Question d'origine :
L'article II-81 de la Constitution européenne commence par :
"Est interdite toute discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions,(...)"
Que signifie, dans ce texte, le mot "race" ?
En admettant qu'il ait un sens précis, qu'apporte-t-il de plus que les termes "couleur", "origines ethniques ou sociales", "caractéristiques génétiques" ou "religion" ?
Pourquoi les auteurs de cette constitution (ou ses traducteurs en français, si celle-ci n'a pas été directement rédigée en français) ont-ils choisi d'utiliser ce terme, alors qu'il est généralement considéré que le concept de "race" n'a pas de pertinence, qu'il correspond à un non-sens scientifique, que les "races" n'existent pas chez les humains ?
Merci de m'éclairer.
Réponse du Guichet
bml_sci
- Département : Sciences et Techniques
Le 20/04/2005 à 13h43
Des classifications anciennes ont tenté d’établir une séparation entre races humaines.
Le racisme se développe le plus souvent sous le couvert du bon sens populaire. Jusqu’à une date récente la plupart des ouvrages nous apprenaient qu’il existait sur terre trois grandes races, la blanche, la noire, la jaune, auxquelles certains ajoutaient la rouge à cause des Indiens d’Amérique.
D’ailleurs quoi de plus visible et incontestable que la couleur de la peau ?
De sorte que celui qui affirme que les races n’existent pas passe pour celui qui nie l’évidence.
Et pourtant la science a renoncé depuis une cinquantaine d’années à une notion aussi vague qu’inutile, celle des races humaines.
La science moderne ne connaît que des «
On s’appuie fréquemment sur la couleur de la peau pour définir les races blanche, noire ou jaune. Mais si l’on considère d’autres séquences génétiques que celles qui définissent la couleur de la peau, on aboutit à des groupes humains qui sont parfaitement différents.
Source : crdp-montpellier
Depuis plusieurs siècles l’homme a tenté d’ordonner la nature et les êtres vivants en établissant des catégories, des groupes, des ordres. Dans un premier temps les seules différences anatomiques suffisaient à comparer deux populations, ce qui faisait classer les chauves-souris dans l’ordre des oiseaux sur le simple fait que les deux étaient dotés d’organes pour voler… !
Appliquée à l‘Homo sapiens, cette méthode allait marquer pour longtemps les esprits ! La couleur de la peau, notamment, est toujours un sujet de conversation et parfois de conflits entre différentes populations...
Les anciennes tentatives de classifications de l'espèce humaine basées sur des pratiques culturelles ou anatomiques continuent malheureusement d'alimenter aujourd'hui des théories racistes...
Dans la Bible les hébreux classaient déjà les animaux selon des critères pratiques : purs et impurs, comestibles ou pas...
En
- les Americanus : rouge, colérique et droit
- les Europeus : blanc, sanguin et musculaire
- les Asiaticus : jaune pâle, mélancolique et rigide
- les Afer : noir, flegmatique et décontracté
Il distinguait également deux autres variétés fantaisistes : les monstrosus (êtres velus) et ferus (les enfants sauvages).
Carl Von Linné fut malgré tout l'un des premiers à tenter d'établir une recension des espèces.
En
La grande nouveauté de Blumenbach c'est qu'il établit une hiérarchie entre les variétés. Il place la variété caucasienne à l'origine des autres selon un critère très personnel : c'est le peuple le plus beau ! Les autres variétés sont une dégénérescence par rapport à cette population originelle (il faut prendre en compte qu'il emploit le mot dégénérescence dans le sens "écart par rapport à").
Il indique toutefois que toutes les variétés d'hommes correspondent à une seule et même espèce : il défend le principe d'unité de l'espèce humaine.
La science, la génétique nous prouvent que l'Homo sapiens est une race à part entière, sans sous-catégorie... et nous ne pouvons pas faire de classification sur des critères aussi subjectifs que la couleur de la peau, la géographie, la culture ou la beauté d'un individu !
Dans la classification générale du vivant on parle d’espèce pour regrouper toutes les populations interfécondes et dont la descendance peut elle-même se reproduire.
La notion de race se base elle sur la notion de « gènes communs et exclusifs à un groupe d’individus ».
Francois Lebas (Directeur de recherche honoraire de l'INRA) propose la définition suivante : ..."au sein d'une espèce, une race est généralement considérée comme une collection d'individus ayant en commun un certain nombre de caractères morphologiques et physiologiques qu'ils perpétuent lorsqu'ils se reproduisent entre eux..."
Aucune population humaine ne possède exclusivement des gènes propres. Les Homo sapiens forment une seule et même espèce.
Les différences anatomiques que l’on perçoit, par exemple entre un individu asiatique et un européen, ne sont que l’expression plus ou moins forte de gènes communs.
