Reliure en peau humaine dans le fonds Lacassagne ?
Question d'origine :
Bonjour, Une rumeur prétend que certains ouvrages du fonds Lacassagne sur le tatouage sont reliés en peau humaine. Est-ce exact ? Merci et bien cordialement.
Réponse du Guichet
Le fonds Alexandre Lacassagne comprend six volumes dédiés aux études sur les tatouages. La rumeur veut que le cuir ayant servi à réaliser la reliure de ces six recueils soit de la peau humaine. Le grain du cuir utilisé ressemble effectivement fortement à de la peau humaine. Toutefois, en 2004, la bibliothèque municipale de Lyon a fait expertiser les peaux en question et il apparaît que ce ne seraient pas de véritables peaux humaines.
Bonjour,
La bibliothèque du professeur Alexandre Lacassagne a été donnée à la bibliothèque municipale en 1921. L’ancien médecin légiste possédait sur de nombreux sujets une documentation très abondante constituée de manuscrits, de livres et de brochures ou articles tirés à part que, le plus souvent, on lui envoyait. La plupart de ces brochures ont été reliés en différents recueils thématiques. C’est notamment le cas des recueils concernant les tatouages, pratique qui intéressait particulièrement Alexandre Lacassagne.
Nous dénombrons ainsi 6 volumes, contenant 64 documents (brochures, livres, tirés à part) cotés de « Rés 135320 » à « Rés 135384 », tous dédiés aux études sur les tatouages, notamment dans leur lien avec les milieux de prisonniers et de criminels. Parmi ces 6 recueils, les quatre premiers sont reliés « plein cuir » et les deux derniers sont des « demi-cuir » ou « demi-peau » (voir le glossaire du bibliophile du site Abebooks.com pour la définition de ces termes).
La rumeur veut en effet que le cuir ayant servi à réaliser ces 6 reliures soit de la peau humaine. Le grain du cuir utilisé ressemble effectivement fortement à de la peau humaine. Toutefois, en 2004, lors de l’exposition « Le médecin et le criminel », la bibliothèque municipale de Lyon a fait expertiser les peaux en question et il apparaît que ce ne seraient pas de véritables peaux humaines. Par ailleurs, cela ne correspond pas à la pratique d’Alexandre Lacassagne, qui était de relever les tatouages par calque sur la peau des prisonniers.
Pour autant, cela ne signifie nullement que la pratique de relier des livres en peau humaine n’existe pas. Le cas récent le plus connu porté au public est la reliure du recueil des confessions du criminel Louis-Marius Rambert (1903-1934). Arrêté et emprisonné, celui-ci avait été en contact direct et appuyé avec le docteur Jean Lacassagne, médecin spécialisé en dermatologie, fils d'Alexandre Lacassagne. Dans son testament rédigé en 1932, Rambert lui lègue sa peau tatouée. Jean Lacassagne fera relier toute la documentation acquise sur Rambert dans une reliure en basane (peau de mouton), avec des inserts de la peau du criminel figurant ses tatouages. Mis en vente par Bergé et compagnie en 2014, ce livre a finalement été retiré de la vente précisément pour cette présence de peau humaine. Le blog « La brouette de Couthon » résume assez bien l’ensemble de l’affaire et propose quelques photographies.
Notons que cela va dans la logique d’un mode de collecte propre à Jean Lacassagne, à savoir : le prélèvement des tatouages directement sur la peau des tatoués, une peau qu’il faisait tanner pour une meilleure conservation. Sa collection a été donnée au musée des techniques policières créé par Edmond Locard en 1921 dans les locaux de son laboratoire de police scientifique. Aujourd'hui, ces collections sont sans doute conservées dans les collections de l'école nationale supérieure de la Police (ENSP) de Saint-Cyr-au-Mont-d’Or, qui a récupéré les collections d’objets et de criminalistique des professeurs Alexandre Lacassagne et Edmond Locard, dont une partie est exposée de façon permanente dans leur musée.
Bien cordialement,