Question d'origine :
Cher guichet,
1)Y a t-il des connaissances nouvelles sur l'alimentation des artisans enFrance (hors disettes et famines) du XVIIe siècle ?(pain noir et peu de viande)
é)Et sur celle des bourgeois du XVIIIe?
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 02/09/2017 à 12h35
Bonjour,
Ne sachant pas exactement quel niveau de « fraicheur » vous souhaitez pour cette réponse, nous ne nous priverons pas de vous proposer des documents un peu datés mais qui peuvent encore servir de référence.
Néanmoins, pour être au fait de l’actualité de la recherche à ce sujet, nous vous invitons vivement à suivre les travaux et publications de l’Institut Européen d’Histoire et des cultures de l’Alimentation et particulièrement ceux de l’historien Florent Quellier, Maître de conférences en histoire moderne à université François-Rabelais de Tours, titulaire de la chaire CNRS «Histoire de l'alimentation des mondes modernes» et par ailleurs membre du Conseil d’Administration de l’institut susmentionné.
Avant toute chose, rappelons que le XVII siècle voit l’émergence d’une nouvelle cuisine française certes au sein de l’aristocratie, mais qui se répandra ensuite dans les couches moins élevées de la société. L’historien de la cuisine et de la gastronomie Patrick Rambourg parle à ce propos d’une « nouvelle ère culinaire » que symbolise la publication en 1651 du Cuisinier François de Pierre-François de la Varenne. Or, d’après Florent Quellier, dans La table des Français, une histoire culturelle (XVe-XIXe siècle), édité aux PUR en 2013, la différence « fondamentale entre la cuisine médiévale et de la Renaissance et ce que l’on pourrait appeler la nouvelle cuisine française ou la cuisine moderne tient à l’assaisonnement » (forte diminution des épices, au profit des plante et aromates locaux).
Venons-en plus précisément aux périodes et catégories sociales qui vous intéressent :
Au XVII siècle : le peuple
Là encore, deux remarques préliminaires s’imposent :
1/ « Il n’existait pas, entre le XVe siècle et la Révolution, d’organismes comme le CREDOC contemporain ou le Laboratoire de Recherche sur la consommation de l’INRA […]. Dès lors, l’amateur risque d’être ballotté entre des clichés oscillant du misérable uniquement attaché à un indigeste “pain d’avoie” au repas princier, fourni de toutes les préciosités de la terre de la mer et sans oublier de l’outre-mer » (Lucien Bély, Dictionnaire de l’Ancien Régime, PUF, 2013 pour la présente édition).
« Que mangeaient-ils ? Si la question a toujours éveillé beaucoup de curiosité, la réponse n’a pas souvent échappé aux clichés, faisant osciller entre l’émerveillement en présence des festins des rois et la commisération pour la maigre chère des gens du peuple. Aller au-delà est périlleux en raison de la minceur des renseignements dont nous disposons […]. On peut y remédier en prenant pour repère non plus le pain, mais une ration connue indépendamment et qui se rapproche, selon toute vraisemblance, d’un brouet ordinaire. C’est, à notre avis, la meilleure façon d’opérer. Cependant, la population salariée était une faible minorité dans l’économie ancienne. La majorité appartenait à une paysannerie qui pratiquait l’autoconsommation » (Histoire de l’Alimentation, de M. Montanari et J.-L. Flandrin, Fayard, 1996).
2/ Nous avons eu bien du mal à trouver des informations spécifiques et récentes sur l’alimentation des artisans à cette époque. La question est d’autant plus complexe que les modes de vie, les statuts et les salaires des artisans divergeaient très largement selon qu’ils étaient ruraux ou urbains, mais aussi en fonction de leurs professions et de leur niveau dans la hiérarchie (entre les maîtres et les apprentis par exemple).
Essayons toutefois de les situer dans la société d’Ancien Régime : ils constituent « les sommets des couches populaires et les tréfonds de la bourgeoisie, plus précisément les personnes qui se distinguent du reste du peuple par la possession d’une minime qualification intellectuelle ou d’une forte qualification manuelle » (La Ville des temps modernes, sous la direction d'E. Le Roy Ladurie, Seuil, 1998).
Nous vous livrons donc quelques éléments généraux sur l’alimentation du peuple qui peuvent en partie se rapporter à cette catégorie socio-professionnelle :
- Sur le site Cuisinealafrancaise.fr, parrainé par le ministère de l’agriculture, on trouve un rapide historique de l’alimentation des Français :
« Et le Peuple ?
