Bibliophilie contemporaine
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 08/02/2017 à 09h57
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Question d'origine :
Bonjour,
J'aimerais savoir si vous pourriez m'aider à définir la notion de bibliophilie contemporaine. Notamment la frontière ténue qu'elle entretient avec le "livre d'artiste". Auriez-vous des références pour m'aider à obtenir plus d'informations sur la définition de la bibliophilie contemporaine qui d'après mes recherches me semble bien floues ?
J'ai déjà lu le résumé du stage de 2011 à Lyon sur la bibliophilie contemporaine, j'ai aussi trouvé un mémoire de l'ENSSIB (mais du début des années 1990). J'ai aussi tenté de comparer les fonds de bibliophilie contemporaine de différentes bibliothèques, et la définition du fonds fluctue d'une structure à l'autre.
Pourriez-vous m'éclairer, ou m'aider à trouver des lectures pour cerner davantage cette notion ?
Merci par avance !
Réponse du Guichet
gds_et
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 10/02/2017 à 16h48
Bonjour,
CICLIC, un organisme qui soutient les auteurs et artistes dans les domaines du livre et de l’image, a adressé un questionnaire à des éditeurs de la région Centre-Val de Loire. Il leur est notamment demandé d’apporter leur définition de la bibliophilie contemporaine et du livre d’artiste :
« "Bibliophilie contemporaine" et "livres d'artiste", deux termes qui font toujours l'objet de discussions, d'après les réponses nous constatons que tous n'ont pas le même point de vue. Marie Alloy, Claire et François Poulain, François Righi et Coco Téxèdre ont néanmoins le point commun d'être tous les quatres des artistes, de même qu'ils sont éditeurs, respectivement depuis 22, 33, 40 et 22 ans.
D'après Marie Alloy, ces deux dénominations ne sont pas synonymes même si elles se recoupent, comme c’est le cas dans son travail.
"Le terme de bibliophilie contemporaine fait référence à une tradition du “beau livre”, développée principalement dès la 1ère moitié du XXe siècle grâce à l’initiative d’éditeurs qui ont su orchestrer magistralement dans des ouvrages d’exception la rencontre entre des poètes et des peintres. Bien avant eux, on parlait plutôt de livre illustré. Ces ouvrages de bibliophilie, à tirage limité, étaient imprimés en typographie au plomb par des imprimeurs chevronnés et accompagnés d’œuvres originales d’artistes de renom, créées en lithographie ou à l’eau-forte ou toute autre technique sur des papiers pur chiffon et signées à la main par l’artiste et le poète.
J’entends par « livre d’artiste », un travail de création du livre lui-même en tant qu’objet poétique, intégrant dans sa conception l’œuvre graphique ou plastique d’un artiste (ou parfois plusieurs). C’est une notion beaucoup plus libre et plus souple que celle de bibliophilie contemporaine qui n’implique d’ailleurs pas nécessairement la présence de la poésie écrite. Il n’y a aucune norme pour définir le livre d’artiste, puisque c’est sa singularité même qui retient l’attention et lui donne sens, par son engagement dans les courants artistiques de référence ou, au contraire, par sa marginalité. Mon travail tient donc à la fois du livre de bibliophilie et du livre d’artiste." (Voir l'intégralité de l'intretien)
Pour Claire et François Poulain, la bibliophilie contemporaine est l'expression que l'on emploie le plus souvent pour qualifier leurs éditions lorsqu'il faut les présenter, les définir et les « catégoriser ».
"On entend par bibliophilie contemporaine l'édition d'ouvrages à caractère singulier avec des multiples originaux tels que gravures, lithographies, sérigraphies, collages... que les artistes créent en fonction d'un médium pour accompagner un texte poétique.
En effet, nous revendiquons le fait d'être éditeur, même si le tirage de nos titres reste en moyenne autour de 70 exemplaires. En cela, il ne s'agit pas de livres d'artistes : cette notion se distingue de l'édition en cela qu'elle nomme précisément un ouvrage qui échappe aux critères de l'édition : le multiple. Le livre d'artiste reste confidentiel, contrairement à l'édition qui nécessite une diffusion.
