Question d'origine :
Bonjour,
je voulais savoir de quand datent les 1ers exemples d'hôtels particuliers entre Cour et jardin, où est apparu le 1er type d'hôtel de ce genre, et si c'est possible d'avoir des indications sur le plan typique de ces hôtels/organisation dans l'urbanisme.
Je vous remercie.
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 31/03/2014 à 13h32
Bonjour,
D’après le Grand Robert de la langue française, voici la définition d’hôtel :
« vers 1135, « maison, logis » ; tenir ostel, vers 1165 ; sens moderne, fin XIVe ; sens issu de l’expression juridique « juger en l’ostel le roi », à la résidence momentanée du roi.
Demeure citadine d’un grand seigneur ou d’un riche particulier. »
Alexandre Gady auteur des Hôtels particuliers à Paris, du Moyen Âge à la Belle Epoque, commissaire scientifique d’une exposition sur les hôtels particuliers parisiens donne l’historique de ces hôtels :
« C'est au Moyen Age que le mot «hôtel» s'est progressivement imposé pour désigner de grandes résidences princières, de préférence à «maison», à connotation plus bourgeoise, ou à «palais», demeure de roi.
A chacun de se glisser, le temps d'une visite, dans l'intimité de ces joyaux de l'architecture pour apprécier le goût et l'art de vivre d'une société disparue, et comprendre leur évolution à travers les siècles. Maison noble sous l'Ancien Régime, l'hôtel particulier voit sa définition changer en même temps que le statut social de son propriétaire. "Ce peut être aussi bien la demeure d'un grand seigneur, noble d'épée, d'un prélat ou d'un noble de robe, voire d'un financier anobli de fraîche date par l'acquisition d'un fief à la campagne", écrit Alexandre Gady dans son ouvrage. Et de préciser: "Avocats, parlementaires et hommes de loi qui peuplent l'ancienne France, non contents de racheter les châteaux de la vieille noblesse ruinée, possèdent de beaux hôtels en ville, proches des lieux de pouvoir où s'exercent leurs offices lucratifs."
Tout le talent de l'architecte consiste à construire un bâtiment pour être vu et vivre à l'abri des regards. Ainsi, le retour de la résidence du roi à Paris en 1527 marque un nouvel âge d'or des hôtels parisiens, avec une politique de lotissement opérée par la couronne ou par des établissements religieux dans le Marais. Puis, c'est l'essor de la société de cour, dans la première moitié du XVIIe siècle, qui favorise la prolifération d'artères bordées d'hôtels dans le Marais, comme la rue Vieille-du-Temple, mais aussi rive gauche, au bord de la Seine, face au Louvre: quai Malaquais, rue Saint-Dominique ou rue Saint-Guillaume, où l'hôtel de Mortemart, du père de Madame de Montespan, accueille Sciences-Po depuis 1879. »
Source : Article Dans l’intimité des hôtels particuliers parisiens du magazine Challenges.
Le dossier de presse de l’exposition L’hôtel particulier, une ambition parisienne de la Cité de l’architecture donne des éléments sur ces hôtels :
« Demeure de l’élite qui tranche avec son environnement bâti, l’hôtel est apparu au Moyen Âge, sans doute dès le XIIIe siècle : il constitue à l’évidence un des éléments de l’émergence de la nouvelle capitale capétienne, alors l’un des foyers artistiques majeurs de l’Occident.