L'alimentation populaire s'appauvrit pour s'orienter vers une consommation de céréales sous forme de pain bis, mélange essentiellement de méteil (mélange de blé et de seigle), de froment et de seigle.
Les céréales ne sont pas uniquement consommées sous la forme de pains levés cuits au four, mais aussi sous la forme d'une bouillie, plus ou moins épaisse.
Cette soupe est une « eau bouillie » dans laquelle sont plongés des « herbes » et « racines », des carottes et des navets, des poireaux, des blettes, des épinards, des panais, des oignons et surtout du chou, et des légumineuses comme des fèves, des lentilles ou des pois. Au mieux, la soupe est rehaussée d'un morceau de lard découpé dans la viande de porc salée.
La viande est peu présente, excepté les jours de fête, ainsi que la morue et les harengs les jours maigres. Quant aux volailles, œufs, beurre et vin, ils étaient apportés au marché afin de gagner quelques piécettes nécessaires au paiement en argent de l'impôt royal».
- Dans : Les sociétés au 17ème Espagne, Angleterre, France, Florent Quellier, encore lui, explique aussi en quoi l’alimentation devient en somme un motif de distinction sociale : « L’existence supposée de deux types d’estomac, celui des gens d’étude et de loisirs – bourgeoisie, clergé et noblesse – et celui des gens exerçant un métier physique, notamment les masses paysannes, permet de justifier par des critères physiologiques des codes alimentaires ségrégatifs. À la délicatesse de l’estomac des premiers siéent des chairs subtiles comme le pain blanc et la volaille […]. En France, la table comme distinction sociale s’enrichit au XVIIe siècle d’une redéfinition de la gourmandise qui a rendu possible un détournement hédoniste de l’alimentation. Le palais du gentilhomme doit savoir apprécier la délicatesse d’une chair, estimer la saveur d’une asperge croquante, savourer l’eau d’une poire […]. À l’inverse sont grossiers les mets et les aliments consommés par la paysannerie et le peuple des villes : les bouillies (hasty-pudding, crowdie), les galettes et le pain noir, les céréales non nobles (seigle, orge, avoine, maïs en Espagne du Nord-Ouest et dans le Sud-Ouest de la France) et leurs substituts – le blé noir, les châtaignes, les pommes de terre en Espagne et en Angleterre –, les légumineuses – les haricots, les pois, les fèves – et des légumes comme les raves et les choux ».
- Cette dichotomie portée par les discours des élites et dans les livres de cuisine de l’époque ne doit cependant pas nous faire tomber dans le misérabilisme. Marcel Lachiver rappelle dans Les Années de misère. La famine au temps du grand Roi que « Les Français de la fin du XVII siècle ne sont pas des crève-la faim. La plupart des travailleurs mangent suffisamment, même si leur alimentation est déséquilibrée, ce qui est un autre aspect de la question »…
… Autre aspect traité dans La Table des Français, une histoire culturelle de Quellier (dont vous l’aurez compris, nous vous recommandons vivement la lecture) : l’alimentation des Français « est indéniablement déséquilibrée et fortement carencée. Ce régime alimentaire à base de pain et de bouillie comporte trop de glucides et de protéines végétales […] mais il manque fortement de lipides et de protéines animales, ce qui diminue les défenses immunitaires de l’organisme ».
- Finissons avec la lecture de La Vie quotidienne des parisiens au temps du Roi-Soleil de Jacques Wilhelm qui a le défaut de n’être pas vraiment une nouveauté (publié en 1977…). Il donne néanmoins des précisions sur la nourriture d’un compagnon à Paris au 17ème siècle, précisions qui corroborent les éléments plus récents que nous vous avons proposés ci-dessus : «Le compagnon ne mangeait presque jamais de viande, sinon de loin en loin, du porc, moins coûteux. D’ordinaire, il se contentait de pain et de quelques légumes, fèves, haricots ou choux, et de salade. Aux meilleurs jours, quelques abats et bas morceaux ».
