Question d'origine :
Bonjour,mon père Matias PANO était au GTE de Mende et en 1943 il a été envoyé au STO à Marseille. Existe-t-il des informations sur le STO des républicains espagnols à Marseille en 1943 et 1944? Merci
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 05/04/2017 à 15h01
Bonjour,
Il ne semble pas exister de documentation précise sur le STO à Marseille. Nous avons donc suivi plutôt vainement trois pistes : les histoires du STO, les histoires des réfugiés espagnols et les histoires de Marseille sous l’Occupation. Tout juste peut-on supposer, grâce à des exemples glanés dans des ouvrages sur les réfugiés espagnols, que votre père, s’il est resté à Marseille, a été recruté par l’organisation Todt pour construire une base sous-marine ou travailler aux fortifications.
«Dans les premiers jours de novembre 1942, lorsque les Américains débarquèrent au Maroc, les Allemands occupèrent la zone dite « libre ». […] Un jour, nous avons été convoqués au siège du groupement à Miramas, où nous attendait une délégation de militaires français. Un des gradés, je pense qu’il s’agissait d’un commandant, s’adressa à tous les espagnols rassemblés dans la langue de Cervantès qu’il maîtrisait parfaitement. […].Le but de ce discours était de recruter des volontaires, mais cette opération de séduction fut un échec pour les autorités de Vichy, qui collaboraient ouvertement avec les Allemands. […] Nous retournâmes donc au « mas de Bouscayer », mais quelques jours plus tard nous fûmes à nouveau convoqués à Miramas. La méthode changea de façon radicale, on ne nous présenta plus la chose sous un angle aussi aguichant. Sans ménagement, les gendarmes français nous firent monter dans des wagons à bestiaux et nous conduisirent à l’Estaque, près de Marseille, où les Allemands avaient, semble-t-il, le projet de construire une base sous-marine. On nous enferma dans un grand bâtiment, situé au bord d’une route, qui, je ne sais trop pourquoi, était baptisé « Moulin rouge ». Nous étions placés sous la surveillance de la légion antibolchevique française qui, en quelque sorte, était l’équivalent de la division Azul espagnole. Il s’agissait de volontaires destinés à combattre au côté des troupes allemandes sur le front de l’Est. […] »
Source : Une longue marche. De la répression franquiste aux camps français, Albino Garrido. Il s’enfuit peu après, si bien qu’on ne saura rien de plus … En note, l’auteur précise qu’il a trouvé la trace de ce « Moulin rouge » aux Archives départementales des Alpes de Haute-Provence
Dans Exils et migrations : Italiens et Espagnols en France 1938-1946, un exemple non sourcé :
« Les espagnols des GTE, réquisitionnés au service de l’organisation Todt en nombre croissant, se déplacent de chantier en chantier selon les besoins. H. incorporé dans une GTE des Bouches du Rhône, sera simplement affecté à la base sous-marine de Marseille et y restera jusqu’à la fin de la guerre ».
«Lorsque les Allemands entreprennent de recruter de la main d’œuvre partout où ils le peuvent, pour construire le mur de l’Atlantique, des fortifications sur la côte méditerranéennes, des abris pour les sous-marins et pour aller travailler en Allemagne même, les GTE constitueront des réserves idéales de travailleurs.[…] 26 000 Espagnols auraient été officiellement recrutés entre 1942 et 1944 pour l’organisation Todt et 40 000 envoyés pour travailler en Allemagne »
Source : L’exil des républicains espagnols en France. Geneviève Dreyfus-Armand y explique le processus des Groupements de Travailleurs Etrangers et la réquisition forcée des travailleurs mais sans citer Marseille. Par ailleurs, p. 429 et suivantes, elle cite de nombreuses sources, dont les Archives Nationales et celles du Ministère des Affaires étrangères, qui comportent plusieurs cotes consacrées aux réfugiés espagnols.
Voir aussi : Les étrangers en France : guide des sources d'archives publiques et privées : XIXe-XXe siècles
Si les ouvrages sur le STO s’intéressent essentiellement au travail en Allemagne, les documents sur l’organisation Todt se penchent surtout sur le Mur de l’Atlantique, qui a occupé semble-t-il le gros des travailleurs forçés.
Voir par exemple : L'Organisation Todt en France (1940-1944), Remy Desquesnes, Histoire, économie et société Année 1992 Volume 11 Numéro 3 pp. 535-550.
