Question d'origine :
Bonjour,
La majorité pour devenir roi de France a-t-elle variée au cours des siècles ? Si oui, à quel âge l'héritier du trône pouvait devenir roi ?
Je vous remercie.
Très cordialement.
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 22/03/2017 à 10h17
Bonjour,
Comme nous l’apprennent les extraits et textes ci-dessous, la majorité des rois a en effet varié au cours des siècles et n’était pas vraiment fixée jusqu’à 1374. A cette date, l’ordonnance de Charles V fixe la majorité du roi à quatorze ans (13 ans révolus). Mais rapidement, selon le principe de continuité du règne, le fils aîné est en fait roi dès la mort du roi son père, quel que soit son âge.
« Les principes de continuité et d’indisponibilité se sont imposés au plus fort de la guerre de Cent ans, en réponse aux menaces pesant sur la couronne. Depuis l’abandon du couronnement anticipé, une certaine vacance du pouvoir survenait entre la mort du roi et le sacre de son successeur, à fortiori si la minorité de celui-ci provoquait une longue régence. Philippe III avait bien pris acte de ce problème en datant ses actes à partir de la mort de son père, et non de son propre sacre, et en fixant à quatorze ans la majorité du prince, jusqu’alors réglée sur la date où il était armé chevalier, vers la fin de son adolescence. Charles V, en 1374, ne put que réduire à peine la difficulté en abaissant encore d’un an cette majorité. Pour résoudre le problème, il fallait affirmer l’instantanéité de la succession royale ; c’est ce que fit quelques années plus tard Le songe du verger d’Evrard de Trémaugon ; en reprenant la règle coutumière selon laquelle « le mort saisit le vif », c’est-à-dire que le décès du monarque fait ipso facto de son successeur un roi, quel que soit son âge et avant même son sacre. »
Source : Les institutions de la France médiévale, Romain Telliez, p.52.
Voir aussi le chapitre Le roi est mort ! Vive le roi ! p. 34 à 38 de Pouvoirs et institutions dans la France médiévale. T. 2, O. Guillot, A. Rigaudière, Y. Sassier.
Ces pages mentionnent l’ordonnance d’Avril 1403 qui précise la précédente : « Il y est prévu que le fils aîné « en quelque petit âge qu’il soit ou puisse être, soit après nous incontinent sans aucune dilacion, appelé roy de France, succède a notre royaume et soit couronné Roy le plustot que faire se pourra. » Et, pour mieux assurer les droits du nouveau souverain, personne même parmi les plus proches du jeune roi ne peut plus être habilité à recevoir « bail, régence ou gouvernement » du royaume dont l’administration est confiée à la reine, assistée des princes du sang et autres membres de l’entourage royal […]La succession à la couronne devait être instantanée, quel que soit l’âge du jeune prince. Sacré ou non, il doit être tenu pour roi dès la mort du roi régnant et il apparaît désormais inutile de fixer un âge pour la majorité. »
"Majorité du Roi, est fixée en France à quatorze ans commencés. Jusqu'au regne de Charles V. il n'y avoit rien de certain sur le tems auquel les rois devenoient majeurs, les uns l'avoient été reconnus plûtôt, d'autres plûtard."
Article Majorité du roi, Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers
Le texte de l’ Ordonnance du roi Charles V fixant la majorité des rois de France à 14 ans et l'organisation de la régence. Acte en latin sur parchemin scellé du sceau royal de cire verte pendant sur lacs de soie rouge et verte, daté d'août 1374, est en ligne sur ARCHIM, Portail internet des Archives nationales.
Dans le Traité de la majorité de nos rois et des régences du Royaume, Pierre Dupuy narre l’histoire de cette majorité et rappelle l’âge auquel les rois précédents ont régné au chap. 1.
Dans Régences et lois fondamentales, Annuaire-bulletin de la Société de l’Histoire de France, année 2003, on voit que la mise en œuvre est difficile …
Voir aussi l’article Majorité des rois de France, dans la table du Recueil général des anciennes lois françaises, depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, volume 29, pour un petit récapitulatif des édits et ordonnances.