Dans la mesure où nous travaillons avec des poètes et artistes vivants, nous nous inscrivons dans la contemporanéité des expressions textes/images relative à différents courants comme par exemple la poésie sonore, mais sans appartenance à quelque « chapelle » que ce soit."
Le mot livre d'artiste reste très vague pour Coco Téxèdre, elle considère que les libraires l'utilisent pour des livres à grand tirage sur des artistes, et qu'il a donc perdu son sens.
"Ce serait mieux de dire qu'un livre d'artiste est fait par un artiste en livre unique ou illimité et ce mot nous conviendrait.
Dans bibliophilie contemporaine j'entends Beau livre, beau papier, belle typo, petit tirage, livre accompagné auteur-peintre, mais aussi le livre-objet unique, on peut y ajouter le livre d'artiste avec ou sans texte, beau papier ou pas: l'artist'book.
Il faudrait aussi entendre artistes et auteurs vivants, mais ce n'est pas toujours le cas. Donc c'est très compliqué. Il y a le livre libre Essai sur le livre d'artiste ( les cahiers dessinés) qui essaient de donner une définition du livre d'artiste. Aucun des deux mots n'est satisfaisant. Associer les deux ? J'ai l'impression de mieux faire comprendre ce que je fais avec bibliophilie contemporaine. Trouver une troisième appellation ou organiser un forum ?"
François Righi ne se pose pas la question sous cette forme, pour lui c'est en pratiquant des arts plastiques et visuels qu'il se pose la sempiternelle question : "pourquoi faire des livres plutôt qu'autre chose ? Ce qui dans mes mains a lieu sous cette forme ne saurait exister sous une autre. Si ce sont les livres d'un artiste, ce sont d'abord ceux d'un lecteur. On a pu rappeler que les livres sont notre commun partage ; mais qui peut dire pourtant ce que les autres ont lu ? Quelque chose de ce mystère se cherche dans mon atelier." »
Marie Alloy rapporte elle aussi cet entretien sur son site : Livre d’artiste ou livre de bibliophilie contemporaine.
Nous vous conseillons en complément la lecture de l'article de Luc Brévart, Voir, toucher, lire… Le livre d’artiste dans les marges paru dans le BBF de juillet 2015.
Voir aussi :
- Le livre d’artiste, qu’es aquò ?, bibnblog.fr
- Sur le livre d’artiste : Un medium à part entière, numerare.fr
Vous trouverez par ailleurs un panorama des éditeurs de bibliophilie contemporaine dans la revue Art & métiers du livre n°258 de février/mars 2007.
Bonne journée.
CICLIC, un organisme qui soutient les auteurs et artistes dans les domaines du livre et de l’image, a adressé un questionnaire à des éditeurs de la région Centre-Val de Loire. Il leur est notamment demandé d’apporter leur définition de la bibliophilie contemporaine et du livre d’artiste :
« "Bibliophilie contemporaine" et "livres d'artiste", deux termes qui font toujours l'objet de discussions, d'après les réponses nous constatons que tous n'ont pas le même point de vue. Marie Alloy, Claire et François Poulain, François Righi et Coco Téxèdre ont néanmoins le point commun d'être tous les quatres des artistes, de même qu'ils sont éditeurs, respectivement depuis 22, 33, 40 et 22 ans.
D'après Marie Alloy, ces deux dénominations ne sont pas synonymes même si elles se recoupent, comme c’est le cas dans son travail.
"Le terme de bibliophilie contemporaine fait référence à une tradition du “beau livre”, développée principalement dès la 1ère moitié du XXe siècle grâce à l’initiative d’éditeurs qui ont su orchestrer magistralement dans des ouvrages d’exception la rencontre entre des poètes et des peintres. Bien avant eux, on parlait plutôt de livre illustré. Ces ouvrages de bibliophilie, à tirage limité, étaient imprimés en typographie au plomb par des imprimeurs chevronnés et accompagnés d’œuvres originales d’artistes de renom, créées en lithographie ou à l’eau-forte ou toute autre technique sur des papiers pur chiffon et signées à la main par l’artiste et le poète.
