Question d'origine :
Bonjour à tous!
Je souhaiterais savoir combien, par famille, les chinois ont le droit d'avoir d'enfants et s'ils doivent payer des taxes pour x enfants de plus que la loi l'exige.
merci d'avance et bravo pour votre site.
Réponse du Guichet
bml_chin
- Département : Fonds Chinois
Le 06/04/2005 à 19h43
Pour connaître le discours officiel des autorités chinoises sur ce délicat sujet, voyons ce qu’en dit l’Ambassade de la République populaire de Chine en France qui nous donne les éléments suivants (c’est bien sûr nous qui soulignons) :
En ce qui concerne le planning familial, le gouvernement chinois a adopté une méthode consistant à faire coïncider l'objectif de l'Etat et les désirs du peuple.
La politique concernée consiste à encourager les jeunes gens à retarder l'âge du mariage et de la première maternité, à avoir moins d'enfants, bien constitué, à
Dans les cas où ce(s) chiffre(s) est (sont) dépassé(s), des amendes ou des mesures bien plus contraignantes ont été envisagées par la loi chinoise.
Amnesty International dans un dossier consacré à la Chine en mai 2002 indiquait entre autres :
Aujourd’hui, la Chine compte officiellement 1,22 milliard d’habitants, soit un cinquième de l’humanité, et s’est fixée la barre de 1,6 milliard à l’horizon 2050. Qu’on ne s’y trompe pas, ces chiffres sont en dessous de la réalité car ils ne tiennent pas compte des naissances non déclarées. Ces enfants qui n’auraient pas dû naître seraient quelque 200 millions. « Enfants fantômes », sans existence légale, ils n’ont droit ni à l’éducation, ni aux soins gratuits, ni à une autorisation de mariage [1]. Si l’on comptabilise ces parias de la société chinoise, la population atteindrait 1,5 milliard d’habitants. Un chiffre qui devrait s’élever à 2 milliards dès 2050.
La recette choisie ?
Dans les campagnes, la politique de contrôle de la natalité s’est heurtée au poids des traditions et aux nécessités économiques. L’enfant, surtout si c’est un mâle, y étant considéré comme un « bâton pour la vieillesse ». Les campagnes et les zones occupées par de minorités ethniques ont, par ailleurs, pu bénéficier d’une certaine clémence de la part de Pékin.
Dans Le Quotidien du peuple (version française en ligne) daté du 9 février 2004, un article intitulé « Les naissances illégales seront sanctionnées dans une province orientale de la Chine » indiquait :
Les couples seraient sanctionnés s'ils donnent naissance à des bébés quand ils ne sont pas encore mariés légalement, selon un règlement promulgué dans la province du Jiangxi, dans l'est de la Chine.
Le règlement, entré en vigueur le 1er février [2004], stipule que tout couple sans un certificat de mariage officiel paiera une amende s'il procrée des bébés. Des responsables locaux du planning familial indiquent que c'est un moyen pour prévenir la violation de la "politique d'un enfant unique" et protéger les enfants.
Les amendes seront imposées conformément à l'indice du revenu de la région. Le revenu moyen de la population urbaine en 2003 dans la province était de quelque 6 900 yuans (quelque 830 dollars) et était de quelque 2 000 yuans pour la population rurale.
Selon ce règlement, un couple non marié sera passible d'une amende qui est de 1,05 fois plus que le revenu moyen de la région s'il a donné naissance à un bébé. S'il l'un du couple n'atteint pas l'âge de mariage légal, l'amende sera de 1,7 fois plus que le revenu moyen.
L'âge de mariage légal est de 22 ans pour les hommes et de 20 ans pour les femmes en Chine.
Le gouvernement chinois accorde des bénéfices aux familles d'un enfant. La Loi sur la Population et le Planning familial, amendée en 2002, demande aux gouvernements à divers échelons d'aider les familles d'un enfant, en particulier celles dans les régions rurales, et cette aide porte sur le financement, l'assurance, les services médicaux, l'éducation et l'emploi.
