Question d'origine :
Bonjour,
De quels modèles s'est inspiré l'Abbé Suger pour créer l'art français (futur art gothique) de la Basilique St Denis ?
Je vous remercie.
Réponse du Guichet
gds_se
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 07/12/2016 à 08h45
Bonjour
L’art gothique apparait vers la moitié du XIIe siècle et l’abbatiale de Saint-Denis en est l’un de ces tous premiers exemples :
« L’art gothique se substitue peu à peu à l’art roman au cours de la seconde moitié du XIIe siècle. Né en Île-de-France, il rayonne ensuite dans toute l’Europe jusqu’au début du XVe siècle. […]
La première des grandes cathédrales gothiques est construite à Sens. La basilique de Saint-Denis, élevée sous le règne des Carolingiens et rénovée entre le XIIe et le XIVe siècle, constitue ensuite l’un des grands chefs-d’œuvre gothiques. Le style de son décor annonce certaines des réalisations sculptées des grandes cathédrales de Reims, Chartres et des « bijoux » d’un gothique flamboyant à venir comme à la Sainte-Chapelle de Paris ou à la cathédrale de Strasbourg.
L’art gothique / Mag du Grand Palais
Basilique Saint-Denis
Carte postale ancienne éditée par LL, n°1 : SAINT-DENIS - L'Abbaye / Scanné par Claude_villetaneuse (Collection personnelle) [Public domain], via Wikimedia Commons
Cathédrale Saint-Etienne de Sens
By Urban (Own work) [Public domain], via Wikimedia Commons
« L'art nouveau apparaît en Île-de-France. Cette région, qui n'avait pas eu à l'époque précédente un rôle important, devient déterminante dans l'histoire de l'Europe. Plus précisément, c'est à l'abbatiale de Saint-Denis que s'affirme le nouveau style : il s'oppose à la production contemporaine par un choix esthétique clairement affirmé, par la volonté d'intégrer toutes les techniques, mais aussi par le désir de le faire savoir. À la façade occidentale, achevée en 1140, on découvre un ensemble sculpté jamais réalisé jusqu'alors. À l'abside entreprise en 1140, terminée en 1143, consacrée en 1144, se matérialise une nouvelle conception architecturale caractérisée par la fusion des différents espaces, par une étroite association entre le verre et la pierre. […]
Si la façade harmonique n'apporte que peu d'éléments nouveaux par rapport aux expériences romanes de la Normandie, elle est dès lors retenue comme la solution satisfaisante du traitement du front occidental d'un édifice religieux. L'architecture du chevet se montre plus révolutionnaire dans son plan et son élévation. Le premier est clairement défini, avec son double déambulatoire et ses chapelles rayonnantes ; la fusion de ces trois espaces en un volume unifié s'inscrit dans la volonté de rupture : un mur d'enveloppe extérieur intègre par son mouvement chacune des chapelles ; des colonnes en délit supportent les couvrements des déambulatoires intérieur et extérieur auxquels se trouve associée la chapelle, grâce à une ogive supplémentaire qui permet l'unicité des volumes. L'emploi de l'ogive apparaît déterminant : il donne la possibilité de réduire le mur et de percer largement d'immenses baies, qui diffusent une lumière unificatrice vivifiée par le verre.
L’architecture
L'architecte de Saint-Denis avait formulé d'emblée la nouvelle conception architecturale qui s'oppose à celle de l'époque romane. Celle-ci juxtapose les masses, additionne les volumes. L'architecte gothique cherche à unir les premières, à fondre les seconds. L'arc-boutant y joue un rôle tout aussi important que l'ogive. Il lie les masses entre elles et crée une dynamique verticale ; il permet de réduire le rôle porteur du mur, qui pourra ainsi être largement percé afin de permettre une libre circulation de l'air : la dimension des baies, des grandes arcades s'inscrit dans cette volonté d'amplifier les vides au détriment des pleins. En même temps, la travée est l'objet de nouvelles recherches qui aboutiront à la considérer comme une cellule dont le renouvellement définit le volume intérieur par une double dynamique : en hauteur à l'aide des supports dont le mouvement aboutit à la clé de voûte unificatrice ; en longueur grâce à cet effet répétitif. »
Gothique : art / Alain Erlande-Brandenburg (in Encyclopaedia Universalis)
« Art français, art ogival, art gothique… Ces différentes appellations témoignent des difficultés rencontrées pour définir l’art nouveau qui s’épanouit en Europe entre les XIIe et XVIe siècles. Ce sont les Italiens qui, au XVIIe siècle, baptisent l’art français de manière péjorative « art gothique », pour signifier barbare. Ce mot marque le mépris porté alors à l’art médiéval.