Aucune demeure antérieure au XVe siècle n’a subsisté, mais les grands hôtels de la fin du Moyen Âge, dont celui qui abrite le musée Cluny demeure le parfait symbole, montrent que l’édifice a déjà adopté la formule qui allait faire sa renommée : situé entre cour et jardin, donc protégé de la rue, richement décoré et meublé, il participe à la fois du paysage urbain, en affichant sa splendeur aux yeux des passants, tout en procurant une intimité par ses réserves foncières cachées depuis l’espace public (cours et surtout jardins d’agrément). Toute l’histoire de l’hôtel est déjà contenue dans ce rapport dialectique à la ville, où l’on veut être regardé sans être vu…
L’âge d’or de l’hôtel parisien commence au XVIe siècle, quand Paris redevient grâce à François Ier une capitale politique où l’État monarchique se centralise et se sédentarise ; il faut être à la Cour, près du roi… donc à Paris. Au cours de la Renaissance, l’hôtel parisien adopte la symétrie, ainsi que le nouveau langage architectural imité de l’antique et de l’art italien : ils développent des discours raffinés en façade, multipliant dans les intérieurs de nouveaux usages, dont témoigne l’apparition de l’antichambre, et décors plus soignés, soit des plafonds peints. Le quartier des Halles, puis le Marais concentrent les plus belles fleurs de cette époque, dont l’hôtel de Carnavalet demeure encore aujourd’hui le meilleur représentant.
Sous Louis XIII, l’hôtel connaît un extraordinaire essor, tant sur le plan numérique (un érudit, Henri Sauval, croyait en compter deux mille en 1650 !) que sur le plan architectural : nouvelle distribution, nouvelles pièces (le vestibule, la chambre à alcôve ou le salon à l’italienne), nouveaux décors et révolution des escaliers…[…] »
Le dossier pédagogique réalisé par le muséum Henri-Lecoq de Clermont-Ferrand sur l’hôtel particulier qui l’abrite, explique l’histoire de ces bâtiments :
« Habitation urbaine de grande taille, l'hôtel particulier appartient en général à un personnage important. Il y vit avec sa famille ainsi que son personnel (domestiques, palefreniers, jardiniers, etc). C'est la nature familiale de l'hôtel particulier qui explique que le nombre d'appartements y soit limité. L'hôtel particulier est différent du château. En effet, il ne joue pas un rôle dans le système féodal et ne vit pas des terres qui l'entourent.
La taille du bâtiment, l'architecture et le décor mettent en évidence la fortune du propriétaire de l'hôtel particulier. Ce modèle de logement comprend des services divisés en deux catégories : la bouche (la cuisine par exemple) et le transport (les écuries).
Ce type d'habitation semble apparaître entre le XIIIe et le XIVe siècles et va être utilisé pendant tout l'Ancien Régime. Les premiers hôtels mentionnés appartiennent à des princes, des ducs et des grands prélats1. A partir du XVIIème siècle, on note l'essor de nouveaux aristocrates issus de la bourgeoisie marchande et de la finance. L'éventail s'agrandit avec des artistes pendant le XVIIIème siècle. Sous l'Ancien Régime, on rencontre des hôtels particuliers seulement à Paris et dans des grandes villes de province où siègent les parlements ou des cours souveraines comme par exemple à Rouen, Rennes, Toulouse, Riom ou Montpellier.
Architecturalement les hôtels sont très variés. Les plans, les élévations et les dispositions intérieures diffèrent selon l'hôtel étudié. Le caractère bruyant et dérangeant de la cuisine et des écuries oblige l'architecte à bien réfléchir au plan adopté. L'escalier est un élément fondamental de l'hôtel particulier. Il permet la circulation vers et entre les appartements. C'est le point central de la distribution des hôtels. Si les hôtels prennent des formes très variées, on peut néanmoins les disposer en deux catégories : l'hôtel entre cour et jardin et l'hôtel sur le devant. Ces deux types de constructions se suivent chronologiquement puis vont se concurrencer.
L'hôtel entre cour et jardin apparait au Moyen Âge. Il consiste en un corps de logis principal placé entre une cour et un jardin à l'arrière. Ce genre varie à partir du règne de Louis XIV avec l'hôtel en forme de pavillon.
Pour aller plus loin :
- L’hôtel particulier, une ambition parisienne, une présentation de l’exposition de la Cité de l’architecture.
- L’hôtel particulier, une ambition parisienne sur le Nouvel obs.
- Hôtel particulier sur Wikipédia.
- Sur le site Gallica, vous pouvez consulter des plans architecturaux d’hôtels.