Au XVIIIe siècle : la bourgeoisie
- On trouve davantage d’informations sur la façon dont se nourrissait cette partie de la population à cette époque. Mais là encore, mentionnons les difficultés à définir cette catégorie sociale : on ne peut réduire les bourgeois ceux qui habitaient une « ville dotée d’une charte leur accordant des privilèges d’ordre juridique, économique, fiscaux, judiciaire » (Laurent Coste, Les bourgeoisies en France, du XVIe au milieu du XIXe siècle). Laurent Coste rappelle l’existence d’une bourgeoisie rurale… Mais aussi d’une « bourgeoisie gênée » et d’une « bourgeoisie pauvre » ce qui exclut donc de la définir par un niveau de revenu homogène.
- Avec l’inévitable Florent Quellier, on peut ainsi résumer les choses quant à l’alimentation : « Noblesse et bourgeoisie imitent la table de l'aristocratie. À l'image du franc succès de La Cuisinière bourgeoise (1746) de Menon, la cuisine bourgeoise propose non pas une cuisine originale, mais une adaptation, en moins onéreux, de la cuisine aristocratique » (extrait de l’article« Gastronomie : une invention française » paru dans le Sciences humaine n°251 de 2013).
- L’historien André Bruguière, interrogé par le site vousnousils.fr signale lui aussi une évolution manifeste du goût et des pratiques alimentaires chez les plus riches : « L’alimentation des classes supérieures était bien différente. Elles avaient des exigences culinaires, des cuisiniers souvent réputés (qu’on appelait “officiers de bouche”) qui leur servaient une nourriture sophistiquée et variée. Les tables de la haute noblesse ou des grands financiers découvrent alors quelque chose d’analogue à ce qu’on appelle aujourd’hui la “nouvelle cuisine” : c’est à dire le goût du produit authentique. Alors que traditionnellement on proposait dans les banquets des plats compliqués et spectaculaires où les ingrédients étaient travestis et difficilement reconnaissables, le XVIIIe siècle découvre le goût du produit naturel ».
- Si vous souhaitez davantage de précisions, nous vous invitons à lire le chapitre « La nourriture, entre frugalité et convivialité » tiré du livre de Laurent Coste mentionné plus haut dont voici un court extrait : « Dans sa diversité, les milieux bourgeois sous l’Ancien Régime comme les classes moyennes au XIXe siècle sont à l’abri du besoin, sauf grand difficulté conjoncturelle. Ils jouissent d’une alimentation diversifiée […]. Ainsi veaux, agneaux, chapons, poules jambons, œufs, fromage venaient régulièrement alimenter la table citadine ».
Bonnes lectures !
Ne sachant pas exactement quel niveau de « fraicheur » vous souhaitez pour cette réponse, nous ne nous priverons pas de vous proposer des documents un peu datés mais qui peuvent encore servir de référence.
Néanmoins, pour être au fait de l’actualité de la recherche à ce sujet, nous vous invitons vivement à suivre les travaux et publications de l’Institut Européen d’Histoire et des cultures de l’Alimentation et particulièrement ceux de l’historien Florent Quellier, Maître de conférences en histoire moderne à université François-Rabelais de Tours, titulaire de la chaire CNRS «Histoire de l'alimentation des mondes modernes» et par ailleurs membre du Conseil d’Administration de l’institut susmentionné.
Avant toute chose, rappelons que le XVII siècle voit l’émergence d’une nouvelle cuisine française certes au sein de l’aristocratie, mais qui se répandra ensuite dans les couches moins élevées de la société. L’historien de la cuisine et de la gastronomie Patrick Rambourg parle à ce propos d’une « nouvelle ère culinaire » que symbolise la publication en 1651 du Cuisinier François de Pierre-François de la Varenne. Or, d’après Florent Quellier, dans La table des Français, une histoire culturelle (XVe-XIXe siècle), édité aux PUR en 2013, la différence « fondamentale entre la cuisine médiévale et de la Renaissance et ce que l’on pourrait appeler la nouvelle cuisine française ou la cuisine moderne tient à l’assaisonnement » (forte diminution des épices, au profit des plante et aromates locaux).
Venons-en plus précisément aux périodes et catégories sociales qui vous intéressent :
Là encore, deux remarques préliminaires s’imposent :
1/ « Il n’existait pas, entre le XVe siècle et la Révolution, d’organismes comme le CREDOC contemporain ou le Laboratoire de Recherche sur la consommation de l’INRA […]. Dès lors, l’amateur risque d’être ballotté entre des clichés oscillant du misérable uniquement attaché à un indigeste “pain d’avoie” au repas princier, fourni de toutes les préciosités de la terre de la mer et sans oublier de l’outre-mer » (Lucien Bély, Dictionnaire de l’Ancien Régime, PUF, 2013 pour la présente édition).