L’architecture gothique / BnF
« Les procédés gothiques de construction permettent de fait de donner une grande lisibilité aux structures, de souligner, par le graphisme des colonnes, des chapiteaux et des moulures, les lignes de force des supports et leurs prolongements sous les voûtes dans le jeu des ogives et des doubleaux, la division des travées et la séparation stricte des étages. Cette même clarté reparaît dans la répartition des sculptures aux portails : statues-colonnes, voussures, trumeau, linteau, tympan.
C'est à Saint-Denis que se manifeste avec évidence cet esprit nouveau. Pourtant, la voûte sur croisée d'ogives était employée depuis la fin du XIe s. en Angleterre et en Normandie, et l'arc brisé était d'un usage courant dans la Bourgogne romane. La création de l'art gothique tient à ce que, par le moyen de techniques éprouvées et associées, Saint-Denis exprime un style nouveau de légèreté, de lumière et de clarté logique, qui rompt avec la robustesse, le schématisme et parfois la confusion de l'art roman. »
Gothique / Encyclopédie Larousse
Ainsi, Suger - abbé de Saint-Denis - ne « créé » pas l’art gothique à partir de rien, il s’appuie sur des expériences architecturales autour de lui :
« En tant que style constitué, l’architecture gothique apparaît en Ile-de-France à la fin de la première moitié du XIIe siècle ; deux monuments essentiels illustrent cette apparition, la cathédrale de Sens (v. 1130-1162) et l’abbatiale de Saint-Denis (v. 1130-1140 et 1140-1144). Mais, au même moment, des essais, moins décisifs il est vrai, peuvent être relevés en Normandie et en Angleterre d’une part, dans l’Ouest de la France d’autre part. Les expériences qui ont préparé la formation de l’architecture gothique sont beaucoup plus anciennes.
Certains parmi ses éléments, typiques, comme l’arc brisé, sont d’origine antique orientale ; l’art sassanide l’a pratiqué d’une manière habituelle et l’a transmis à l’art de l’Islam dès le VIIe siècle. Les grandes constructions musulmanes d’Afrique du Nord (mosquée de Kairouan) ou d’Espagne (cathédrale de Cordoue) en offrent de nombreux exemples, de même que les édifices de la Sicile […].
L’histoire de la voûte sur nervure entrecroisées importe bien davantage, par l’enchaînement des expériences constructives et plastiques qui conduisent à Sens et à Saint-Denis. Les architectes romains de l’Antiquité ont déjà quelquefois employé des nervures sous les voûtes (l’exemple célèbre de Sette-Bassi en Campanie) ; mais il ne semble pas qu’elles aient été les modèles des premières voûtes sur croisées d’ogives en Occident, même en Lombardie. Il est en revanche démontré que les voûtes nervées ont pris un grand développement en Mésopotamie sassanide et dans les premières constructions de l’Islam en Iran, telle la mosquée d’Ispahan. Dès le IXe siècle, dans les grandes mosquées d’Afrique du Nord et en Espagne musulmane, les combinaisons de nervures sous voûtes, dans les mihrabs à coupole, ou dans les salles des tours, parviennent à une extraordinaire complication de caractère essentiellement décoratif. La petite mosquée Bib Mardum à Tolède, de l’an mille très exactement, peut servir d’exemple final pour cette période. Les voûtes nervées islamiques ne sont certes pas les modèles exacts des voûtes occidentales gothiques. […]
Plus semblables aux premières expériences occidentales sont les constructions nervées d’Arménie et de Géorgie étudiées par Baltrušaitis : du Xe au XIIIe siècle (les dates ne sont pas toujours assurées), on y trouve des nervures sous coupoles (Ani, Nicorzminda), des arcs diagonaux sur espace carré (Ani), des arcs perpendiculaires aux murs (Horomos Vank). Le rôle constructif – et non décoratif – de ces croisées d’arcs est incontestable ; souvent elles ne supportent pas directement la voûte, mais sont extradossées de murettes portant des couvertures plates. […]
Mais c’est au sein de l’art roman anglo-normand, une des architectures les plus vigoureusement définies au cours du XIe et XIIe siècle, que l’on aperçoit les expériences constructives et plastiques qui mènent au gothique français. […] Les premières expériences de voûtement sur croisées d’ogives sont presque simultanées en Angleterre et en Normandie : Durham (collatéral du chœur, 1093-1100) ; bras nord du transept, avant 1104 ; chœur avant 1110), Winchester, Peterborough, Gloucester et, en Normandie, le chœur et le transept de Lessay (v. 1100), Duclair, Saint-Paul de Rouen, peut-être la salle capitulaire de Jumièges (avant 1100). […]
Les expériences anglo-saxonnes sont alors relayées, en quelque sorte, par les recherches des bâtisseurs du Vexin, du Valois et de l’Ile-de-France.
