale. 1. Dans la traversée, direction, vitesse, largeur, profondeur et température des courants de la mer, le degré de leur salure comparativement aux eaux environnantes. 2. Jusqu’à quelle latitude arrivent les glaces que la Mer du Nord verse dans l’Océan ; à quelle époque de l’année se montrent-elles ? […] 10. Se procurer un modèle de tous les instruments aratoires du pays, de tous les ustensiles de cuisine qui s’écartent des nôtres et qui offrent quelques avantages. 11. Se procurer un échantillon de tous les produits des arts de tout genre. 12. Se procurer un modèle des instruments, machines, métiers qui méritent le plus d’entrer dans une collection pour servir à l’instruction nationale. 13. Étudier les mœurs des naturels, la conduite des pères, des mères envers leurs enfants sous le rapport de leur éducation physique, intellectuelle et morale. 14. Étudier les mœurs des habitants civilisés sous les mêmes rapports. 15. Rassembler les lois faites sur l’éducation, des renseignements sur les établissements qui y sont consacrés, les livres élémentaires qu’on y suit. 16. Quelles sont les lois du pays sur les poids et mesures, sur la mesure du temps. 17. Sur les inventions et découvertes, les récompenses et encouragements, sur la conservation, le rassemblement des objets qui intéressent les arts et la liberté d’en prendre communication. 18. Des vocabulaires des différents idiomes en créant, s’il en est besoin, de nouveaux signes pour rendre plus parfaitement les sons, les accents, les inflexions des voix qui seraient étrangers à notre langue »
Questionnaire que Dombey ne put jamais remplir : le 10 janvier 1794, le navire fait relâche dans la rade de la Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe. On connaît la suite de ses mésaventures, victime des tensions particulièrement fortes entre les différents courants politiques sur l'île [5][5] BMNH, Manuscrit 2625. I, « Notes nécrologiques », signées..., où « il a péri dans les prisons [de Monserra] vers la fin du même mois. Ses effets et le mètre qui lui avait été confié par le Comité de salut public ont été vendus »
BMHN, Manuscrit 2625, Lettre de Partarrieu, déporté de la Guadeloupe, Paris, le 17 vendémiaire an 3/8 octobre 1794 à Henri Grégoire. La lettre précise que « Après une longue et pénible navigation, Dombey fut obligé de relâcher à la Pointe-à-Pitre, aujourd’hui, Port-de-la-Liberté. Il […] reçut de la part des sans-culottes de la ville l’accueil le plus empressé. La municipalité fit imprimer sa déclaration sur la situation de la République. Elle avait pour objet d’éclairer le peuple que la malveillance du général Collot et de ses agents cherchaient à corrompre. […] Ce bulletin fut conspué et les officiers municipaux furent traités d’imposteurs. […] Dombey, forcé de changer de route et d’aller se rembarquer à la Basse-Terre sur le bâtiment qui l’avait mené de France, fut enlevé à la vue de la rade par un corsaire anglais ». »
Bonne journée.
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