Question d'origine :
On semble oublier la place des bruns en France, en Europe, même nordique pourquoi ?.
Comment se fait-il que l'image du français ne soit elle pas celui d'un brun, alors que nos plus grands acteurs, célébrités français cheveux même noir !(Gérard Lanvin, Alain Delon, Michel Constantin, Michel Galabru, Paul Meurisse, Fernandel, Roger Pierre, Daniel Auteuil, Gérard Jugnot, Francis Perrin, Jean Luc Anglade, Anne Parillaud, Béatrice Dalle, juliette Binoche, Edith Piaf, Barbara tous très bruns) . Ils semble aussi très nombreux même dans les pays même anglo-saxons, nordiques et sous-estimés : Robert Smith, le chanteur du groupe the Cure, Andrew Eldrich, des sisters of Mercy , Morissey des Smiths, etc tous bruns comme les grands acteurs américains les plus classiques: Cary Grant, Anthony Perkins, John Gavin, pour ne citer qu'eux, les" super man" : Dean Cain, Christopher Reeves, Etrange paradoxe ils sembles omniprésent, et moins reconnus que les châtains et les blonds !
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 29/05/2017 à 10h37
Bonjour,
Comme nous l’expliquions dans une réponse précédente, discrimination positive, en date de 2007, cette assertion est loin d’être vraie. L’exposition proposée par la cinémathèque sur le thème « brune / blonde » montre que les critères de beauté varient considérablement d’une période à une autre et si, à un moment donné, le blond a pu l’emporter, ce n’est aujourd’hui pas le cas.
A titre d’exemple, les oscars 2017 ont été exclusivement attribués à … des bruns : Casey Affleck ou Emma stone ne sont pas blonds pas plus que Viola Davis et Mahershala Ali, tous deux oscars du meilleur second rôle, qui sont noirs !!
Dans les journaux actuels, les classements des plus belles personnalités mettent en avant la diversité :
Le magazine belge 7 sur 7 propose un classement des cinquante plus belles femmes dans le cinéma : Isabelle Adjani est en première position, Monica Bellucci en quatrième …
Elle présente « cinquante nuances de quinquas », dont beaucoup de brunes.
Sur pausepeople.com, le classement des 50 beaux mecs d’Hollywood met en avant les bruns !!
Nous pourrions ainsi poursuivre ces énumérations.
Plus scientifiquement, revenons sur les explications apportées dans le cadre de l’exposition de la cinémathèque :
"Le cinéma a fait des cheveux de femmes un motif essentiel de son esthétique et de sa mythologie. Héritier de la peinture et de la littérature, il prolonge cette fascination pour la chevelure féminine et la gestuelle qui lui est liée. Dès son origine, les cinéastes et leurs chefs opérateurs ont vu tout le parti qu'ils pouvaient tirer des cheveux comme forme et matière privilégiées dans la construction plastique de leurs plans. Les grands cinéastes de la chevelure (Hitchcock, Mizoguchi, Buñuel, Antonioni, Bergman, Godard, Lynch, Fassbinder et d'autres) se sont emparés de la richesse émotionnelle des cheveux de femmes, auxquels était donnée pour la première fois la grâce du mouvement. Ce motif détenant dans leurs films une part du mystère de ce que leur création a de plus intime et singulier.
Cet intérêt du cinéma pour la chevelure traverse aussi la grande Histoire dont elle accompagne les mutations et les heures les plus sombres. Chaque aire de civilisation (la Méditerranée, les pays nordiques, l'Asie, l'Afrique, les pays arabes, l'Inde) a développé sa propre poétique cinématographique de la chevelure, reflet de son identité culturelle, religieuse et de sa tradition artistique. En Occident, le XXème siècle aura été celui des médias de masse, et c'est le cinéma qui a constitué et diffusé les modèles féminins dominants. Les stars en ont été les icônes privilégiées, imposant, sous le contrôle des grands studios, des styles de féminité qui ont souvent guidé la mode de génération en génération : les cheveux courts dans les années 20 (Louise Brooks), les chevelures platinées dans les années 30 (Jean Harlow), les longues mèches ondulantes dans les années 40 (Veronica Lake), les coiffures lâchées à la Brigitte Bardot dans les années 50, les coupes androgynes à la Jean Seberg dans les années 60..."
