Question d'origine :
Bonjour,
merci beaucoup pour ce service vraiment rapide et pertinent.
Je fais des recherches sur la coopération décentralisée au pays basque.
Plus présicement les relations de coopération décentralisée entre le pays basque français et le pays basque espagnol.
Quelles est la coopération décentralisée de la ville basque Saint Jean de Luz?
Cordialement
Thierry Boutet
Réponse du Guichet
bml_soc
- Département : Société
Le 16/05/2005 à 12h14
Tout d’abord voici une définition et un état de la question de la coopération décentralisée :
•Ce qu'il en est du concept à l'heure actuelle
o Coopération décentralisée et décentralisation
o Les 5 principes de la coopération décentralisée à la mode UE
•sites et articles en ligne
La coopération décentralisée peut être considérée comme une résultante des processus d'ajustements structurels ayant conduit aux décentralisations politiques des Etats et comme un produit de toutes les réflexions qui les ont accompagnées. Mais elle ne peut être confondue avec la décentralisation.
La décentralisation politique et administrative prend plusieurs formes selon le degré de pouvoir qu'un gouvernement délégue aux entités de niveau subalterne (DDC, 1999).
• la déconcentration : certaines fonctions précises sont confiées à des services périphériques de l'Etat. Il y a par exemple des ministères dont les bureaux locaux accomplissent certaines tâches loin de l'administration centrale.
• la délégation : correspond au transfert de certaines responsabilités à des unités administratives nationales ou régionales qui ont généralement un statut de semi-autonomie. Cette forme de décentralisation se rencontre fréquemment dans les secteurs de l'énergie, des télécommunications et des transports.
• la décentralisation : transfert de certains pouvoirs et ressources à des collectivités décentralisées - par exemple provinces, districts ou communes - dûment habilitées. Ces entités sont tenues de se conformer aux principes en vigueur de la politique nationale.
• la dévolution : terme juridique anglo-saxon qui contrairement à la décentralisation suppose que les collectivités locales ont le pouvoir de légiférer.
• la décentralisation économique : démantèlement du contrôle exercé par le pouvoir central, application de stratégies destinées à renforcer le secteur privé, encouragement de partenaires entre acteurs publics et privés.
A cette définition relativement restreinte de la décentralisation - relative à la dimension verticale des équilibrages de compétences entre autorités centrales et locales - est associée fréquemment une autre acception, horizontale, liée à la recherche d'équilibres entre secteur public et secteur privé. Les liens entre l'une et l'autre sont généralement implicites pour beaucoup : le transfert de pouvoir à des collectivités locales devrait faciliter une réelle participation citoyenne et un meilleur partage du pouvoir entre le public et la société civile au niveau local. Ce lien est cependant contredit par la réalité et nécessite d'être analysé dans chaque situation particulière.
Apparemment étroitement liées, les deux acceptions traduisent des façons de penser fondamentalement différentes.
La dimension verticale, la plus fréquente, est à la fois origine et conséquence d'une série de théories, les unes en faveur de la décentralisation les autres plutôt opposées. Les premières qualifiées de "théories normatives libérales", sont basée sur :
1. la conception démocratique libérale ("la décentralisation rapproche les autorités du gouvernement des citoyens" Tocqueville 1835, Mill 1961, Wilson 1948, Rondenilli et al; 1989),
2. la théorie du choix public (Russel et Nicholson 1961, Rondinelli 1989),
3. la théorie de la bonne gestion ("good governance" Handy 1985, Moris 1991).
Les critiques les plus fréquemment émises à l'encontre de ces théories portent essentiellement sur, d'une part le fait qu'elles font une analyse relativement restreinte du pouvoir, le limitant au droit de vote conventionnel et à la politique des partis, d'autre part, qu'elles considèrent l'égalité des individus dans l'accès à l'information et l'inexistence de pouvoir de monopoles.