Cette mixité génétique dans l’espèce humaine est tellement importante que si vous avez besoin d’un don d’organe ( un rein par exemple) vous avez autant de chance de trouver un donneur compatible dans votre voisinage qu'à Dakar (Sénégal).
Les populations humaines forment un seul et même groupe taxinomique, une seule espèce.
Les études génétiques démontrent que l'espèce humaine a une origine récente : il y a de très faibles variations génétiques entre les différentes populations humaines.
Pour illustrer cette petite différenciation, on peut comparer deux chimpanzés (pris au hasard) et deux humains. Les chimpanzés présentent plus de différences génétiques que les 2 humains entre eux... Leurs origines sont donc plus anciennes que la nôtre... (voir dossier Homme-singe)
Le nombre de gènes est sans rapport avec la taille ou l'importance que nous accordons à une espèce : 14 000 pour la mouche Drosophile et... 30 à 40 000 pour l'Homo sapiens...
Source : hominidés.com
Réponse du Guichet
anonyme
- Département : Équipe du Guichet du Savoir
Le 20/04/2005 à 13h53
Voici un extrait de la Déclaration sur la race et les préjugés raciaux de l'Unesco du 27 novembre 1978 :
1. Tous les êtres humains appartiennent à la même espèce et proviennent de la même souche. Ils naissent égaux en dignité et en droits et font tous partie intégrante de l'humanité.
2. Tous les individus et tous les groupes ont le droit d'être différents, de se concevoir et d'être perçus comme tels. Toutefois, la diversité des formes de vie et le droit à la différence ne peuvent en aucun cas servir de prétexte aux préjugés raciaux; ils ne peuvent légitimer ni en droit ni en fait quelque pratique discriminatoire que ce soit, ni fonder la politique de l'apartheid qui constitue la forme extrême du racisme.
3. L'identité d'origine n'affecte en rien la faculté pour les êtres humains de vivre différemment, ni les différences fondées sur la diversité des cultures, du milieu et de l'histoire, ni le droit de maintenir l'identité culturelle.
4. Tous les peuples du monde sont dotés des mêmes facultés leur permettant d'atteindre la plénitude de développement intellectuel, technique, social, économique, culturel et politique.
5. Les différences entre les réalisations des différents peuples s'expliquent entièrement par des facteurs géographiques, historiques, politiques, économiques, sociaux et culturels. Ces différences ne peuvent en aucun cas servir de prétexte à un quelconque classement hiérarchisé des nations et des peuples.
1. Toute théorie faisant état de la supériorité ou de l'infériorité intrinsèque de groupes raciaux ou ethniques qui donnerait aux uns le droit de dominer ou d'éliminer les autres, inférieurs présumés, ou fondant des jugements de valeur sur une différence raciale, est sans fondement scientifique et contraire aux principes moraux et éthiques de l'humanité.
2. Le racisme englobe les idéologies racistes, les attitudes fondées sur les préjugés raciaux, les comportements discriminatoires, les dispositions structurelles et les pratiques institutionnalisées qui provoquent l'inégalité raciale, ainsi que l'idée fallacieuse que les relations discriminatoires entre groupes sont moralement et scientifiquement justifiables; il se manifeste par des dispositions législatives ou réglementaires et par des pratiques discriminatoires, ainsi que par des croyances et des actes antisociaux; il entrave le développement de ses victimes, pervertit ceux qui le mettent en pratique, divise les nations au sein d'elles-mêmes, constitue un obstacle à la coopération internationale, et crée des tensions politiques entre les peuples; il est contraire aux principes fondamentaux du droit international et, par conséquent, il trouble gravement la paix et la sécurité internationales.
3. Le préjugé racial, historiquement lié aux inégalités de pouvoir, se renforçant en raison des différences économiques et sociales entre les individus et les groupes humains, et visant encore aujourd'hui à justifier de telles inégalités, est totalement injustifié.
Est incompatible avec les exigences d'un ordre international juste et garantissant le respect des droits de l'homme toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l'origine ethnique ou nationale ou sur l'intolérance religieuse motivée par des considérations racistes, qui détruit ou compromet l'égalité souveraine des Etats et le droit des peuples à l'autodétermination ou qui limite d'une manière arbitraire ou discriminatoire le droit au développement intégral de tout être et groupe humains; ce droit implique un accès en pleine égalité aux moyens de progrès et d'épanouissement collectif et individuel dans un climat qui respecte les valeurs de civilisation et les cultures nationales et universelles.
(...)
Nous ne pouvons guère préjuger de l'usage de ce mot dans la Constitution européenne, mais simplement constater son emploi dans des textes de référence comme celui de l'Unesco précité.
Nous vous engageons à éventuellement poser votre question sur les forums du site officiel français sur la Constitution européenne.
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