A consulter peut-être : L’organisation Todt : une organisation allemande au cœur de la collaboration, Jean-Guy Dubernat
La recherche catalogue « STO Marseille » dans les Bibliothèques de Marseille ne donne que deux résultats qui ne nous apprennent pas grand-chose mais vous pouvez essayer peut-être de les contacter :
- Introduction : Notes sur le S.T.O. à Marseille, Antoine Olivesi, Provence historique, 1987, fasc. 147. On peut y lire : « Le S.T.O. à Marseille a été peu étudié encore. Aux Archives Départementales, les dossiers de la série M6, ceux du cabinet du préfet, surtout, contiennent pouvant des informations intéressantes qui vont du cas individuel aux longues séries statistiques des registres nominatifs et alphabétiques, sans parler de la correspondance administrative et des multiples lettres de protestation, de recommandation, de dénonciations. etc. »
Attention, les Archives départementales des Bouches-du-Rhône semblent avoir procédé à un changement de cotes
- De Marseille à Leipzig : chronique du S.T.O., Jean-Louis Vissière, Provence historique, 1987, fasc. 147, parle d’un français parti à Dresde.
Autres pistes d’ouvrages que nous n’avons pu consulter :
de Peter Gaida :
- Camps de travail sous Vichy : les « groupes de travailleurs étrangers » (GTE) en France et en Afrique du Nord 1940-1944, thèse de doctorat, Paris 1, 2008 : Résumé : « A la veille de la Seconde Guerre mondiale, des nombreux étrangers réfugiés en France sont incorporés par la Troisième République dans des «Compagnies de Travailleurs Etrangers » (CTE) et doivent contribuer à la défense nationale. Après la défaite, le régime de Vichy crée pour les réfugiés étrangers des «Groupes de Travailleurs Etrangers » (GTE). Ces GTE se révèlent, avec en moyenne 40 000 étrangers incorporés dans plus de cent groupes, l’expression d’une politique xénophobe, antisémite et anticommuniste. Cette politique est également appliquée en Afrique du Nord où les autorités de Vichy créent de camps de travail pour la construction d'un chemin de fer, le «Transsaharien». En zone occupée, les autorités allemandes reçoivent 35000 républicains espagnols des GTE. L'étude démontre qu'environ 100 000 étrangers ont connu un travail forcé en France, soit dans les GTE de Vichy en zone libre et en Afrique du Nord, soit dans les camps de l'Organisation Todt. » Voir le sommaire.
- ”Les étrangers en surnombre” : les groupements de travailleurs étrangers (GTE)
Ici-même : Marseille 1940-1944, Robert Mencherini.
La emigracion de la guerra civil, Javier Rubio, que vous pouvez localiser dans le Sudoc
Bonnes recherches !
Il ne semble pas exister de documentation précise sur le STO à Marseille. Nous avons donc suivi plutôt vainement trois pistes : les histoires du STO, les histoires des réfugiés espagnols et les histoires de Marseille sous l’Occupation. Tout juste peut-on supposer, grâce à des exemples glanés dans des ouvrages sur les réfugiés espagnols, que votre père, s’il est resté à Marseille, a été recruté par l’organisation Todt pour construire une base sous-marine ou travailler aux fortifications.
«Dans les premiers jours de novembre 1942, lorsque les Américains débarquèrent au Maroc, les Allemands occupèrent la zone dite « libre ». […] Un jour, nous avons été convoqués au siège du groupement à Miramas, où nous attendait une délégation de militaires français. Un des gradés, je pense qu’il s’agissait d’un commandant, s’adressa à tous les espagnols rassemblés dans la langue de Cervantès qu’il maîtrisait parfaitement. […].Le but de ce discours était de recruter des volontaires, mais cette opération de séduction fut un échec pour les autorités de Vichy, qui collaboraient ouvertement avec les Allemands. […] Nous retournâmes donc au « mas de Bouscayer », mais quelques jours plus tard nous fûmes à nouveau convoqués à Miramas. La méthode changea de façon radicale, on ne nous présenta plus la chose sous un angle aussi aguichant. Sans ménagement, les gendarmes français nous firent monter dans des wagons à bestiaux et nous conduisirent à l’Estaque, près de Marseille, où les Allemands avaient, semble-t-il, le projet de construire une base sous-marine. On nous enferma dans un grand bâtiment, situé au bord d’une route, qui, je ne sais trop pourquoi, était baptisé « Moulin rouge ». Nous étions placés sous la surveillance de la légion antibolchevique française qui, en quelque sorte, était l’équivalent de la division Azul espagnole. Il s’agissait de volontaires destinés à combattre au côté des troupes allemandes sur le front de l’Est. […] »
Source : Une longue marche. De la répression franquiste aux camps français, Albino Garrido. Il s’enfuit peu après, si bien qu’on ne saura rien de plus … En note, l’auteur précise qu’il a trouvé la trace de ce « Moulin rouge » aux Archives départementales des Alpes de Haute-Provence
Dans Exils et migrations : Italiens et Espagnols en France 1938-1946, un exemple non sourcé :
« Les espagnols des GTE, réquisitionnés au service de l’organisation Todt en nombre croissant, se déplacent de chantier en chantier selon les besoins. H. incorporé dans une GTE des Bouches du Rhône, sera simplement affecté à la base sous-marine de Marseille et y restera jusqu’à la fin de la guerre ».
