Question d'origine :
Où se situe la frontière entre l’aide illégale aux migrants et la non-assistance à personne en danger ?
Comment un Etat peut honorer les Justes qui ont tendu une main secourable pour aider, héberger, sauver des enfants ou des familles juives, au mépris des lois de Vichy, au risque de leur propre liberté ou même de leur vie... et envoyer devant les juges un agriculteur humaniste, solidaire, généreux ?
Réponse du Guichet
bml_soc
- Département : Société
Le 24/01/2017 à 16h16
Réponse du Département Société
Dans le droit français, comme dans le droit communautaire, on reconnait des exceptions au délit d’aide au séjour irrégulier.
Le droit communautaire prévoyait dès 2002 (Directive 2002/90/CE du Conseil du 28 novembre 2002) que :
« Tout État membre peut décider de ne pas imposer de sanctions à l'égard du comportement défini au paragraphe 1, point a), en appliquant sa législation et sa pratique nationales, dans les cas où ce comportement a pour but d'apporter une aide humanitaire à la personne concernée. "
Le droit français ne prévoyait pas cette exception et condamnait l’aide apportée, hors cadre familial. Cependant, de nouvelles exceptions ont été définies par la loi du 31 décembre 2012 (révision du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ces exceptions au délit d’aide au séjour irrégulier concernent d’abord les familles des personnes en situation irrégulière, puis :
« (…) toute personne physique ou morale, lorsque l'acte reproché n'a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et consistait à fournir des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d'hébergement ou de soins médicaux destinées à assurer des conditions de vie dignes et décentes à l'étranger, ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l'intégrité physique de celui-ci. » loi du le 31 décembre 2012, article L 622-4.
Depuis cette modification, ce que les associations appelaient délit de solidarité a ainsi été supprimé.
Cependant, les contours de cette aide humanitaire peuvent être débattus. On ne peut faire appel à la notion de non-assistance à personne en danger que dans les conditions cumulatives suivantes (que la personne soit sans papier ou pas), comme le rappelle Maitre Anthony Bem :
«Une personne en péri l : le péril des biens n'est pas concerné par cette infraction. Le péril doit menacer la santé physique ou morale ou l'intégrité corporelle d'une personne vivante. En conséquence, un fœtus ou des animaux qui n’ont pas la personnalité juridique, ne sont pas protégés.
Le péril doit avoir un caractère grave et immédiat . Cette gravité s'apprécie au jour du risque. Ainsi, même si le risque a disparu, que la victime est sauve en dépit de l’inertie de l’accusé, ce dernier met en jeu sa responsabilité. En outre, l'origine du péril importe peu. Le péril peut provenir d'une maladie, d'un accident ou de la faute d'imprudence de la victime elle-même. Peu importe qu'il y ait eu une erreur sur la gravité réelle du péril. Le délit est constitué même si le péril n'est finalement pas si sérieux ou si grave que les secours ne suffiront pas à sauver la personne.
Le danger doit véritablement exister ou être d'une certaine imminence pour caractériser l'urgence de l'intervention »
C’est l’article 223-6 du code pénal qui édicte ce qui en est dans le droit français en matière de non-assistance à personne en danger.
En vérité le problème est encore plus complexe, comme l’expose Serge Slama dans une émission de France Culture. Il invite à questionner les points suivants :
• Le délit de séjour irrégulier a disparu depuis la loi Valls 2012, quand le délit d’entrée au séjour continue d’exister.
• L’immunité prévue par l’article L 622-4, mentionné précédemment, concerne l’aide aux personnes pour des raisons d’intégrité physique, or l’aide à la personne peut, et c’est ce que revendique Cédric Herrou, avoir des raisons plus morales que physiques ou médicales.
• La légitimité des contrôles policiers et la manière dont ces contrôles sont effectués.
• La légitimité de la désobéissance en vertu d’un droit positif, basé sur des valeurs généralistes (Droits de l’Homme) supérieur au droit national.
Nous vous invitons également à consulter ce dossier du GISTI sur les délits de la solidarité par le ainsi qu’un historique de ces problématiques.
Bonne lecture
Dans le droit français, comme dans le droit communautaire, on reconnait des exceptions au délit d’aide au séjour irrégulier.
Le droit communautaire prévoyait dès 2002 (Directive 2002/90/CE du Conseil du 28 novembre 2002) que :
« Tout État membre peut décider de ne pas imposer de sanctions à l'égard du comportement défini au paragraphe 1, point a), en appliquant sa législation et sa pratique nationales, dans les cas où ce comportement a pour but d'apporter une aide humanitaire à la personne concernée. "
Le droit français ne prévoyait pas cette exception et condamnait l’aide apportée, hors cadre familial. Cependant, de nouvelles exceptions ont été définies par la loi du 31 décembre 2012 (révision du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ces exceptions au délit d’aide au séjour irrégulier concernent d’abord les familles des personnes en situation irrégulière, puis :
« (…) toute personne physique ou morale, lorsque l'acte reproché n'a donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte et consistait à fournir des conseils juridiques ou des prestations de restauration, d'hébergement ou de soins médicaux destinées à assurer des conditions de vie dignes et décentes à l'étranger, ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l'intégrité physique de celui-ci. » loi du le 31 décembre 2012, article L 622-4.
Depuis cette modification, ce que les associations appelaient délit de solidarité a ainsi été supprimé.
Cependant, les contours de cette aide humanitaire peuvent être débattus. On ne peut faire appel à la notion de non-assistance à personne en danger que dans les conditions cumulatives suivantes (que la personne soit sans papier ou pas), comme le rappelle Maitre Anthony Bem :
«
C’est l’article 223-6 du code pénal qui édicte ce qui en est dans le droit français en matière de non-assistance à personne en danger.
En vérité le problème est encore plus complexe, comme l’expose Serge Slama dans une émission de France Culture. Il invite à questionner les points suivants :
• Le délit de séjour irrégulier a disparu depuis la loi Valls 2012, quand le délit d’entrée au séjour continue d’exister.
• L’immunité prévue par l’article L 622-4, mentionné précédemment, concerne l’aide aux personnes pour des raisons d’intégrité physique, or l’aide à la personne peut, et c’est ce que revendique Cédric Herrou, avoir des raisons plus morales que physiques ou médicales.
• La légitimité des contrôles policiers et la manière dont ces contrôles sont effectués.
• La légitimité de la désobéissance en vertu d’un droit positif, basé sur des valeurs généralistes (Droits de l’Homme) supérieur au droit national.
Nous vous invitons également à consulter ce dossier du GISTI sur les délits de la solidarité par le ainsi qu’un historique de ces problématiques.
Bonne lecture
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