[…]
Le numéro 27 de la revue chinoise « Beijing information » accessible en ligne dans sa version française proposait un article intitulé "Limiter les milliards" :
[...]
Les responsables de la planification familiale en Chine imposent des sanctions administratives et économiques à ceux qui excèdent le quota de naissances fixé. Les punitions administratives consistent à perdre son poste ou être dégradé et par le fait même voir son salaire réduit, et les sanctions économiques, à devoir payer une grosse somme comme « frais de soutien social », selon le montant décidé par les autorités locales. À Shanghai par exemple, le montant est basé sur le revenu en liquide moyen par personne de l’année précédant la naissance de l’enfant, puis multiplié par trois.
Dans ce cas, le revenu des habitants de Shanghai était en moyenne de 14 867 yuans en 2003, ce qui porte le « soutien social » payé par les parents d’un second enfant à environ 40 000 yuans en 2004. C’est une forte somme pour les familles à revenu moyen. De plus, les parents font face à des frais d’éducation plus élevés pour leur enfant « supplémentaire ». Ainsi, alors que les familles non fortunées ne peuvent se permettre d’avoir un enfant de plus, l’amende n’a aucun effet sur les entrepreneurs privés et d’autres personnes de la « nouvelle classe riche ».
[...]
Nous vous conseillons de lire l’ensemble de cet article pour connaître la pensée actuelle des autorités chinoise en la matière. Ce texte reconnaît presque explicitement les énormes disparités sociales chinoises, manifestes dans les grandes villes. Les amendes ne sauraient être dissuasives pour ceux qui ont très largement les moyens de s’en acquitter.
Nous vous conseillons également de lire cette étude de l’INED (Institut national d’études démographiques) qui dans la livraison de juillet – août 1998, n° 337 de sa publication « Population et sociétés » publiait un article intitulé : En Chine, une transition sous la contrainte. Dans cet article très complet (qui évoque également la situation démographique de l’Indonésie), l’auteur, Isabelle Attané, indique notamment ceci :
Avant la mise en œuvre de politiques antinatalistes, une tradition ancienne de limitation de la descendance avait permis de contenir la fécondité des Chinoises dans des limites assez basses : moins de 6 enfants par femme. En revanche, la baisse rapide de la fécondité intervenue depuis le début des années 70 s'est effectuée dans un cadre de coercition extrême. Mais l'application autoritaire trouve aujourd'hui ses limites. Dans le contexte de libéralisation qui accompagne les réformes économiques, on assiste à une désagrégation progressive du système d'encadrement des individus, et cette perte de contrôle de l'État favorise de plus en plus l'autonomie des couples en matière de reproduction. De nouveaux progrès dans la baisse de la fécondité dépendront probablement davantage des changements socio-économiques à venir que d'une rigueur accrue dans l'application du programme : pour que la baisse de la fécondité se poursuive en Chine, il faudra qu'elle soit plus spontanée, et donc qu'elle réponde à des besoins individuels.
Dans la toute dernière livraison de la revue chinoise La Chine au présent (numéro daté du mois d’avril 2005), figure un dossier intitulé : « 1,3 milliard d’habitants, est-ce trop ? ».
Extraits de l’article intitulé « Perfectionnement continu de la politique démographique de la Chine » dont l’auteur, Lu Rucai, montre - à l’inverse de ce qui a été vu précédemment -, que l’Etat chinois récompense ceux qui ont respecté les consignes du Planning familial chinois !
