Question d'origine :
Je découvre avec stupéfaction au détour d’une note de bas de page (dans "Hollywood, la Mecque du cinéma", de Cendrars, éditions Denoël) que ce cher Blaise soutenait le camp franquiste pendant la guerre d’Espagne ! La chose me surprend et m’intrigue beaucoup : sans connaître son œuvre à fond, ce que j’avais lu (et aimé) de lui à ce jour ne m’avait pas laissé soupçonner cela… Pouvez-vous m’éclairer sur cet aspect de Cendrars ? Me conseiller des lectures sur le sujet ? Merci d’avance !
Réponse du Guichet
bml_litt
- Département : Langues et Littératures
Le 31/03/2005 à 12h14
Citons la note éditoriale,à la page 216 de l’ouvrage de Blaise Cendrars «"Hollywood, La Mecque du cinéma"», qui vous a tant ému(e) : « (…) Cendrars (…) affiche ainsi ses sympathies franquistes pendant la Guerre civile En juin 1936, il avait effectivement effectué un reportage en Espagne, rejoignant à Burgos son vieil ami t’Serstevens, pour l’hebdomadaire «Gringoire», marqué à droite ; toutefois Horace de Carbuccia, son directeur, qui attendait sans doute plus de virulence dans l’engagement, refusera de le publier» (Il a été publié ultérieurement sous le titre «Sur la frontière espagnole» dans Panorama de la pègre et autres reportages, 10/18, 1986).
Outre le texte mentionné ci-dessus, et parmi l’abondance des documents consacrés à Blaise Cendrars (de son vrai nom Frédéric Sauser, 1887-1961), deux ouvrages en particulier peuvent apporter quelque lumière sur cet aspect de la vie de l’écrivain :
. Blaise Cendrars, de Miriam Cendrars, sa fille (1984), qui évoque (de manière peut-être subjective) dans quelles circonstances eut lieu la collaboration avortée de son père avec l’hebdomadaire «Gringoire» pour un reportage dans l’Espagne de la Guerre civile.
. L’article «Cendrars et la guerre d’Espagne», de Michel Décaudin, dans l’ouvrage collectif «Blaise Cendrars et la guerre», ( 1995). Cette remarquable intervention reprend, en la commentant, la version de Miriam Cendrars, replace dans un contexte historique l’évolution idéologique, relayée par certains organes de presse, de nombre, Céline en tête, d’anciens combattantsde la 1ère guerre mondiale (rappelons que Cendrars y a perdu un bras) face aux bouleversements politiques des années 1930. Il retranscrit également une interview de Cendrars publiée dans le numéro du 25 (février 1939) du mensuel «Occident», organe de propagande des nationalistes espagnols…, etc.
Nous transcrivons ici la conclusion de l’article de M. Décaudin :
«La guerre d’Espagne n’aura-t-elle été pour Cendrars qu’une occasion d’exprimer ses sympathies politiques et le motif d’une enquête peu différente des précédentes dans sa conduite, sans que jamais soit évoquée la réalité des combats ? Les seuls textes publiés nous méneraient à cette conclusion. Mais elle ne sera que provisoire tant que d’autres documents, lettres, peut-être notes personnelles, ne viendront pas la fortifier ou l’infirmer. (…) Il y a des secrets qui laissent des traces ; les événements tragiques qui ont déchiré l’Espagne pourraient bien se révéler aux chercheurs futurs comme un de ces secrets.»
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