Par ailleurs, lesinrocks rappelle qu’ "A l’origine, le blond figure la pureté (exemplairement les boucles dorées de Lilian Gish, petite fiancée de l’Amérique des années 1910-1920) tandis que le brun est associé au soufre, celui des vamps, des femmes scandaleuses (le noir de jais de Louise Brooks dans Loulou). Ce n’est que durant les années 1930 que les scénarios opèrent une imprévue permutation. La femme brune devient aimante et vertueuse tandis que la blonde se fait incendiaire et vénéneuse.
"C’est le premier effet de l’impérialisme du blond auquel a participé Hollywood , affirme Alain Bergala, commissaire de l’exposition. A partir du moment où les premiers produits de décoloration créés par L’Oréal au début du siècle se démocratisent, chaque ménagère peut, grâce à un produit de grande consommation, se cloner en star de cinéma. Le blond devient l’objet de désir absolu , et comme il incarne le désir, il se met aussi, à partir des années 1930, à incarner le danger dans les scénarios hollywoodiens."
Lana Turner, dans Le facteur sonne toujours deux fois, est une des versions les plus maléfiques de ces nouvelles pestes blondes.
A partir des années 1960, le cinéma moderne s’attache à compliquer cet antagonisme du blond et du brun . Tout commence avec Vertigo (Sueurs froides) de Hitchcock en 1958. De façon très classique, le héros Scottie (James Stewart) s’éprend de deux femmes à la couleur de cheveux différente (une blonde puis une rousse) et s’efforce de conformer la seconde à la première en lui teignant les cheveux. Mais toutes deux sont interprétées par Kim Novak et ne forment en fait qu’un seul personnage. Désormais, plus de conflit entre la brune et la blonde : la brune est la blonde.
Chez Hitchcock à nouveau (Tippi Hedren rinçant sa teinture brune dans Marnie et redéployant sa blondeur comme une résurrection), puis chez Godard (faisant temporairement porter une perruque brune à Bardot dans Le Mépris), De Palma (Body Double), Lynch (Lost Highway, Mulholland Drive), Wong Kar-wai (la perruque Marilyn de la tueuse brune de Chungking Express)… On ne compte plus les fictions de mise en miroir du brun et du blond.
Ultime aboutissement de l’abandon du vieux scénario de la rivalité : dans Mulholland Drive (2001), qui exhibe pourtant l’apparat du film noir classique, la brune et la blonde deviennent amantes. Equivalent français de cette relecture de mythologies nationales : le baiser de deux héroïnes truffaldiennes, la blonde Catherine Deneuve et la brune Fanny Ardant, dans Huit femmes d’Ozon.
Cet "impérialisme du blond" dont parle Alain Bergala, l’exposition s’attache à en pointer l’ampleur tout au long du XXe siècle, bien au-delà du cinéma. Plus exactement, la diffusion du blond comme idéal par Hollywood n’a été que l’incarnation par le capitalisme d’un phénomène qui toucha aussi deux grands systèmes totalitaires : l’URSS et le nazisme. Dans une salle consacrée à la question, un montage d’images d’archives montre en parallèle, sur plusieurs écrans, des publicités pour les produits cosmétiques promouvant la blondeur en Amérique et des films de propagande nazie exaltant le type aryen et sa crinière blonde, ou encore des films russes héroïsant l’athlète blond.