« Que mangeaient-ils ? Si la question a toujours éveillé beaucoup de curiosité, la réponse n’a pas souvent échappé aux clichés, faisant osciller entre l’émerveillement en présence des festins des rois et la commisération pour la maigre chère des gens du peuple. Aller au-delà est périlleux en raison de la minceur des renseignements dont nous disposons […]. On peut y remédier en prenant pour repère non plus le pain, mais une ration connue indépendamment et qui se rapproche, selon toute vraisemblance, d’un brouet ordinaire. C’est, à notre avis, la meilleure façon d’opérer. Cependant, la population salariée était une faible minorité dans l’économie ancienne. La majorité appartenait à une paysannerie qui pratiquait l’autoconsommation » (Histoire de l’Alimentation, de M. Montanari et J.-L. Flandrin, Fayard, 1996).
2/ Nous avons eu bien du mal à trouver des informations spécifiques et récentes sur l’alimentation des artisans à cette époque. La question est d’autant plus complexe que les modes de vie, les statuts et les salaires des artisans divergeaient très largement selon qu’ils étaient ruraux ou urbains, mais aussi en fonction de leurs professions et de leur niveau dans la hiérarchie (entre les maîtres et les apprentis par exemple).
Essayons toutefois de les situer dans la société d’Ancien Régime : ils constituent « les sommets des couches populaires et les tréfonds de la bourgeoisie, plus précisément les personnes qui se distinguent du reste du peuple par la possession d’une minime qualification intellectuelle ou d’une forte qualification manuelle » (La Ville des temps modernes, sous la direction d'E. Le Roy Ladurie, Seuil, 1998).
Nous vous livrons donc quelques éléments généraux sur l’alimentation du peuple qui peuvent en partie se rapporter à cette catégorie socio-professionnelle :
- Sur le site Cuisinealafrancaise.fr, parrainé par le ministère de l’agriculture, on trouve un rapide historique de l’alimentation des Français :
« Et le Peuple ?
L'alimentation populaire s'appauvrit pour s'orienter vers une consommation de céréales sous forme de pain bis, mélange essentiellement de méteil (mélange de blé et de seigle), de froment et de seigle.
Les céréales ne sont pas uniquement consommées sous la forme de pains levés cuits au four, mais aussi sous la forme d'une bouillie, plus ou moins épaisse.
Cette soupe est une « eau bouillie » dans laquelle sont plongés des « herbes » et « racines », des carottes et des navets, des poireaux, des blettes, des épinards, des panais, des oignons et surtout du chou, et des légumineuses comme des fèves, des lentilles ou des pois. Au mieux, la soupe est rehaussée d'un morceau de lard découpé dans la viande de porc salée.
La viande est peu présente, excepté les jours de fête, ainsi que la morue et les harengs les jours maigres. Quant aux volailles, œufs, beurre et vin, ils étaient apportés au marché afin de gagner quelques piécettes nécessaires au paiement en argent de l'impôt royal».
- Dans : Les sociétés au 17ème Espagne, Angleterre, France, Florent Quellier, encore lui, explique aussi en quoi l’alimentation devient en somme un motif de distinction sociale : « L’existence supposée de deux types d’estomac, celui des gens d’étude et de loisirs – bourgeoisie, clergé et noblesse – et celui des gens exerçant un métier physique, notamment les masses paysannes, permet de justifier par des critères physiologiques des codes alimentaires ségrégatifs. À la délicatesse de l’estomac des premiers siéent des chairs subtiles comme le pain blanc et la volaille […]. En France, la table comme distinction sociale s’enrichit au XVIIe siècle d’une redéfinition de la gourmandise qui a rendu possible un détournement hédoniste de l’alimentation. Le palais du gentilhomme doit savoir apprécier la délicatesse d’une chair, estimer la saveur d’une asperge croquante, savourer l’eau d’une poire […]. À l’inverse sont grossiers les mets et les aliments consommés par la paysannerie et le peuple des villes : les bouillies (hasty-pudding, crowdie), les galettes et le pain noir, les céréales non nobles (seigle, orge, avoine, maïs en Espagne du Nord-Ouest et dans le Sud-Ouest de la France) et leurs substituts – le blé noir, les châtaignes, les pommes de terre en Espagne et en Angleterre –, les légumineuses – les haricots, les pois, les fèves – et des légumes comme les raves et les choux ».
