Question d'origine :
Bonjour
Je travaille au musée gallo-romain d'Aoste et je suis en train de faire une fiche sur le martyr de Sainte-Blandine. Voici ce que j'ai trouvé. Est ce exact ?
A l’origine esclave, elle se joint à la communauté chrétienne de Lyon Elle est arrêtée avec 47 de ses compagnons (dont Pothin) en raison de leur refus de participer au culte impérial. Ils sont même accusés d’inceste et de cannibalisme. Ils sont interrogés rudement et elle garde le même discours : « Je suis chrétienne et nous ne faisons aucun mal ». Certains meurent en prison sous la torture, les citoyens romains sont décapités. 6 dont Blandine sont condamnés à l’arène dans l’amphithéâtre des Trois-Gaules (Croix -Rousse) le 2 août 177 devant les représentants des soixante nations gauloises. Les fauves se détourne d’elle (se sont couchés), et attachée à son poteau, elle prie, chante des cantiques et encourage ses compagnons à mourir pour le Christ.
Elle est flagellée, placée sur un gril brûlant, puis livrée dans un filet à un taureau qui la lance en l’air avec ses cornes. Mais elle survit. Elle est renvoyée en prison. Son ami Pothin est martyrisé et meurt pour sa foi chrétienne.
Blandine est remise dans l’arène seule. Les spectateurs lui demandent d’abjurer pour avoir la vie sauve. Elle ne répond pas, le regard rivé vers le ciel. Elle est finalement égorgée par le bourreau à la fin des jeux. Son corps et ceux des autres martyrs sont brûlés et leurs cendres sont jetées dans le Rhône.
Est elle remise en prison l'après midi et remise dans l'arène après ou un autre jour. Est elle morte le 2 août 177 ?
Merci par avance
Bien cordialement
Réponse du Guichet
bml_reg
- Département : Documentation régionale
Le 09/02/2017 à 09h41
Voici quelques précisions sur le martyr de Sainte Blandine tel qu'il est présenté à travers divers documents conservés dans nos collections.
Dans son
On trouve une reproduction d’extraits de ce témoignage transmis par Eusèbe dans plusieurs ouvrages, dont Je suis chrétien ! Blandine et les martyrs de Lyon en 177, dont nous citerons plusieurs passages.
Concernant le nombre de martyrs : « Eusèbe n’a transmis dans ses extraits que neuf noms de martyrs. (…) La liste complète, qui faisait partie du document original, comprenait 48 noms (…) le total des opérations qui se succèdent dans la Lettre s’étalant sur deux ou trois mois. »
Je suis chrétien ! Blandine et les martyrs de Lyon en 177
Dans Mythe et réalité sur Sainte Blandine, Nicole Lemoine résume ainsi le contexte de l’arrestation des premiers chrétiens :
« Cette « lettre » décrit le mouvement populaire qui s’exerce contre les chrétiens. On ne tolère pas leur présence dans les lieux publics, on les oblige à quitter leurs maisons et à se cacher. On les accuse de commettre les atrocités de la mythologie grecque, d’être incestueux puisque s’appelant entre frères et sœurs, de se nourrir de chair humaine en recevant l’hostie, de prendre donc part à des « festins de Thyeste » (qui dévora ses enfants sans le savoir), d’être semblables à Œdipe-roi, meurtrier de son père, époux de sa mère. Puis, la foule ameutée leur fait subir des sévices ; enfin, on les traîne au tribunal sur le forum de Fourvière. Interrogés devant le peuple et les premiers magistrats de la ville, ils confessent leur foi ; ils sont incarcérés jusqu’à l’arrivée du légat (…) »
« Interrogés rudement » est probablement un euphémisme. Voici ce qu’on peut lire toujours dans Mythe et réalité sur Sainte Blandine :
« On s’acharna contre les prisonniers pour les faire renier, en particulier, Blandine, frêle esclave dont la maîtresse et les autres chrétiens craignaient qu’elle ne pût tenir bon mais, « elle épuisa et fit capituler tous ceux qui successivement la torturèrent de toutes les façons, du matin au soir… » Elle se contentait de répéter « Je suis chrétienne et chez nous il n’y a rien de mauvais ». On recommença ces mêmes tortures quelques jours plus tard sans plus de succès. (...) »
« Pothin, premier évêque de Lyon ? mourut d’étouffement à 90 ans, alors qu’il était dans les fers, le 2 juin (date choisie pour célébrer les martyrs de Lyon)»
Voici d’autres extraits de Je suis chrétien ! Blandine et les martyrs de Lyon en 177 :
« Suite aux arrestations, les chrétiens subissent des « tortures inquisitoires, destinées normalement à arracher la vérité mais, ici, à obtenir des reniements. Ces derniers étant trop peu nombreux, le gouverneur va essayer la peine de mort et envoyer quatre fidèles à l’amphithéâtre. Deux périront. Là encore, c’est un échec, car aucun des quatre n’a abjuré, et les reniements ne suivent pas. »
Blandine fait partie des quatre premiers fidèles envoyés dans l’amphithéâtre, épisode que la lettre décrit ainsi :
« Maturus, Sanctus, Blandine et Attale furent ainsi conduits à l’amphithéâtre et livrés aux bêtes (…). Blandine, elle, suspendue à un poteau, était exposée pour être la pâture des bêtes qu’on lâchait sur elle. En la regardant suspendue à cette espèce de croix, en l’entendant prier à haute voix, les combattants sentaient croître leur courage (…) Comme aucune bête ne l'’avait alors touchée, on la détacha du poteau et on la remit en prison, en réserve pour un autre combat. ».