"Clairement, le blond a été l’instrument par lequel, au coeur du XXe siècle , des sociétés ont cherché à mettre à l’écart des minorités : noirs et latinos en Amérique, juifs dans l’Allemagne nazie…""
Pour dépasser le stade des apparences et des idées reçues, nous vous conseillons la lecture de deux références :
- cet article paru dans L'Ethonologie Française de mars 2005 : Pas de demi-mesure pour les Miss : la beauté en ses critères qui revient sur l'histoire sociologique des concours de beauté. Il y est notamment expliqué que les blondes ont eu grand mal à revenir dans les canons de beauté après la Seconde Guerre mondiale car elles évoquaient justement trop l'aryanité (1957). Cet article montre aussi clairement que les couleurs, des yeux ou des cheveux, sont des détails accessoires en regard d'autres critères, en particulier celui de la corpulence, du maintien, de la morphologie, des mensurations ; mais aussi de la personnalité.
- et cette interview de Jean-François Amadieu, sociologue, parue dans le Nouvel Observateur du 17 juillet 2003 : Relayé par une étude de l’Insee sur l’influence de la taille et par une enquête de la Sofres sur celle du physique, voici conforté le postulat du «poids de l’apparence» développé par Jean-François Amadieu. Ce sociologue de formation qui enseigne la gestion dénonce la tyrannie des apparences, facteur de discrimination et de reproduction des inégalités. Il confirme notamment que les critères de beauté évoluent sensiblement.
Notons néanmoins qu’il existe encore des milieux où les stéréotypes abondent. C’est le cas de la publicité où l’image de la femme blonde est surexploitée. A ce sujet, nous vous laissons lire Devenir concepteur-rédacteur en publicité par Didier Lavanant.
Comme nous l’expliquions dans une réponse précédente, discrimination positive, en date de 2007, cette assertion est loin d’être vraie. L’exposition proposée par la cinémathèque sur le thème « brune / blonde » montre que les critères de beauté varient considérablement d’une période à une autre et si, à un moment donné, le blond a pu l’emporter, ce n’est aujourd’hui pas le cas.
A titre d’exemple, les oscars 2017 ont été exclusivement attribués à … des bruns : Casey Affleck ou Emma stone ne sont pas blonds pas plus que Viola Davis et Mahershala Ali, tous deux oscars du meilleur second rôle, qui sont noirs !!
Dans les journaux actuels, les classements des plus belles personnalités mettent en avant la diversité :
Le magazine belge 7 sur 7 propose un classement des cinquante plus belles femmes dans le cinéma : Isabelle Adjani est en première position, Monica Bellucci en quatrième …
Elle présente « cinquante nuances de quinquas », dont beaucoup de brunes.
Sur pausepeople.com, le classement des 50 beaux mecs d’Hollywood met en avant les bruns !!
Nous pourrions ainsi poursuivre ces énumérations.
Plus scientifiquement, revenons sur les explications apportées dans le cadre de l’exposition de la cinémathèque :
"Le cinéma a fait des cheveux de femmes un motif essentiel de son esthétique et de sa mythologie. Héritier de la peinture et de la littérature, il prolonge cette fascination pour la chevelure féminine et la gestuelle qui lui est liée. Dès son origine, les cinéastes et leurs chefs opérateurs ont vu tout le parti qu'ils pouvaient tirer des cheveux comme forme et matière privilégiées dans la construction plastique de leurs plans. Les grands cinéastes de la chevelure (Hitchcock, Mizoguchi, Buñuel, Antonioni, Bergman, Godard, Lynch, Fassbinder et d'autres) se sont emparés de la richesse émotionnelle des cheveux de femmes, auxquels était donnée pour la première fois la grâce du mouvement. Ce motif détenant dans leurs films une part du mystère de ce que leur création a de plus intime et singulier.