Ces essais qui se situent entre 1125 et 1135, sont souvent modestes et concernent des édifices d’importance secondaire : églises de Rhuis, d’Acy-en-Multien, de Cambronne. Deux sont importantes : Saint-Etienne de Beauvais et Morienval. […] Dans l’une et l’autre église apparaissent des voûtes allégées, au profil simplement torique (ou à deux tores), et le mur s’amincit. […]
D’autres expériences sur le continent, parallèles à celles que l’on vient de décrire, ont eu lieu pendant la première moitié du XIIe siècle. […]
Sens et Saint-Denis
Tous les historiens sont aujourd’hui d’accord pour voir en Saint-Denis de Suger (v. 1130-1140 et 1140-1144) et en la cathédrale de Sens de Henri le Sanglier (v. 1130-1164) les monuments majeurs de la création du gothique, ceux où les éléments élaborés, surtout en Normandie, au cours de l’âge roman, prennent un sens nouveau en engendrant un style. »
L’architecture gothique / Louis Grodecki
Pour aller plus loin :
• Saint-Denis : la basilique / Elisabeth A. R. Brown
• L’Architecture gothique en France : 1130-1270 / Dieter Kimpel et Robert Suckale
• Suger : abbé de Saint-Denis, régent de France / Michel Bur
• L’art gothique / Réponse du Guichet du Savoir
• Art gothique / Réponse du Guichet du Savoir
Bonne journée
L’art gothique apparait vers la moitié du XIIe siècle et l’abbatiale de Saint-Denis en est l’un de ces tous premiers exemples :
« L’art gothique se substitue peu à peu à l’art roman au cours de la seconde moitié du XIIe siècle. Né en Île-de-France, il rayonne ensuite dans toute l’Europe jusqu’au début du XVe siècle. […]
La première des grandes cathédrales gothiques est construite à Sens. La basilique de Saint-Denis, élevée sous le règne des Carolingiens et rénovée entre le XIIe et le XIVe siècle, constitue ensuite l’un des grands chefs-d’œuvre gothiques. Le style de son décor annonce certaines des réalisations sculptées des grandes cathédrales de Reims, Chartres et des « bijoux » d’un gothique flamboyant à venir comme à la Sainte-Chapelle de Paris ou à la cathédrale de Strasbourg.
L’art gothique / Mag du Grand Palais
Carte postale ancienne éditée par LL, n°1 : SAINT-DENIS - L'Abbaye / Scanné par Claude_villetaneuse (Collection personnelle) [Public domain], via Wikimedia Commons
By Urban (Own work) [Public domain], via Wikimedia Commons
« L'art nouveau apparaît en Île-de-France. Cette région, qui n'avait pas eu à l'époque précédente un rôle important, devient déterminante dans l'histoire de l'Europe. Plus précisément, c'est à l'abbatiale de Saint-Denis que s'affirme le nouveau style : il s'oppose à la production contemporaine par un choix esthétique clairement affirmé, par la volonté d'intégrer toutes les techniques, mais aussi par le désir de le faire savoir. À la façade occidentale, achevée en 1140, on découvre un ensemble sculpté jamais réalisé jusqu'alors. À l'abside entreprise en 1140, terminée en 1143, consacrée en 1144, se matérialise une nouvelle conception architecturale caractérisée par la fusion des différents espaces, par une étroite association entre le verre et la pierre. […]
Si la façade harmonique n'apporte que peu d'éléments nouveaux par rapport aux expériences romanes de la Normandie, elle est dès lors retenue comme la solution satisfaisante du traitement du front occidental d'un édifice religieux. L'architecture du chevet se montre plus révolutionnaire dans son plan et son élévation. Le premier est clairement défini, avec son double déambulatoire et ses chapelles rayonnantes ; la fusion de ces trois espaces en un volume unifié s'inscrit dans la volonté de rupture : un mur d'enveloppe extérieur intègre par son mouvement chacune des chapelles ; des colonnes en délit supportent les couvrements des déambulatoires intérieur et extérieur auxquels se trouve associée la chapelle, grâce à une ogive supplémentaire qui permet l'unicité des volumes. L'emploi de l'ogive apparaît déterminant : il donne la possibilité de réduire le mur et de percer largement d'immenses baies, qui diffusent une lumière unificatrice vivifiée par le verre.