Alors que Maturus et Sanctus sont égorgés à l’issue du combat, Blandine et Attale retournent au cachot.
« Le gouverneur marque alors une pause et, avant de faire exécuter tous les confesseurs restants, préfère consulter Marc Aurèle qui se trouvait alors à Rome.
C’est à la fin de ces combats que Blandine apparait à nouveau. Voici un nouvel extrait de la lettre tel que reproduite dans Je suis chrétien ! Blandine et les martyrs de Lyon en 177 :
« Le dernier combat de Blandine
Après tout cela, le dernier jour des combats singuliers, on introduisit à nouveau dans l’amphithéâtre Blandine en même temps que Pontique (…). Chacun des jours précédents, on les avait emmenés pour voir les tortures des autres. (…) On les soumit à toutes les épreuves et on les fit passer par toute la série des tortures, en les prenant à part, tour à tour pour essayer de les faire blasphémer. On ne put y réussir. (…) Quand [Pontique] eut généreusement supporté toutes sortes de tortures, il rendit l’âme. La bienheureuse Blandine (…) subissait à son tour la rigueur de tous les combats soutenus par ses enfants. (…) Après les fouets, après les bêtes, après le gril, on finit par la jeter dans un filet et l’exposer ainsi à un taureau. Bien des fois projetée en l’air par cet animal, elle ne s’apercevait même plus de ce qui lui arrivait (…). On l’égorgea, elle aussi (…) »
Comme mentionné plus haut, Pothin meurt bien avant cet épisode puisque sa mort est estimée au 2 juin. Il meurt en prison deux jours après son passage au tribunal, en raison de son extrême faiblesse physique, des brutalités subies et des mauvaises conditions d’emprisonnement. Concernant celles-ci, lire l’extrait de la Lettre ci-dessous :
« Comme la patience des martyrs avait, grâce à l’assistance du Christ, rendu vains les tourments des bourreaux, le Diable imagina d’autres moyens : la réclusion collective à l’étroit, dans l’obscurité d’un endroit très malsain, l’écartement des pieds dans les ceps jusqu’au cinquième trou (…) Ainsi la plupart d’entre eux périrent d’étouffement dans le cachot. »
Pour ce qui est des dépouilles des martyrs, encore un extrait de la lettre transmise par Eusèbe : « Ils jetèrent donc aux chiens ceux qui avaient péri d’étouffement dans la prison (…) en même temps, on exposa ce que les bêtes et le feu avaient laissé de leurs victimes, les membres déchirés ou carbonisés, les têtes et les troncs de ceux qui avaient été décapités, le tout sans sépulture. (…) » Après 6 jours, « on les brûla et on les réduisit en cendres. Les impies balayèrent ensuite ces cendres jusqu’au Rhône (…) ».
Concernant la mort de Blandine, le témoignage reproduit par Eusèbe ne comporte aucune date précise, simplement des indications de périodes.
Voici ce qu’en dit Mythe et réalité sur Sainte Blandine :
« Commémoration de la mort de Blandine
Le pape Paul VI ordonne « que les fêtes des saints soient fixées, en principe, au jour anniversaire de leur mort (…) La fête de Sainte-Blandine est fixée au 2 juin ; en fait, elle ne coïncide pas avec l’anniversaire de sa mort mais, de même que pour les autres martyrs de 177, elle n’est pas dissociée de celle de Saint Pothin.
Sa propre fête fut célébrée au XVIIe siècle les 3 et 4 juin, supprimée vers 1750 puis, rétablie pour un temps en 1844, le 8 août, aux environs de sa mort. »
Dans Les martyrs de Lyon et leur temps , Alexandre Troubnikoff émet des hypothèses de dates beaucoup plus précises :
« La première période [de mise à mort], résultant d’une explosion de haine populaire, débute dans la première quinzaine du mois d’avril et se termine le 2 juin – date de la mort de Saint-Pothin.
La deuxième période de mise à mort se situe le 24 juin, lorsqu’étaient célébrés les jeux solsticiaux, comportant des combats de bêtes dans l’amphithéâtre.
Le légat constata qu’Attale était citoyen romain. Il est probable que d’autres citoyens romains se manifestèrent. Un courrier est dépêché auprès de l’empereur pour solliciter son avis sur le sort à réserver à cette catégorie de chrétiens. La distance de Lyon à Rome par la route des Alpes est de mille kilomètres. Comme l’indique M. Audin, un courrier abattait près de quatre-vingt kilomètres par jour. Il lui fallait donc treize jours pour aller et autant pour revenir, soit vingt-six jours, auxquels il faut ajouter une semaine nécessaire à la chancellerie impériale pour présenter la requête du légat (…)
2 juin - mort en prison de Saint-Pothin
24 juin - mise à mort de Maturus et du diacre Sanctus
L'auteur semble supposer que la dernière série d'exécutions d'août avait eu lieu le même jour, le 1er août, "date de la fête annuelle". Hors l'extrait de la Lettre des chrétiens de Lyon cité plus tôt mentionne que Blandine et Pontique sont amenés "le dernier jour des combats singuliers", après que "chacun des jours précédents, on les avait amenés pour voir les tortures des autres". S'agit-il d'une divergence de traduction ?
Dans Lyon et les origines du christianisme en occident, les auteurs n’avancent pas de date aussi précise et indiquent simplement l’exécution des derniers survivants «
Nous n'avons pas consulté l'ensemble des ressources pouvant aborder le martyr de Sainte-Blandine, d'autres hypothèses de dates ont pu y être formulées. Mais ces quelques informations devraient déjà vous permettre de préciser votre notice.
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