J’entends par « livre d’artiste », un travail de création du livre lui-même en tant qu’objet poétique, intégrant dans sa conception l’œuvre graphique ou plastique d’un artiste (ou parfois plusieurs). C’est une notion beaucoup plus libre et plus souple que celle de bibliophilie contemporaine qui n’implique d’ailleurs pas nécessairement la présence de la poésie écrite. Il n’y a aucune norme pour définir le livre d’artiste, puisque c’est sa singularité même qui retient l’attention et lui donne sens, par son engagement dans les courants artistiques de référence ou, au contraire, par sa marginalité. Mon travail tient donc à la fois du livre de bibliophilie et du livre d’artiste." (Voir l'intégralité de l'intretien)
Pour Claire et François Poulain, la bibliophilie contemporaine est l'expression que l'on emploie le plus souvent pour qualifier leurs éditions lorsqu'il faut les présenter, les définir et les « catégoriser ».
"On entend par bibliophilie contemporaine l'édition d'ouvrages à caractère singulier avec des multiples originaux tels que gravures, lithographies, sérigraphies, collages... que les artistes créent en fonction d'un médium pour accompagner un texte poétique.
En effet, nous revendiquons le fait d'être éditeur, même si le tirage de nos titres reste en moyenne autour de 70 exemplaires. En cela, il ne s'agit pas de livres d'artistes : cette notion se distingue de l'édition en cela qu'elle nomme précisément un ouvrage qui échappe aux critères de l'édition : le multiple. Le livre d'artiste reste confidentiel, contrairement à l'édition qui nécessite une diffusion.
Dans la mesure où nous travaillons avec des poètes et artistes vivants, nous nous inscrivons dans la contemporanéité des expressions textes/images relative à différents courants comme par exemple la poésie sonore, mais sans appartenance à quelque « chapelle » que ce soit."
Le mot livre d'artiste reste très vague pour Coco Téxèdre, elle considère que les libraires l'utilisent pour des livres à grand tirage sur des artistes, et qu'il a donc perdu son sens.
"Ce serait mieux de dire qu'un livre d'artiste est fait par un artiste en livre unique ou illimité et ce mot nous conviendrait.
Dans bibliophilie contemporaine j'entends Beau livre, beau papier, belle typo, petit tirage, livre accompagné auteur-peintre, mais aussi le livre-objet unique, on peut y ajouter le livre d'artiste avec ou sans texte, beau papier ou pas: l'artist'book.
Il faudrait aussi entendre artistes et auteurs vivants, mais ce n'est pas toujours le cas. Donc c'est très compliqué. Il y a le livre libre Essai sur le livre d'artiste ( les cahiers dessinés) qui essaient de donner une définition du livre d'artiste. Aucun des deux mots n'est satisfaisant. Associer les deux ? J'ai l'impression de mieux faire comprendre ce que je fais avec bibliophilie contemporaine. Trouver une troisième appellation ou organiser un forum ?"
François Righi ne se pose pas la question sous cette forme, pour lui c'est en pratiquant des arts plastiques et visuels qu'il se pose la sempiternelle question : "pourquoi faire des livres plutôt qu'autre chose ? Ce qui dans mes mains a lieu sous cette forme ne saurait exister sous une autre. Si ce sont les livres d'un artiste, ce sont d'abord ceux d'un lecteur. On a pu rappeler que les livres sont notre commun partage ; mais qui peut dire pourtant ce que les autres ont lu ? Quelque chose de ce mystère se cherche dans mon atelier." »
Marie Alloy rapporte elle aussi cet entretien sur son site : Livre d’artiste ou livre de bibliophilie contemporaine.
Nous vous conseillons en complément la lecture de l'article de Luc Brévart, Voir, toucher, lire… Le livre d’artiste dans les marges paru dans le BBF de juillet 2015.
- Le livre d’artiste, qu’es aquò ?, bibnblog.fr
- Sur le livre d’artiste : Un medium à part entière, numerare.fr
Vous trouverez par ailleurs un panorama des éditeurs de bibliophilie contemporaine dans la revue Art & métiers du livre n°258 de février/mars 2007.
Bonne journée.
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