Question d'origine :
comment les ingénieurs romains ont pu déterminer avec précision les altitudes de nîmes et et de la fontaine d'eure, éléments indispensables pour connaître le dénivelé entre les 2 lieux et fixer ensuite la pente de l'aqueduc ?
tous les sites que j'ai consultés sur la construction de l'aqueduc n'abordent jamais ce point
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 16/08/2017 à 14h30
Bonjour,
Selon le site officiel du Pont du Gard, l’aqueduc auquel ce pont appartient fut « construit vers 50 après JC, sous les règnes de Claude ou de Néron ».
Comme le précise un mémento disponible sur ce site, intitulé « L’aqueduc romain de Nîmes et le Pont du Gard – Les techniques de construction romaine » (pdf), cet aqueduc avait plusieurs fonctions utilitaires :
- « Alimenter en eau la ville de Nîmes, notamment les thermes et fontaines publiques
- Assainir la ville : drainer le réseau d'égouts
- Lutter contre l'incendie à Nîmes
- Accroître les ressources en eau pour l'artisanat urbain en particulier les blanchisseries ».
Vous vous demandez comment les ingénieurs romains ont pu calculer les altitude de Nîmes et de la fontaine d’Eure afin de mesurer le dénivelé entre ces deux points, et ainsi déterminer la pente que devait respecter l’aqueduc.
Le Guichet du savoir a répondu à deux questions comparables :
- Les aqueducs romains.
- Comment les constructeurs du Pont du Gard on calculé la pente nécessaire à l'écoulement de l'eau non seulement pour le pont, mais sur toute la longueur de l'ouvrage.
Nous reprenons la réponse de cette deuxième question :
D’après Alain Malissard dans son ouvrage Les romains et l’eau (1994), « conduire l'eau, c'était en effet la faire descendre en contrôlant sa vitesse, et mettre en place un "specus", c'était bâtir un canal en pente dans dans lequel l'eau s’écoulerait sans pression par l'effet de la gravité.
On avait donc toujours soin d’abord de n’installer que des captages assez élevés pour que, compte tenu de la distance à parcourir et de la hauteur du point d’arrivée, la pente optimale pût être obtenue sans trop de difficultés techniques.
[...]
Quand l'élévation semblait insuffisante, on s'efforçait de l'augmenter, et l'on peut voir qu'à Sens, par exemple, les drains qui faisaient monter l'eau des sources comme un puits artésien n'avaient pas seulement pour fonction d'en accroître le débit, mais aussi d'en rehausser nettement le niveau.
Il fallait ensuite arranger le canal de telle manière que l'inclinaison n'en fût jamais ni trop faible ni trop forte ; trop forte, elle aurait provoqué l'usure prématurée du conduit ou la destruction des installations d'arrivée ; trop faible, elle n'aurait pas permis l'écoulement naturel des eaux, qui seraient demeurées stagnantes au pied des contrepentes nées de leurs propres limons. On devait donc à la fois se préoccuper de maintenir durablement en état le specus et d'obtenir une bonne progression de l'eau.
Pour tracer le parcours de l'aqueduc, les ingénieurs romains, nommés dans ce cas "libratores" parce qu'ils calculaient la pente appelée "libramentum", disposaient de deux appareils qui nous sont connus par les découvertes archéologiques et par les descriptions qu'ont données les théoriciens ; il s'agit de la groma, qui permettait de faire les visées indispensables, et du chorobate utilisé pour les travaux de nivellement.
La groma est représentée sur deux stèles funéraires, et un exemplaire en a été découvert en assez bon état dans un atelier de Pompéi. L'appareil est en métal et se compose essentiellement d'une croix à quatre branches, qui est fixée latéralement sur un pied d'environ deux mètres ; à l'extrémité de chacune des branches pend un fil à plomb ; la stabilité du support est assurée par un tripode ou par une pointe à planter dans le sol, et sa verticalité contrôlée par un cinquième plomb.
L'ensemble étant installé près d'un repère en position bien horizontale, et à condition que le temps soit très calme, les quatre fils permettent au géomètre d'effectuer commodément toutes les visées droites ou orthogonales nécessaires au tracé de l'aqueduc.
Plus spécifiquement adapté à la détermination des différences de niveau,le chorobate n'est connu que par la description qu'en a laissée Vitruve. Il s'agit cette fois d'une table de bois, d'environ six mètres de longueur, dont les extrémités reposent solidement sur deux pieds verticaux ; l'horizontalité peut en être vérifiée par des fils à plomb, qu'il faut placer sur des repères, ou par un niveau d'eau ménagé dans la partie supérieure et spécialement utile quand le vent vient faire osciller les plombs.
[...]
Quelle que fut cependant la méthode utilisée, il s'agissait toujours de suivre le trajet prévu pour l'aqueduc en traçant une ligne horizontale imaginaire qu'on reportait sur un plan ; en notant ensuite la distance entre cette ligne et le sol, telle que l'avait fournie le chorobate, on obtenait le profil du terrain à partir duquel les ingénieurs pouvaient établir le parcours définitif du specus, en déterminer la pente et en fixer la nature aérienne ou souterraine.
C'était donc un travail lent et minutieux, qui nécessitait, avec des manipulations délicates et des déplacements difficiles, de nombreux relevés, de nombreux calculs et l'enregistrement soigneux de nombreuses cotes qu'il fallait transcrire ensuite avec clarté sur d'innombrables schémas ; si l'on ajoute que les instruments étaient imprécis par nature, et que, inévitablement exposés au soleil et à l'humidité, le bois du chorobate travaillait certainement , on comprend que les erreurs et les approximations devaient être fréquentes, et que, en général imparfaitement calculée, la pente des aqueducs ne pouvait pas être absolument continue.