«Lorsque les Allemands entreprennent de recruter de la main d’œuvre partout où ils le peuvent, pour construire le mur de l’Atlantique, des fortifications sur la côte méditerranéennes, des abris pour les sous-marins et pour aller travailler en Allemagne même, les GTE constitueront des réserves idéales de travailleurs.[…] 26 000 Espagnols auraient été officiellement recrutés entre 1942 et 1944 pour l’organisation Todt et 40 000 envoyés pour travailler en Allemagne »
Source : L’exil des républicains espagnols en France. Geneviève Dreyfus-Armand y explique le processus des Groupements de Travailleurs Etrangers et la réquisition forcée des travailleurs mais sans citer Marseille. Par ailleurs, p. 429 et suivantes, elle cite de nombreuses sources, dont les Archives Nationales et celles du Ministère des Affaires étrangères, qui comportent plusieurs cotes consacrées aux réfugiés espagnols.
Voir aussi : Les étrangers en France : guide des sources d'archives publiques et privées : XIXe-XXe siècles
Si les ouvrages sur le STO s’intéressent essentiellement au travail en Allemagne, les documents sur l’organisation Todt se penchent surtout sur le Mur de l’Atlantique, qui a occupé semble-t-il le gros des travailleurs forçés.
Voir par exemple : L'Organisation Todt en France (1940-1944), Remy Desquesnes, Histoire, économie et société Année 1992 Volume 11 Numéro 3 pp. 535-550.
A consulter peut-être : L’organisation Todt : une organisation allemande au cœur de la collaboration, Jean-Guy Dubernat
La recherche catalogue « STO Marseille » dans les Bibliothèques de Marseille ne donne que deux résultats qui ne nous apprennent pas grand-chose mais vous pouvez essayer peut-être de les contacter :
- Introduction : Notes sur le S.T.O. à Marseille, Antoine Olivesi, Provence historique, 1987, fasc. 147. On peut y lire : « Le S.T.O. à Marseille a été peu étudié encore. Aux Archives Départementales, les dossiers de la série M6, ceux du cabinet du préfet, surtout, contiennent pouvant des informations intéressantes qui vont du cas individuel aux longues séries statistiques des registres nominatifs et alphabétiques, sans parler de la correspondance administrative et des multiples lettres de protestation, de recommandation, de dénonciations. etc. »
Attention, les Archives départementales des Bouches-du-Rhône semblent avoir procédé à un changement de cotes
- De Marseille à Leipzig : chronique du S.T.O., Jean-Louis Vissière, Provence historique, 1987, fasc. 147, parle d’un français parti à Dresde.
Autres pistes d’ouvrages que nous n’avons pu consulter :
de Peter Gaida :
- Camps de travail sous Vichy : les « groupes de travailleurs étrangers » (GTE) en France et en Afrique du Nord 1940-1944, thèse de doctorat, Paris 1, 2008 : Résumé : « A la veille de la Seconde Guerre mondiale, des nombreux étrangers réfugiés en France sont incorporés par la Troisième République dans des «Compagnies de Travailleurs Etrangers » (CTE) et doivent contribuer à la défense nationale. Après la défaite, le régime de Vichy crée pour les réfugiés étrangers des «Groupes de Travailleurs Etrangers » (GTE). Ces GTE se révèlent, avec en moyenne 40 000 étrangers incorporés dans plus de cent groupes, l’expression d’une politique xénophobe, antisémite et anticommuniste. Cette politique est également appliquée en Afrique du Nord où les autorités de Vichy créent de camps de travail pour la construction d'un chemin de fer, le «Transsaharien». En zone occupée, les autorités allemandes reçoivent 35000 républicains espagnols des GTE. L'étude démontre qu'environ 100 000 étrangers ont connu un travail forcé en France, soit dans les GTE de Vichy en zone libre et en Afrique du Nord, soit dans les camps de l'Organisation Todt. » Voir le sommaire.
- ”Les étrangers en surnombre” : les groupements de travailleurs étrangers (GTE)
Ici-même : Marseille 1940-1944, Robert Mencherini.
La emigracion de la guerra civil, Javier Rubio, que vous pouvez localiser dans le Sudoc
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