Question d'origine :
Bonjour,
La façade occidentale de la Basilique St Denis comporte des portails romans, pourtant cette Eglise a bien été édifiée au 13e...
L'abbé Suger s'est-il inspiré de l'architecture romane pour servir de transition à l'architecture gothique ?
Je vous remercie.
Réponse du Guichet
gds_se
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 20/01/2017 à 10h51
Bonjour
La Basilique Saint-Denis, telle que nous la connaissons actuellement, a été bâtie par l’abbé Suger à partir de 1130 (au XIIe siècle donc). Il existait toutefois des bâtiments à cet emplacement depuis l’époque gallo-romaine :
« La découverte d’un mausolée gallo-romain à l’emplacement de l’église actuelle semble indiquer que Denis fut enterré tout de suite après son martyre sur le site où se développa très vite la vénération pour le saint. […]
La deuxième grande construction sur le site est la chapelle bâtie, disait-on, parce que sainte Geneviève (v. 420-v. 500), la sainte patronne de Paris, ayant visité le tombeau de saint Denis, trouva qu’il était indigne d’un saint aussi glorieux. La chapelle aurait été édifiée entre 450 et 475, puis agrandie vers l’Ouest à la fin du Ve ou au début du Vie siècle. […]
L’abbé Fulrad (750-784) préside à la construction du troisième édifice, qui subsistera jusqu’à l’époque de Suger. »
Saint Denis : la basilique / Elizabeth Brown
Comme nous l’expliquions dans cette réponse précédente : Basilique St Denis, la basilique de l’abbé Suger est l’un des tous premiers exemples d’art gothique en France. La construction de la basilique survient donc dans une période de transition entre art roman et art gothique ; en conséquent il n’est guère étonnant de trouver des éléments de l’art roman dans cet édifice :
« Suger n’a pas indiqué quand le massif occidental a été commencé. […]
Ce massif constitue une sorte d’avant-nef, dans la tradition des abbayes bénédictines romanes. […]
A l’extérieur, la façade est divisée en trois grandes sections verticales par de larges contreforts qui marquent les angles des tours et qui montent d’un jet au parapet horizontal du sommet. Les niveaux supérieurs des tours se dressent à l’arrière-plan de la façade elle-même. […]
A première vue, la façade de Saint Denis rappelle les façades des abbatiales romanes de la Normandie, telles que Saint-Etienne et la Trinité de Caen, dans sa division tripartite et dans ses deux tours. Elle est cependant très novatrice et pas seulement dans le voûtement d’ogives de l’intérieur. La rose central est relativement modeste, mais c’est la première rose de façade occidentale. […]
Le portail central est encore en plein cintre, mais la disposition des trois portails sculptés, inscrits dans la répartition tripartite de la structure et des vaisseaux intérieurs, est aussi une nouveauté. Dans l’art roman, un seul portail est généralement sculpté, sauf à Saint-Gilles-du-Gard, dont la date discutée doit être assez proche de celle de Saint-Denis. L’élément le plus novateur a malheureusement disparu depuis le XVIIIe siècle : les ébrasement des portes étaient à l’origine garnis de statues-colonnes, comme au Portail Royal de Chartres, légèrement postérieur. […]
Dans l’iconographie, comme dans leur structure, les portails de Saint-Denis constituent donc des prototypes de l’art gothique. »
L’architecture de l’abbaye Saint-Denis / Anne Prache (in Les Dossiers d’archéologie n°261 – mars 2001)
By Thomas Clouet (Own work) [CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons]
« L'art nouveau apparaît en Île-de-France. Cette région, qui n'avait pas eu à l'époque précédente un rôle important, devient déterminante dans l'histoire de l'Europe. Plus précisément, c'est à l'abbatiale de Saint-Denis que s'affirme le nouveau style : il s'oppose à la production contemporaine par un choix esthétique clairement affirmé, par la volonté d'intégrer toutes les techniques, mais aussi par le désir de le faire savoir. À la façade occidentale, achevée en 1140, on découvre un ensemble sculpté jamais réalisé jusqu'alors. […]
Suger a inventé le portail à statues- colonnes. Taillées dans un même bloc de pierre, statues et colonnes innovaient certes sur le plan technique, mais aussi dans les domaines de l'architecture, de l'iconographie, du style. Elles participent à la tension verticale du monument. Elles introduisent le principe de concordance entre l'Ancien et le Nouveau Testament : les rois et les reines de l'Ancien Testament, auxquels s'ajoute au trumeau le saint éponyme. Elles établissent une conception plastique issue d'une réflexion sur les œuvres de métal : les plis taillés dans la pierre conservent l'acuité du repoussé, les visages sont traités par grandes masses aux plans rompus, leur étrangeté est soulignée par les perles de verre qui garnissent les yeux. Si la façade harmonique n'apporte que peu d'éléments nouveaux par rapport aux expériences romanes de la Normandie, elle est dès lors retenue comme la solution satisfaisante du traitement du front occidental d'un édifice religieux. »