Dès la mise en service de l'adduction de Nîmes on s'aperçut, par exemple, que le specus du pont du Gard était placé trop bas et que l'eau s'en échappait par le haut ; il fallut aussitôt mettre l'aqueduc à sec et rehausser de 60 centimètres les côtés du radier. »
Par ailleurs, le site de l'association l'Académie du Pont du Gard, créée en 2011, fournit de nombreuses informations sur la construction de cet ouvrage :
- Les limites du système oeil-chorobate pour l’implantation de l’aqueduc de Nîmes.
- Les instruments d'arpentage.
Bonne journée.
Selon le site officiel du Pont du Gard, l’aqueduc auquel ce pont appartient fut « construit vers 50 après JC, sous les règnes de Claude ou de Néron ».
Comme le précise un mémento disponible sur ce site, intitulé « L’aqueduc romain de Nîmes et le Pont du Gard – Les techniques de construction romaine » (pdf), cet aqueduc avait plusieurs fonctions utilitaires :
- « Alimenter en eau la ville de Nîmes, notamment les thermes et fontaines publiques
- Assainir la ville : drainer le réseau d'égouts
- Lutter contre l'incendie à Nîmes
- Accroître les ressources en eau pour l'artisanat urbain en particulier les blanchisseries ».
Vous vous demandez comment les ingénieurs romains ont pu calculer les altitude de Nîmes et de la fontaine d’Eure afin de mesurer le dénivelé entre ces deux points, et ainsi déterminer la pente que devait respecter l’aqueduc.
Le Guichet du savoir a répondu à deux questions comparables :
- Les aqueducs romains.
- Comment les constructeurs du Pont du Gard on calculé la pente nécessaire à l'écoulement de l'eau non seulement pour le pont, mais sur toute la longueur de l'ouvrage.
Nous reprenons la réponse de cette deuxième question :
D’après Alain Malissard dans son ouvrage Les romains et l’eau (1994), « conduire l'eau, c'était en effet la faire descendre en contrôlant sa vitesse, et mettre en place un "specus", c'était bâtir un canal en pente dans dans lequel l'eau s’écoulerait sans pression par l'effet de la gravité.
On avait donc toujours soin d’abord de n’installer que des captages assez élevés pour que, compte tenu de la distance à parcourir et de la hauteur du point d’arrivée, la pente optimale pût être obtenue sans trop de difficultés techniques.
[...]
Quand l'élévation semblait insuffisante, on s'efforçait de l'augmenter, et l'on peut voir qu'à Sens, par exemple, les drains qui faisaient monter l'eau des sources comme un puits artésien n'avaient pas seulement pour fonction d'en accroître le débit, mais aussi d'en rehausser nettement le niveau.
Il fallait ensuite arranger le canal de telle manière que l'inclinaison n'en fût jamais ni trop faible ni trop forte ; trop forte, elle aurait provoqué l'usure prématurée du conduit ou la destruction des installations d'arrivée ; trop faible, elle n'aurait pas permis l'écoulement naturel des eaux, qui seraient demeurées stagnantes au pied des contrepentes nées de leurs propres limons. On devait donc à la fois se préoccuper de maintenir durablement en état le specus et d'obtenir une bonne progression de l'eau.
Pour tracer le parcours de l'aqueduc, les ingénieurs romains, nommés dans ce cas "libratores" parce qu'ils calculaient la pente appelée "libramentum", disposaient de deux appareils qui nous sont connus par les découvertes archéologiques et par les descriptions qu'ont données les théoriciens ; il s'agit de la groma, qui permettait de faire les visées indispensables, et du chorobate utilisé pour les travaux de nivellement.
L'ensemble étant installé près d'un repère en position bien horizontale, et à condition que le temps soit très calme, les quatre fils permettent au géomètre d'effectuer commodément toutes les visées droites ou orthogonales nécessaires au tracé de l'aqueduc.
Plus spécifiquement adapté à la détermination des différences de niveau,
[...]
Quelle que fut cependant la méthode utilisée, il s'agissait toujours de suivre le trajet prévu pour l'aqueduc en traçant une ligne horizontale imaginaire qu'on reportait sur un plan ; en notant ensuite la distance entre cette ligne et le sol, telle que l'avait fournie le chorobate, on obtenait le profil du terrain à partir duquel les ingénieurs pouvaient établir le parcours définitif du specus, en déterminer la pente et en fixer la nature aérienne ou souterraine.
C'était donc un travail lent et minutieux, qui nécessitait, avec des manipulations délicates et des déplacements difficiles, de nombreux relevés, de nombreux calculs et l'enregistrement soigneux de nombreuses cotes qu'il fallait transcrire ensuite avec clarté sur d'innombrables schémas ; si l'on ajoute que les instruments étaient imprécis par nature, et que, inévitablement exposés au soleil et à l'humidité, le bois du chorobate travaillait certainement , on comprend que les erreurs et les approximations devaient être fréquentes, et que, en général imparfaitement calculée, la pente des aqueducs ne pouvait pas être absolument continue.
Dès la mise en service de l'adduction de Nîmes on s'aperçut, par exemple, que le specus du pont du Gard était placé trop bas et que l'eau s'en échappait par le haut ; il fallut aussitôt mettre l'aqueduc à sec et rehausser de 60 centimètres les côtés du radier. »
Par ailleurs, le site de l'association l'Académie du Pont du Gard, créée en 2011, fournit de nombreuses informations sur la construction de cet ouvrage :
- Les limites du système oeil-chorobate pour l’implantation de l’aqueduc de Nîmes.
- Les instruments d'arpentage.
Bonne journée.
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