Plus proches de la réalité, les théories analytiques considèrent la notion de pouvoir comme LA question clé de toute analyse de la décentralisation. Elles font ressortir le caractère fondamentalement inégalitaire du pouvoir dans la pratique et le fait que la décentralisation n'est pas un bien absolu, positif par nature. Selon ces théories, la décentralisation est même potentiellement inégalitaire (Fesler 1965, Smith 1985, Samoff 1990), créatrice de nouvelles élites (Mullard 197, Griffin 1981), favorable à l'accumulation privée et au clientélisme (Rakodi 1988 et Slater 1990).
On peut reprocher à ces théories analytiques leur manque de vision prescriptive (Noore Adam Siddiquee 1997), il n'en reste pas moins qu'elles s'adaptent mieux aux réalités diverses vécues dans nombre de pays. Les théoriciens de l'économie politique ne proposent cependant aucun modèle alternatif qui puisse renforcer la participation populaire et le développement à la base.
Car en fin de compte c'est bien de cela qu'il s'agit comme l'exprime très bien Lemarchand R.(1999)
"La décentralisation est avant tout affaire de capital social, c'est-à-dire de ressourcement à la base ; c'est par la mise en place de réseaux de solidarités horizontales, fondées sur la confiance mutuelle, que doit s'étayer la vie communautaire dans le sens d'une participation plus active aux affaires des collectivités de base. Ceci vaut aussi bien pour l'Afrique que pour les Etats du Nord. Or cette action, pour être efficace, doit tenir compte et éventuellement se substituer au jeu des multiples solidarités de type vertical qui, partout en Afrique, sous une forme ou une autre, limitent la participation, détournent les financements, entravent l'allocation des ressources, et renforcent l'emprise de l'Etat. En bref, comment opérer le passage du clientélisme politique au capital social ?"
On touche ici au point essentiel de la décentralisation - cette "deuxième dimension, horizontale" évoquée plus haut - qui concerne les modes de faire et de penser le partage du pouvoir entre le secteur public et la société civile (les organisations non gouvernementales, les associations populaires et de développement, les privés, les autorités coutumières ou religieuses etc...).
La coopération décentralisée rejoint précisément cette dernière acception en ce qu'elle cherche à organiser les relations entre les différentes familles d'acteurs du développement qu'elles relèvent du local ou national et plus particulièrement entre les pouvoirs publics et la société civile organisée.
La coopération décentralisée contribue donc à combler un manque théorique, bien que sa conceptualisation soit encore peu formalisée et peu connue. Elle relève surtout de la pratique et s'est forgée sur le terrain, dans les brèches ouvertes par les ajustements structurels et les opportunités pour la société civile qu'elles induisaient.
Une note d'orientation, (CE, 1999) précise les 5 principes de la coopération décentralisée version UE :
1. La participation active ("responsabilisation" de toutes les familles d'acteurs. Il ne s'agit pas simplement d'assurer une participation instrumentale, mais de transformer les bénéficiaires en véritables acteurs et/ou partenaires, capables de prendre en charge leur propre développement.
2. La recherche d'une concertation et d'une complémentarité entre différents acteurs. La coopération décentralisée ne cherche pas à soutenir une multitude de projets isolés, mais à promouvoir des processus de dialogue et de mise en cohérence des initiatives de différents acteurs dans le cadre d'une approche programmatique et en articulant les interventions à différents niveaux (local, régional, national). Il ne s'agit donc pas de contourner l' Etat, mais d'aider à construire de nouveaux partenariats public-privé (par exemple, pour l'amélioration de services de base accessibles et durables).
3. Une gestion décentralisée. La délégation de responsabilités de gestion, y compris financière, à l'échelon le plus proche possible des acteurs concernés, est une pierre angulaire de la démarche (principe de subsidiarité). Cela implique un changement profond des rôles et comportements des agences centrales (par exemple, en ce qui concerne leur culture de contrôle) et des partenaires du Nord tels que les ONGs (dont la participation n'est plus une condition préalable d'accès aux fonds et dont le rôle devrait évoluer vers la facilitation ou les prestations de services).