- Cette dichotomie portée par les discours des élites et dans les livres de cuisine de l’époque ne doit cependant pas nous faire tomber dans le misérabilisme. Marcel Lachiver rappelle dans Les Années de misère. La famine au temps du grand Roi que « Les Français de la fin du XVII siècle ne sont pas des crève-la faim. La plupart des travailleurs mangent suffisamment, même si leur alimentation est déséquilibrée, ce qui est un autre aspect de la question »…
… Autre aspect traité dans La Table des Français, une histoire culturelle de Quellier (dont vous l’aurez compris, nous vous recommandons vivement la lecture) : l’alimentation des Français « est indéniablement déséquilibrée et fortement carencée. Ce régime alimentaire à base de pain et de bouillie comporte trop de glucides et de protéines végétales […] mais il manque fortement de lipides et de protéines animales, ce qui diminue les défenses immunitaires de l’organisme ».
- Finissons avec la lecture de La Vie quotidienne des parisiens au temps du Roi-Soleil de Jacques Wilhelm qui a le défaut de n’être pas vraiment une nouveauté (publié en 1977…). Il donne néanmoins des précisions sur la nourriture d’un compagnon à Paris au 17ème siècle, précisions qui corroborent les éléments plus récents que nous vous avons proposés ci-dessus : «Le compagnon ne mangeait presque jamais de viande, sinon de loin en loin, du porc, moins coûteux. D’ordinaire, il se contentait de pain et de quelques légumes, fèves, haricots ou choux, et de salade. Aux meilleurs jours, quelques abats et bas morceaux ».
- On trouve davantage d’informations sur la façon dont se nourrissait cette partie de la population à cette époque. Mais là encore, mentionnons les difficultés à définir cette catégorie sociale : on ne peut réduire les bourgeois ceux qui habitaient une « ville dotée d’une charte leur accordant des privilèges d’ordre juridique, économique, fiscaux, judiciaire » (Laurent Coste, Les bourgeoisies en France, du XVIe au milieu du XIXe siècle). Laurent Coste rappelle l’existence d’une bourgeoisie rurale… Mais aussi d’une « bourgeoisie gênée » et d’une « bourgeoisie pauvre » ce qui exclut donc de la définir par un niveau de revenu homogène.
- Avec l’inévitable Florent Quellier, on peut ainsi résumer les choses quant à l’alimentation : « Noblesse et bourgeoisie imitent la table de l'aristocratie. À l'image du franc succès de La Cuisinière bourgeoise (1746) de Menon, la cuisine bourgeoise propose non pas une cuisine originale, mais une adaptation, en moins onéreux, de la cuisine aristocratique » (extrait de l’article« Gastronomie : une invention française » paru dans le Sciences humaine n°251 de 2013).
- L’historien André Bruguière, interrogé par le site vousnousils.fr signale lui aussi une évolution manifeste du goût et des pratiques alimentaires chez les plus riches : « L’alimentation des classes supérieures était bien différente. Elles avaient des exigences culinaires, des cuisiniers souvent réputés (qu’on appelait “officiers de bouche”) qui leur servaient une nourriture sophistiquée et variée. Les tables de la haute noblesse ou des grands financiers découvrent alors quelque chose d’analogue à ce qu’on appelle aujourd’hui la “nouvelle cuisine” : c’est à dire le goût du produit authentique. Alors que traditionnellement on proposait dans les banquets des plats compliqués et spectaculaires où les ingrédients étaient travestis et difficilement reconnaissables, le XVIIIe siècle découvre le goût du produit naturel ».
- Si vous souhaitez davantage de précisions, nous vous invitons à lire le chapitre « La nourriture, entre frugalité et convivialité » tiré du livre de Laurent Coste mentionné plus haut dont voici un court extrait : « Dans sa diversité, les milieux bourgeois sous l’Ancien Régime comme les classes moyennes au XIXe siècle sont à l’abri du besoin, sauf grand difficulté conjoncturelle. Ils jouissent d’une alimentation diversifiée […]. Ainsi veaux, agneaux, chapons, poules jambons, œufs, fromage venaient régulièrement alimenter la table citadine ».
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