« Des crises successorales de 1316 et 1328 naissent les deux principes qui régissent la transmission du trône de France : les femmes ne peuvent hériter ni transmettre les droits à la couronne. La souveraineté, strictement masculine dans son exercice, est dévolue au plus prochain mâle en ligne masculine. La couronne s’affirme donc indisponible et le domaine royal devient, corrélativement, inaliénable. Pour compléter cette construction juridique, et assurer de la sorte la pérennité de la royauté maintenue dans une seule et même lignée dynastique, Charles V, puis son successeur Charles VI, fixent les conditions d’exercice de la régence en cas de minorité royale. Avec l’ordonnance de 1374, les femmes se voient confier la tutelle du roi mineur, tandis que les princes et grands dignitaires du royaume ont la charge du gouvernement. Rien de très original à cela : dans la société féodale, les mères obtiennent traditionnellement la garde de leurs enfants jusqu’à la majorité. C’est sur ce modèle que se calque l’organisation de la régence dans un premier temps. Seule la majorité du roi, fixée à 14 ans par cette même ordonnance, met un terme au pouvoir du régent. La protection du roi mineur est assurée par la reine mère, mais les risques d’usurpation, par un prince trop ambitieux, sont loin d’être écartés. Pour pallier de tels dangers, Charles VI, par une ordonnance promulguée en 1407, révise cette forme de gouvernement transitoire. En établissant le principe d’instantanéité de la succession — à l’origine d’un roi-qui-ne-meurt-jamais — il modifie profondément la conception même de la régence, désormais exercée au nom d’un monarque qui, bien que mineur, détient seul l’intégralité de la souveraineté. Il n’est plus question, dès lors, que d’une délégation de l’autorité incarnée par le roi. »
Source : Puissance maternelle et pouvoir politique. La régence des reines mères, Fanny Cosandey, Dossier Maternités, Clio, 21/2005 en ligne
Bonnes lectures !
Comme nous l’apprennent les extraits et textes ci-dessous, la majorité des rois a en effet varié au cours des siècles et n’était pas vraiment fixée jusqu’à 1374. A cette date, l’ordonnance de Charles V fixe la majorité du roi à quatorze ans (13 ans révolus). Mais rapidement, selon le principe de continuité du règne, le fils aîné est en fait roi dès la mort du roi son père, quel que soit son âge.
« Les principes de continuité et d’indisponibilité se sont imposés au plus fort de la guerre de Cent ans, en réponse aux menaces pesant sur la couronne. Depuis l’abandon du couronnement anticipé, une certaine vacance du pouvoir survenait entre la mort du roi et le sacre de son successeur, à fortiori si la minorité de celui-ci provoquait une longue régence. Philippe III avait bien pris acte de ce problème en datant ses actes à partir de la mort de son père, et non de son propre sacre, et en fixant à quatorze ans la majorité du prince, jusqu’alors réglée sur la date où il était armé chevalier, vers la fin de son adolescence. Charles V, en 1374, ne put que réduire à peine la difficulté en abaissant encore d’un an cette majorité. Pour résoudre le problème, il fallait affirmer l’instantanéité de la succession royale ; c’est ce que fit quelques années plus tard Le songe du verger d’Evrard de Trémaugon ; en reprenant la règle coutumière selon laquelle « le mort saisit le vif », c’est-à-dire que le décès du monarque fait ipso facto de son successeur un roi, quel que soit son âge et avant même son sacre. »
Source : Les institutions de la France médiévale, Romain Telliez, p.52.
Voir aussi le chapitre Le roi est mort ! Vive le roi ! p. 34 à 38 de Pouvoirs et institutions dans la France médiévale. T. 2, O. Guillot, A. Rigaudière, Y. Sassier.
