Question d'origine :
Bonjour,
Quand on raconte les origines mythologiques de la fondation de Rome, on parle toujours d'Albe la longue (Alba Longa), dont sont originaires Numitor et Rhéa Silvia.
D'où vient ce surnom de "la longue" ? De son ancienneté ? De son caractère étendu d'un point de vue géographique ? Les sources antiques expliquent-elles cela ?
En vous remerciant par avance pour votre réponse,
Bien cordialement,
Antoine Torrens
Réponse attendue le 02/08/2017 - 12:08.
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 31/07/2017 à 09h00
Bonjour,
Selon la légende, Albe la Longue (Alba Longa) est fondée par Ascagne (Iule), fils d’Énée, trente ans après la fondation de Lavinium. Chronologiquement, cela signifierait à peu près au milieu du XIIe siècle av. J.-C., peu de temps après la destruction de Troie (qui aurait eu lieu en 1184 av. J.-C. selon les Anciens).
Mais que savons-nous ajuste de la cité d’Albe la Longue elle-même ? On a longtemps cherché, et gageons que l’on cherchera encore longtemps, Albe la Longue, la cité fabuleuse de Numitor et des jumeaux de Mars, la patrie des Curiaces, vaincus par les Horaces romains du belliqueux roi Tullus Hostilius, troisième souverain de Rome. C’est Denys d’Halicarnasse qui décrit le mieux la situation de la cité de Numitor :
"Elle fut construite près d’une montagne et d’un lac, dans l’espace compris entre les deux, lesquels constituaient comme un rempart pour la cité rendant sa prise difficile. La montagne constitue en effet une position forte, d’altitude élevée. Le lac est profond et étendu, et la plaine en reçoit les eaux grâce à un système d’écluses dont l’ouverture permet aux habitants de mettre en réserve autant d’eau qu’ils le désirent". [...]
"Pour comprendre l’énigme d’Albe, il faut remonter à l’étymologie d’Albe la Longue. Denys d’Halicarnasse voit en Alba Longa une Leuké Makra, c’est-à-dire la "Blanche Longue". On ne voit pas comment une communauté de cabanes de bois et de torchis peut bien avoir de blanc. Pour les Anciens, le blanc viendrait du sacrifice d’une truie blanche qui présida à la fondation de la cité. Il n’est nul besoin d’insister sur l’artificialité étiologique (l’étiologie désigne la démarche visant à expliquer des traits de civilisation existant par le récit mythique) de l’argument, qui met surtout en lumière l’embarras des Anciens, bien en peine de comprendre pourquoi la cité-mère était blanche. Il faut dire que ces mêmes Anciens n’étaient pas versés dans la linguistique indo-européenne. En effet, le nom d’Alba semble plutôt se référer à la racine Alb indo-européenne qui a donné Alpes ou, nous l’avons vu, l’ancien nom du Tibre Albula, fleuve des montagnes. Ainsi, Albe serait avant tout une ville sise en position élevée, une cité de la montagne.Pour expliquer le terme Longa, les Anciens évoquaient la forme de la ciitée étalée en longueur sur une colline. Albe devait être, comme le pense Tite-Live, une ville "en longueur sur une croupe". D’ailleurs, c’est cette conception d’un habitat s’étirant le long du lac qui a sans doute conduit de nombreux savants, contre l’avis de Denys d’Halicarnasse et donc la description la plus précise du sité d’Albe que nous possédons, à localiser de préférence la cité de Numitor sur le rebord du lac Albain, là où se situe l’actuelle Castel Gandolfo, opinion renforcée ensuite par les travaux de Visconti au début du 19e siècle"
Source : Romulus, le rêve de Rome / Thierry Camous
Pour aller plus loin, vous pourrez vous plonger dans les écrits de Denys d’Halicarnasse : Antiquités romaines :