Cet intérêt du cinéma pour la chevelure traverse aussi la grande Histoire dont elle accompagne les mutations et les heures les plus sombres. Chaque aire de civilisation (la Méditerranée, les pays nordiques, l'Asie, l'Afrique, les pays arabes, l'Inde) a développé sa propre poétique cinématographique de la chevelure, reflet de son identité culturelle, religieuse et de sa tradition artistique. En Occident, le XXème siècle aura été celui des médias de masse, et c'est le cinéma qui a constitué et diffusé les modèles féminins dominants. Les stars en ont été les icônes privilégiées, imposant, sous le contrôle des grands studios, des styles de féminité qui ont souvent guidé la mode de génération en génération : les cheveux courts dans les années 20 (Louise Brooks), les chevelures platinées dans les années 30 (Jean Harlow), les longues mèches ondulantes dans les années 40 (Veronica Lake), les coiffures lâchées à la Brigitte Bardot dans les années 50, les coupes androgynes à la Jean Seberg dans les années 60..."
Par ailleurs, lesinrocks rappelle qu’ "A l’origine, le blond figure la pureté (exemplairement les boucles dorées de Lilian Gish, petite fiancée de l’Amérique des années 1910-1920) tandis que le brun est associé au soufre, celui des vamps, des femmes scandaleuses (le noir de jais de Louise Brooks dans Loulou). Ce n’est que durant les années 1930 que les scénarios opèrent une imprévue permutation. La femme brune devient aimante et vertueuse tandis que la blonde se fait incendiaire et vénéneuse.
"C’est le premier effet de
Lana Turner, dans Le facteur sonne toujours deux fois, est une des versions les plus maléfiques de ces nouvelles pestes blondes.
Chez Hitchcock à nouveau (Tippi Hedren rinçant sa teinture brune dans Marnie et redéployant sa blondeur comme une résurrection), puis chez Godard (faisant temporairement porter une perruque brune à Bardot dans Le Mépris), De Palma (Body Double), Lynch (Lost Highway, Mulholland Drive), Wong Kar-wai (la perruque Marilyn de la tueuse brune de Chungking Express)… On ne compte plus les fictions de mise en miroir du brun et du blond.
Ultime aboutissement de l’abandon du vieux scénario de la rivalité : dans Mulholland Drive (2001), qui exhibe pourtant l’apparat du film noir classique, la brune et la blonde deviennent amantes. Equivalent français de cette relecture de mythologies nationales : le baiser de deux héroïnes truffaldiennes, la blonde Catherine Deneuve et la brune Fanny Ardant, dans Huit femmes d’Ozon.
"Clairement,
Pour dépasser le stade des apparences et des idées reçues, nous vous conseillons la lecture de deux références :
- cet article paru dans L'Ethonologie Française de mars 2005 : Pas de demi-mesure pour les Miss : la beauté en ses critères qui revient sur l'histoire sociologique des concours de beauté. Il y est notamment expliqué que les blondes ont eu grand mal à revenir dans les canons de beauté après la Seconde Guerre mondiale car elles évoquaient justement trop l'aryanité (1957). Cet article montre aussi clairement que les couleurs, des yeux ou des cheveux, sont des détails accessoires en regard d'autres critères, en particulier celui de la corpulence, du maintien, de la morphologie, des mensurations ; mais aussi de la personnalité.
- et cette interview de Jean-François Amadieu, sociologue, parue dans le Nouvel Observateur du 17 juillet 2003 : Relayé par une étude de l’Insee sur l’influence de la taille et par une enquête de la Sofres sur celle du physique, voici conforté le postulat du «poids de l’apparence» développé par Jean-François Amadieu. Ce sociologue de formation qui enseigne la gestion dénonce la tyrannie des apparences, facteur de discrimination et de reproduction des inégalités. Il confirme notamment que les critères de beauté évoluent sensiblement.
Notons néanmoins qu’il existe encore des milieux où les stéréotypes abondent. C’est le cas de la publicité où l’image de la femme blonde est surexploitée. A ce sujet, nous vous laissons lire Devenir concepteur-rédacteur en publicité par Didier Lavanant.
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