Ces pages mentionnent l’ordonnance d’Avril 1403 qui précise la précédente : « Il y est prévu que le fils aîné « en quelque petit âge qu’il soit ou puisse être, soit après nous incontinent sans aucune dilacion, appelé roy de France, succède a notre royaume et soit couronné Roy le plustot que faire se pourra. » Et, pour mieux assurer les droits du nouveau souverain, personne même parmi les plus proches du jeune roi ne peut plus être habilité à recevoir « bail, régence ou gouvernement » du royaume dont l’administration est confiée à la reine, assistée des princes du sang et autres membres de l’entourage royal […]La succession à la couronne devait être instantanée, quel que soit l’âge du jeune prince. Sacré ou non, il doit être tenu pour roi dès la mort du roi régnant et il apparaît désormais inutile de fixer un âge pour la majorité. »
"Majorité du Roi, est fixée en France à quatorze ans commencés. Jusqu'au regne de Charles V. il n'y avoit rien de certain sur le tems auquel les rois devenoient majeurs, les uns l'avoient été reconnus plûtôt, d'autres plûtard."
Article Majorité du roi, Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers
Le texte de l’ Ordonnance du roi Charles V fixant la majorité des rois de France à 14 ans et l'organisation de la régence. Acte en latin sur parchemin scellé du sceau royal de cire verte pendant sur lacs de soie rouge et verte, daté d'août 1374, est en ligne sur ARCHIM, Portail internet des Archives nationales.
Dans le Traité de la majorité de nos rois et des régences du Royaume, Pierre Dupuy narre l’histoire de cette majorité et rappelle l’âge auquel les rois précédents ont régné au chap. 1.
Dans Régences et lois fondamentales, Annuaire-bulletin de la Société de l’Histoire de France, année 2003, on voit que la mise en œuvre est difficile …
Voir aussi l’article Majorité des rois de France, dans la table du Recueil général des anciennes lois françaises, depuis l’an 420 jusqu’à la Révolution de 1789, volume 29, pour un petit récapitulatif des édits et ordonnances.
« Des crises successorales de 1316 et 1328 naissent les deux principes qui régissent la transmission du trône de France : les femmes ne peuvent hériter ni transmettre les droits à la couronne. La souveraineté, strictement masculine dans son exercice, est dévolue au plus prochain mâle en ligne masculine. La couronne s’affirme donc indisponible et le domaine royal devient, corrélativement, inaliénable. Pour compléter cette construction juridique, et assurer de la sorte la pérennité de la royauté maintenue dans une seule et même lignée dynastique, Charles V, puis son successeur Charles VI, fixent les conditions d’exercice de la régence en cas de minorité royale. Avec l’ordonnance de 1374, les femmes se voient confier la tutelle du roi mineur, tandis que les princes et grands dignitaires du royaume ont la charge du gouvernement. Rien de très original à cela : dans la société féodale, les mères obtiennent traditionnellement la garde de leurs enfants jusqu’à la majorité. C’est sur ce modèle que se calque l’organisation de la régence dans un premier temps. Seule la majorité du roi, fixée à 14 ans par cette même ordonnance, met un terme au pouvoir du régent. La protection du roi mineur est assurée par la reine mère, mais les risques d’usurpation, par un prince trop ambitieux, sont loin d’être écartés. Pour pallier de tels dangers, Charles VI, par une ordonnance promulguée en 1407, révise cette forme de gouvernement transitoire. En établissant le principe d’instantanéité de la succession — à l’origine d’un roi-qui-ne-meurt-jamais — il modifie profondément la conception même de la régence, désormais exercée au nom d’un monarque qui, bien que mineur, détient seul l’intégralité de la souveraineté. Il n’est plus question, dès lors, que d’une délégation de l’autorité incarnée par le roi. »
Source : Puissance maternelle et pouvoir politique. La régence des reines mères, Fanny Cosandey, Dossier Maternités, Clio, 21/2005 en ligne
Bonnes lectures !
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