Question d'origine :

Réponse du Guichet

Avatar par défaut bml_reg - Département : Documentation régionale
Le 10/05/2005 à 12h23
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[…] Car, on chantait alors, tous les soirs, sur la vieille place [des Célestins] ! non point l'Amant d'Amanda, Popaul, Tiens! voilà Mathieu! et autres scies plus ou moins populaires, qui n'étaient pas encore nées, mais les mâles refrains de Darcier, chantés par lui-même (c'est tout dire !), au Café de Paris, les joyeux flonflons de ce pauvre Joseph Kelm, au Café d'Apollon, et les duos-bouffes de cette époque, si drôlement enlevés par le petit Paul et Narcisse (dit l'homme au nez pâle), au Messager des Dieux.
Ces trois cafés-lyriques, plus ordinairement nommés cafés-chantants, étaient le type primitif de ces établissements qui sont devenus aujourd'hui [en 1887], à Paris et dans les grandes villes de province, Casinos, Alcazars, Eldorados, Scalas..... vastes locaux agencés en théâtres, luxueusement décorés, et qui donnent un spectacle varié, composé de chansonnettes, romances, fragments d'opéras et opérettes, vaudevilles, ballets, acrobaties, etc. Ce fut la création, à Lyon, en 1862, du premier grand établissement de ce genre, le Casino des Arts, rue Impériale [actuelle rue de la République], qui entraîna la déchéance des cafés-concerts de la place des Célestins.


Le Café d'Apollon (p.5-7)
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Le Café d'Apollon et le Messager des Dieux étaient de petits estaminets décorés de glaces, entièrement meublés de guéridons de marbre entourés de tabourets en paille, et surmontés d'une galerie circulaire, dont la partie, faisant face à la scène, s'étendait plus largement jusqu'au fond de la salle donnant sur la rue de Savoie. Cette galerie était spécialement fréquentée par la clientèle jeune et bruyante des étudiants, des employés de commerce qui s'offraient là le plaisir et l'insigne faveur d'échanger force saluts et poignées de main avec les artistes des deux sexes, lesquels se costumant dans les maigres dépendances de l'entresol, passaient par là pour atteindre le petit escalier aboutissant à la salle du bas, qu'ils devaient ensuite longer au milieu du public pour arriver à la petite estrade-scène, large de 2 mètres 50 sur 2 mètres de profondeur, et meublée tout simplement de trois chaises sur lesquelles trônaient Mesdames les chanteuses, qui n'avaient à faire qu'un pas en avant et leur plus gracieuse révérence quand préludait leur tour de chant.
Les artistes-hommes, attablés avec les abonnés de l'endroit, buvant et trinquant avec eux, n'avaient qu'à franchir les trois marches placées sur le côté de l'estrade pour exécuter leur fantaisie lyrique.
Le Café d'Apollon eut à cette époque pour directeur le père Jules, un type original, dont le flamboyant attestait surabondamment l'intempérance. On cite à son avoir cette jolie boutade, adressée à un de ses clients qui lui offrait un soir une tasse de café dans son établissement avant le commencement du concert : "Je ne consomme jamais chez moi ; les consommations sont infectes. Quand je veux boire du bon café, je vais en face, chez Prill; allons-y, c'est moi qui régale." On ne peut pas pousser plus loin la franchise commerciale.


Pour revenir à votre question, nous n’avons trouvé que peu d’indications sur les "Folies Gaillot". D’une part, le mot Gaillot peut être utilisé pour désigner une personne physique. Dans l’ouvrage très documenté de Jean-Luc Roux, Le Café-concert à Lyon (XIXe siècle et début XXe siècle), nous avons retrouvé la mention d’un monsieur GUILLOT (et non Gaillot), cafetier rue des Fossés (actuelle rue d’Austerlitz), à la Croix-Rousse, qui aurait reçu l’autorisation, dès 1839, de donner des concerts vocaux et instrumentaux sur la colline de la Croix-Rousse, alors commune autonome. Pourrait-il s’agir d’une erreur dans l’orthographe de ce nom ?
D’autre part, "Gaillot" peut également être une référence au terme utilisé dans le patois lyonnais pour désigner un "cloaque", un "bourbier" et, par extension, les trous remplis d’eau que l’on trouve sur les chemins et que l’on nomme aujourd’hui "nid de poule". Il existe d’ailleurs à Lyon une rue du Puits-Gaillot qui longe l’Hôtel-de-Ville (1er arrondissement). Outre les artistes travaillants pour les fabriques de soie (Belacla, Potteaud, Féraud, Chomas, Dubuisson, Boucharlat, etc.), de nombreuses personnalités du monde des arts habitèrent dans cette rue. Elle vit ainsi défiler, au XVIIIe siècle, les architectes J.Delamonce et Soufflot (et son associé, Léonard Milanois), les peintres et dessinateurs Marnel et Vacherin; au XIXe siècle, le peintre Grobon (professeur à l’Ecole des Beaux-Arts), l’architecte Antoine Durand, les dessinateurs Henri Olivier et Etienne Marté; etc.
En conclusion, les "Folies Gaillot" étaient peut-être le nom de l’un des établissements de cette rue, mais nous ne pouvons vous le confirmer car les Annuaires commerciaux de la ville ne sont conservés à la Bibliothèque qu’à partir du dernier tiers du XIXe siècle, donc bien après votre date. De plus, la rue a été plusieurs fois remaniée, jusqu’à être complètement amputée des immeubles du tronçon Est qui s’ouvre dorénavant sur la place Louis Pradel !


Image en pièce jointe :
La Place Tolozan vue depuis le quai du Rhône, photographie par Jules Sylvestre, ca. 1920 (BM Lyon, Fonds Sylvestre, S 1891)
Dans la perspective, la rue Puits-Gaillot et l'Hôtel de Ville de Lyon.

Pièces jointes

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