[…]
Liang Xiaowu, 36 ans, est originaire de la campagne de la province du Guizhou et est allé travailler en ville. À la différence des personnes de son âge, il est l’unique enfant de sa famille. D’ailleurs, il a la charge de ses parents, âgés de plus de 60 ans; c’est une tâche assez lourde pour lui. Ainsi, ayant déjà un fils, il hésite à avoir un deuxième enfant. Promulguée l’année dernière, la nouvelle politique de la Commission d’État pour la démographie et le planning familial l’a un peu soulagé. En effet, en mars 2004, cette commission a publié un document officiel selon lequel certains paysans,
Notez l’esprit largement propagandiste des textes publiés par les revues officielles chinoises. Le texte ci-dessus insiste sur le changement des mentalités qui serait survenu dans les campagnes. Nous nous permettons de douter d’un tel retournement de l’esprit du paysan chinois.
Un article de l’excellente spécialiste des choses chinoises, Valérie Niquet, intitulé Chine : la politique familiale comme instrument d’une politique de puissance a été publié en anglais le 1er juin 1996 dans le numéro 1561 de China News Analysis. Il est ici accessible dans sa version française.
Bien que déjà ancien, il s’agit d’un très bon texte faisant une synthèse de la situation en matière de politique des naissances en Chine dans le courant de la dernière décennie. Valérie Niquet indiquait en substance :
Face aux difficultés rencontrées par la politique de contrôle des naissances dans les campagnes, plusieurs stratégies ont été mises en place. L'utilisation de la persuasion, semble avoir rencontré un certain succès mais ne dépasse que très rarement le stade expérimental. Peut-être parce que l'un de ses effets pervers est de faire fortement chuter les revenus provenant des amendes pour naissances hors quota. Dans les années 1980 au Shanxi, dans le district de Yicheng, une expérience a été tentée avec un certain succès, visant à encourager le mariage tardif et la naissance tardive du premier enfant, et autorisant en revanche la naissance d'un deuxième enfant dix ans après celle du premier. Cette expérience, très éloignée de l'application stricte mais souvent irréaliste de la politique de l'enfant unique, a en fait permis une diminution importante des naissances d'un troisième enfant. Le taux de natalité dans le district en 1990 n'a pas dépassé 20,12 pour mille alors qu'il s'élevait à 22,31 pour mille pour l'ensemble de la province. Conséquence d'un succès qui semble s'être prolongé, le montant des amendes, qui s'élevait à 240 000 yuan en 1992 n'aurait pas dépassé 9 000 yuan en 1993 (23).
Mais il semble que cette politique relativement modérée de contrôle des naissances, qui accompagne les évolutions de la société plus qu'elle ne les heurte de front, ne constitue pas aujourd'hui une priorité. Pour ralentir l'accroissement des catégories les plus « arriérées » de la population, qui restent difficiles à convaincre, au profit des catégories les plus « avancées » le respect le plus strict possible des objectifs définis par une planification rigide et le recours aux méthodes eugénistes semblent au contraire avoir les faveurs du pouvoir politique et de nombreux spécialistes des questions de population.
Le Centre d’information géopolitique publiait en février 2005 sur le site de la Commission des recours des réfugiés un excellent texte qui est un historique du sujet, texte intitulé dont nous vous recommandons la lecture : La politique de contrôle des naissances en République populaire de Chine :
[…]
La politique de l’enfant unique a été dès ses débuts particulièrement impopulaire dans les régions rurales. Elle est en effet entrée en vigueur à peu près au moment où est établi le système de responsabilité des ménages, lequel permet aux familles paysannes de tirer profit d’une partie des terres qui leur sont allouées. Les deux politiques se contredisaient puisque la politique rigide de planification des naissances limite la disponibilité de main d’œuvre familiale au moment où les familles en ont le plus besoin pour assurer leur prospérité. Ce transfert des responsabilités de production aux familles augmente le revenu familial et permet la migration des paysans de façon à ce qu’ils puissent se soustraire au contrôle des agents de la planification des naissances. Cette politique s’oppose par ailleurs à la préférence qui est traditionnellement accordée aux garçons, garants de la pérennité de la lignée familiale dans le système confucéen. Les fils et leurs épouses doivent en effet soutenir les parents du fils dans leur vieillesse, alors que les filles, en se mariant, apportent leur soutien à leur belle-famille. De plus, seuls les fils peuvent célébrer les rites honorant les ancêtres. On considère enfin qu’ils sont en mesure d’abattre plus de besognes que les filles sur une exploitation agricole.