L'architecte de Saint-Denis avait formulé d'emblée la nouvelle conception architecturale qui s'oppose à celle de l'époque romane. Celle-ci juxtapose les masses, additionne les volumes. L'architecte gothique cherche à unir les premières, à fondre les seconds. L'arc-boutant y joue un rôle tout aussi important que l'ogive. Il lie les masses entre elles et crée une dynamique verticale ; il permet de réduire le rôle porteur du mur, qui pourra ainsi être largement percé afin de permettre une libre circulation de l'air : la dimension des baies, des grandes arcades s'inscrit dans cette volonté d'amplifier les vides au détriment des pleins. En même temps, la travée est l'objet de nouvelles recherches qui aboutiront à la considérer comme une cellule dont le renouvellement définit le volume intérieur par une double dynamique : en hauteur à l'aide des supports dont le mouvement aboutit à la clé de voûte unificatrice ; en longueur grâce à cet effet répétitif. »
Gothique : art / Alain Erlande-Brandenburg (in Encyclopaedia Universalis)
« Art français, art ogival, art gothique… Ces différentes appellations témoignent des difficultés rencontrées pour définir l’art nouveau qui s’épanouit en Europe entre les XIIe et XVIe siècles. Ce sont les Italiens qui, au XVIIe siècle, baptisent l’art français de manière péjorative « art gothique », pour signifier barbare. Ce mot marque le mépris porté alors à l’art médiéval.
L’architecture gothique / BnF
« Les procédés gothiques de construction permettent de fait de donner une grande lisibilité aux structures, de souligner, par le graphisme des colonnes, des chapiteaux et des moulures, les lignes de force des supports et leurs prolongements sous les voûtes dans le jeu des ogives et des doubleaux, la division des travées et la séparation stricte des étages. Cette même clarté reparaît dans la répartition des sculptures aux portails : statues-colonnes, voussures, trumeau, linteau, tympan.
C'est à Saint-Denis que se manifeste avec évidence cet esprit nouveau. Pourtant, la voûte sur croisée d'ogives était employée depuis la fin du XIe s. en Angleterre et en Normandie, et l'arc brisé était d'un usage courant dans la Bourgogne romane. La création de l'art gothique tient à ce que, par le moyen de techniques éprouvées et associées, Saint-Denis exprime un style nouveau de légèreté, de lumière et de clarté logique, qui rompt avec la robustesse, le schématisme et parfois la confusion de l'art roman. »
Gothique / Encyclopédie Larousse
Ainsi, Suger - abbé de Saint-Denis - ne « créé » pas l’art gothique à partir de rien, il s’appuie sur des expériences architecturales autour de lui :
« En tant que style constitué, l’architecture gothique apparaît en Ile-de-France à la fin de la première moitié du XIIe siècle ; deux monuments essentiels illustrent cette apparition, la cathédrale de Sens (v. 1130-1162) et l’abbatiale de Saint-Denis (v. 1130-1140 et 1140-1144). Mais, au même moment, des essais, moins décisifs il est vrai, peuvent être relevés en Normandie et en Angleterre d’une part, dans l’Ouest de la France d’autre part. Les expériences qui ont préparé la formation de l’architecture gothique sont beaucoup plus anciennes.