4. L'adoption d'une "approche processus ". La durée est un élément essentiel: il faut du temps pour garantir une vraie participation et appropriation (tout en veillant à la réalisation d'actions à court terme de manière à maintenir l'engagement des acteurs). D'où la nécessité d'adapter l'approche projet classique (composée de phases clairement séparées, limitée dans le temps et basée sur des objectifs, moyens et budgets définis avant le commencement du projet) en faveur d'une démarche itérative, qui valorise l'écoute, le dialogue, la mobilisation des ressources locales, la concrétisation des objectifs et actions en cours de processus, I'évaluation conjointe, etc. Dans la même logique, il convient d'évoluer d'un contrôle a priori à un suivi et un contrôle des résultats (a posteriori).
5. La priorité donnée au renforcement des capacités et au développement institutionnel. La coopération décentralisée a pour objet non seulement de répondre à des besoins matériels mais en même temps de renforcer le potentiel d'action et la maîtrise d'initiatives locales. Appuyer les acteurs, c'est aider à les faire naître, à s'organiser, à se former, à se constituer en réseaux et à construire des partenariats entre eux et avec les acteurs publics.
La coopération décentralisée peut se traduire sous des formes et modalités de mise en oeuvre très différentes -- en réponse à une grande diversité de situations locales. Mais dans chaque cas d'application, il faudrait pouvoir retrouver les 5 principes précités, qui permettraient de distinguer la démarche des approches d'aide classiques (tels que les micro-réalisations). De même, I'intégration des acteurs ne peut se limiter au niveau de l'appui au développement local, le terrain naturel de la coopération décentralisée. Il faudra également s'efforcer de faire remonter la dimension locale au niveau national, entre autres, par le biais de l'implication des acteurs dans les processus de programmation nationale et sectorielle ainsi que dans le dialogue politique et social que l'UE se propose d'avoir avec les pays ACP.
Dans la pratique de la Commission cependant - et, malgré des avancées évidentes dans la convention de Lomé et des expériences fort réussies financées sur une ligne spéciale "coopération décentralisée" - cette nouvelle approche reste cependant très peu institutionnalisée. Elle se heurte à une culture procédurière et de défiance qui fait douter de son avenir au sein de l'institution. Après en avoir fait la démonstration, la CE montre actuellement son incapacité à la mettre en pratique à une échelle plus large.
D'autres coopérations s'en emparent cependant. Les dynamiques de terrain vont également dans ce sens. Certaines ONG du Nord ont réapproprié le concept et participé à en démontrer l'opérationnalité. Un peu moins les ONG du Sud.
Les enjeux futurs porteront précisément sur la capacité des associations et ONG du Sud à s'emparer de ce concept fécond et à construire le développement avec les collectivités locales. . (source : Cota : méthodologies et technologies pour le développement durable).
En ce qui concerne la coopération décentralisée entre le Pays basque français et le Pays basque espagnol nous vous conseillons la lecture de l’étude de Frederic Mertens de Wilmars : coopération transfrontalière entre collectivités territoriales au pays basque. Avec à la fin de l’étude une bibliographie et des adresses de sites à visiter.
Un document de l'Assemblée des Régions d'Europe vous renseignera aussi sur la coopération transfrontalière entre la région Midi Pyrénées et l'Espagne, notamment le paragraphe 3.
Eurocité basque Bayonne-San Sébastian : un autre exemple de coopération transfrontalière : espaces tranfrontaliers
Le site vie publique explique les différentes formes de coopération transfrontalière et renvoie à des adresses en cliquant sur
Enfin sur le site du Sénat vous pouvez consulter le rapport n° 420 : Projet de loi sur la coopération transfrontalière... de Michel ALLONCLE .
Pour ce qui est précisement de la Ville de Saint Jean de Luz le plus simple serait peut-être de contacter la Chambre de commerce de Bayonne Pays basque.
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