Question d'origine :
Je voudrais me procurer le texte intégral de la satire de Voltaire Les Cabales publiée en 1772 à la suite des Lois de Minos , tragédie non représentée ?
Voici les vers les plus célèbres, que j’aimerais resituer dans leur contexte :
"Il est vrai, j'ai raillé Saint-Médard et la bulle,
Mais j'ai sur la nature encor quelque scrupule.
L'univers m'embarrasse, et je ne puis songer
Que cette horloge existe et n'ait pas d'horloger."
Merci d’avance
Réponse du Guichet
bml_litt
- Département : Langues et Littératures
Le 27/05/2005 à 09h39
Dans le grand débat religieux sans cesse repris, Voltaire passa toujours très naturellement de l'observation des choses à la pensée de l'existence d'un Dieu. Cent fois reformulée, c'est la même évidence, celle d'un ordre, lui-même effet d'une intelligence-la difficulté est ensuite de penser le mal. Voltaire n'a d'ailleurs pas médité seulement sur les mouvements célestes du nouveau cosmos selon Newton, mais sur le vivant aussi, l'oeil de l'insecte, les muscles de l'homme, la croissance du blé; la nature entière est pour lui un "art"-au sens classique : un travail intelligent sur la matière-, donc elle révèle un "artisan".
Sur l'idée d'un "Eternel Géomètre" qu'il emprunte à Platon, il a conçu la figure d'un Dieu horloger du monde, plus conforme à la modernité technicienne. L'image sous-tend tout son discours sur Dieu, dès le Traité de métaphysique (1734-1737), mais elle n'affleure qu'assez rarement, un peu facile peut-être à ses yeux. C'est dans le poème des Cabales en 1773, qu'il lui donna sa plus grande énergie. Voltaire s'y représente face à un athée militant, qui le presse et l'endoctrine; harcelé, ébranlé, il est près de céder, mais oppose enfin l'ultime objection :
L'univers m'embarasse, et je ne puis songer
Que cette horloge existe, et n'ait pas d'horloger
- et une note accrochée là déploie l'argument en belle et bonne prose. On sait que ce nouvel athéisme doctrinal inquiéta la vieillesse de Voltaire. Il avait lu de fort près les athées modernes, tout particulièrement le Système de la nature publié en 1770, qu'il prit soin de réfuter. Il y trouva directement attaqué son postulat de l'Horloger, comme suspect d'anthropomorphisme : un sauvage découvrant une montre, objectait d'Holbach, n'y verrait-il pas l'oeuvre d'un dieu? Il mit à cette page un signet, qui s'est conservé avec le livre dans sa bibliothèque, portant sobrement : "Comparaison du sauvage". Mais son déisme resta ferme.
Vous pourrez donc retrouver ce texte à la bilbilothèque de la Part-Dieu. Il s'agit du tome 14 des oeuvres complètes de Voltaire, Les Cabales, edition 1787, page 230 à 235.
Oeuvres complètes de Voltaire
Nous vous recommandons également la lecture le l'ouvrage "Inventaire Voltaire", editions Gallimard, collection Quarto, qui propose un portrait neuf de ce "grand libérateur de l'esprit".
Inventaire Voltaire, Editions Gallimard, collection Quarto, 1995.
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