Certains parmi ses éléments, typiques, comme l’arc brisé, sont d’origine antique orientale ; l’art sassanide l’a pratiqué d’une manière habituelle et l’a transmis à l’art de l’Islam dès le VIIe siècle. Les grandes constructions musulmanes d’Afrique du Nord (mosquée de Kairouan) ou d’Espagne (cathédrale de Cordoue) en offrent de nombreux exemples, de même que les édifices de la Sicile […].
L’histoire de la voûte sur nervure entrecroisées importe bien davantage, par l’enchaînement des expériences constructives et plastiques qui conduisent à Sens et à Saint-Denis. Les architectes romains de l’Antiquité ont déjà quelquefois employé des nervures sous les voûtes (l’exemple célèbre de Sette-Bassi en Campanie) ; mais il ne semble pas qu’elles aient été les modèles des premières voûtes sur croisées d’ogives en Occident, même en Lombardie. Il est en revanche démontré que les voûtes nervées ont pris un grand développement en Mésopotamie sassanide et dans les premières constructions de l’Islam en Iran, telle la mosquée d’Ispahan. Dès le IXe siècle, dans les grandes mosquées d’Afrique du Nord et en Espagne musulmane, les combinaisons de nervures sous voûtes, dans les mihrabs à coupole, ou dans les salles des tours, parviennent à une extraordinaire complication de caractère essentiellement décoratif. La petite mosquée Bib Mardum à Tolède, de l’an mille très exactement, peut servir d’exemple final pour cette période. Les voûtes nervées islamiques ne sont certes pas les modèles exacts des voûtes occidentales gothiques. […]
Plus semblables aux premières expériences occidentales sont les constructions nervées d’Arménie et de Géorgie étudiées par Baltrušaitis : du Xe au XIIIe siècle (les dates ne sont pas toujours assurées), on y trouve des nervures sous coupoles (Ani, Nicorzminda), des arcs diagonaux sur espace carré (Ani), des arcs perpendiculaires aux murs (Horomos Vank). Le rôle constructif – et non décoratif – de ces croisées d’arcs est incontestable ; souvent elles ne supportent pas directement la voûte, mais sont extradossées de murettes portant des couvertures plates. […]
Mais c’est au sein de l’art roman anglo-normand, une des architectures les plus vigoureusement définies au cours du XIe et XIIe siècle, que l’on aperçoit les expériences constructives et plastiques qui mènent au gothique français. […] Les premières expériences de voûtement sur croisées d’ogives sont presque simultanées en Angleterre et en Normandie : Durham (collatéral du chœur, 1093-1100) ; bras nord du transept, avant 1104 ; chœur avant 1110), Winchester, Peterborough, Gloucester et, en Normandie, le chœur et le transept de Lessay (v. 1100), Duclair, Saint-Paul de Rouen, peut-être la salle capitulaire de Jumièges (avant 1100). […]
Les expériences anglo-saxonnes sont alors relayées, en quelque sorte, par les recherches des bâtisseurs du Vexin, du Valois et de l’Ile-de-France.
Ces essais qui se situent entre 1125 et 1135, sont souvent modestes et concernent des édifices d’importance secondaire : églises de Rhuis, d’Acy-en-Multien, de Cambronne. Deux sont importantes : Saint-Etienne de Beauvais et Morienval. […] Dans l’une et l’autre église apparaissent des voûtes allégées, au profil simplement torique (ou à deux tores), et le mur s’amincit. […]
D’autres expériences sur le continent, parallèles à celles que l’on vient de décrire, ont eu lieu pendant la première moitié du XIIe siècle. […]
Tous les historiens sont aujourd’hui d’accord pour voir en Saint-Denis de Suger (v. 1130-1140 et 1140-1144) et en la cathédrale de Sens de Henri le Sanglier (v. 1130-1164) les monuments majeurs de la création du gothique, ceux où les éléments élaborés, surtout en Normandie, au cours de l’âge roman, prennent un sens nouveau en engendrant un style. »
L’architecture gothique / Louis Grodecki
Pour aller plus loin :
• Saint-Denis : la basilique / Elisabeth A. R. Brown
• L’Architecture gothique en France : 1130-1270 / Dieter Kimpel et Robert Suckale
• Suger : abbé de Saint-Denis, régent de France / Michel Bur
• L’art gothique / Réponse du Guichet du Savoir
• Art gothique / Réponse du Guichet du Savoir
Bonne journée
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