Pour finir, quelques pistes bibliographiques :
- Louis Le Vau et les nouvelles ambitions de l’architecture française d’Alexandre Cojannot.
- Les hôtels de Soubise et de Rohan-Strasbourg.
- Reconnaître les hôtels particuliers parisiens.
- L’hôtel aristocratique : le marché du luxe à Paris au XVIIIe siècle.
Bonne journée.
D’après le Grand Robert de la langue française, voici la définition d’hôtel :
« vers 1135, « maison, logis » ; tenir ostel, vers 1165 ; sens moderne, fin XIVe ; sens issu de l’expression juridique « juger en l’ostel le roi », à la résidence momentanée du roi.
Demeure citadine d’un grand seigneur ou d’un riche particulier. »
Alexandre Gady auteur des Hôtels particuliers à Paris, du Moyen Âge à la Belle Epoque, commissaire scientifique d’une exposition sur les hôtels particuliers parisiens donne l’historique de ces hôtels :
« C'est au Moyen Age que le mot «hôtel» s'est progressivement imposé pour désigner de grandes résidences princières, de préférence à «maison», à connotation plus bourgeoise, ou à «palais», demeure de roi.
A chacun de se glisser, le temps d'une visite, dans l'intimité de ces joyaux de l'architecture pour apprécier le goût et l'art de vivre d'une société disparue, et comprendre leur évolution à travers les siècles. Maison noble sous l'Ancien Régime, l'hôtel particulier voit sa définition changer en même temps que le statut social de son propriétaire. "Ce peut être aussi bien la demeure d'un grand seigneur, noble d'épée, d'un prélat ou d'un noble de robe, voire d'un financier anobli de fraîche date par l'acquisition d'un fief à la campagne", écrit Alexandre Gady dans son ouvrage. Et de préciser: "Avocats, parlementaires et hommes de loi qui peuplent l'ancienne France, non contents de racheter les châteaux de la vieille noblesse ruinée, possèdent de beaux hôtels en ville, proches des lieux de pouvoir où s'exercent leurs offices lucratifs."
Tout le talent de l'architecte consiste à construire un bâtiment pour être vu et vivre à l'abri des regards. Ainsi, le retour de la résidence du roi à Paris en 1527 marque un nouvel âge d'or des hôtels parisiens, avec une politique de lotissement opérée par la couronne ou par des établissements religieux dans le Marais. Puis, c'est l'essor de la société de cour, dans la première moitié du XVIIe siècle, qui favorise la prolifération d'artères bordées d'hôtels dans le Marais, comme la rue Vieille-du-Temple, mais aussi rive gauche, au bord de la Seine, face au Louvre: quai Malaquais, rue Saint-Dominique ou rue Saint-Guillaume, où l'hôtel de Mortemart, du père de Madame de Montespan, accueille Sciences-Po depuis 1879. »
Source : Article Dans l’intimité des hôtels particuliers parisiens du magazine Challenges.
Le dossier de presse de l’exposition L’hôtel particulier, une ambition parisienne de la Cité de l’architecture donne des éléments sur ces hôtels :
« Demeure de l’élite qui tranche avec son environnement bâti, l’hôtel est apparu au Moyen Âge, sans doute dès le XIIIe siècle : il constitue à l’évidence un des éléments de l’émergence de la nouvelle capitale capétienne, alors l’un des foyers artistiques majeurs de l’Occident.