Ascagne, fils d’Enée, bâtit une autre ville suivant la réponse que son père avait reçue de l’oracle. Il transféra dans cette nouvelle ville, non seulement les habitants de Lavinion, mais encore tous ceux des autres Latins qui voulurent s’y établir.Il la nomma Albe, comme qui diroit en Grec Leuké, c’est-à-dire blanche ; et pour la distinguer clairement d’une autre ville de ce m^me nom, il la nomma Longue, à cause de sa figure. De ces deux mots on en fit un composé, ce que nous exprimerions en grec par ces deux mots Leuké-Makra, qui signifient Blanche Longue. Aujourd’hui cette ville est déserte, car du temps de Tullus Hostilius, roi des Romains, elle fut rasée parce qu’elle semblait vouloir disputer l’empire à sa colonie, et la ville de Rome ayant détruit sa métropole en reçut les habitants qu’elle incorpora avec les siens. (également disponible en ligne sur Gallica)
Autres sources utilisées dans lesquelles nous n’avons trouvé que peu de renseignements pour compléter notre réponse :
SPQR, histoire de l’ancienne Rome / Mary Beard
Rome, la ville sans origine / Florence Dupont
Dictionnaire amoureux de la Rome antique / Xavier Darcos
Dictionnaire de la Civilisation romaine / Jean-Claude Fredouille
Selon la légende, Albe la Longue (Alba Longa) est fondée par Ascagne (Iule), fils d’Énée, trente ans après la fondation de Lavinium. Chronologiquement, cela signifierait à peu près au milieu du XIIe siècle av. J.-C., peu de temps après la destruction de Troie (qui aurait eu lieu en 1184 av. J.-C. selon les Anciens).
Mais que savons-nous ajuste de la cité d’Albe la Longue elle-même ? On a longtemps cherché, et gageons que l’on cherchera encore longtemps, Albe la Longue, la cité fabuleuse de Numitor et des jumeaux de Mars, la patrie des Curiaces, vaincus par les Horaces romains du belliqueux roi Tullus Hostilius, troisième souverain de Rome. C’est Denys d’Halicarnasse qui décrit le mieux la situation de la cité de Numitor :
"Elle fut construite près d’une montagne et d’un lac, dans l’espace compris entre les deux, lesquels constituaient comme un rempart pour la cité rendant sa prise difficile. La montagne constitue en effet une position forte, d’altitude élevée. Le lac est profond et étendu, et la plaine en reçoit les eaux grâce à un système d’écluses dont l’ouverture permet aux habitants de mettre en réserve autant d’eau qu’ils le désirent". [...]
"Pour comprendre l’énigme d’Albe, il faut remonter à l’étymologie d’Albe la Longue. Denys d’Halicarnasse voit en Alba Longa une Leuké Makra, c’est-à-dire la "Blanche Longue". On ne voit pas comment une communauté de cabanes de bois et de torchis peut bien avoir de blanc. Pour les Anciens, le blanc viendrait du sacrifice d’une truie blanche qui présida à la fondation de la cité. Il n’est nul besoin d’insister sur l’artificialité étiologique (l’étiologie désigne la démarche visant à expliquer des traits de civilisation existant par le récit mythique) de l’argument, qui met surtout en lumière l’embarras des Anciens, bien en peine de comprendre pourquoi la cité-mère était blanche. Il faut dire que ces mêmes Anciens n’étaient pas versés dans la linguistique indo-européenne. En effet, le nom d’Alba semble plutôt se référer à la racine Alb indo-européenne qui a donné Alpes ou, nous l’avons vu, l’ancien nom du Tibre Albula, fleuve des montagnes. Ainsi, Albe serait avant tout une ville sise en position élevée, une cité de la montagne.
Source : Romulus, le rêve de Rome / Thierry Camous
Pour aller plus loin, vous pourrez vous plonger dans les écrits de Denys d’Halicarnasse : Antiquités romaines :
Ascagne, fils d’Enée, bâtit une autre ville suivant la réponse que son père avait reçue de l’oracle. Il transféra dans cette nouvelle ville, non seulement les habitants de Lavinion, mais encore tous ceux des autres Latins qui voulurent s’y établir.
Autres sources utilisées dans lesquelles nous n’avons trouvé que peu de renseignements pour compléter notre réponse :
SPQR, histoire de l’ancienne Rome / Mary Beard
Rome, la ville sans origine / Florence Dupont
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