L’inobservation massive de la politique de l’enfant unique en région rurale et les résistances de plus en plus vives à celle-ci conduisent à son abandon de facto en 1984. En 1988, les autorités permettent ainsi officiellement la naissance d’un deuxième enfant, si le premier est une fille, naissance pouvant intervenir seulement après un certain laps de temps, lequel varie d’une région à une autre. La proportion de couples autorisés à avoir deux enfants passe de 10% en 1984 à 50% en 1986.
[…]
Le site Question Chine a publié une note intitulée « Une Loi sur "l’enfant unique" pour toute la Chine ». Cette note nous apprend notamment que la politique démographique chinoise n’avait fait jusqu’en 2002 l’objet d’aucune loi…
Extrait :
Aussi curieux que cela paraisse, la politique de l’enfant unique était décrétée et définie depuis vingt ans par des législations provinciales et locales. Cela change en 2002, le Comité permanent du Congrès national populaire ayant voté une loi nationale sur le contrôle des naissances, qui devrait être appliquée progressivement.
Cette loi confirme les principales prescriptions de la pratique récente du freinage des naissances, mais vise à éliminer les variations et les abus courants à l’échelon local, tels que les avortements tardifs ou forcés et les amendes arbitraires. La loi veut être incitative et égale pour tous. Elle définit les quelques catégories de couples autorisés à avoir plus d’un enfant. Elle introduit surtout deux innovations qui pourraient changer beaucoup de choses : l’interdiction d’utiliser l’échographie pour sélectionner les naissances et la réforme du financement du planning familial.
Jusqu’à maintenant en effet, cette branche des administrations locales est financée essentiellement par les amendes infligées aux couples contrevenants. Elles dépendent de cette ressource pour leur activité et pour les salaires de leurs cadres. Désormais les gouvernements locaux devront prévoir un budget et payer eux-mêmes les salaires des cadres chargés de faire appliquer la politique de l’enfant unique.
Les Etats-Unis avaient décidé en juillet de geler leur contribution de 34 millions de dollars au Fonds population pour la Chine de l’ONU, en raison de la pratique d’avortements et de stérilisations forcés. Pékin avait admis des abus à l’échelon local.
La Mission économique de Chine (Bureau de Pékin) a publié une fiche de synthèse intitulée "Démographie et croissance : le cas chinois". Réalisée en janvier 2004, très complète, en format PDF, elle a le grand mérite de dresser un historique de la démographie chinoise depuis 1950 et de faire quelques projections pour les décennies à venir.
La Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada propose une recension d’articles et dépêches publiés dans le monde au sujet de la loi nationale du 1er septembre 2002 sur la population et la planification nationale. Parmi lesquels on peut lire ceci :
Toutefois, les autorités de la province du Guangdong ont estimé nécessaire d'augmenter le montant des sanctions financières pour les naissances hors plan afin de décourager la population, notamment les riches, de payer pour avoir d'autres enfants (South China Morning Post 31 août 2002), et à Shanghai, les amendes pour les naissances hors plan peuvent représenter jusqu'à trois fois le salaire annuel d'une personne (AFP 20 févr. 2002; Country Reports 2001 4 mars 2002).
Enfin, cette page (publiée par le World resources Institute) propose des données sur la démographie, la santé et le niveau de vie, la mortalité, la scolarité en Chine, livrés en comparaison avec ceux concernant les autres pays d'Extrême-orient et du reste du monde. Ces données datent de 2003.
Ce document (en anglais, format PDF) est intitulé Population, health, and human well-being – China.
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