Aucune demeure antérieure au XVe siècle n’a subsisté, mais les grands hôtels de la fin du Moyen Âge, dont celui qui abrite le musée Cluny demeure le parfait symbole, montrent que l’édifice a déjà adopté la formule qui allait faire sa renommée : situé entre cour et jardin, donc protégé de la rue, richement décoré et meublé, il participe à la fois du paysage urbain, en affichant sa splendeur aux yeux des passants, tout en procurant une intimité par ses réserves foncières cachées depuis l’espace public (cours et surtout jardins d’agrément). Toute l’histoire de l’hôtel est déjà contenue dans ce rapport dialectique à la ville, où l’on veut être regardé sans être vu…
L’âge d’or de l’hôtel parisien commence au XVIe siècle, quand Paris redevient grâce à François Ier une capitale politique où l’État monarchique se centralise et se sédentarise ; il faut être à la Cour, près du roi… donc à Paris. Au cours de la Renaissance, l’hôtel parisien adopte la symétrie, ainsi que le nouveau langage architectural imité de l’antique et de l’art italien : ils développent des discours raffinés en façade, multipliant dans les intérieurs de nouveaux usages, dont témoigne l’apparition de l’antichambre, et décors plus soignés, soit des plafonds peints. Le quartier des Halles, puis le Marais concentrent les plus belles fleurs de cette époque, dont l’hôtel de Carnavalet demeure encore aujourd’hui le meilleur représentant.
Sous Louis XIII, l’hôtel connaît un extraordinaire essor, tant sur le plan numérique (un érudit, Henri Sauval, croyait en compter deux mille en 1650 !) que sur le plan architectural : nouvelle distribution, nouvelles pièces (le vestibule, la chambre à alcôve ou le salon à l’italienne), nouveaux décors et révolution des escaliers…[…] »
Le dossier pédagogique réalisé par le muséum Henri-Lecoq de Clermont-Ferrand sur l’hôtel particulier qui l’abrite, explique l’histoire de ces bâtiments :
« Habitation urbaine de grande taille, l'hôtel particulier appartient en général à un personnage important. Il y vit avec sa famille ainsi que son personnel (domestiques, palefreniers, jardiniers, etc). C'est la nature familiale de l'hôtel particulier qui explique que le nombre d'appartements y soit limité. L'hôtel particulier est différent du château. En effet, il ne joue pas un rôle dans le système féodal et ne vit pas des terres qui l'entourent.
La taille du bâtiment, l'architecture et le décor mettent en évidence la fortune du propriétaire de l'hôtel particulier. Ce modèle de logement comprend des services divisés en deux catégories : la bouche (la cuisine par exemple) et le transport (les écuries).
Ce type d'habitation semble apparaître entre le XIIIe et le XIVe siècles et va être utilisé pendant tout l'Ancien Régime. Les premiers hôtels mentionnés appartiennent à des princes, des ducs et des grands prélats1. A partir du XVIIème siècle, on note l'essor de nouveaux aristocrates issus de la bourgeoisie marchande et de la finance. L'éventail s'agrandit avec des artistes pendant le XVIIIème siècle. Sous l'Ancien Régime, on rencontre des hôtels particuliers seulement à Paris et dans des grandes villes de province où siègent les parlements ou des cours souveraines comme par exemple à Rouen, Rennes, Toulouse, Riom ou Montpellier.
Architecturalement les hôtels sont très variés. Les plans, les élévations et les dispositions intérieures diffèrent selon l'hôtel étudié. Le caractère bruyant et dérangeant de la cuisine et des écuries oblige l'architecte à bien réfléchir au plan adopté. L'escalier est un élément fondamental de l'hôtel particulier. Il permet la circulation vers et entre les appartements. C'est le point central de la distribution des hôtels. Si les hôtels prennent des formes très variées, on peut néanmoins les disposer en deux catégories : l'hôtel entre cour et jardin et l'hôtel sur le devant. Ces deux types de constructions se suivent chronologiquement puis vont se concurrencer.
Pour aller plus loin :
- L’hôtel particulier, une ambition parisienne, une présentation de l’exposition de la Cité de l’architecture.
- L’hôtel particulier, une ambition parisienne sur le Nouvel obs.
- Hôtel particulier sur Wikipédia.
- Sur le site Gallica, vous pouvez consulter des plans architecturaux d’hôtels.
Pour finir, quelques pistes bibliographiques :
- Louis Le Vau et les nouvelles ambitions de l’architecture française d’Alexandre Cojannot.
- Les hôtels de Soubise et de Rohan-Strasbourg.
- Reconnaître les hôtels particuliers parisiens.
- L’hôtel aristocratique : le marché du luxe à Paris au XVIIIe siècle.
Bonne journée.
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