Art gothique / Alain Erlande-Brandenburg (in Encyclopaedia Universalis)
Bonne journée
La Basilique Saint-Denis, telle que nous la connaissons actuellement, a été bâtie par l’abbé Suger à partir de 1130 (au XIIe siècle donc). Il existait toutefois des bâtiments à cet emplacement depuis l’époque gallo-romaine :
« La découverte d’un mausolée gallo-romain à l’emplacement de l’église actuelle semble indiquer que Denis fut enterré tout de suite après son martyre sur le site où se développa très vite la vénération pour le saint. […]
La deuxième grande construction sur le site est la chapelle bâtie, disait-on, parce que sainte Geneviève (v. 420-v. 500), la sainte patronne de Paris, ayant visité le tombeau de saint Denis, trouva qu’il était indigne d’un saint aussi glorieux. La chapelle aurait été édifiée entre 450 et 475, puis agrandie vers l’Ouest à la fin du Ve ou au début du Vie siècle. […]
L’abbé Fulrad (750-784) préside à la construction du troisième édifice, qui subsistera jusqu’à l’époque de Suger. »
Saint Denis : la basilique / Elizabeth Brown
Comme nous l’expliquions dans cette réponse précédente : Basilique St Denis, la basilique de l’abbé Suger est l’un des tous premiers exemples d’art gothique en France. La construction de la basilique survient donc dans une période de transition entre art roman et art gothique ; en conséquent il n’est guère étonnant de trouver des éléments de l’art roman dans cet édifice :
« Suger n’a pas indiqué quand le massif occidental a été commencé. […]
Ce massif constitue une sorte d’avant-nef, dans la tradition des abbayes bénédictines romanes. […]
A l’extérieur, la façade est divisée en trois grandes sections verticales par de larges contreforts qui marquent les angles des tours et qui montent d’un jet au parapet horizontal du sommet. Les niveaux supérieurs des tours se dressent à l’arrière-plan de la façade elle-même. […]
A première vue, la façade de Saint Denis rappelle les façades des abbatiales romanes de la Normandie, telles que Saint-Etienne et la Trinité de Caen, dans sa division tripartite et dans ses deux tours. Elle est cependant très novatrice et pas seulement dans le voûtement d’ogives de l’intérieur. La rose central est relativement modeste, mais c’est la première rose de façade occidentale. […]
Le portail central est encore en plein cintre, mais la disposition des trois portails sculptés, inscrits dans la répartition tripartite de la structure et des vaisseaux intérieurs, est aussi une nouveauté. Dans l’art roman, un seul portail est généralement sculpté, sauf à Saint-Gilles-du-Gard, dont la date discutée doit être assez proche de celle de Saint-Denis. L’élément le plus novateur a malheureusement disparu depuis le XVIIIe siècle : les ébrasement des portes étaient à l’origine garnis de statues-colonnes, comme au Portail Royal de Chartres, légèrement postérieur. […]
Dans l’iconographie, comme dans leur structure, les portails de Saint-Denis constituent donc des prototypes de l’art gothique. »
L’architecture de l’abbaye Saint-Denis / Anne Prache (in Les Dossiers d’archéologie n°261 – mars 2001)
By Thomas Clouet (Own work) [CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons]
« L'art nouveau apparaît en Île-de-France. Cette région, qui n'avait pas eu à l'époque précédente un rôle important, devient déterminante dans l'histoire de l'Europe. Plus précisément, c'est à l'abbatiale de Saint-Denis que s'affirme le nouveau style : il s'oppose à la production contemporaine par un choix esthétique clairement affirmé, par la volonté d'intégrer toutes les techniques, mais aussi par le désir de le faire savoir. À la façade occidentale, achevée en 1140, on découvre un ensemble sculpté jamais réalisé jusqu'alors. […]
Suger a inventé le portail à statues- colonnes. Taillées dans un même bloc de pierre, statues et colonnes innovaient certes sur le plan technique, mais aussi dans les domaines de l'architecture, de l'iconographie, du style. Elles participent à la tension verticale du monument. Elles introduisent le principe de concordance entre l'Ancien et le Nouveau Testament : les rois et les reines de l'Ancien Testament, auxquels s'ajoute au trumeau le saint éponyme. Elles établissent une conception plastique issue d'une réflexion sur les œuvres de métal : les plis taillés dans la pierre conservent l'acuité du repoussé, les visages sont traités par grandes masses aux plans rompus, leur étrangeté est soulignée par les perles de verre qui garnissent les yeux. Si la façade harmonique n'apporte que peu d'éléments nouveaux par rapport aux expériences romanes de la Normandie, elle est dès lors retenue comme la solution satisfaisante du traitement du front occidental d'un édifice religieux. »
Art gothique / Alain Erlande-Brandenburg (in Encyclopaedia Universalis)
Bonne journée
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