Question d'origine :
Bonjour,
Une petite question concernant Saint Jean Népomucène.
Quand on l'a exhumé au moment de sa canonisation dans les années 1720, on aurait retrouvé sa langue intacte plusieurs siècles après sa mort en 1383 (ou 1393). Ce qui tombait à pic pour ce saint martyr de la confession.
Or, j'en entendu dire qu'au XXème siècle, des scientifiques ont affirmé (prouvé?) que c'est sa cervelle qui aurait été trouvée et non sa langue.
Est-ce que cette affrmation est exacte? Quelle est la position de l'Eglise à ce sujet?
Merci d'avance pour votre réponse,
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 12/05/2005 à 10h31
La réponse à votre question concernant Jean Népomucène se trouve dans l’encyclopédie Catholicisme hier aujourd’hui demain Tome 6 p. 467 :
« La légende de « saint Jean Népomucène », telle qu’elle entra dans la bulle de canonisation publiée par Benoît XIII, en 1729, n’est plus aujourd’hui soutenable. Il n’y eut jamais de « saint Jean Népomucène, martyr du secret de la confession ». Les Bollandistes eux-mêmes paraissent y avoir renoncé. Le personnage visé par Benoît XIII, auquel celui-ci attribua de surcroît une date de décès erronée (1383 au lieu de 1393), est Jean de Pomuk, vicaire général de l’archevêque de Prague, Jean de Jenstejn. Pour autant qu’on puisse savoir, il fut un chanoine qui ne se distinguait ni en bien ni en mal du commun de ses semblables. Mais il périt dans les eaux de la Vltava (Moldau), où il fut précipité, après avoir été torturé avec deux de ses collègues par le roi Venceslas IV. Cette mort violente ne fut qu’un incident parmi une infinité d’autres qui émaillèrent les disputes sans grandeur d’un roi irascible et brutal avec un archevêque retors et toujours en lutte contre le monde entier. Il n’est pas sans intérêt de remarquer que Boniface IX, auprès de qui Jean de Jenstejn finit par se réfugier, ne l’approuva guère.
Les faits se ramènent ainsi à peu de choses. Au cour d’une « table ronde » qui réunit le roi et l’archevêque, entourés de leurs conseillers, en vue de sceller la paix, la colère de Venceslas éclate. Emporté par sa fureur, il fait torturer trois des chanoines qui accompagnent l’archevêque. Il veut leur faire avouer on ne sait au juste quoi. Deux d’entre eux, Nicolas Puchnik et Bohuslav, s’en tirent sans trop de mal. Mais Jean de Pomuk est dans un état tel qu’il n’y a plus qu’à le faire disparaître. Il est projeté dans le fleuve. Le roi regrette son geste aussi promptement qu’il s’est laissé emporter à l’accomplir. Et c’est tout.
Le « martyr du secret de la confession » n’est plus admis essentiellement pour quatre motifs :
a- Il est invraisemblable que le roi Venceslas, croyant et pratiquant, ait exigé la révélation du secret d’une confession
b- Il est impensable que Jean de Pomuk, fonctionnaire d’un archevêque avec qui le roi était en dispute depuis bientôt dix ans, ait été le confesseur de la reine, jeune princesse bavaroise, fraîchement arrivée dans le pays. Il y avait à la cour, pour la confesser, des aumôniers et des chapelains en suffisance. La jeune reine n’a pas pu choisir son confesseur chez l’ennemi d’en face.
c- Toutes les sources anciennes ignorent le motif du secret de la confession pour expliquer la mort de Jean de Pomuk.
d- Le seul récit authentique de sa mort, les Acta de Jean de Jenstejn, nous en donne positivement un autre, commun d’ailleurs à Jean de Pomuk et à ses deux compagnons d’infortune.
La légende népomucénienne paraît devoir son succès, en plus de la crédulité de l’époque, aux remous de la Contre-Réforme en Bohême. Pour les combattants de la contre-offensive catholique, Jean Népomucène, dans son habit de légende, était, comme Huss transformé par son mythe pour les chrétiens opposés à Rome, un patron taillé sur mesure. La paix entre chrétiens gagnerait à ce qu’ils soient réduits tous deux à leurs véritables proportions, celles de l’histoire.
La Sacrée Congrégation des rites vient de supprimer la fête de « saint Jean Népomucène » du calendrier de l’Eglise universelle (Ephem. Lit., LXXV, 1961, p. 424).
Propylaeum ad Acta Sanctorum Decembris, Bruxelles, 1940, p. 192. – P. de Vooght, Hussiana, Louvain, 1960, p. 400-411 ; id., La Suppression de la messe de « S. Jean Népomucène » dans les Questions liturgiques et paroissiales, XLIII, 1962, p. 331-336 ; id.., S. Jean Népomucène, un problème d’hagiographie, dans l’Ami du clergé, 1962, p. 735-736.
P. De Vooght, O.S.B."
Comme vous pouvez le constater la version officielle de l’Eglise Catholique n’évoque ni langue, ni cervelle, et de surcroît il ne saurait être question désormais d’un Saint Jean Népomucène.
Si la question du culte des reliques des saints vous intéresse (cf votre expression « Ce qui tombait à pic pour ce saint martyr de la confession », à propos de sa langue), vous pouvez vous reporter au Tome 12 de la même encyclopédie p. 854-860.
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